ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Code Papyrien, (Page 3:582)

Code Papyrien, ou droit civil papyrien, jus civile Papyrianum, est un recueil des lois royales, c'est - à - dire faites par les rois de Rome. Ce code a été ainsi nommé de Sextus Papyrius qui en fut l'auteur. Les lois faites par les rois de Rome jusqu'au tems de Tarquin le Superbe, le septieme & le dernier de ces rois, n'étoient point écrites: Tarquin le Superbe commença même par les abolir. On se plaignit de I'inobservation des lois, & l'on pensa que ce desordre venoit de ce qu'elles n'étoient point écrites. Le sénat & le peuple arrêterent de concert qu'on les rassembleroit en un seul volume; & ce soin fut confié à Publius Sextus Papyrius, quì étoit de race patricienne. Quelques - uns des auteurs qui ont parlé de ce Papyrius & de sa collection, ont cru qu'elle avoit été faite du tems de Tarquin l'ancien, cinquieme roi de Rome: ce qui les a induits dans cette erreur, est que le jurisconsulte Pomponius en parlant de Papyrius dans la loi ij. au digeste de origine juris, semble supposer que Tarquin le Superbe sous lequel vivoit Papyrius, étoit fils de Demarate le Corinthien; quoique de l'aveu de tous les historiens, ce Demarate fût pere de Tarquin l'ancien, & non de Tarquin le Superbe: mais Pomponius lui - même convient que Papyrius vivoit du tems de Tarquin le Superbe; & s'il a dit que ce dernier étoit Demarati filius, il est évident que par ce terme filius il a entendu petit - fils ou arriere - petit - fils: ce qui est conforme à plusieurs lois qui nous apprennent que sous le terme filii sont aussi compris les petits - enfans & autres descendans. D'ailleurs, Pomponius ne dit pas que Papyrius rassembla les lois de quelques - uns des rois, mais qu'il les rassembla toutes; & s'il le nomme en un endroit avec le prénom de Publius, & en un autre avec celui de Sextus, cela prouve seulement qu'il pouvoit avoir plusieurs noms, étant certain qu'en l'un & l'autre endroit il parle du même individu. Les lois royales furent donc rassemblées en un volume par Publius ou Sextus Papyrius, sous le regne de Tarquin le Superbe; & le peuple, par reconnoissance pour celui qui étoit l'auteur de cette collection, voulut qu'elle portât le nom de son auteur: d'où elle fut appellée le code Papyrien.

Les rois ayant été expulsés de Rome peu de tems après cette collection, les lois royales cesserent encore d'être en usage: ce qui demeura dans cet état pendant environ vingt années, & jusqu'à ce qu'un autre Papyrius surnommé Caïus, & qui étoit souverain pontife, remit en vigueur les lois que Numa Pompilius avoit faites au sujet des sacrifices & de la religion. C'est ce qui a fait croire à Guillaume Grotius & à quelques autres auteurs, que le code Papyrien n'avoit été fait qu'après l'expulsion des rois. Mais de ce que Caïus Papyrius remit en vigueur quelques lois de Numa, il ne s'ensuit pas qu'il ait été l'auteur du code Papyrien, qui étoit fait dans le tems de Tarquin le Superbe.

Il ne nous reste plus du code Papyrien que quelques fragmens répandus dans divers auteurs: ceux qui ont essayé de les rassembler sont Guillaume Forster, Fulvius Ursinus, Antoine Augustin Justelipse, Pardulphus Prateius, François Modius, Etienne Vincent Pighius, Antoine Sylvius, Paul Merule, François Baudouin, & Vincent Gravina. François Baudouin nous a transmis dix - huit lois, qu'il dit avoir copiées sur une table fort ancienne trouvée dans le capitole, & que Jean Barthelemi Marlianus lui avoit communiqué. Paul Manuce fait mention de ces dix - huit lois; Pardulphus Prateius y en a ajoûté six autres. Mais Cujas a démontré que ces lois ne sont pas à beaucoup près si anciennes: on n'y reconnoît point en effet cette ancienne latinité de la loi des douze tables, qui est même postérieure au code Papyrien; ainsi tous ces prétendus fragmens du code Papyrien n'ont évidemment été fabriqués que sur des passages de Ciceron, de Denis d'Halicarnasse, Tite - Live, Plutarque, Aulugele, Festus Varron, lesquels en citant les lois Papyriennes, n'en ont pas rapporté les propres termes, mais seulement le sens. Un certain Granius avoit composé un commentaire sur le code Papyrien, mais ce commentaire n'est pas parvenu jusqu'à nous.

