ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS
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seau, le maitre de l'équipage ait soin que les aiguilles
soient bien présentées & bien saisies; les ponts bien
étançonnés aux endroits où ils portent; les caliornes
bien étropées & bien garnies; & que les pontons
soient aussi garnis de caliornes, franc - funnis, barres
& cabestans.
On donne encore le nom d'aiguilles à diverses pieces
de bois posées à plomb, qui - servent à fermer les
pertuis des rivieres pour arrêter l'eau. On les leve,
lorsqu'on veut faire passer des bateaux.
On appelle aussi aiguilles des petits bateaux pêcheurs
des rivieres de Garonne & Dordogne. (Z)
Aiguille
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Aiguille (en Archit.) c'est une pyramide de charpente
établie sur la tour d'un clocher ou le comble
d'une église pour lui servir de couronnement. Une
aiguille est composée d'une plate - forme qui lui sert
d'empattement. Cette plate - forme qui porte sur la
maçonnerie de la tour est traversée par plusieurs entraits
qui se croisent au centre du clocher. Sur le
point de réunion de ces entraits est élevé verticalement
un poinçon que l'on appelle proprement aiguille.
Il est soûtenu en cette situation par plusieurs arbalêtriers
emmortoisés dans le poinçon & les entraits, &
entouré de chevrons dont toutes les extrémités supérieures
se réunissent près de son sommet. Les chevrons
sont emmortoisés par en bas dans la plate - forme,
& soûtenus dans différens points de leur longueur par
de petits entraits qui s'assemblent avec les chevrons
& le poinçon autour duquel ils sont placés. On latte
sur les chevrons, & on couvre le tout de plomb ou
d'ardoise.
Les aiguilles que l'on pratique sur les combles des
églises sont construites de la même façon, à cette différence
près, qu'elles n'ont point pour empattement
une maçonerie, mais le haut de la cage du clocher
qui est de charpente, lequel leur sert de plate - forme.
Aiguille
(Page 1:203)
Aiguille, Voyez Obélisque.
Aiguille
(Page 1:203)
Aiguille ou Poinçon, (Charpent.) piece de bois
debout dans un cintre, entretenue par deux arbalêtriers
qui sont quelquefois courbes, pour porter les
dosses d'un pont.
Aiguille
(Page 1:203)
Aiguille, s. f. petit instrument d'acier trempé,
délié, poli, & ordinairement pointu par un bout, &
percé d'une ouverture longitudinale par l'autre
bout. Je dis ordinairement, & non pas, toûjours percé
& pointu; parce qu'entre les instrumens qui
portent le nom d'aiguille, & à qui on a donné ce
nom, à cause de l'usage qu'on en fait, il y en a
qui sont pointus & non percés, d'autres qui sont
percés & non pointus, & d'autres encore qui ne
sont ni pointus ni percés. De toutes les manieres
d'attacher l'un à l'autre deux corps flexibles,
celle qui se pratique avec l'aiguille est une des
plus étendues. Aussi distingue - t - on un grand nombre
d'aiguilles différentes. On a les aiguilles à coudre
ou de tailleur, les aiguilles de chirurgie, d'artillerie,
de bonnetier ou faiseur de bas au métier,
d'horloger, de cirier, de drapier, de guainier, de
perruquier, de coëffeuse, de faiseuse de coëffe à
perruque, de piqueur d'étuis, tabatieres & autres
semblables ouvrages, de sellier, d'ouvrier en soie,
de brodeur, de tapissier, de chandelier, d'embaleur,
à matelas, à empointer, à tricoter, à enfiler,
à presser, à brocher, à relier, à nater, à boussole
ou aimantée, &c. sans compter les machines
qu'on appelle du nom d'aiguille, par le rapport
de leur forme avec celle de l'aiguille à coudre.
Voyez Aiguille, Architecture.
Aiguille de tailleur ou à coudre. Cette aiguille qui
semble avoir donné son nom à toutes les autres
sortes, se fabrique de la maniere suivante. Ayez
de l'acier d'Allemagne ou de Hongrie; mais surtout
de Hongrie, car celui d'Allemagne commence
à dégénérer. Voyez l'article Acier. Faites pas<cb->
ser cet acier soit au charbon de terre, soit au
charbon de bois, selon l'endroit où vous fabriquerez.
