ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"450"> faut, ma folie ne seroit - elle pas à l'épreuve de toute la ciguë, si je n'étois persuadé qu'il vaut mieux dormir que de faire des vers?»

Pline, liv. XIV. ch. xxij. vante la ciguë pour prévenir l'yvresse, & prétend qu'on en peut tirer plusieurs remedes. Lescale rapporte quelque part, que voyageant en Lombardie, on lui servit de la salade où il y avoit de la ciguë, ce qui l'étonna fort; mais qu'il revint de sa surprise quand il sçut que les gens du pays en mangeoient, & qu'ils n'en étoient point incommodés. Les chevres en broutent la racine, & les oiseaux en mangent la graine sans in convénient; mais les effets des plantes sur les animaux ne concluent rien pour l'homme, & toutes les autorités qu'on vient de citer ne sauroient contre - balancer le poids de celles qu'on leur oppose. Il reste toûjours certain, par le grand nombre d'exemples funestes rapportés dans les transactions philosophiques, dans les Mémoires de l'académie des Sciences, dans Wepfer, & ailleurs, que toutes les especes de ciguës sont venimeuses.

Nous l'employons extérieurement. On doit donc se contenter de s'en servir pour l'application extérieure, & de cette maniere on en fait usage avec succès. Ses feuilles sont adoucissantes & résolutives; bouillies avec du lait on les applique sur les hémorroïdes, & sur les endroits où la goutte se fait sentir. Le cataplasme de feuilles de ciguë pilées avec des limaçons, & malaxées avec les quatre farines résolutives, est vanté pour l'inflammation des testicules, les douleurs de goutte & de sciatique. Henri d'Heer, observ. 7. les recommande bouillies dans l'eau de fleurs de sureau avec un peu de camfre, pour l'inflammation & la tumeur de la verge qui vient d'échauffement. En général les feuilles & les racines sont estimées pour amollir les tumeurs skirrheuses des parties externes & des visceres du bas - ventre, surtout du foie & de la rate. C'est dans le même but que nos Apothicaires préparent une emplâtre de ciguë, qui passe pour un bon fondant. On employe aussi la ciguë dans l'emplâtre diabotanum de Blondel.

Description de la petite ciguë. Il y a une autre espece de ciguë, cicuta minor offic. qu'on substitue à la précédente dans les boutiques pour l'usage externe; & elle ne differe de la premiere qu'en ce qu'elle est plus petite, que sa tige n'est point marbrée de taches rougeâtres, & que son odeur n'est point aussi forte; du reste elle a les mêmes propriétés, mais moindres. On a nommé cette derniere espece de ciguë, le persil des fous, par la grande ressemblance de ses feuilles à celles du persil; ressemblance qui a trompé quelques personnes, & les a presqu'empoisonnées.

Observation sur la coupe de ciguë que but Socrate. Lorsque le bourreau d'Athenes vint présenter à Socrate la coupe de suc de ciguë, il l'avertit de ne point parler, pour que le poison qu'il lui donnoit opérât plus promptement. On ne voit pas comment les effets du poison pouvoient être accélérés par le silence de la personne qui le prenoit: mais que ce fût un fait ou un préjugé, le bourreau n'agissoit ainsi que par avarice, & dans la crainte d'être obligé, suivant la coûtume, de fournir à ses dépens une nouvelle dose de ce breuvage; car Plutarque remarque dans la vie de Phocion, tom. VI. de Dacier, p. 409. que comme tous ses amis eurent bû de la ciguë, & qu'il n'en restoit plus pour ce grand homme, l'exécuteur dit qu'il n'en broyeroit pas davantage, si on ne lui donnoit douze drachmes (aujourd'hui, 1752, environ neuf livres dix sous de notre monnoie), qui étoit le prix que chaque dose coûtoit: alors Phocion voulant éviter tout retard, fit remettre cette somme à l'exécuteur; « puisque, ditil, dans Athenes il faut tout acheter, jusqu'à sa mort ». Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Emplâtre de ciguë de la pharmacopée de Paris, édition de 1732. . poix - résine, 28 onces; cire jaune, 20 onces; poix blanche, 14 onces; huile de câpres, 4 onces; de la ciguë écrasée, 4 livres. Faites cuire le tout selon l'art jusqu'à la consommation de l'humidité; passez par un linge, en exprimant fortement l'expression; étant un peu refroidie, délayez - y une livre de gomme ammoniac, auparavant dissoute dans du vinaigre scillitique & du suc de ciguë, & à laquelle on aura donné par la dessiccation une consistance emplastrique; ce qui étant exactement mêlé, l'emplâtre sera fait.

