ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Au reste la prohibition d'aliéner l'héritage taillable sans le consentement du seigneur, ne regarde que la propriété; car le tenancier peut librement disposer des fruits, & ses créanciers s'y venger, tant qu'il en est possesseur.

Quelques - uns tiennent que si une maison menace ruine, & que le tenancier ne soit pas en état d'y faire les réparations, il peut l'offrir en vente au seigneur; & que si celui - ci refuse de l'acheter, le tenancier peut la vendre à un autre: ce qui paroît fondé sur l'équité.

Lorsque le tenancier n'a disposé sans le consentement du seigneur que d'une partie de l'héritage, il n'y a que cette portion qui tombe en commise.

Il ne suffit pas pour prévenir la commise de stipuler dans la vente ou autre disposition, qu'elle n'est faite que sous le bon plaisir & consentement du seigneur, si le vendeur s'en désaisit, & que l'acquéreur en prenne possession réelle avant d'avoir obtenu l'agrément du seigneur, la commise est encourue à son profit.

Mais la vente ou disposition ne fait pas seule encourir la commise, quand même l'acte contiendroit une reserve d'usufruit au profit du vendeur, & que l'acquéreur auroit par ce moyen une possession fictive; parce que le vendeur, à cet égard, n'est censé dépouillé que par la prise de possession réelle & actuelle de l'acquéreur: jusque - là les parties peuvent se rétracter.

Celui qui a vendu ou autrement aliéné un héritage taillable sans le consentement du seigneur, n'est pas tenu de livrer l'héritage si le seigneur n'y consent; attendu que l'héritage tomberoit en commise, & que par conséquent l'acquéreur n'en profiteroit pas: mais si l'acquéreur a pû ignorer & ignoroit effectivement que l'héritage fût taillable, il peut agir en dommages & intérêts contre le vendeur pour l'inexécution du contrat.

Quoique quelques coûtumes supposent la commise encourue ipso facto, néanmoins l'usage est que le seigneur fasse prononcer en justice la commise; s'il n'en forme pas la demande, son silence passe pour un consentement tacite, tellement que l'acquéreur n'est tenu de rendre les fruits que du jour de la demande, & non du jour que la commise est cuverte.

Lorsque le seigneur reçoit les droits, ou approuve de quelqu'autre maniere la vente, la commise n'a pas lieu: on tient même que le consentement du mari suffit pour les héritages taillables qui sont de la censive de sa femme; ce qui est fondé sur ce que ces droits sont in fructu, & appartiennent au mari.

Par une suite du même principe, quand le seigneur use de la commise, l'usufruitier ou fermier de la seigneurie joüit pendant le tems de sa ferme de l'usufruit de l'héritage tombé en commise; parce que la commise est considérée comme usufruit.

Le droit de commise étant de pure faculté, ne se prescrit point pour n'en avoir pas usé dans certains cas: la prescription ne commence à courir que du jour de la contradiction faite par l'acquéreur; mais l'exercice de la commise qui est ouverte, se prescrit par trente ans comme toutes les actions personnelles.

Le Roi ni ceux qui le représentent, n'usent pas du droit de commise pour les héritages taillables qui sont tenus de lui; mais ils ont aussi un droit de lods & ventes plus fort.

Pour ce qui est de l'église, elle n'use de commise sur ses héritages taillables, que dans les lieux où elle est en possession de le faire. Voyez Despommiers sur les rc. ccccxc. & ccccxcj. de la coûtume de Bourbonnois, & Jabely sur l'art. cxlviij. de celle de la Marche, & l'article Taille seigneuriale.

Commise passive (Page 3:705)

Commise passive est opposée à commise active; voyez ci - devant Commise active.

La commise passive peut aussi s'entendre de la confiscation qui a lieu contre le seigneur pour la mouvance d'un fief, lorsqu'il s'est rendu coupable de félonnie envers son vassal, c'est - à - dire lorsqu'il a commis contre lui quelque forfait & déloyauté notable. On trouve dans quelques - uns de nos historiens un exemple fameux de cette sorte de commise passive; savoir celui de Clotaire II. qui suivant quelques-uns de nos historiens, perdit la mouvance de la seigneurie d'Yvetot dans le pays de Caux, pour le meurtre par lui commis en la personne de Gautier, seigneur d'Yvetot. Le fait à la vérité paroît justement contesté; mais ce qui en est dit prouve toûjours qu'on étoit dès - lors dans l'opinion que la commise auroit lieu contre le seigneur en pareil cas.

Commise tailliabliere, (Page 3:705)

Commise tailliabliere, voyez ci - dev. Commise d'un héritage taillable.

Commise (Page 3:705)

Commise du seigneur contre le vassal & censitaire, voyez ci - devant Commise féodale & Commise censuelle.

