ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"486"> prétendent que l'homme est porté par sa nature à former des cités ou sociétés civiles; que les familles tendent à se réunir, c'est - à - dire à résigner leurs forces & leurs volontés à une personne physique ou à un être moral; ce qui peut être vrai, mais ce qui n'est pas facile à prouver. D'autres la déduisent de la nécessité d'une société civile pour la formation & la subsistance des moindres sociétés, la conjugale, la paternelle, & l'hérile, ce qui est démontré faux par l'exemple des patriarches qui vivoient en familles libres & séparées. Il y en a qui ont recours, ou à l'indigence de la nature humaine, ou à sa crainte du mal, ou à un appétit violent des commodités de la vie, ou même à la débauche, ce qui suffiroit bien pour rassembler les familles en société civile, & pour les y maintenir. La premiere ville ou cité fut construite par Caïn. Nemrod, qui fut méchant, & qui affecta un des premiers la souveraineté, fut aussi un fondateur de cités. Nous voyons naître & s'accroître la corruption & les vices, avec la naissance & l'accroissement des cités. L'histoire & la philosophie sont donc d'accord sur leurs origines. Quelles que soient les loix de la cité où l'on s'est retiré, il faut les connoître, s'y soûmettre, & les défendre. Quand on se représente en esprit des familles s'assemblant pour former une cité, on ne conçoit entre elles que de l'égalité. Quand on se les représente assemblées, & que la résignation des volontés & des forces s'est faite, on conçoit de la subordination, non - seulement entre les familles, mais entre les individus. Il faut faire le même raisonnement par rapport aux cités entr'elles. Quand on se représente en esprit les cités isolées, on ne conçoit que de l'égalité entr'elles; quand on se les représente réunies, on conçoit la formation des empires & la subordination des cités, soit entr'elles, soit à quelque personne physique, ou à quelque être moral. Que n'en peut - on dire autant des empires! Mais c'est par cela même qu'il ne s'est point formé de combinaison des empires, que les souverains absolus restent égaux, & vivent seuls indépendans & dans l'état de nature. Le consentement qui assûre, soit la subordination des familles dans une cité, soit celle des cités dans un empire, à une personne physique ou à un être moral, est démontré par le fait; & celui qui trouble l'ordre des familles dans la cité est mauvais citoyen; & celui qui trouble l'ordre des cités dans l'empire est mauvais sujet; & celui qui trouble l'ordre des empires dans le monde est mauvais souverain. Dans un état bien ordonné, une cité peut être regardée comme une seule personne, & la réunion des cités comme une seule personne, & cette derniere personne comme soûmise à une autorité qui réside dans un individu physique ou dans un être moral souverain, à qui il appartient de veiller au bien des cités en général & en particulier.

Le mot cité désignoit anciennement un état, un peuple avec toutes ses dépendances, une république particuliere. Ce nom ne convient plus guere aujourd'hui qu'à quelques villes d'Allemagne ou des cantons Suisses.

Quoique les Gaulois ne fussent qu'une même nation, ils étoient cependant divisés en plusieurs peuples, formant presqu'autant d'états séparés que César appelle cités, civitates. Outre que chaque cité avoit ses assemblées propres, elle envoyoit encore des députés à des assemblées générales, où l'on discutoit les intérêts de plusieurs cantons. Mais la cité ou métropole, ou capitale, où se tenoit l'assemblée, s'appelloit par excellence civitas. Les Latins disoient civitas Æduorum, civitas Lingonum, civitas Senonum; & c'est sous ces noms qu'Autun, Langres, & Sens, sont désignées dans l'itinéraire d'Antonin.

Dans la suite on n'appella cité que les villes épis<cb-> copales; cette distinction ne subsiste plus guere qu'en Angleterre, où le nom de cité n'a été connu que depuis la conquête; avant cette époque toutes les villes s'appelloient bourgs. Chassane, sur la coûtume de Bourgogne, dit que la France a 104 cités, & il en donne pour raison qu'elle a 104 tant évêchés qu'archevêchés. Quand une ville s'est aggrandie avec le tems, on donne le nom de cité à l'espace qu'elle occupoit primitivement; ainsi il y a à Paris la cité & l'université; à Londres, la cité & les faubourgs; & à Prague & à Cracovie, où la ville est divisée en trois parties, la plus ancienne s'appelle cité. Le nom de cité n'est plus guere d'usage parmi nous qu'en ce dernier sens: on dit en toute autre occasion, ou ville, ou faubourg, ou bourg, ou village. Voyez ces articles.

Cité (Page 3:486)

Cité (Droit de) Jurisprud. est la qualité de citoyen ou bourgeois d'une ville, & le droit de participer aux priviléges qui sont communs à tous les citoyens de cette ville.

Chez les Romains, le droit de cité, c'est - à - dire la qualité de citoyen Romain, fut considérée comme un titre d'honneur, & devint un objet d'émulation pour les peuples voisins qui tâchoient de l'obtenir.

