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On trouve une distinction très - juste de ces deux especes de coction dans les définitions de Medecine de Gorrée: il dit que la coction proprement dite, c'est - à - dire la digestion dans les premieres, les secondes & les troisiemes voies, concerne les choses qui entrent dans le corps, & la coction des matieres morbifiques celles qui en sortent ou qui sont préparées pour en être évacuées.
Les premiers maîtres de l'art ayant fait l'importante découverte du moyen le plus efficace que la nature met en usage pour détruire les causes morbifiques, s'appliquerent soigneusement à observer les differens signes qui annoncent le pepasme, ou son défaut qui est la crudité; parce qu'ils jugeoient par les premiers, que la nature devenoit supérieure à la cause de la maladie, & par les seconds au contraire, que les effets de celle - ci étoient toûjours dominans. Ils apprirent à chercher ces signes principalement dans les excrémens, parce qu'étant le résidu des différentes coctions, soit dans l'état de santé soit dans celui de maladie, on peut inférer des qualités de ces matieres la maniere plus ou moins parfaite dont elles on> été séparées. Ainsi Hippocrate (aphor. xij. sect. v.) avoit >articulierement indiqué les urines & les matiere>les, comme pouvant sournir les signes les plu>, communs aux coctions de matiere morbifique faites dans quelque partie du corps que ce soit; les crachats, comme propres à faire connoître particulierement l'état des poumo'is dans les maladies de poitrine; la mucosité des narines, celui de leurs cavités affectées de catarrhe, &c. Galien établit aussi la même chose, lib. II. de crisib. cap. vij. en disant que dans toutes les fievres, attendu que le vice qui les cause est principalement dans le systeme des vaisseaux sanguins, on doit avoir principalement attention aux urines; que dans les maladies qui affectent le bas - ventre, on doit avoir égard aux excrémens des premieres voies, sans négliger les urines, s'il y a fievre; & que de même dans les maladies de poitrine, il faut examiner les crachats & joindre à cela toûjours l'inspection des urines, si ces maladies sont accompagnées de fievre.
Rien ne signifie plus sûrement une heureuse terminaison, que de voir les marques de coction dans les excrémens en général; c'est ce qu'enseigne Hippocrate in epidem. lib. I. sect. ij. text. 45. lorsqu'il dit que toutes les maturations d'excrémens sont toûjours de saison & salutaires: & ensuite il ajoûte que les promptes coctions annoncent toûjours la prompte terminaison des maladies, & sont une assurance de guérison. Galien a conf>mé toutes ces observations du pere de la Medecine par les siennes: il dit, lib. I. de crisib. cap. xviij. que les coctions ne sont jamais de mauvais signe; & il témoigne en être si assûré, qu'il ne craint pas de donner pour regle infaillible, lib. de constit. art. medic. qu'aucune maladie ne se termine d'une maniere salutaire, sans qu'il ait précédé des signes de coction; & Prosper Alpin de prasag. vita & mort. agr. lib. VI. cap. j. ajoûte à tout ce qui vient d'être dit en leur faveur, que non - seulement la coc -
Toutes fortes d'évacuations qui arrivent après la coction, sont toûjours salutaires; c'est l'effet de la nature qui s'est rendue supérieure à la cause de la maladie: mais la sûreté du succès qui est annoncée par les signes de la coction, n'exclut pas cependant absolument toute incertitude; il faut au moins que les signes marquent une coction bien parfaite & bien complete; que ces signes perseverent jusqu'au moment de la crise, pepasmi & cruditatis vicissitudo pessima, dit Duret, in coacas 54. cap. xvj. & qu'il ne survienne de la part du medecin, ou de celle du malade, & de ceux qui le gouvernent, aucun accident qui trouble la coction & qui s'oppose à la crise.
Les grands maitres qui nous ont transmis leurs importantes observations à ce sujet, ne s'en sont pas tenus à ce qui vient d'être rapporté; ils ont cherché tous les signes de coction relatifs aux différentes parties du corps, qu'il seroit trop long d'exposer ici; ils ont de plus indiqué le tems où ils paroissoient dans les différentes maladies: ils ont trouvé qu'ils ne se montrent jamaiç au commencement, parce qu'alors les matieres morbifiques sont absolument crues, ni pendant leur accroissement, parce qu'alors les coctions ne peuvent encore être qu'imparfaites; c'est au tems où la maladie cesse d'augmenter & de produire de nouveaux symptomes, que l'on doit chercher à s'assurer si la coction est faite ou non, lorsque la chaleur naturèlle a pû travailler suffisamment pour la préparer.
