ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"596"> le quelques particules d'air avec le sang dans les poumons, ou non. Voyez Poumon, Air, &c.

En supposant même qu'il s'insinue quelque portion d'air dans la veine pulmonaire, il ne peut autrement dilater le coeur que par une effervescence dans le ventricule gauche, qui ne sèroit point suffisante pour dilater le droit: mais la dissection anatomique de la partie ne suffit - elle point pour détruire ce sentiment, qui a été suffisamment réfuté par un grand nombre d'excellens auteurs? Voyez Respiration.

Quoi qu'il en soit, la masse de l'atmosphere paroît être le véritable antagoniste de tous les muscles qui servent à l'inspiration ordinaire & à la contraction du coeur; & cela se trouve confirmé non - seulement par sa puissance, mais encore par la nécessité de son action sur les corps animaux. Voyez Atmosphere.

Le coeur, comme nous l'avons déjà observé, est un muscle solitaire d'une force extraordinaire, qui est encore augmentée par les muscles intercostaux & le diaphragme, qui n'ont point d'antagonistes; de soite qu'elle a besoin d'être contrebalancée par quelque force équivalente, quelle qu'elle puisse être: car quoique l'action des muscles intercostaux soit volontaire, ils ne sont pas pour cela exempts de la condition des autres muscles qui servent aux mouvemens volontaires, lesquels seroient dans une contraction perpétuelle, nonobstant l'influence de la volonté, sans le balancement des muscles antagonistes. Le poids de l'atmosphere qui presse sur la poitrine & sur toutes les autres parties du corps, supplée à ce balancement qui se trouve entre les autres muscles: & comme dans tous les autres mouvemens volontaires l'influence de la volonté ne fait qu'augmenter l'action de l'une des deux puissances qui étoient auparavant en équilibre; de même elle ne sert ici qu'à donner à ces muscles assez de force pour soûtenir un poids qui surmonteroit leurs forces, s'ils n'étoient point secondés de la maniere que je viens de le dire. Aussi - tôt que ce secours vient à manquer, les côtes s'abaissent de nouveau par la seule pesanteur de l'atmosphere; ce qu'elles ne feroient point sans cela, malgré le penchant naturel qu'ont ces muscles à se contracter.

Cela est suffisamment prouvé par les expériences de Torricelli, & par celles qu'on a faites sur des animaux dans le vuide, où dès que la pression de l'air est ôtée, les muscles intercostaux & le diaphragme sont contractés, les côtes s'élevent dans le moment, & la volonté ne peut plus les obliger à s'abaisser, à moins que l'air ne vienne à son secours, & ne les y force par sa pression.

Comme dans l'élevation des côtes le sang est en quelque sorte obligé d'entrer dans les poumons par le passage qu'il trouve ouvert; de même lorsqu'elles viennent à s'abaisser, il est forcé, par l'affaissement des poumons & par la contraction des vaisseaux sanguins, de passer par la veine pulmonaire dans le ventricule gauche du coeur: cela joint au poids de l'atmosphere qui presse sur toute la surface du corps qu'il entoure de tous côtés, est cette puissance qui oblige le sang à monter dans les veines, après que la force que le coeur lui avoit imprimée a cessé; & elle suffit même pour obliger le coeur à sortir de son état naturel & à se dilater.

Lorsqu'on vient à supputer la pesanteur d'une colonne d'air égale à la surface du corps, on s'apperçoit qu'elle suffit pour produire les effets qu'on lui attribue. Si l'on considere outre cela que les corps des animaux sont des machines capables de céder à la pression, on connoîtra sans peine qu'elle doit agir sur eux de la maniere que nous l'avons dit. Cependant quoique nos corps soient entierement com<cb-> posés de petits tubes ou vaisseaux remplis de fluides, cette pression, quelque grande qu'elle soit, étant la même partout, ne pourroit les affecter, à moins que les dimensions superficielles ne variassent également; à cause qu'étant également pressés partout avec le même degré de force, les fluides qu'ils contiennent ne pourroient se retirer dans aucun endroit, & faire place à ceux qui les suivent, mais demeureroient aussi fixes & aussi immobiles que s'ils étoient actuellement solides. Voyez Fluide & Air.

Mais la dilatation de la poitrine fournit assez d'espace aux fluides pour se mouvoir, & son resserrement leur imprime un nouveau mouvement; ce qui est le principe de la circulation continuelle du sang.

Cette dilatation & cette contraction réciproque des dimensions superficielles du corps paroissent si nécessaires à la vie de l'animal, qu'il n'y en a aucun, quelqu'imparfait qu'il soit, dans lequel elles ne se trouvent; pour le moins on n'en a encore decouvert aucun dans lequel elles n'ayent existé.