Il n'y eut d'abord que ceux qui étoient réellement habitans de Rome qui joüirent du titre & des priviléges de citoyens Romains. Romulus communiqua le droit de cité aux peuples qu'il avoit vaincus, qu'il amena à Rome. Ses successeurs firent la même chose, jusqu'à ce que la ville étant assez peuplée, on permit aux peuples vaincus de rester chacun dans leur ville; & cependant pour les attacher plus fortement aux Romains, on leur accorda le droit de cité ou de bourgeoisie Romaine, ensorte qu'il y eut alors deux sortes de citoyens Romains; les uns qui étoient habitans de Rome, & que l'on appelloit cives ingenui; les autres qui demeuroient dans d'autres villes, & que l'on appelloit municipes. Les consuls & ensuite les empereurs communiquerent les droits de cité à différentes villes & à différens peuples soûmis à leur domination.

La loi 7. au code de incolis, porte que le domicile de quelqu'un dans un endroit ne lui attribue que a qualité d'habitant, mais que celle de citoyen s'acquiert par la naissance, par l'affranchissement, par l'adoption, & par l'élevation à quelque place honorable.

Les droits de cité consistoient chez les Romains, 1° à joüir de la liberté; un esclave ne pouvoit être citoyen Romain, & le citoyen Romain qui tomboit dans l'esclavage perdoit les droits de cité. 2°. Les citoyens Romains n'étoient point soûmis à la puissance des magistrats en matiere criminelle: ils arrêtoient leurs poursuites en disant civis Romanus sum; ce qui tiroit son origine de la loi des douze tables, qui avoit ordonné qu'on ne pourroit décider de la vie & de l'état d'un citoyen Romain que dans les comices par centuries. 3°. Ils avoient le droit de suffrage dans les affaires de la république. 4°. Ils étoient les seuls qui eussent sur leurs enfans la puissance telle que les loix Romaines la donnent. 5°. Ils étoient aussi les seuls qui pussent exercer le sacerdoce & la magistrature, & avoient plusieurs autres priviléges.

Le droit de cité se perdoit, 1° en se faisant recevoir citoyen d'une autre ville; 2° en commettant quelque action indigne d'un citoyen Romain, pour laquelle on encouroit la grande dégradation appellée maxima capitis diminutio, qui ôtoit tout à la fois le droit de cité & la liberté. 3°. La moyenne dégradation, appellée media capitis diminutio, ôtoit aussi le droit de cité; telle étoit la peine de ceux qui étoient essacés du rolle des citoyens Romains, pour s'être fait inserire sur le rolle d'une autre ville; ceux qui étoient exilés ou relégués dans une île souffroient [p. 487] aussi cette moyenne dégradation, & conséquemment perdoient les droits de cité. Voyez l'hist. de la jurisprud. Rom. par M. Terrasson.

Parmi nous il n'y a que la naissance ou les lettres du prince qui attribuent les droits de cité. On confond quelquefois le droit de cité avec celui de bourgeoifie; cependant le droit de cité est plus étendu que celui de bourgeoisie, il comprend aussi quelquefois l'incolat, & même tous les effets civils.

En effet, celui qui est banni d'un lieu ne perd pas seulement le droit de bourgeoisie, il perd absolument les droits de cité, c'est - à - dire tous les priviléges accordés aux habitans du lieu; & si le bannissement est hors du royaume, il perd tous les effets civils.

On peut perdre les droits de cité sans perdre la liberté, comme il arrive dans celui qui est banni; mais la perte de la liberté emporte toûjours la perte des droits de cité. Voyez Furgole, des testamens, tome I. p. 198. Dunod, tr. de la mainmorte, p. 39. au mot Bourgeoisie. (A)

CITEAUX (Page 3:487)

CITEAUX, (Hist. ecelés.) ordre religieux réformé de celui de saint Benoît, & composé d'un très grand nombre de monasteres d'hommes & de filles, qu'on nomme Cisterciens, & le plus communément Bernardins & Bernardines. Voyez Bernardins.

Cet ordre commença en 1075 par vingt - un religieux du monastere de Molesme en Bourgogne, qui trouvant que la regle de saint Benoît n'étoit pas assez exactement observée dans cette maison, obtinrent, avec Robert leur abbé, permission de Hugues archevêque de Lyon & légat du saint siége, d'aller s'établir à quatre lieuës de Dijon, dans un lieu nommé Citeaux, Cistercium, à cause, dit - on, du grand nombre de citernes qu'on y avoit creusées. Othon ou Eudes I. du nom, due de Bourgogne, leur y bâtit une maison où ils entrerent en 1098, & qu'il fonda très - richement. L'évêque de Châlons donna à Robert le bâton pastoral en qualité d'abbé. L'abbé de Citeaux est général de l'ordre, & conseiller né au parlement de Bourgogne.