Cigue aquatique, (Page 3:450)

Cigue aquatique, (Botan.) cicuta aquatica vel palustris, C. B. phellandrium off.

Cette espece de ciguë pousse une tige épaisse, creuse, cannelée, & pleine de noeuds, moins haute que celle de la ciguë ordinaire, divisée en plusieurs branches d'où sortent des feuilles ailées, plus minces & plus tendres que celles de la ciguë. Ses fleurs naissent en parasols, & sont fort petites à proportion de la plante; elles sont blanches, avec un oeil rougeâtre. Sa racine est composée d'un grand nombre de fibres, qui partent des noeuds qui se trouvent au bas de la tige. La ciguë aquatique croît dans les fossés & les étangs, & fleurit au mois de Juin. Elle passe pour être de la même nature & avoir les mêmes qualités que la ciguë ordinaire; mais on l'estime beaucoup plus venimeuse, ce qui fait même qu'on l'employe rarement dans les boutiques.

Les observations fournies par le hasard ont justifié que ses effets sont mortels, & quelquefois promptement; du moins M. Jaugeon a rapporté à l'Académie des Sciences, que trois soldats Allemands partis d'Utrecht au commencement du printems de 1714, moururent subitement tous trois en moins de demi-heure, pour avoir mangé de la cicutaria palustris, qu'ils prenoient pour le calamus aromaticus, propre à fortifier l'estomac. Il y a en effet une espece de phellandrium ou ciguë aquatique, à feuille d'ache sauvage, qui est odorante, aromatique, & qui tromperoit des gens plus habiles que ne le sont communément des soldats. On trouva à l'un de ceux - ci les membranes de l'estomac percées d'outre en outre, & aux deux autres seulement corrodées. Dans tous l'estomac étoit plein d'un écume blanchâtre; le reste des visceres du bas - ventre peu altérés; les poumons & les muscles du coeur, flasques & flétris; & les vaisseaux pleins d'un sang tout fluide. Wepfer (Jean Jacques) rapporte aussi plusieurs exemples, moins prompts à la vérité, mais également funestes, des effets de cette plante.

Comme nous avons de cet auteur un traité complet sur cette matiere, imprimé d'abord à Schaffouze en 1679, in - 4°. à Leyde en 1733, in - 8°. & qui est entre les mains de tout le monde; nous nous dispenserons d'entrer dans de plus grands détails. V. Poison. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Nous ne croyons pourtant pas pouvoir nous dispenser d'indiquer les secours les plus efficaces contre ce poison, d'après le traitement du même Wepfer, dont le succès a été confirmé par plusieurs expériences postérieures.

Cet auteur recommande d'abord d'évacuer le poison qui se trouve dans l'estomac par la voie la plus abregée & la plus sûre, c'est - à - dire par le vomissement, qu'il ne trouve pas contre - indiqué dans ce cas par une espece d'épilepsie, qui est un symptome assez ordinaire du venin de la ciguë.

Lorsqu'on a chassé la ciguë des premieres voies autant qu'il est possible, il ne s'agit plus que de remédier aux impressions qu'elle a pû faire sur ces parties, & à masquer l'action de quelques restes de ce poison qui peuvent avoir échappé au vomissement.

