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Nous voudrions bien admettre avec Boyle que les conditions essentielles pour la fixité, sont la grosseur des parties constituantes du corps fixe, la gravité, ou la solidité de ces corpuscules, & enfin leur inaptitude à l'avolation prise de leur figure rameuse, crochue, courbe, irréguliere en un mot, & s'opposant à ce qu'elles puissent se débarasser les unes des autres, comme étant entrelacées, &c. & faire dépendre la volatilité des qualités contraires, &c. mais les faits dérangent toutes ces idées: des corps acquierent de la volatilité en acquérant de la grosseur, comme la lune cornée. Que si Boyle me dit, & il n'y manquera pas, que l'acide marin lui donne des aîles, en étendant sa surface, je lui répondrai que cela même devroit nuire à la troisieme condition, en augmentant l'irrégularité de figure propre à entrelacer, &c. Des corps pesans ou solides sont volatils, le mercure; des corps legers ou rares sont fixes, l'alkali fixe, &c. En un mot, quant à ces figures, ces entrelacemens de parties, ces spires si cheres à Boyle, & si ingénieuses, il faut l'avoüer, nous les regrettons réellement; mais les phénomenes des mixtions, des précipitations, des raréfactions, des coagulations, &c. nous démontrent trop sensiblement que toute union de petits corps ne se fait que par juxtaposition, pour que nous puissions nous accommoder de ces méchanismes purement imaginaires. Mais la doctrine de Newton, postérieure sur ce point à celle de Becher, comme je l'observe ailleurs, les a décrédités assez généralement, pour qu'il soit inutile d'insister sur leur réfutation. En un mot, les actions méchaniques dont il s'agit ici, sont mises en jeu sans fondement; nous osons même défier qu'on nous présente une explication d'un phénomene chimique fondée sur les lois méchaniques connues dont nous ne démontrions le faux ou le gratuit.
Il est clair que deux sciences qui considerent des objets sous deux aspects si différens, doivent non seulement fournir des connoissances particulieres, distinctes, mais même avoir chacune un certain nombre de notions composées, & une certaine maniere générale d'envisager & de traiter ses sujets, qui leur donnera un langage, une méthode, & des moyens différens. Le Physicien verra des masses, des forces, des qualités; le chimiste verra des petits corps, des rapports, des principes. Le premier calculera rigoureusement, il réduira à des théories des effets sensibles & des forces, c'est - à - dire, qu'il soûmettra ces effets & ces forces au calcul (car c'est - là la théorie du physicien moderne) & il établira des loix que les expériences confirmeront à - peu - près; je dis àpeu - près, parce que les Mathématiciens conviennent eux - mêmes que l'exercice des forces qu'ils calculent suppose toûjours un modo nihil obstet, & que le cas où rien ne s'oppose n'existe jamais dans la nature. Les théories du second seront vagues & d'approximation; ce seront des expositions claires de la nature, & des
Tant que le Chimiste & le Physicien philosopheront chacun à leur maniere sur leurs objets respectifs, qu'ils les analyseront, les compareront; les raprocheront, les composeront, & que sur leurs objets communs ce sera celui qui aura le plus vû qui donnera le ton, tout ira bien.
Mais si quelqu'un confond tout ce que nous avons distingué, soit parce qu'il n'a pas soupçonné l'existence & la nécessité de cette distinction, à cause de sa vûe courte, ou parce qu'il l'a rejettée à force de tête: si le chimiste se mêle des objets physiques, ne sachant que la Chimie, ou si le physicien propose des loix à la Chimie, ne connoissant que les phénomenes physiques: si l'un applique les loix des masses aux affections des petits corps, ou si l'autre transporte les affections des petits corps aux actions des masses: si l'on traite more chimico les choses physiques, & les chimiques more physico: si l'on veut dissoudre un sel avec un coin, ou faire tourner un moulin par un menstrue, tout ira mal.
Le simple chimiste, ou le simple physicien a - t - il embrassé lui seul la science générale des corps, & a - t - il prétendu assujettir à ses notions particulieres, des propriétés communes? la science générale sera défectueuse & mauvaise; lorsqu'il lui arrivera de descendre par la synthese, de ses principes qu'il prendra pour généraux, & pour des données sur lesquelles il peut compter, il faudra nécessairement qu'il s'égare. Or toutes les Métahysiques Physiques, ou pour me servir de l'expression de Wolf, toutes les Cosmologies que je connois sont des ouvrages de Physiciens. Quelques - unes marqueront, si l'on veut, les plus grands efforts du génie; je consens même qu'il y en ait qu'il soit impossible de détruire & de réfuter, parce que ce sont des enchaînemens de notions abstraites & de définitions nominales, que le métaphysicien a déterminées & circonscrites à sa fantaisie; mais la science générale des propriétés des corps n'en existera pas pour cela plus solide & plus réelle; quand je dis la science générale des corps, j'entends des corps physiques, tels que nous les observons dans la nature, avec toutes leurs conditions, & non des corps dépouillés, & presque anéantis par des abstractions.
Nous pouvons assûrer de la plûpart des prétendues vérités générales qui servent de bases aux systèmes généraux subsistans, sans en excepter les fameux principes de Leibnitz, ce que M. Merian a dit du Spinosisme dans un mémoire sur l'apperception, hist. de l'acad. de Prusse 1749; que c'est dans le passage de l'abstraction à la réalité que ces vérités trouvent leur terme fatal, & qu'il n'y a qu'à tenter ce passage pour voir s'écrouler de soi - même le colosse qu'elles soûtenoient.