Mettez - le chaud sous le martinet pour lui
ôter ses angles, l'étirer & l'arrondir. Lorsqu'il sera
fort étiré & qu'il ne pourra plus soûtenir le coup
du martinet, continuez de l'étirer & de l'arrondir
au marteau. Ayez une filiere à différens trous; faites
passer ce fil par un des grands trous de votre
filiere, & trifilez - le. Ce premier trifilage s'appelle
dégrossir. Quant aux machines dont on se sert pour
trifiler. Voyez les articles épinglier & trifilerie.
Après le premier trifilage oû le dégrossi, donnez un
second trifilage par un plus petit trou de votre filiere,
après avoir fait chauffer votre fil; puis un
troisieme trifilage par un troisieme trou plus petit
que le second. Continuez ainsi jusqu'à ce que votre
fil soit réduit par ces trifilages successifs au degré
de finesse qu'exige la sorte d'aiguilles que vous
voulez fabriquer. Mais observez deux choses, c'est
qu'il semble que la facilité du trifilage demande un
acier ductile & doux, & que l'usage de l'aiguille
semble demander un acier fin, & par conséquent
très - cassant. C'est à l'ouvrier à choisir entre tous les
aciers, celui où ces deux qualités sont combinées
de maniere que son fil se tire bien, & que les
aiguilles aient la pointe fine, sans être cassantes.
Mais comme il y a peu d'ouvriers en général qui
entendent assez bien leurs intérêts, pour ne rien épargner quand il s'agit de rendre leur ouvrage excellent;
il n'y a guere d'aiguilliers qui ne disent que
plus on casiera d'aiguilles, plus ils en vendront; &
qui ne les fassent de l'acier le plus fin, d'autant plus
qu'ils ont répandu le préjugé que les bonnes aiguilles
devoient casser. Les bonnes aiguilles cependant
ne doivent être ni molles ni cassantes. Graissez
votre fil de lard, à chaque trifilage, il en sera moins
revêche & plus docile à passer par les trous de la
filiere.
Lorsque l'acier est suffisamment trifilé, on le coupe
par brins à - peu - près d'égale longueur; un ouvrier
prend de ces brins autant qu'il en peut tenir les uns
contre les autres étendus & paralleles, de la main
gauche. Voyez cet ouvrier aiguillier Pl. I. fig. 1. a. II
est assis devant un banc. Ce banc est armé d'un anneau
fixe à son extrémité c. Il est échancré circulairement
à son extrémité b. L'anneau de l'extrémité
c reçoit le bout long, de la branche d'une cisaille
ou force d. A l'échancrure circulaire b, est
ajusté un seau rond; l'ouvrier tient l'autre branche
de la cisaille de la main droite a, & coupe les
brins de fil d'acier qui tombent dans le seau. Ces
bouts de fil d'acier coupés passent entre les mains
d'un second ouvrier qui les palme. Palmer les aiguilles,
c'est les prendre quatre à quatre, plus ou
moins, de la main gauche, par le bout qui doit
faire la pointe, placé entre le pouce & l'intervalle
de la troisieme & de la seconde jointure de l'index,
de les tenir divergentes, & d'en applatir sur l'enclume
l'autre bout. Ce bout fera le cul de l'aiguille.
Voyez fig. 4. un ouvrier qui palme: Voyez la
même manoeuvre, même Planche figure 16. k est la
main de l'ouvrier palmeur: l sont les aiguilles à
palmer sur l'enclumeau. On conçoit aisément que
ce petit applatissement fera de la place à la pointe
de l'instrument qui doit percer l'aiguille: mais pour
faciliter encore cette manoeuvre, on tache d'amollir.
la matiere. Pour cet effet, on passe toutes les aiguilles
palmées par le feu, on les laisse refroidir;
& un autre ouvrier tel que celui qu'on voit fig. 2.
assis devant un billot à trois piés d, prend un poinçon
à percer, l'applique sur une des faces applaties
de l'aiguille, & frappe sur le poinçon; il en fait autant
à l'autre face applatie, & l'aiguille est percée.