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On remplit cette double indication par tous les adoucissans gras & huileux, comme le beurre, l'huile d'olive, celle d'amandes douces, le bouilion gras, &c. le laitage & les émulsions, les farineux délayés dans de l'eau, comme la creme de ris, l'orge mondé, &c.

Les alexipharmaques, les cordiaux, le mouvement, & les autres ressources contre la coagulation des humeurs, sont des secours aussi peu réels que la cause qui les a fait imaginer; le venin de la ciguë réputé froid & coagulant presque jusqu'au tems de Wepfer, a été enfin reconnu pour irritant & caustique, & il est rentré par conséquent dans la classe de ceux qu'on ne combat qu'en prévenant ou en masquant leur action sur les premieres voies. (b)

CILIAIRES (Page 3:451)

CILIAIRES, adj. en Anatomie, se dit de différentes parties de l'oeil; glandes ciliaires, procès ciliaires, ligament ciliaire, les nerfs ciliaires. Voyez il.

Les glandes ciliaires sont des grains situés dans le tissu cellulaire des paupieres; Meibomius décrivit leurs conduits en 1666, trois ans après les avoir découverts.

Procès ciliaires, est le nom que Ruisch a donné aux fibres de l'uvée. Voyez Uvée. (L)

Ciliaire, (Page 3:451)

Ciliaire, (ligament) appartient à l'oeil, & a été ainsi appellé à cause de la ressemblance qu'il a avec les cils ou poils des paupieres. Voyez Ligament.

Des fibres un peu épaisses partent de la choroïde presque une ligne plus en - arriere que le ceintre orbiculociliaire, derriere l'uvée, au commencement de laquelle elle a sa partie moyenne. Elles vont de toutes parts transversalement à la circonsérence du crystallin, blanches quand on a lavé leur couleur, mêlées pareillement de tuyaux grands & vermiformes, faisant un arc qui s'accommode au crystallin; convexes en - devant, couchées sur l'humeur vitrée, ensuite sur le crystallin, à la partie antétieure duquel elles s'inserent au - dedans du plus grand cercle; tenant manisestement dans le boeuf à la capsule vitrée, à celle du crystallin, & à la rétine, plus légerement à la vitrée dans l'homme.

Descartes a dit, dans sa dioptrique, que la contraction des ligamens du crystallin lui donnoit un mouvement par lequel il devenoit plus convexe pour voir; dioptr. ch. iij. & il a confirmé cette opinion par quelques expériences. Grew, dans sa cosmolog. sacr. Collins. p. 906. Parisinus, disect. de l'ourse, p. m. 79. Bidloo, de oculis, qui assirme, p. 30. qu on voit visiblement ce changement de figure dans les oiseaux, ont suivi ce grand philosophe. Bourdelot, suivant Denis, consér. 4. dit que la pupille s'étant retrécie à cause de la proximité des objets, le crystallin prenoit plus de convexité en son milieu pour mieux voir les objets trop proches. Cependant. Molinetti, p. 147. Brisseau, p. 77. Bohn, p. 366. veulent au contraire que l'action du corps ciliaire soit d'applatir le crystallin. D. Phelippeaux, suivant Stenon, can. carch. diss. p. 104. Wintringham, pag. 301. & en dernier lieu Santorini, ont embrassé le même système; ce dernier ayant vû des stries sur le crystallin d'un aveugle, & comme des vestiges du ligament ciliaire. ch. jv. n. 2.

Porterfields, l. c. p. 187. & suiv. conteste ce changement de la figure du crystallin: en effet l'extrème mollesse du ligament n'est pas faite pour surpasser la structure dense & élastique de la capsule: de plus, on peut objecter l'arc que font ces ligamens ou leur direction, qui fait au crystallin un angle fort obtus; ce qui ne peut favoriser le changement. Hall. (L)

CILICE (Page 3:451)

CILICE, s. m. (Hist. anc. & mod.) vêtement fait de poils de chevre ou de bouc, dont l'usage est venu des anciens Ciliciens qui portoient de ces sortes de robes, particulierement les soldats & les matelots.