Commise (Page 3:705)

Commise du vassal contre le seigneur, voyez cidevant Commise passive. (A)

COMMISSAIRES (Page 3:705)

COMMISSAIRES, sub. m. pl. (Jurispru,) est le nom que l'on donne à certains officiers qui sont commis, soit par le Roi directement, soit par quelque juge, pour faire certaines fonctions de justice ou police. Il y en a de plusieurs sortes: les uns qui sont en titre d'office ou commission permanente, qui sont établis par le Roi pour faire ordinairement certaines fonctions; les autres qui n'ont qu'une simple commission pour un tems limité & pour une affaire particuliere, soit que la commission émane du Roi, ou qu'elle soit seulement émanée de quelque juge.

La premiere ordonnance où l'on trouve le terme de commissaire employé, commissarii, est celle de saint Louis en 1254; depuis ce tems il est devenu d'un usage fréquent; nous expliquerons dans les subdivisions suivantes les fonctions des différentes sortes de commissaires qui ont rapport à la justice. (A)

Commissaires au Chastelet, (Page 3:705)

Commissaires au Chastelet, (Jurisprud.) qu on appelle aussi commissaires - enquéteurs - examinateurs, sont des officiers de robe longue établis pour faire certaines instructions & fonctions de justice & police, à la décharge des magistrats du châtelet.

Le commissaire de la Mare qui étoit fort zélé pour l'honneur de sa compagnie, prétend dans son traité de la police, tome I. liv. I. tit. 12. que les enquêteursexaminateurs sont plus anciens que les conseillers au Châtelet.

Mais il est certain, comme nous le prouverons ci - après au mot Conseillers au châtelet, que ceuxci sont plus anciens; que c'étoit eux qui faisoient autrefois les enquêtes, informations, partages, & toute l'instruction; que ce qui est dit dans les anciens auteurs & dans les registres publics jusque vers l'an 1300 au sujet des auditeurs & enquêteurs, ne doit point s'entendre d'officiers qui fussent en titre pour ces fonctions, mais de conseillers ou avocats qui étoient délégués à cet effet par le prévôt de Paris, & autres juges; il n'est donc pas étonnant qu'il soit dit en plusieurs endroits que les auditeurs & enquêteurs avoient séance & voix délibérative au châtelet, puisque c'étoient ordinairement des conseillers qui faisoient cette fonction; & c'étoit comme conseillers qu'ils avoient cette séance.

On ne trouve point de preuve certaine qu'avant l'an 1300, il y eût au châtelet des enquêteurs ou examinateurs en titre, & dont la fonction fût permanente, & séparée de celle des conseillers. (A)

Les examinateurs, appellés depuis commissaires ax châtelet, ont eux - mêmes reconnu dans deux arrêts que les conseillers du châtelet étoient plus anciens qu'eux. [p. 706]

On voit dans le premier de ces arrêts, qui est du 5 Août 1434, qu'il fut dit par Chauvin & consorts examinateurs au châtelet, qu'eb antiquo il n'y avoit nombre d'examinateurs qui fût ordinaire; mais que les conseillers du châtelet, qui sont douze, étoient comme les conseillers de la cour; qu'eux - mêmes faisoient les enquêtes, & ne postuloient point en maniere d'avocats; & que depuis fut mis certain nombre d'examinateurs.

Le second arrêt, qui est du 10 Mai 1502, fut rendu entre les seize examinateurs d'une part, & les lieutenans civil & criminel, & les conseillers au châtelet d'autre part. Les examinateurs reconnurent, du moins tacitement, que leur érection ne remontoit pas plus haut que vers l'an 1300. En effet à l'audience du 2 Mai 1502, leur avocat parla seulement de l'ordonnance qui avoit établi les seize examinateurs, sans la dater: l'avocat des conseillers au châtelet dit qu'on avoit d'abord érigé au châtelet le prevôt de Paris & douze conseillers; que depuis furent commis deux lieutenans, l'un civil, l'autre criminel: & l'avocat du lieutenant criminel dit que de tout tems & d'ancienneté, plus de deux cents ans, & long - tems avant l'érection des examinateurs, les lieutenans civil & criminel de la prevôté avoient accoûtumé de faire les enquêtes; qu'il n'y avoit qu'eux qui les fissent, n'étoient les conseillers ou avocats auxquels ils les commettoient; que depuis pour le soulagement des lieutenans, qui ne pouvoient bonnement entendre à faire les enquêtes & expéditions des procès pendans au châtelet, pour la grande multitude des causes & affluence du peuple, il fut ordonné par le roi qu'il y auroit seize examinateurs dans cette ville ès seize quartiers, sous lesdits lieutenans, pour eux s'enquérir des vagabonds & maléfices, & le rapporter au châtelet; & aussi pour faire nettoyer les rues, visiter les boulangers, & entendre sur le fait de la police; qu'il fut aussi dit qu'ils feroient les enquêtes des procès pendans au châtelet.

Tels sont les faits énoncés dans cet arrêt, qui ne paroissent point avoir été contredits par les examinateurs; ce qui confirme que les conseillers ont été établis avant les examinateurs en titre, & que ces derniers l'ont eux - mêmes reconnu.