On voit cette manoeuvre séparée, même Planche, fi<pb->
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gure 15. n est la main de l'ouvrier armée du marteau
à percer; m est l'autre main avec le poinçon.
On apperçoit sous le poinçon l'aiguille, & l'aiguille
est posée sur l'enclumeau. On transporte les aiguilles
percées sur un bloc de plomb, où un ouvrier
qu'on voit fig. 3. ôte à l'aide d'un autre poinçon
le petit morceau d'acier qui est resté dans l'oeil de
l'aiguille, & qui le bouche. Cet ouvrier s'appelle
le troqueur; & sa manoeuvre, troquer les aiguilles. Les
aiguilles troquées passent entre les mains d'un ouvrier
qui pratique à la lime cette petite rainure
qu'on apperçoit des deux côtés du trou & dans sa
direction; c'est ce qu'on appelle les évider. Quand les
aiguilles sont évidées; & que la canelle ou la rainure
ou la railure est faite, & le cul de l'aiguille arrondi,
ce qui est encore de l'affaire de l'évideur; on commence
à former la pointe à la lime; ce qui s'appelle
pointer l'aiguille; & de la même manoeuvre,
on en forme le corps, ce qui s'appelle dresser l'aiguille. Quand les aiguilles sont pointées & dressées,
on les range sur un fer long, plat, étroit & courbé
par le bout. Voyez ce fer en p, fig. 13. avec la
pince dont on prend ce fer, quand il est chaud.
Quand il est tout couvert, on fait rougir sur ce
fer les aiguilles, à un feu de charbon. Rouges on
les faits tomber dans un bassin d'eau froide pour les
tremper. C'est cette opération qu'on voit même Pl.
fig. 5. c'est la plus délicate de toutes. C'est d'elle
que dépend toute la qualité de l'aiguille. Trop de
chaleur brûle l'aiguille; trop peu la laisse molle.
Il n'y a point de regle à donner la - dessus. C'est l'expérience
qui forme l'oeil de l'ouvrier, & qui lui
fait reconnoître à la couleur de l'aiguille quand il
est temps de la tremper. Après la trempe, se fait le
recuit. Pour recuire les aiguilles, on les met dans
une poele de fer, sur un feu plus ou moins fort,
selon que les aiguilles sont plus ou moins fortes.
L'effet du recuit, est de les empêcher de se casser facilement.
Il faut encore avoir ici grande attention
au degré de la chaleur. Trop de chaleur les rend
molles & détruit la trempe; trop peu, les laisse inflexibles
& cassantes. Il arrive aux aiguilles dans
la trempe, où elles sont jettées dans l'eau fraîche,
de se courber, de se tordre & de se défigurer. C'est
pour les redresser & les restituer dans leur premier
état, qu'on les a fait recuire. On les redresse avec
le marteau; cette manoeuvre s'appelle dresser les
aiguilles de marteau. Il s'agit ensuite de les polir.
Pour cet effet, on en prend douze à quinze
mille qu'on range en petits tas, les uns auprès des
autres, sur un morceau de treillis neuf couvert de
poudre d'émeri. Quand elles sont ainsi arrangées,
on répand dessus de la poudre d'émeri; on arrose
l'émeri d'huile; on roule le treillis; on en fait un
espece de bourse oblongue, en le liant fortement
par les deux bouts, & le serrant par tout avec des
cordes. Voyez fig. 24. les aiguilles rangées sur le
treillis, & fig. 12. le treillis roulé & mis en bourse.
On prend cette bourse ou ce rouleau; on le porte
sur la table à polir; on place dessus une planche
épaisse, chargée d'un poids & suspendue par deux
cordes. Un ou deux ouvriers font aller & venir
cette charge sur le rouleau ou la bourse, pendant
un jour & demi & même deux jours de suite. Par ce
moyen, les aiguilles enduites d'émeri sont continuellement
frottées les unes contre les autres selon
leur longueur, & se polissent insensiblement. V. cette
manoeuvre même Pl. fig. 6. L est la table; M est la
planche; n est le poids dont elle est chargée; o o les
cordes qui tiennent le tout suspendu; p l'ouvrier.