C'est des différentes sources que nous venons d'indiquer, que sont >orties mille erreurs, à propos desquelles nous pourrions dire à ceux qui les avancent [p. 417]
La Chimie est une science qui s'occupe des séparations & des unions des principes constituans des corps, soit opérées par la nature, soit opérées par l'art, dans la vûe de découvrir les qualités de ces corps, ou de les rendre propres à divers usages.
Les objets particuliers de la Chimie sont tous les phénomenes, soit naturels, soit artificiels, qui dépendent des séparations & des unions des principes des corps. Les naturels sont la maturation des fruits, la formation des gommes, des extraits, des résines, des sels végétaux, &c. l'élaboration & les diverses altérations des alimens des animaux, & de leurs diverses humeurs; la génération des métaux, des pierres, des crystallisations naturelles, des sels fossiles, du soufre, des bitumes, &c. l'imprégnation & la chaleur des eaux minérales, l'inflammation des volcans, la nature de la foudre & des autres feux allumés dans l'atmosphere, &c. en un mot tous les phénomenes de la Botanique physique, excepté ceux qui appartiennent à l'organisation des végétaux; tous ceux qui appartiennent à cette branche de l'oeconomie animale qui est fondée sur les affections des humeurs; tous ceux qui constituent l'oeconomie ninerale que Becher a appellée physique soûterraine, ou qui sont dûs aux changemens chimiques survenus dans ces corps; & enfin ceux que présentent dans l'atmosphere certaines matieres détachées des végétaux, des animaux, ou des minéraux.
Les phénomenes chimiques artificiels sont tous ceux qui nous sont présentés par les opérations chimiques, & ceux qui constituent la théorie de ces opérations elles - mêmes.
Nous appellons opérations, tous les moyens particuliers employés à faire subir aux sujets de l'art les deux grands changemens enoncés dans la définition de la Chimie, c'est - à - dire à effectuer des séparations & des unions.
Ces opérations ou sont fondamentales & essentiellement
chimiques, ou elles sont simplement préparatoires
& méchaniques. Voyez
Les deux effets généraux, primitifs, & immédiats de toutes les opérations chimiques, savoir la séparation & l'union des principes, sont plus connus dans l'art sous le nom de diacrese & de syncrese. La premiere est appellée aussi par plusieurs chimistes analyse, décomposition, corruption, solution, destruction; & la seconde, mixtion, génération, synthese, combinaison, coagulation, & même confusion par quelques-uns: chacune de ces expressions est prise dans un sens plus ou moins général par divers auteurs, & même en différens sens par les mêmes. Le mot de mixtion, dans la doctrine de Becher & de Stahl, si<cb->
Les noms les plus usités parmi les Chimistes François, sont ceux d'analyse & de décomposition pour le premier effet général, & ceux de combinaison & de mixtion pour le deuxieme.
Il est très - peu d'opérations chimiques qui ne produisent
qu'un de ces effets, ou qui appartiennent
exactement à la diacrese ou à la syncrese: la plûpart
au contraire sont mixtes, c'est - à - dire qu'elles
produisent des séparations & des unions qui sont entre
elles dans un rapport de cause & d'effet. Voyez
Les opérations chimiques s'exécutent par deux agens généraux, la chaleur & les menstrues.
L'action de ces deux causes se complique diversement dans les différentes opérations, selon le petit nombre de lois suivantes.
1°. La chaleur seule opere rarement des séparations pures; & les corps résistent d'autant plus à son action dissociante, qu'ils sont d'un ordre de mixtion moins composé. Nos corps simples & nos mixtes parfaits sont inaltérables par la chaleur seule, du moins par le plus haut degré de chaleur que nous sachions leur appliquer dans les vaisseaux fermés, c'est - à - dire sans le concours de l'air, de l'eau, & du feu menstrue; plusieurs composés même éludent absolument cette action. Tels sont le tartre vitriolé, le sel marir., &c.
2°. La chaleur est nécessaire à touteaction menstruelle, au moins comme condition essentielle; car il est impossible, du moins il est très - rare que cette derniere action ait lieu entre deux corps solides ou gelés (ce qui est proprement la même chose), & elle ne peut être éxercée que l'aggrégation de l'un des deux corps ne soit très - lâche: or cette laxité suffisante ne se trouve ordinairement que dans l'état de liquidité, qui est essentiellement dépendent de la chaleur. C'est sur cette observation qu'est fondé l'axiome chimique, menstrua non agunt nisi sint soluta.
3°. Non - seulement tout menstrue doit pour agir
être secondé d'une chaleur absolue, mais même son
activité est proportionnelle au degré de chaleur dont
il est animé; ou, pour parler sans figure, à son degré
de rareté ou d'expansion: car, comme nous l'avons
déjà observé, & comme nous le prouverons
au mot
4°. La chaleur appliquée à un corps composé, non seulement
desunit ses différens principes, mais même
les met ordinairement en jeu, & favorise par là
de nouvelles combinaisons. L'extrait d'une plante,
par exemple, est une substance très - composée, portant
en soi des principes de réaction. Ces principes
dégagés de leurs premiers liens par un feu suffisant,
exercent l'action menstruelle en opérant des précipitations
qui >upposent des dégagemens & des combinaisons
nouvelles. Voyez
Ces dégagemens & ces nouvelles combinaisons
sont assez multipliés pour qu'on n'ait dû avoir que des
théories très - fausses des opérations qui les produisoient,
tant qu'on n'a pas sû qu'elles les produisoient
en effet, ou qu'on n'a pas été en état de les estimer.
C'est parce que quelques anciens chimistes ont ignoré
les vrais effets de la chaleur sur les principes des
corps, qu'ils ont tant abusé de ce moyen chimique;
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