Il paroît par des lettres de Philippe - le - Bel du mois d'Avril 1301, que les notaires du châtelet se plaignirent de ce que le prevôt, les auditeurs, & les enquêteurs ou examinateurs, faisoient écrire leurs expéditions par d'autres personnes qu'eux; & Philippele - Bel leur ordonne de se servir du ministere des notaires.

Au mois de Mai 1313, ce même prince trouvant que les examinateurs qui étoient alors en place avoient abusé de leurs charges, les supprima, & ordonna que les enquêtes seroient faites par les notaires, ou par d'autres personnes qui seroient nommées par les auditeurs ou par le prevôt.

Philippe V. au mois de Février 1320, ordonna que les notaires du châtelet pourroient examiner témoins en toutes les causes mûes & à mouvoir au châtelet, selon ce que le prevôt & les auditeurs du châtelet leur commettroient, & spécialement ceux que les parties requéreroient & nommeroient de commun accord.

Il ordonna cependant en même tems qu'il y auroit au châtelet huit examinateurs seulement, qui seroient loyaux & discretes personnes choisies par les gens des comptes; que ces examinateurs pourroient examiner les témoins en toutes causes, ayant chacun pour adjoint un notaire. Leur salaire est aussi reglé par la même ordonnance.

Celle de Philippe de Valois, du mois de Février 1327, fixa le nombre des examinateurs du châtelet à douze, qui étoient distribués deux à deux en six chambres, où l'un interrogeoit les témoins, & l'autre écrivoit les dépositions. Cette ordonnance défend aux examinateurs de se mettre au rang du siége du prevôt de Paris: elle leur défend aussi d'être avocats, notaires, pensionnaires, ni procureurs, & de tenir aucun autre office au châtelet. Elle regle aussi leurs salaires, & la maniere de leur donner les faits & articles.

Il se trouva quelques années après jusqu'à vingt - deux examinateurs pourvûs par le roi; c'est pourquoi Philippe de Valois, par des lettres du 24 Avril 1337, en fixa le nombre à seize, qu'il choisit parmi ceux qui exerçoient alors, & ordonna que les six surnuméraires rempliroient les places qui deviendroient vacantes.

Ce nombre de seize fut confirmé par des lettres du roi Jean, du premier Juin 1353; de Charles V. du mois de Juin 1366; & de Charles VI. du mois de Juin 1380.

Ces charges étoient recherchées avec tant d'empressement, que Louis XI. en attendant qu'il y en eût de vacantes, en créa quatre extraordinaires, par édit du mois de Janvier 1464: il en donna deux aux nommés Assailly & Chauvin, pour récompense des services qu'ils lui avoient rendus. Mais les seize ordinaires s'étant opposés à leur réception, cela donna lieu à une longue contestation; ce qui engagea Louis XI. à supprimer les quatre nouveaux offices, par un édit du mois de Mars 1473.

Assailly eut cependant le crédit de faire rétablir pour lui un de ces offices, & y fut reçû.

Comme il s'éleva encore à ce sujet des difficultés, Louis XI. au mois de Juin 1474, créa quatre offices d'examinateurs ordinaires, & en donna un à ce nouveau pourvû. Il y eut opposition à l'enregistrement, & cette nouvelle création n'eut pas lieu.

Au mois de Décembre 1477, Louis XI. créa encore deux nouvelles charges d'examinateurs, & au mois de Février suivant un office d'examinateur extraordinaire.

Mais Charles VIII. par des lettres du 27 Septembre 1493, rétablit l'ancien nombre de seize, & supprima les surnuméraires: & Louis XII. au mois d'Octobre 1507, ordonna que ce nombre demeureroit fixe, sans pouvoir être augmenté.

Cependant François I. par son édit du mois de Février 1521, en créa seize nouveaux, & leur donna à tous le titre de commissaires, qui renferme tous les autres titres qu'ils portoient autrefois. Il y eut plusieurs contestations entre les anciens & les nouveaux, qui furent terminées par arrét du grand conseil du premier Août 1534, portant que les uns & les autres joüiroient des mêmes droits & prérogatives.

Il fut créé le 7 Septembre 1570 un trente - troisieme office de commissaire au châtelet, & au mois de Juin 1586 huit autres, qui par une déclaration du même mois furent réduits à sept; ce qui fit en tout le nombre de quarante.

Dans la suite ce nombre ayant paru excessis, eu égard à l'état où étoit alors la ville de Paris, il fut ordonné par édit d'Octobre 1603, que ceux qui vaqueroient seroient supprimés, jusqu'à ce qu'ils fussent réduits à trente - deux; mais il n'y en eut qu'un qui fut remboursé.

Au mois de Décembre 1635 Louis XIII. créa vingt - un offices de commissaires au châtelet, pour faire avec les trente - neuf qui subsistoient le nombre de soixante. Par des lettres du mois de Juillet 1638, les vingt - un nouveaux offices furent réduits à neuf, au moyen dequoi il y avoit alors quarante - huit commissaires.

Ils prennent tous le titre de maîtres; & depuis 1668 ils prennent aussi le titre de conseillers du Roi, en

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