Les religieux de Citeaux peuvent prendre des degrés dans l'université de Paris, & ont à cet effet dans la capitale un collége pour les étudians de leurs différentes maisons, qu'on nomme le collége des Bernardins. Leur ordre a été fécond en hommes illustres; outre quatre papes qu'il a donnés à l'égiise, on compte un très - grand nombre de cardinaux, d'évêques, & d'écrivains distingués. L'ordre des Cîteaux est le premier qui ait établi des chapitres généraux par une bulle de Calixte II. en 1119. (G)

CITER (Page 3:487)

CITER, (Jurisprud.) c'est assigner quelqu'un devant un juge d'église. Voyez ci - devant Citation. (A)

CITERNE (Page 3:487)

CITERNE, s. f. (Architecture.) réservoir soûterrain d'eau de pluie, fait par art pour les divers besoins de la vie. On ne sauroit s'en passer dans plusieurs pays maritimes, dans plusieurs endroits de l'Asie, & d'autres parties du monde. Comme l'eau de toute la Hollande est saumache, toutes les maisons ont des citernes, & il y en a qui sont construites avec un soin, un goût, & une propreté admirable. Mais on dit que la plus belle citerne qu'il ait au monde, se trouve à Constantinople. Les voûtes de cette citerne portent sur deux rangs de 212 piliers chacun; ces piliers, qui ont deux piés de diametre, sont plantés circulairement, & en rayons qui tendent à celui qui est au centre.

Ainsi un des grands avantages qu'on puisse tirer de l'eau de la pluie, c'est de la ramasser dans des réservoirs soûterrains qu'on appelle citernes, où quand elle a été purifiée en passant au - travers du sable de riviere, elle se conserve plusieurs années sans se corrompre. Cette eau est ordinairement la meilleure de toutes celles dont on peut user, soit pour boire, soit pour l'employer à plusieurs usages, comme pour le blanchissage & pour les teintures, parce qu'elle n'est point mêlée d'aucun sel de la terre, comme sont presque toutes les eaux des fontaines, & même les plus estimées.

Ces citernes sont d'une très - grande utilité dans les lieux où l'on n'a point d'eau de source, ou bien lorsque toutes les eaux de puits sont mauvaises.

Dans ce cas, ceux qui sont curieux d'avoir de bonne eau, observent soigneusement de ne laisser point entter l'eau des neiges fondues dans la citerne, ni celles des pluies d'orages. Pour ce qui est des neiges fondues, on a quelque raison de les exclure des citernes, non pas à cause des sels qu'on s'imagine qui sont enfermés & mêlés avec les particules de la neige; mais seulement parce que ces neiges demeurent ordinairement plusieurs jours, & quelquefois des mois entiers sur les toits des maisons, où elles se corrompent par la fiente des oiseaux & des animaux, & plus encore par le séjour qu'elles font sur les tuiles, qui sont ordinairement fort sales.

Cependant les Hollandois parent à ces deux detniers inconvéniens, en entretenant leurs toits avec propreté, en en éloignant les animaux, & en filtrant leur eau par des pierres ou des fontaines sablées.

Ce seroit ici le lieu de parler de la construction de leurs citernes, de leur maçonnerie, de leur revêtement de marbre, de leur couverture, de leur propriété, du choix des matériaux qu'ils y employent: car ce n'est pas assez pour former une citerne, que d'avoir un lieu qui tienne bien l'eau, que les pierres & le mortier dont elles sont jointes ne puissent communiquer aucune qualité à cette eau qui y séjourne pendant un tems considérable; il faut encore de l'art dans la forme, dans la structure, dans les fondemens d'une bonne citerne; mais ce détail me meneroit trop loin, & seroit presque inintelligible sans les figures.

Comme toutefois ce n'est pas seulement dans des pays tels que la Hollande que des citernes sont nécessaires; qu'il y a quantité de villes, de lieux, de châteaux dans toute l'Europe, & dans ce royaume, où des citernes seroient d'une très - grande utilité; que d'ailleurs l'on ne peut douter par toutes les épreuves qu'on a faites, que l'eau de la pluie qui a été purifiée dans du sable de riviere, ne soit la meilleure de toutes celles qu'on puisse employer: M. de la Hire a imaginé, & a communiqué au public (Mém. de l'acad. des Sciences 1703.) les moyens suivans, pour pratiquer en tout pays des citernes qui fourniroient à chaque maison assez d'eau pour l'usage & les besoins de ceux qui y demeurent.

Premierement, il est certain qu'une maison ordinaire qui auroit en superficie 40 toises, lesquelles seroient couvertes de toits, peut ramasser chaque année 2160 piés cubiques d'eau, en prenant seulement 18 pouces pour la hauteur de ce qu'il en tombe, qui est la moindre hauteur que l'on observe communément. Mais ces 2160 piés cubiques valent 75600 pintes d'eau, à raison de 35 pintes par pié, qui est la juste mesure pour la pinte de Paris. Si l'on divise donc ce nombre de pintes par les 365 jours de l'année, on trouvera 200 pintes par jour. On voit par - là que quand il y auroit dans une maison, comme celle qu'on suppose, vingt - cinq pertonnes, elles auroient huit pintes d'eau chacune à dépenser, ce qui est plus que suffisant pour tous les usages de la vie.

Il ne faut pas négliger un avis de M. de la Hire, sur le lieu, & sur la maniere de construire ces sortes de citernes dans les maisons particulietes. On voit dans plusieurs villes de Flandres, vers les bords de

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