ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"344"> binaisons différentes de superstitions, d'idolatrie, & de polythéisme ou d'athéisme. C'est ce dont on jugera plus sainement par l'exposition de leurs principes que nous allons placer ici. Ces principes, selon les auteurs qui paroissent les mieux instruits, ont été ceux des philosophes du moyen âge, & sont encore aujourd'hui ceux des lettrés, avec quelques différences qu'y aura apparemment introduit le commerce avec nos savans.

Principes des philosophes Chinois du moyen âge & des lettrés de celui - ci. 1. Le devoir du philosophe est de chercher quel est le premier principe de l'univers: comment les causes générales & particulieres en sont émanées; quelles sont les actions de ces causes, quels sont leurs effets; qu'est - ce que l'homme relativement à son corps & à son ame; comment il conçoit, comment il agit; ce que c'est que le vice, ce que c'est que la vertu; en quoi l'habitude en consiste; quelle est la destinée de chaque homme; quels sont les moyens de la connoître: & toute cette doctrine doit être exposée par symboles, énigmes, nombres, figures, & hiéroglyphes.

2. La science est ou antécédente, sien tien hio, & s'occupe de l'être & de la substance du premier principe, du lieu, du mode, de l'opération des causes premieres considérées en puissance; ou elle est subséquente, & elle traite de l'influence des principes immatériels dans les cas particuliers; de l'application des forces actives pour augmenter, diminuer, altérer; des ouvrages; des choses de la vie civile; de l'administration de l'empire; des conjonctures convenables ou non; des tems propres ou non, &c.

Science antécédente. 1. La puissance qui domine sur les causes générales, s'appelle ti - chu - chu - zai - kuinwang - huang: ces termes sont l'énumération de ses qualités.

2. Il ne se fait rien de rien. Il n'y a donc ni principe ni cause qui ait tiré tout du néant.

3. Tout n'étant pas de toute éternité, il y a donc eu de toute éternité un principe des choses, antérieur aux choses: li est ce principe; li est la on premiere, & le fondement de la nature.

4. Cette cause est l'Etre infini, incorrup ble, sans commencement ni fin; sans quoi elle ne seroit pas cause premiere & derniere.

5. Cette grande cause universelle n'a ni vie, ni intelligence, ni volonté; elle est pure, tranquille, subtile, transparente, sans corporéité, sans figure. ne s'atteint que par la pensée comme les choses spirituelles; & quoiqu'elle ne soit point spirituelle, elle n'a ni les qualités actives, ni les qualités passives des élémens.

6. Li, qu'on peut regarder comme la matiere premiere, a produit l'air à cinq émanations, & cet air est devenu par cinq vicissitudes sensible & palpable.

7. Li devenu par lui - même un globe infini, s'appelle tai - hien, perfection souveraine.

8. L'air qu'il a produit a cinq émanations, & rendu palpable par cinq vicissitudes, est incorruptible comme lui; mais il est plus matériel, & plus soûmis à la condensation, au mouvement, au repos, à la chaleur, & au froid.

9. Li est la matiere premiere. Tai - kie est la seconde.

10. Le froid & le chaud sont les causes de toute génération & de toute destruction. Le chaud naît du mouvement. Le froid naît du repos.

11. L'air contenu dans la matiere seconde ou le chaos, a produit la chaleur en s'agitant de lui même. Une portion de cet air est restée en repos & froide. L'air est donc froid ou chaud. L'air chaud est pur, clair, transparent, & leger. L'air froid est impur, obscur, épais, & pesant.

12. Il y a donc quatre causes physiques, le mou<cb-> vement & le repos, la chaleur & le froid. On les appelle tung - cing - in - iang.

13. Le froid & le chaud sont étroitement unis: c'est la femelle & le mâle. Ils ont engendré l'eau la premiere, & le feu après l'eau. L'eau appartient à l'in, le feu à l'iang.

14. Telle est l'origine des cinq élémens, qui constituent tai - kie, ou in - iang, ou l'air revêtu de qualités.

15. Ces élémens sont l'eau, élément septentrional; le feu, élément austral; le bois, élément oriental; le métal, élément occidental; & la terre, qui tient le milieu.

16. Ling - yang & les cinq élémens ont produit le ciel, la terre, le soleil, la lune, & les planetes. L'air pur & leger porté en - haut, a fait le ciel; l'air épais & lourd précipité en - bas, a fait la terre.

17. Le ciel & la terre unissant leurs vertus, ont engendré mâle & femelle. Le ciel & la mer sont d'iang, la terre & la femme sont d'in. C'est pourquoi l'empereur de la Chine est appellé roi du ciel; & l'empire sacrifie au ciel & à la terre ses premiers parens.

