ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"796"> peuple sauvage de l'Amérique méridionale au Bresil, nous apprend dans son voyage fait en la terre du Bresil, ch. xx. qu'ils n'avoient point de nombres au - dessus de cinq; & que lorsqu'ils vouloient exprimer quelque nombre au - delà, ils montroient leurs doigts & les doigts des autres personnes qui étoient avec eux; leur calcul n'alloit pas plus loin: ce qui prouve que des noms distincts sont absolument nécessaires pour compter, & que pour aller aux progressions les plus étendues du calcul, les langues ont besoin de dénominations propres, & de signes propres que nous appellons chiffres, pour exprimer ces progresfions. Or voici comment cela s'exécute dans notre langue.

Lorsqu'il y a plusieurs chiffres sur une même ligne, pour éviter la confusion, on les coupe de trois en trois par tranche, ou seulement on laisse un petit espace vuide, & chaque tranche ou chaque ternaire a son nom: le premier ternaire s'appelle unité; le second, mille; le troisieme, million; le quatrieme, billion; le cinquieme, trillion; le sixieme, quatrillion, puis quintillion, sextillion, septillion; ainsi de suite, la dénomination des nombres & des signes peut être infinie.

Les enfans commencent assez tard à compter, & ne comptent point fort avant ni d'une maniere fort affûrée, que long - tems après qu'ils ont l'esprit rempli de quantité d'autres idées; soit que d'abord il leur manque des mots pour marquer les différentes progressions des nombres, ou qu'ils n'ayent pas encore la faculté de former des idées complexes de plusieurs idées simples & détachées les unes des autres, de les disposer dans un certain ordre régulier, & de les retenir ainsi dans leur mémoire, comme il est nécessaire pour bien compter. Quoi qu'il en soit, on peut voir tous les jours des enfans qui parlent & raisonnent affez bien, & ont des notions fort claires de bien des choses, avant que de pouvoir compter jusqu'à vingt.

Il y a des personnes qui faute de mémoire, ne pouvant retenir différentes combinaisons de nombres, avec les noms qu'on leur donne par rapport aux rangs distincts qui leur sont assignés, ni la dépendance d'une si longue suite de progressions numérales dans la relation qu'elles ont les unes avec les autres, sont incapables durant toute leur vie de compter, ou de suivre régulierement une assez petite suite de nombres: car qui veut compter quatre - vingts, ou avoir une idée de ce nombre, doit savoir que soixante - dixneuf le précede, & connoître le nom ou le signe de ces deux nombres, selon qu'ils sont marqués dans leur ordre; parce que dès que cela vient à manquer, il se fait une breche, la chaîne se rompt, & il n'y a plus aucune progression.

Il est donc nécessaire, pour bien compter, 1°. que l'esprit distingue exactement deux idées, qui ne different l'une de l'autre que par l'addition ou la soustraction d'une unité: 2°. qu'il conserve dans sa mémoire les noms des différentes combinaisons depuis l'unité jusqu'à ce nombre qu'il a à compter, & cela sans aucune confusion, & selon cet ordre exact dans lequel les nombres se suivent les uns les autres: 3°. qu'il connoisse sans aucune erreur chaque chiffre ou signe distinct, inventé pour représenter précisément la collection des diverses unités, qui ont aussi chacune leurs noms distincts & particuliers: il doit savoir bien que le signe 9 représente la collection que nous appellons neuf; que les deux chiffres 19 représentent cette collection que nous appellons dix - neuf, tandis que les deux chiffres 91 représentent la collection que nous appellons quatre - vingt - oze, & ainsi de suite pour l'assemblage de toutes les collections.

Nous ne discernons différentes collections, que parce que nous avons des chiffres qui sont eux - mêmes fort distincts: ôtons ces chiffres, ôtons tous les signes en usage; & nous appercevrons qu'il nous est impossible d'en conserver les idées. Le progrès de nos connoissances dans les nombres, vient uniquement de l'exactitude avec laquelle nous avons ajoûté l'unité à elle - même, en donnant à chaque progression un nom & un signe qui la fait distinguer de celle qui la précede & de celle qui la suit. Je sai que cent (100) est supérieur d'une unité à quatre - vingtsdix - neuf (99), & inférieur d'une unité à cent un (101), parce que je me souviens que 99, 100, 101, sont les trois signes choisis pour désigner ces trois nombres qui se suivent.

Il ne faut pas se faire illusion, en s'imaginant que les idées des nombres séparées de leurs signes, soient quelque chose de clair & de déterminé: il est même hors de doute que quand un homme ne voudroit compter que pour lui, il seroit autant obligé d'inventer des signes, que s'il vouloit communiquer ses comptes.