Autant il y a à compter sur les signes de coction,
comme présages salutaires, autant doit - on craindre
lo>squ'ils manquent & qu'il n'y a que des signes de
crudité, lors même qu'ils sont joints aux meilleurs
signes, ou que la maladie paroit terminée; parce
qu'on doit s'attendre à ce que le mal ait des suites
fâcheuses ou de longue durée, s'il subsiste encore,
& à ce qu'il y ait rechûte s'il paroît fini: c'est sur
ce fondement que Galien a dit, in primo aphorismo,
qu'une maladie dans laquelle il se fait quelque crise
avec des signes de crudité subsistante, doit faire
craindre une fin funeste, ou au moins un long cours
dans la maladie: au reste les signes de crudité & de
coction des différens excrémens sont rapportés dans
chacun des articles qui les concerne, ainsi voyez
Après s'être assurés par l'observation des moyens de connoître dans les maladies la crudite & la coction; après avoir étudié ce que la nature fait en conséquence de l'une ou de l'autre, les changemens utiles qu'elle opere: les anciens Medecins en conclurent, que pour imiter la conduite qu'elle tient dans le cours des maladies laissées à elles - mêmes, il ne falloit jamais entreprendre de procurer des évacuations dans le commencement des maladies; parce qu'alors la matiere morbifique étant encore crue, n'ayant pas pû être encore préparée, rendue susceptible d'être portée par l'action de la vie hors des parties dont elle empêche les fonctions, résiste à son expulsion, pendant que les humeurs saines, s'il y en a, sont emportées; ou elle ne cede, & souvent même qu'en partie, aux grands efforts qu'excite le moyen employé pour en procurer l'évacuation; ce qui diminue considérablement les forces du malade, & le jette dans l'abattement: d'où il suit tres - souvent, que la nature réduite à rester presque sans action, ne tra<pb-> [p. 566]
Il suit de tout ce qui vient d'être dit de la théorie des anciens sur la coction, considérée dans l'état de santé & dans celui de maladie, que l'exposition de ce qu'ils ont pensé à ce sujet est presque tout ce qu'on peut en dire de mieux, ou au moins de plus utile, attendu que leur doctrine est principalement fondée sur l'observation de ce qui s'opere dans l'oeconomie animale; elle n'a par conséquent pas pû être renversée & oubliée, comme tant d'autres opinions, qui n'étant que la production de l'imagination, ont été successivement détruites les unes par les autres, tandis que celle - ci s'est conservée dans son entier, pour ce qui est des principes établis d'apres les faits, & des conséquences qui peuvent en être tirées. En effet, elle n'a éprouvé de changemens que par rap<cb->
Car depuis Hippocrate & Galien jusqu'à ce temslà, tous les Medecins (en adoptant les sentimens de ces grands maîtres qui s'etoient bornés à indiquer la chaleur naturelle comme cause immédiate de tous les changemens qui se font dans les humeurs animales, tant saines que morbifiques) attribuoient la digestion des alimens dans le ventricule, à une coction faite dans ce viscere, semblable à celle qui se fait dans les cuisines. Ils comparoient l'estomac à une marmite; ils se le représontoient comme exposé à l'action du feu, fourni & entretenu par le coeur, le foie, la rate, & autres parties voisines; ils pensoient que les matieres renfermées dans ce principal organe de la digestion des alimens, étant comme détrempées, macérées par les fluides qui s'y répandent, devenoient susceptibles d'une veritable élixation par l'effet de la chaleur, ce qui sembloit leur être prouvé par les vents qui s'elevent de l'estomac pendant la digestion; ils les comparoient aux bulles qui se forment sur la surface d'un fluide qui boût: ensorte qu'ils n'admettoient d'autre agent que le feu, pour la préparation des matieres alibiles qui se fait dans ce viscere; celle qui est cont>nuée dans les autres parties des premieres voies, étoit aussi attribuée à l'action continuée de cette cause, qu'ils rendoient commune à toutes les autres élaborations d'humeurs dans le système des vaisseaux sanguins, & de tous les autres vaisseaux du corps.
Pierre Castellus, professeur de l'école de Messine,
commença à réfuter cette opinion, dans une lettre
écrite à Severinus; il lui disoit entr'autres choses à
ce sujet, que si la chaleur seule suffisoit pour la confection
du chyle, on devroit aussi pouvoir en saire
dans une marmite: mais comme on ne le peut pas,
ajoûte - t - il, il faut donc avoir recours à la fermentation
pour cette opération, &c. Bientôt après Vanhelmont attaqua avec bien plus de fo>e sentiment
de la coction des alimens opérée par >le chaleur,
dans une dissertation intitulée, calo> efficaciter non
digerit, sed excitativè. Son principal argument étoit,
que les poissons ne laissent pas de digérer les alimens
qui leur sont propres, quoique le sang des plus voraces
même d'entre ces animaux, ne soit guere plus
chaud que l'eau dans laquelle ils vivent: on trouve
même établi, que le sang des tortues est plus froid
que l'eau (Stubas, journ. in trans. phil. xxvij.). Vanhelmont objectoit d'ailleurs, que si la chaleur seule
pouvoit opérer la coction des alimens, la fievre devroit
la faciliter ultérieurement, bien loin de la troubler
& de causer du dégoùt, comme il arrive qu'elle
le fait ordinairement. Il opposoit au systeme des anciens,
bien d'autres choses de cette nature; & il ne
négligeoit rien pour détruire leur erreur, mais pour
tomber dans une autre, qui consistoit à établir que
la digestion des alimens ne peut se faire que par l'efficacité
d'un ferment acide spécifique. Galien sembloit
bien avoir conjecturé, que l'acide pouvoit contribuer
à la digestion. De usu part. lib. IV. cap. viij.
Riolan paroît aussi avoir eu la même idée. Antropograph. lib. II. cap. x. Mais ni l'un ni l'autre n'avoient
imaginé que l'acide pût agir comme dissolvant, mais
seulement en irritant les fibres des organes de la digestion.
Le ferment acide fit bientôt fortune; il fut
adopté par Sylvius Deleboé, & par toute la secte
chimique Cartésienne: mais son regne n'a pas été
bien long, l'expérience a bientôt détruit le fruit de
l'imagination; il n'a pas été possible de prouver la
fermentation dans l'estomac, on n'y a jamais trouvé
de véritable acide; au contraire, Musgrave (Trans.
phil.) y a démontré des matieres alkalescentes: Peger a prouvé, qu'on trouve constamment des matieres
pourries dans l'estomac des boeufs, à Rome;
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