Quoique les côtes & les poumons d'un grand nombre de poissons & d'insectes n'ayent aucun mouvement, & que leur poitrine, par une suite nécessaire, ne puisse point se dilater; ce défaut est cependant réparé par un méchanisme analogue qui supplée autant qu'il faut aux besoins de la vie. Les poissons, par exemple, qui n'ont point de poumons, ont des oüies qui font les mêmes fonctions qu'eux; car elles reçoivent & rejettent l'eau alternativement; de sorte que les vaisseaux sanguins souffrent la même altération dans leurs dimensions, que dans les poumons des animaux les plus parfaits. Voyez Ouies.

Quoique les poumons des insectes different autant que ceux des poissons de ceux des animaux parfaits, ils ont cependant la même action & le même usage qu'eux; c'est - à - dire qu'ils servent à chasser l'air, & à varier les dimensions & la capacité des vaisseaux sanguins. Comme ils n'ont point de poitrine ou de cavité séparée pour le coeur & les vaisseaux qui reçoivent l'air, ces derniers se distribuent dans tout le tronc, par le moyen duquel ils communiquent avec l'air extérieur par différens soupiraux, auxquels sont adaptés différens sifflets qui envoyent des rameaux dans tous les muscles & dans tous les visceres, & paroissent accompagner les vaisseaux sanguins par tout le corps, de même que dans les poumons des animaux parfaits. Par cette disposition le corps s'enfle dans chaque inspiration, & se resserre dans chaque expiration; ce qui doit causer dans les vaisseaux sanguins une vicissitude d'extension & de contraction, & imprimer un plus grand mouvement dans les fluides qu'ils contiennent, que ne le feroit le coeur qui ne paroît point musculeux dans ces animaux.

Le ftus est le seul animal qui soit exempt de la nécessité de recevoir & de chasser alternativement quelque fluide; mais pendant qu'il est enfermé dans la matrice, il ne paroît avoir tout au plus qu'une vie végétative, & ne mérite point d'être mis au nombre des animaux; & sans cette petite portion de mouvement musculaire qu'il exerce dans la matrice, on pourroit sans absurdité le regarder comme une greffe ou une branche de la mere. Voyez Ftus, Embryon, &c.

On peut objecter contre la doctrine que nous venons d'établir, que le coeur de plusieurs animaux ne bat pas avec moins de régularité & moins de force dans le vuide que dans l'air, comme M. Boyle l'a expérimenté avec ceux des grenouilles. Trans. phil. n°. 62.

Estimation de la force du coeur. La quantité de la force du coeur - a été différemment estimée, & sur di<pb-> [p. 597] vers principes, par plusieurs auteurs; mais particulierement par Borelli, Morland, Keill, Jurin, &c.

On peut déterminer la force du coeur par le mouvement avec lequel il se contracte, ou par le mouvement d'un poids qui étant opposé au sang tel qu'il existe hors du coeur, soit capable de le balancer & d'en arrêter le cours. Nous n'avons aucun moyen de pouvoir en venir à bout à priori, à cause que nous ne connoissons qu'imparfaitement la structure interne de cette partie, & la nature & la force de la cause d'où dépend la contraction; de sorte que le seul moyen qui nous reste est de l'apprétier par les effets.

Toute l'action du coeur consiste dans la contraction de ses ventricules: à mesure que ceux - ci se contractent, ils pressent le sang, & lui communiquant une partie de leur mouvement, ils le poussent avec violence dans les passages qu'il trouve ouverts. Le sang ainsi poussé dans l'aorte & dans l'artere pulmonaire fait effort de toutes parts, partie contre les tuniques des arteres qui étoient devenues flaiques dans la derniere diastole, & en partie contre le sang qui le précede, & dont le mouvement est trop lent. Par ce moyen les tuniques des arteres se tendent peu - à - peu, & le mouvement du sang dont nous venons de parler devient plus rapide.

Il est bon d'observer en passant, que plus les arteres sont flasques, moins elles font de résistance au sang qui veut les dilater; & que plus elles sont tendues, plus aussi s'opposent - elles avec force à une plus grande dilatation; de sorte que toute la force du sang au sortir du coeur est d'abord plùtôt employée à dilater les arteres, qu'à pousser le sang qui le précede; au lieu que dans la suite il agit moins sur les arteres que sur le sang qui s'oppose à son cours.

Borelli, comme nous l'avons déjà observé, dans son OEconom. anim. suppose les obstacles qui s'opposent au mouvement du sang dans les arteres, équivalens à 180000 livres, & la force du coeur à 3000; ce qui n'est qu'un 1/60 de la résistance qu'il rencontre. Si l'on déduit 45000 livres pour le secours fortuit qu'il reçoit de la tunique musculaire élastique des arteres, il reste pour le coeur une force de 3000 livies, avec laquelle il doit surmonter une résistance de 135000 livres; c'est - à - dire écarter avec une livre de force un obstacle de quarante - cinq livres; ce qu'il fait, à ce que suppose cet auteur, par la force de percussion.

S'il eût poussé son calcul jusqu'aux veines, qu'il prétend contenir quatre fois plus de sang que les arteres, & dans lesquelles cette force de percussion ne se fait point sentir du tout, ou du moins que très foiblement, il n'eût pas eu de peine à reconnoître l'insuffisance du système de percussion.