Voilà comme s'exécute l'opération que nous nommons compter: cette opération est la mesure de tout ce qui existe; la Métaphysique, la Morale, la Physique, toutes les sciences y sont soûmises. Concluons avec M. l'abbé de Condillac, que pour avoir des idées sur lesquelles nous puissions réfléchir, nous avons besoin des signes qui servent de liens aux différentes collections d'idées simples; & pour le dire en un mot, nos notions ne sont exactes, qu'autant que nous avons inventé avec ordre les signes qui doivent les fixer. Des gestes, des sons, des chiffres, des lettres, c'est avec des instrumens aussi étrangers à nos idées, que nous les mettons en oeuvre pour nous élever aux connoissances les plus sublimes. Les matériaux sont les mêmes chez tous les hommes; mais l'adresse à s'en servir les distingue. V. Arithmétique, Binaire, Calcul, Caractere, Chiffre, & Nombre. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.

Compter, (Page 3:796)

Compter, (Comm.) On compte aux jettons ou à la plume; c'est dans l'un & l'autre cas exécuter les différentes opérations d'arithmétique. Il se dit 1°. des payemens qui se font en especes ou monnoies courantes; il m'a compté 400 livres: 2°. relativement aux arrêtés de payement ou de compte que font entre eux les Marchands ou Négocians. Les Marchands doivent compter tous les six mois, tous les ans au moins avec les personnes auxquelles ils font crédit, pour éviter les fins de non recevoir.

Compter par bref état; (Page 3:796)

Compter par bref état; c'est compter sommairement sur de simples mémoires ou bordereaux de compte. Voyez Bordereau.

Compter en forme; (Page 3:796)

Compter en forme; c'est lorsque le compte qu'on présente est en bonne forme, ou bien libellé. On le dit encore lorsqu'on examine un compte avec le légitime contradicteur.

Compter de clerc à maître; (Page 3:796)

Compter de clerc à maître; c'est lorsqu'un comptable ne compte que de ce qu'il a reçû, sans qu'on le rende responsable d'autre chose que de la recette des deniers.

Compter (Page 3:796)

Compter une chose à quelqu'un, c'est quelquefois lui en tenir compte, & quelquefois la mettre sur son compte.

Compter par pieces, (Page 3:796)

Compter par pieces, c'est compter en détail; ce qui est opposé à compter en gros. Voyez les dictionn de Comm. Trév. Dish. Chamb.

COMPTEUR, COMPTABLE, ou RECEVEUR (Page 3:796)

COMPTEUR, COMPTABLE, ou RECEVEUR, s. m. (Hist. mod.) est un officier de l'échiquier dont la fonction est de recevoir tous les deniers qui sont dûs à la couronne d'Angleterre: à mesure qu'il reçoit il fait passer un billet par une pipe dans la cour des tailles, où ce billet est ramassé par les clercs de l'auditeur qui se tiennent là pour écrire les mots por<pb-> [p. 797] tés par ledit billet sur une taille, & pour remettre ensuite le même billet aux clercs des peaux ou à ses substituts. Voyez Echiquier, Taille, &c.

Cela fait, les deux chamberlans députés fendent la taille: ils ont chacun leur sceau; & pendant que le plus ancien député fait la lecture d'une moitié de la taille, le plus jeune, assisté des deux autres clercs, examine l'autre partie.

Les compteurs sont au nombre de quatre: leurs places se donnent par le roi; & outre le maître clerc ou député, ils ont quatre autres clercs pour faire les expéditions. Voyez Echiquier. Cet usage est singulierement propre à l'Angleterre; les autres nations ont une autre maniere de recette pour les revenus de leurs états ou souveraineté. Voy. Chambre des Comptes. Chambers. (G)

Compteur, (Page 3:797)

Compteur, dans le Commerce, celui qui compte, qui fait des payemens.

Compteur (Page 3:797)

Compteur est aussi le nom qu'on donne à Paris à dix officiers de police, appellés jurés compteurs & déchargeurs de poisson de mer frais, sec, & salé, dont les fonctions sont de compter & décharger toutes les marchandises de cette espece à mesure qu'elles arrivent dans les halles & qu'elles y sont vendues, moyennant un certain droit par chaque cent, millier, tonne ou barril, somme ou panier, de ces marchandises.

Les jurés mesureurs de sel, étalonneurs des mesures de bois, qui sont d'autres officiers de police, sont aussi qualifiés de compteurs de salines sur la riviere, parce qu'ils sont préposés pour compter toutes les marchandises de salines qui arrivent par bateaux, & qui sont déchargées dans les ports. Dict. de Com. Trév. & Chamb. (G)

COMPTOIR (Page 3:797)

* COMPTOIR, s. m. (Comm.) a deux acceptions, l'une simple, & l'autre figurée: comptoir au simple, c'est une table ou un bureau sur lequel le négociant expose ses marchandises, paye ou reçoit de l'argent, &c. Au figuré, il se dit d'un lieu que les Européens ont fait, & qu'ils regardent comme le centre de leur commerce, dans l'Inde, en Afrique, &c.

COMPTORISTE (Page 3:797)

COMPTORISTE, s. m. (Comm.) terme qui parmi les Négocians signifie un homme de cubinet expert dans les comptes, ou un habile teneur de livres.