M. Terrasson, dans son histoire de la jurisprudence Romaine, a rassemblé les fragmens du code Papyrien, qu'il a recherchés dans les anciens auteurs avec plus d'attention & de critique que les autres jurisconsultes n'avoient fait jusqu'ici. Il a eu soin de distinguer les lois dont l'ancien texte nous a été conservé, de celles dont les historiens ne nous ont transmis que le sens. Il rapporte quinze textes de lois, & vingt - une autres lois dont on n'a que le sens e qui fait en tout trente - six lois. Il a divisé ces trente - six lois en quatre parties: la premiere en contient treize, qui concernent la religion, les fêtes, & les sacrifices. Ces lois portent en substance, qu'on ne fera aucune statue ni aucune image de quelque forme qu'elle puisse être, pour représenter la divinité, & que ce sera un crime de croire que Dieu ait la figure soit d'une bête, soit d'un homme; qu'on adorera les dieux de ses ancêtres, & qu'on n'adoptera aucune fable ni superstition des autres peuples; qu'on n'entreprendra rien d'important sans avoir consulté les dieux; que le roi présidera aux sacrifices, & en réglera les cérémonies; que les vestales entretiendront le feu sacré; que si elles manquent à la chasteté, elles seront punies de mort; & que celui qui les aura séduites, expirera sous le bâton; que les procès & les travaux des esclaves seront suspendus pendant les fêtes, lesquelles seront décrites dans des calendriers; qu'on ne s'assemblera point la nuit soit pour prieres ou pour sacrifices; qu'en suppliant les dieux de détourner les malheurs dont l'état est menacé, on leur présentera quelques fruits & un gâteau salé qu'on n'employera point dans les libations de vin d'une vigne non taillée; que dans les sacrifices on n'offrira point de poissons sans écailles; que tous poissons sans ecailles pourront être offerts, excepté le scarre. La loi treizieme regle les sacrifices & offrandes qui devoient être faits après une victoire remportée sur les ennemis de l'état. La seconde partie contient sept lois qui ont rapport au droit public & à la police: elles reglent les devoirs des praticiens envers les Plébeiens, & des patrons envers leurs cliens; le droit de suffrage que le peuple avoit dans les assemblées de se choisir des magistrats, de faire des plébiscites, [p. 583] & d'empêcher qu'on ne conclût la guerre ou la paix contre son avis; la jurisdiction des duumvirs par rapport aux meurtres, la punition des homicides, l'obligation de respecter les murailles de Rome comme sacrées & inviolables; que celui qui en labourant la terre auroit déraciné les statues des dieux qui servoient de bornes aux héritages, seroit dévoüé aux dieux Manes lui & ses boeufs de labour; & la défense d'exercer tous les arts sédentaires propres à introduire ou entretenir le luxe & la molesse. La troisieme partie contient douze lois qui concernent les mariages & la puissance paternelle; savoir, qu'une femme légitimement liée avec un homme par la confarréation, participe à ses dieux & à ses biens; qu'une concubine ne contracte point de mariage solemnel; que si elle se marie, elle n'approchera point de l'autel de Junon qu'elle n'ait coupé ses cheveux & immolé une jeune brebis; que la femme étant coupable d'adultere ou autre libertinage, son mari sera son juge & pourra la punir lui - même, après en avoir délibéré avec ses parens; qu'un mari pourra tuer sa femme lorsqu'elle aura bû du vin, surquoi Pline & Aulugelle remarquent que les femmes étoient embrassées par leurs proches, pour sentir à leur haleine si elles avoient bû du vin: il est dit aussi qu'un mari pourra faire divorce avec sa femme, si elle a empoisonné ses enfans, fabriqué de fausses clés, ou commis adultere; que s'il la répudie sans qu'elle soit coupable, il sera privé de ses biens, dont moitié sera pour la femme, l'autre moitié à la déesse Cérès; que le mari sera aussi dévoüé aux dieux infernaux; que le pere peut tuer un enfant monstrueux aussitôt qu'il est né; qu'il a droit de vie & de mort sur ses enfans légitimes; q'il a aussi droit de les vendre, excepté lorsqu'il leur a permis de se marier; que le fils vendu trois fois, cesse d'être sous la puissance du pere; que le fils qui a battu son pere, sera dévoüé aux dieux infernaux, quoiqu'il ait demandé pardon à son pere; qu'il en sera de même de la bru envers son beau - pere; qu'une femme mourant enceinte ne sera point inhumée qu'on n'ait tiré son fruit, qu'autrement son mari sera puni comme ayant nui à la naissance d'un citoyen; que ceux qui auront trois enfans mâles vivans, pourront les faire élever aux dépens de la république jusqu'à l'âge de puberté. La quatrieme partie contient quatre lois qui concernent les contrats, la procédure, & les funérailles; savoir, que la bonne foi doit être la base des contrats; que s'il y a un jour indiqué pour un jugement, & que le juge ou le défendeur ait quelque empêchement, l'affaire sera remise; qu'aux sacrifices des funérailles on ne versera point de vin sur les tombeaux; enfin que si un homme est frappé du feu du ciel, on n'ira point à son secours pour le relever: que si la foudre le tue, on ne lui fera point de funérailles, mais qu'on l'enterrera sur le champ dans le même lieu.

Telle est en substance la teneur de ces fragmens du code Papyrien. M. Terrasson a accompagné ces trente - six lois de notes très - savantes pour en faciliter l'intelligence; & comme pour l'ordre des matieres il a été obligé d'entre - mêler les lois, dont on a conservé le texte, avec celles dont les auteurs n'ont rapporté que le sens, il a rapporté de suite à la fin de cet article, le texte des quinze lois dont le texte a été conservé. Ces lois sont en langue Osque, que l'on sait être la langue des peuples de la Campanie, que l'on parloit à Rome du tems de Papyrius, & l'une de celles qui ont contribué à former la langue Latine; mais l'ortographe & la prononciation ont tellement changé depuis, & le texte de ces lois paroît aujourd'hui si barbare, que M. Terrasson a mis à côté du texte Osque une version latine, pour faciliter l'intelligence de ces lois; ce qu'il a accompagné d'une dissertation très - curieuse sur la langue Osque.

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