Nec minus interea barbas, incanaque menta, Cinyphii tondent hirci, setasque comantes, Usum in castrorum, & miseris velamina nautis. Géorg. liv. III.

Peut - être le vrai sens de ces vers est - il qu'anciennement les soldats & les matelots se servoient de ces tissus de poil de chevre pour en faire des tentes & des voiles; & c'est ce que semble insinuer Asconius Pedianus, dans une remarque sur la troisieme verrine, où - il dit: Cilicia tenta in castrorum usum atque nautarum. (G)

CILICIE (Page 3:451)

* CILICIE, s. f. (Geog. anc & mod.) pays de l'Asie mineure, borné au nord - ouest par une longue chaîne du mont Taurus; au nord par la seconde Cappadoce & la seconde Arméníe; à l'orient par la Comagene; au midi par la Syrie & la mer Méditerranée; & au couchant par la Pamphilie. On la divisoit en champêtre & en montagneuse; la montagneuse s'appelloit chez les Grecs Trachotis, & ses habitans Trachéotes, & on la partageoit en Sélénide & en Cétide. Il paroît par les villes que cette contrée comprenoit, qu'elle étoit très - peuplée. La Cilicie fait maintenant partie de la Caramanie. Les Ciliciens avoient inventé une forte d'étosse de poil de chevre, dont on faisoit des habits pour les matelots & les soldats. Comme elle étoit grossiere & d'une couleur brune, les Hébreux s'en servoient dans le deuil & dans la disgrace. Ils étorent différens de ceux que l'esprit de pénitence a inventés depuis, & qui sont tout de crin. Aristote dit qu'en Cilicie on tondoit les chevres, comme on tond ailleurs les brebis.

Cilicie, (Page 3:451)

Cilicie, (terre de) Hist. nat. c'est suivant Théophraste, une espece de terre qui se trouvoit en Cilicie. Cet auteur dit qu'en la faisant bouillir dans de l'eau elle devenoit v squeuse & tenace: on s'en servoit pour en enduire les seps de vigne, & les garantir des vers & des autres insectes. M. Hill pense avec raison que cette terre étoit une terre bitumineuse, d'une consistance solide, que la chaleur de l'eau bouillante rendoit assez molle pour pouvoir s'étendre, & qui par sa qualité tenace & visqueuse arrêtoit les insectes, ou les chassoit par son odeur forte. ( - )

CILINDRE (Page 3:451)

CILINDRE & CILINDRIQUE, voyez Cylindre & Cylindrique.

CILLEMENT (Page 3:451)

CILLEMENT, s. m. (Anat. Physiol.) en Latin nictatio, mouvement vif, alternatif, & synchronique des paupieres.

Elles ont, comme on sait, un très - prompt mouvement, & la paupiere supérieure dans l'homme en a beaucoup plus que la paupiere insérieure. Ce mouvement des paupieres se fait quelquefois volontairement, souvent aussi sans y penser, & toûjours avec une extrème vitesse.

Les cillemens qui arrivent de moment en moment, dans les uns plus, dans les autres moins, se font à la paupiere supérieure alternativement par le releveur propre, & par la portion palpébrale supérieure du muscle orbiculaire: ils se font aussi alternativement & en même tems à la paupiere inférieure, par la portion palpébralc inférieure du muscle orbiculaire, mais très - peu, à cause du petit nombre des fibres palpébrales inférieures.

On voit déjà qu'il y a deux muscles qui servent au mouvement des paupieres; mais pour mieux entendre leurs cillemens, il faut se rappeller la structure de ces deux voiles qui sont tendus sur les yeux: or les deux paupieres étant formées de membranes minces, presque transparentes, à petits plis, très vasculeuses, remplies d'une grande quantité de papilles nerveuses à leur surface interne, toùjours unies, & bordées d'un large cartilage en forme d'arc, on comprend qu'elles peuvent se toucher mutuellement, s'éloigner ensuite, s'abaisser & se rouvrir al<pb->

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