COMPULSER (Page 3:797)

COMPULSER, (Jurispr.) c'est contraindre par autorité de justice une personne publique à exhiber un acte qui est entre ses mains pour en tirer copie, partie présente ou dûement appellée, afin que cette copie fasse foi contre la partie qui a été présente ou appellée au compulsoire. Voyez ci - après Compulsoire. (A)

COMPULSEUR (Page 3:797)

COMPULSEUR, s. m. (Hist. anc.) nom d'office sous les empereurs Romains. Les compulseurs étoient des gens envoyés par la cour dans les provinces, pour faire payer à l'épargne ce qui ne l'avoit pas été dans le tems prescrit.

Ces compulseurs firent de si grandes exactions, sous prétexte de remplir leur devoir, que l'empereur Honorius les cassa par une loi donnée en 412.

Les lois des Visigoths font mention des compulseurs de l'armée. Les Goths appelloient ainsi ceux qui obligeoient les soldats d'aller au combat ou à l'attaque.

Cassien appelle aussi compulseurs, ceux qui dans les monasteres indiquoient les heures de l'office canonique, & qui avoient soin que les moines se rendissent à l'office à ces heures. C'est ce qu'on nomme encore aujourd'hui dans les communautés ecclésiastiques reglementaire, homme chargé de veiller à l'exécution des reglemens. Chambers. (G)

COMPULSOIRE (Page 3:797)

COMPULSOIRE, (Jurispr.) du Latin compellere, est un mandement émané de l'autorité souveraine ou de justice, en vertu duquel le dépositaire d'une piece est tenu de la représenter.

L'usage des compulseires nous vient des Romains on en trouve des vestiges dans le code Théodosien, tit. de edend. 1. 6. & au même titre du code de Justinien, loi 2.

Par cette loi, qui est des empereurs Sévere & Antonin, il est dit que le juge devant lequel la cause est pendante, ordonnera que l'on représente aux parties les actes publics, tant civils que criminels, afin que les parties les examinent, & puissent s'éclair cir de la vérité de ces actes.

Il y a long - tems que les compulsoires sont aussi d'usage parmi nous, en effet il en est parlé dans l'ordonnance de Charles VII. de l'an 1446, art. 36. qui porte que les parties produiront dans trois jours, sans espérance d'autre délai, sous ombre de compulsoire ni autrement.

L'ordonnance de Charles VIII. de l'an 1493, art. 31. ordonne qu'aucun délai & compulsoire ne soit accordé par la cour, outre les délais ordinaires pour produire, finon que ce délai & compulsoire eût été demandé en jugement en plaidant la cause.

Le même reglement fut renouvellé par Louis XII. en 1507, art. 81. & par François I. en Octobre 1535, ch. xv. art. 2.

François I. par son ordonnance de 1539, art. 177. a encore prévû le cas du compulsoire, en défendant aux notaires & tabellions de ne montrer & communiquer leurs registres, livres, & protocolles, sinon aux contractans, leurs héritiers & successeurs, ou autres auxquels le droit de ces contrats appartiendroit notoirement, ou qu'il fût ordonné par justice.

Enfin l'ordonnance de 1667 contient un titre exprès des compulsoires & collations de pieces; c'est le titre xij.

A l'égard des coûtumes, je ne connois que celle de Bourbonnois, redigée en 1520, qui fasse mention des compulsoires. L'art. 433. dit que les notaires & tabellions sont tenus & peuvent être contraints, par compulsoire ou autrement, d'exhiber aux lignagers, seigneurs féodaux & directs, la note & contrat d'aliénation par eux reçû, & leur en donner copie à leurs dépens s'ils en sont requis, &c.

La coûtume de Nivernois, ch. xxxj. art. 15. contient une disposition à - peu - près semblable pour l'e<-> hibition des pieces qui est dûe par les notaires; mais elle ne parle pas de compulsoire.

Anciennement l'ordonnance du juge suffisoit pour autoriser une partie à compulser une piece; mais depuis que l'on a introduit l'usage des lettres de justice en chancellerie, il est nécessaire d'obtenir des lettres de compulsoire.

Ces lettres sont adressées à un huissier, ensorte qu'il n'y a qu'un huissier qui puisse les mettre à exécution.

Elles contiennent l'exposé qui a été fait par l'impétrant, qu'il a intérêt d'avoir connoissance de certaines pieces, dont on lui refuse ou dont on pourroit lui refuser la communication sous de vains prétextes; qu'il desire en avoir une copie authentique, & qui puisse faire foi contre sa partie.

Les lettres donnent ensuite pouvoir à l'huissier de faire commandement à tous notaires, tabellions, greffiers, curés, vicaires, gardes - registres, & autres perionnes publiques, de représenter tous les titres, contrats, aveux, registres, & autres actes qui seront requis par l'impétrant, pour en être par l'huissier fait des copies, extraits, vidimus, & collations, partie présente ou dûement appellée, pour servir à l'impétrant au procès dont il s'agit, & partout ailleurs; & en cas d'opposition, refus ou délai, l'huissier est autorisé à assigner pour en dire les causes.

On voit par - là qu'un compulsoire peut avoir deux objets.

L'un d'avoir communication d'une piece que l'o

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