18. Le ciel, la terre, & l'homme sont une source féconde qui comprend tout.

19. Et voici comment le monde fut fait. Sa machine est composée de trois parties primitives, principes de toutes les autres.

20. Le ciel est la premiere; elle comprend le soleil, la lune, les étoiles, les planetes, & la région de l'air où sont épars les cinq élémens dont les choses inférieures sont engendrées.

21. Cette région est divisée en huit kuas ou portions, où les élémens se modifient diversement, & conspirent avec les causes universelles efficientes.

22. La terre est la seconde cause primitive; elle comprend les montagnes, les fleuves, les lacs, & les mers, qui ont aussi des causes universelles efficientes, qui ne sont pas sans énergie.

23. C'est aux parties de la terre qu'appartiennent le kang & l'ieu, le fort & le foible, le dur & le mou, l'âpre & le doux.

24. L'homme est la troisieme cause primitive. Il a des actions & des générations qui lui sont propres.

25. Ce monde s'est fait par hasard, sans destin, sans intelligence, sans prédestination, par une conspiration fortuite des premieres causes efficientes.

26. Le ciel est rond, son mouvement est circulaire, ses influences suivent la même direction.

27. La terre est quarrée; c'est pourquoi elle tient le milieu comme le point du repos. Les quatre autres élémens sont à ses côtés.

28. Outre le ciel il y a encore une matiere premiere infinie; elle s'appelle li; le tai - kie en est l'émanation: elle ne se meut point; elle est transparente, subtile, sans action, sans connoissance; c'est une puissance pure.

29. L'air qui est entre le ciel & la terre est divisé en huit cantons: quatre sont méridionaux, où regne iang ou la chaleur: quatre sont septentrionaux, où dure l'in ou le froid. Chaque canton a son kua ou sa portion d'air; c'est - là le sujet de l'énigme de Fohi. Fohi a donné les premiers linéamens de l'histoire du monde. Confucius les a développés dans le livre liekien.

Voilà le système des lettrés sur l'origine des choses. La métaphysique de la secte de Taoçu est la même. Selon cette secte, tao ou cahos, a produit un; c'est tai - kie ou la matiere seconde; tai - kie a produit deux, in & leang; deux ont produit trois, tien, ty, gin, san, zay, le ciel, la terre, & l'homme; trois ont produit tout ce qui existe.

Science subséquente. Vuem - Vuam, & Cheu - Kung son fils, en ont été les inventeurs: elle s'occupe des [p. 345] influences célestes sur les tems, les mois, les jours, les signes du zodiaque, & de la futurition des évenemens, selon laquelle les actions de la vie doivent être dirigées. Voici ses principes.

1. La chaleur est le principe de toute action & de toute conservation; elle naît d'un mouvement produit par le soleil voisin, & par la lumiere éclatante: le froid est cause de tout repos & de toute destruction; c'est une suite de la grande distance du soleil, de l'éloignement de la lumiere, & de la présence des ténebres.

2. La chaleur regne sur le printems & sur l'été; l'automne & l'hyver sont soûmis au froid.

3. Le zodiaque est divisé en huit parties; quatre appartiennent à la chaleur, & quatre au froid.

4. L'influence des causes efficientes universelles se calcule en commençant au point cardinal ou kua, appellé chin; il est oriental; c'est le premier jour du printems, ou le cinq ou six de Février.

5. Toutes choses ne sont qu'une seule & même substance.

6. Il y a deux matieres principales; le chaos infini ou li; l'air ou tai - kie, émanation premiere de li: cette émanation contient en soi l'essence de la matiere premiere, qui entre conséquemment dans toutes ses productions.

7. Après la formation du ciel & de la terre, entre l'un & l'autre se trouva l'émanation premiere ou l'air, matiere la plus voisine de toutes les choses corruptibles.

8. Ainsi tout est sorti d'une seule & même essence, substance, nature, par la condensation, principe des figures corporelles, par les modifications variées selon les qualités du ciel, du soleil, de la lune, des étoiles, des planetes, des élémens, de la terre, de l'instant, du lieu, & par le concours de toutes ces qualités.

9. Ces qualités sont donc la forme & le principe des opérations intérieures & extérieures des corps composés.

10. La génération est un écoulement de l'air primitif ou du chaos modifié sous des figures, & doüé de qualités plus ou moins pures; qualités & figures combinées selon le concours du soleil, & des autres causes universelles & particulieres.

11. La corruption est la destruction de la figure extérieure, & la séparation des qualités, des humeurs, & des esprits unis dans l'air: les parties d'air desunies, les plus legeres, les plus chaudes, & les plus pures, montent; les plus pesantes, les plus froides, & les plus grossieres, descendent: les premieres s'appellent xin & hoen, esprits purs, ames séparées; les secondes s'appellent kuei, esprits impurs, ou les cadavres.