On accuse même son calcul de fausseté, & l'on prétend que la force qu'il attribue au coeur est infiniment trop grande.

Le docteur Jurin fait voir que si Borelli ne se fût point trompé dans son calcul, il eût trouvé la résistance que le coeur est obligé de surmonter beaucoup plus grande, même suivant ses principes, & qu'elle eût été de 1 076 000, au lieu de 135000; ce qui passe toute vraissemblance.

Le plus grand défaut de la solution consiste, suivant le docteur Jurin, en ce qu'il a apprétié la force motrice du coeur par un poids en repos; en ce qu'il a supposé dans une de ses expériences que le poids que soûtient un muscle est entierement soûtenu par sa force de contraction; que les muscles qui ont la même pesanteur sont également forts; enfin que la force du coeur augmente à chaque systole, &c.

Le docteur Keill, dans ses essais sur l'OEcon. anim. a le premier abandonné le calcul de Borelli, auquel il en a substitué un autre infiniment plus petit. Voici comment il estime la force du coeur. Supposant que l'on connoisse la vîtesse d'un fluide, & faisant abstraction de la résistance qu'il rencontre de la part d'un autre fluide, on détermine la force qui le met en mouvement comme il suit. Soit la ligne a la hauteur de laquelle doit tomber un corps pour avoir une vîtesse égale à celle du fluide, la force qui met ce fluide en mouvement sera égale au poids d'une colonne du même fluide, dont la base seroit égale à l'orifice, & la pesanteur à 2 a. Coroll. 2. prop. 36. lib. II. des principes de Newton.

Maintenant le sang qui sort du coeur trouve une résistance qui retarde son mouvement de la part de celui qui circule dans les veines & les arteres; ce qui l'empêche de couler avec toute la vîtesse que le coeur lui imprime, une partie de cette force étant employée à surmonter la résistance de la masse du sang. Supposé donc que l'on connoisse de combien la vîtesse du sang est diminuée par cette résistance, ou quelle est la proportion entre la vîtesse du sang qui rencontre cette résistance, & celle du sang qui n'en trouve aucune; il ne sera pas difficile, après avoir déterminé la premiere, de trouver la seconde, & par conséquent la force absolue du coeur. L'auteur s'est servi, pour la découvrir, de l'expérience suivante.

Après avoir découvert l'artere & la veine iliaque dans la cuisse d'un chien près du tronc, & y avoir fait les ligatures convenables, il coupa les vaisseaux, & reçut pendant dix secondes le sang qui en sortit. Il fit la même chose sur l'artere pendant le même espace de tems, & il pesa avec soin la quantité de sang qui sortit de ces deux différens vaisseaux: il réitéra la même expérience, & il trouva enfin que la quantité de sang qui étoit sortie de l'artere, étoit à celle qu'avoit donnée la veine dans le même espace de tems, à - peu - près comme 7 1/2 à 3.

La vîtesse du sang dans l'artere iliaque si près de l'aorte, doit être à - peu - près la même que dans l'aorte; d'où il suit que la vîtesse avec laquelle il sort par l'artere iliaque après qu'on l'a coupée, est égale à celle qu'il auroit au sortir du coeur lorsqu'il ne trouve aucune resistance: ou ce qui revient au même, le sang sort par l'ouverture de l'artere iliaque avec toute la vîtesse qu'il a reçûe du coeur. Tout le sang qui passe dans l'artere iliaque y revient de nouveau par la veine iliaque, & par conséquent la quantité de sang qui passe dans toutes les deux dans le même tems doit être égale. Il s'ensuit donc que la quantité de sang qui sort par l'ouverture de la veine iliaque, est égale à celle qui a passé dans l'artere iliaque avant qu'on l'ait coupée, dans le même espace de tems. Puis donc que nous connoissons la quantité de sang qui passe dans l'artere iliaque lorsqu'elle est coupée, & avant qu'elle le soit, il s'ensuit que nous avons leur vîtesse: car la vîtesse d'un fluide qui coule dans le même tuyau dans un espace de tems égal, est directement comme sa quantité. Mais la vîtesse du sang, lorsque l'artere est coupée, est égale à celle qu'il reçoit du coeur; & la vîtesse, lorsqu'elle n'est point coupée, est celle avec laquelle le sang coule dans l'aorte, dans laquelle il trouve de la résistance: d'où l'on voit que ces deux vîtesses sont l'une à l'autre comme 7 1/2 à 3.

Si l'on suppose maintenant que le coeur jette deux onces de sang à chaque systole, ce qui est assez vraissemblable, le sang doit parcourir dans l'aorte 156 piés en une minute; de sorte que la vîtesse absolue avec laquelle il est poussé dans l'aorte est capable de lui faire courir 390 piés en une minute, ou six piés 1/2 en une seconde, s'il ne trouvoit aucune résistance.

Recherchons maintenant de quelle hauteur doit tomber un corps pour acquérir la vîtesse que nous lui avons donnée; car cette hauteur étant doublée,

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