On peut polir de plusieurs manieres; à deux, ou
à un: à deux, le poids est suspendu par quatre cordes
égales, & la table est horisontale: à un, il n'y
a que deux cordes & la table est inclinée. L'ou<cb->
vrier tire la chargè, & la laisse ensuite aller. E>
Allemagne, on fait aller ces machines ou d'autres
semblables par des moulins à eau. La machine
qu'on voit figure 6 s'appelle polissoire; & son effet
est le poliment. Lorsque les aiguilles sont polies,
on délie les deux extrémités du rouleau, s'il n'y
en avoit qu'un sous la polissoire; car on peut
très - bien y en mettre plusieurs. Le rouleau délié;
on jette les aiguilles dans de l'eau chaude & du
savon; ce mêlange en détache le camboui formé
d'huile, de parties d'acier & de parties d'émeri
dont elles sont enduites; & cette manoeuvre s'appelle
lessive. Lorsque les aiguilles sont lessivées; on
prend du son humide, qu'on étale; on répand les
aiguilles encore humides sur ce son. Elles s'en couvrent,
en les remuant un peu. Quand elles en sont
chargées, on les jette avec ce son dans une boëte
ronde qui est suspendue en l'air par une corde &
qu'on agite jusqu'à ce qu'on juge que le son, & les
aiguilles sont secs & sans humidité. C'est ce qu'on
entend par vanner les aiguilles. Mais il est plus commode
d'avoir pour van, une machine telle qu'on
la voit fig. 8. même Planche. C'est une boîte a b
quarrée, traversée par un axe, à une des extrémités
duquel est une manivelle qui met en mouvement
la boîte, avec le son & les aiguilles qu'elle
contient. Après que les aiguilles sont nettoyées par
le van, où on a eu le soin de les faire passer par
deux ou trois sons différens, on les en tire, en ouvrant
la porte b du van qui est tenue barrée. On les met
dans des vases de bois. On les trie. On sépare
les bonnes des mauvaises; car on se doute bien
qu'il y en a un bon nombre dont la pointe ou le
cul s'est cassé sous la polissoire & dans le van. Ce
triage, & l'action de leur mettre à toutes la pointe
du même côté, s'appelle détourner les aiguilles: il
n'est plus question que de les empointer, pour les
achever. C'est ce qu'un ouvrier placé comme dans
la fig. 7. exécute sur une pierre d'émeri qu'il fait
tourner comme on voit même fig. tenant la manivelle
de la roue d'une main, & roulant la pointe
de l'aiguille sur la pierre d'émeri qui est en mouvement.
Voilà enfin le travail des aiguilles achevé.
La derniere manoeuvre que nous venons de décrire
s'appelle l'affinage.
Lorsque les aiguilles sont affinées, on les essuie
avec des linges mollets, secs, & plûtôt gras & huilés
qu'humides. On en fait des comptes de deux cens
cinquante qu'on empaquete dans de petits morceaux
de papier bleu que l'on plie proprement. De ces petits
paquets on en forme de plus gros qui contiennent
jusqu'à cinquante milliers d'aiguilles de différentes
qualités & grosseurs; on les distingue par numero.
Celles du numero 1 sont les plus grosses; les aiguilles
vont en diminuant de grosseur jusqu'au numero
22, qui marque les plus petites. Les 50 milliers sont
distribués en treize paquets, douze de 4 milliers,
& un paquet de deux milliers. Le paquet de quatre
milliers est distribué en quatre paquets d'un millier,
& le paquet d'un millier en quatre paquets de deux
cens cinquante. Chaque paquet porte le nom & la
marque de l'ouvrier. Le paquet de deux cens cinquante
est en gros papier bleu; les autrès en papier
blanc; tous sont encore couverts de gros papiers
blancs en six ou sept doubles, qui font leur enveloppe
commune: cette enveloppe est bien ficelée; on la
recouvre de deux vessies de cochon qu'on ficelle, &
les vessies de cochon, d'une grosse toile d'emballage.
Toutes ces précautions sont nécessaires, si l'on ne
veut pas que les aiguilles se rouillent. Le paquet tel
que nous venons de le former, est marqué à l'extérieur
avec de l'encre, des différens numeros des aiguilles
qui y sont contenues.
Ce sont les Merciers & les Aiguilliers - Alèniers qui
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