12. Les choses different & par la forme extérieure, & par les qualités internes.

13. Il y a quatre qualités: le ching, droit, pur, & constant; le pien, courbe, impur & variable; le tung, pénétrant, & subtil; le se, épais, obscur, & impénetrable. Les deux premieres sont bonnes & admises dans l'homme; les deux autres sont mauvaises, & reléguées dans la brute & les inanimés.

14. Des bonnes qualités naît la distinction du parfait & de l'imparfait, du pur & de l'impur dans les choses: celui qui a reçû les premiers de ces modes, est un héros ou un lettré; la raison le commande; il laisse loin de lui la multitude: celui qui a reçû les secondes, est obscur & cruel; sa vie est mauvaise; c'est une bête sous une figure humaine: celui qui participe des unes & des autres, tient le milieu; c'est un bon homme, sage & prdent; il est du nombie des hien - lin.

15. Taie - ki, ou la substance universelle, se divise en lieu & vû est la substance figurée, corpo<cb-> relle, matérielle, étendue, solide, & résistante; lieu est la substance moins corporelle, mais sans figure déterminée, comme l'air; on l'appelle vu, kunghieu, vu - kung, néant, vuide.

16. Le néant ou vuide, ou la substance sans qualité & sans accident, ai vu, tai kung, est la plus pure, la plus subtile, & la plus simple.

17. Cependant elle ne peut subsister par elle - même, mais seulement par l'air primitif; elle entre dans tout composé; elle est tres - aérienne; on l'appelle ki: il ne faut pas la confondre avec la nature immatérielle & intellectuelle.

18. De li pur, ou du chaos ou séminaire universel des choses, sortent cinq vertus; la piété, la justice, la religion, la prudence, & la fidélité avec tous ses attributs: de li revêtu de qualités, & combiné avec l'air primitif, naissent cinq élémens physiques & moraux, dont la source est commune.

19. Li est donc l'essence de tout, ou, selon l'expression de Confucius, la raison premiere ou la substance universelle.

20. Li produit tout par ki ou son air primitif; cet air est son instrument & son régulateur général.

21. Après un certain nombre d'ans & de révolutions, le monde finira; tout retournera à sa source premiere, à son principe; il ne restera que li & ki; & li reproduira un nouveau monde; & ainsi de suite à l'infini.

22. Il y a des esprits; c'est une vérité démontrée par l'ordre constant de la terre & des cieux, & la continuation reglée & non interrompue de leurs opérations.

23. Les choses ont donc un auteur, un principe invisible qui les conduit; c'est chu, le maître; xinkuei, l'esprit qui va & revient; ti - kium, le prince ou le souverain.

24. Autre preuve des esprits; ce sont les bienfaits répandus sur les hommes, amenés par cette voie au culte & aux sacrifices.

25. Nos peres ont offert quatre sortes de sacrifices; lui, au ciel & à xanghti son esprit; in, aux esprits des six causes universelles, dans les quatre tems de l'année, savoir, le froid, le chaud, le soleil, la lune, les étoiles, les pluies, & la sécheresse; vuang, aux esprits des montagnes & des fleuves; pien, aux esprits inférieurs, & aux hommes qui ont bien mérité de la république.

D'où il suit 1° que les esprits des Chinois ne sont qu'une seule & même substance avec la chose à laquelle ils sont unis: 2° qu'ils n'ont tous qu'un principe, le chaos primitif; ce qu'il faut entendre du tien - Chu, notre Dieu, & du xanghti, le ciel ou l'esprit céleste: 3° que les esprits finiront avec le monde, & retourneront à la source commune de toutes choses: 4° que relativement à leur substance primitive, les esprits sont tous également parfaits, & qu'ils ne sont distingués que par les parties plus grandes ou plus petites de leur résidence: 5° qu'ils sont tous sans vie, sans intelligence, sans liberté: 6° qu'ils reçoivent des sacrifices seulement selon la condition de leurs opérations & des lieux qu'ils habitent: 7° que ce sont des portions de la substance universelle, qui ne peuvent être séparées des êtres où on les suppose, sans la deitruction de ces êtres.

26. Il y a des esprits de génération & de corruption qu'on peut appeller esprits physiques, parce qu'ils sont causes des effets physiques; & il y a des esprits de sacrifices qui sont ou bien ou malfaisans à l'homme, & qu'on peut appeller politiques.

27. La vie de l'homme consiste dans l'union convenable des parties de l'homme, qu'on peut appeller l'entité du ciel & de la terre: l'entite du ciel est un air très - pur, très - leger, de nature ignée, qui constitue l'hoen, l'ame ou l'esprit des animaux: l'entité

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.