ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"303"> longes; quand il sera en situation, on aidera à l'accouplement en le dirigeant, & en détournant la queue de la jument: un crin qui s'opposeroit pourroit blesser l'étalon, & même dangereusement. Il arrive quelquefois que l'étalon ne consomme pas; on le connoîtra si le tronçon de sa queue n'a pas pris un mouvement de balancier: ce mouvement accompagne toûjours l'émission de la liqueur séminale. S'il a consommé, il faudra le ramener tout de suite à l'écurie, & l'y laisser jusqu'au sur - lendemain. Un bon étalon peut couvrir une fois tous les jours pendant les trois mois que dure la monte; mais il vaut mieux le ménager, & ne lui donner une jument qu'une fois tous les deux jours.

On lui présentera donc dans les sept premiers jours quatre jumens différentes. Le neuvieme jour on lui ramenera la premiere; & ainsi des autres, tant qu'elles set ont en chaleur. Il y en a qui retiennent des la premiere, la seconde, ou la troisieme fois. On compte qu'un étalon ainsi conduit, peut couvrir quinze ou dix - huit jumens, & produire dix à douze poulains dans les trois mois de cet exercice. Dans ces animaux la quantité & l'émission de la liqueur séminale est très - grande. Il s'en fait aussi une émission ou stillation dans les jumens. Elles jettent au - dehors une liqueur gluante & blanchâtre qu'on appelle des chaleurs, & qui disparoit dès qu'elles sont pleines. C'est à cette liqueur que les Grecs donnoient le nom d'hippomane de la jument, & dont ils faisoient des filtres. Voyez Hippomane. On reconnoit encore la chaleur de la jument au gonflement de la partie inférieure de la vulve, aux hennissemens fréquens, & à l'ardeur avec laquelle elle cherche les chevaux.

Au lieu de conduire la jument à l'étalon, il y en a qui lâchent l'éralon dans le parquet, & l'y laissent choisir celles qui ont besoin de lui: cette maniere est bonne pour les jumens, mais elle ruine l'étalon.

Quand la jument a été couverte par l'étalon, on la remene au pàturage sans autre précaution; peut - être retiendroit - elle mieux, si on lui jettoit de l'eau fraiche, comme c'est l'usage de quelques peuples. Il faut donner la premiere fois à une jument un gros étalon; parce que sans cela, son premier poulain sera petit: il faut aussi avoir égard à la réciprocité des figures, corriger les défauts de l'étalon ou de la jument par le contraste, comme nous avons dit, & ne point faire d'accouplemens disproportionnés.

Quand les jumens sont pleines, & que le ventre commence à s'appesantir, il faut les séparer des autres qui pourroient les blesser; elles portent ordinairement onze mois, & quelques jours; elles accouchent debout, au contraire de presque tous les autres quadrupedes. On les aide en mettant le poulain en situation; & quelquefois même, quand il est mort, on le tire avec des cordes. Le poulain se présente la tête la premiere, comme dans toutes les especes d'animaux; il rompt ses enveloppes en sortant; les eaux s'ecoulent; il tombe en même tems plusieurs morceaux solides qu'on appelle l'hippomane du poulain: la jument lêche le poulain, mais ne touche point à l'hippomane.

Quand on veut tirer de son haras tout le produit possible, on peut faire couvrir la jument neuf jours après qu'elle a pouliné; cependant nourrissant son poulain né & son poulain à naître dans le même tems, ses forces seront partagées; & il vaudroit mieux ne laisser couvrir les jumens que de deux années l'une.

Elles souffrent l'accouplement, quoique pleines; mais il n'y a jamais de superfétation. Elles portent jusqu'à l'âge de quatorze ou quinze ans; les plus vigoureuses sont fécondes jusqu'au - delà de dix - huit; les chevaux jusqu'à vingt, & même au - delà. Ceux qui ont commencé de bonne heure, finissent plûtôt.

Des poulains. Des le tems du premier âge, on sépare les poulains de leurs meres: on les laisse teter cinq, six, ou tout au plus sept mois. Ceux qu'on ne sevre qu'à dix ou onze mois ne sont pas si bons, quoiqu'ils prennent plus de chair & de corps. Apres les mois de lait, on leur donne du son deux fois par jour avec un peu de foin, dont on augmente la quantité à mesure qu'ils avancent en âge. On les tient dans l'écurie tant qu'on leur remarque de l'inquiétude pour leurs meres. Quand cette inquiétude est passée, & qu'il fait beau, on les conduit aux pâturages. Il ne faut pas les laisser paître à jeun; il faut leur avoir donné le son, & les avoir abreuvés une heure avant que de les mettre à l'herbe, & ne les exposer ni à la pluie, ni au grand froid.

Ils passeront de cette maniere le premier hyver. Au mois de Mai suivant, on leur permettra tous les jours les pâturages; on les y laissera coucher pendant l'été jusqu'à la fin d'Octobre, observant de les écarter des regains, de peur qu'ils ne s'accoûtument à cette herbe trop fine, & ne se dégoûtent du foin. Le foin sera leur nourriture principale pendant le second hyver, avec du son mêlé d'orge ou d'avoine moulus. On les dirigera de cette maniere, les laissant paître le jour pendant l'hyver, la nuit pendant l'été, jusqu'à l'âge de quatre an, qu'on les tirera du pâturage pour les nourrir à l'herbe seche. Ce changement de nourriture demande quelque précaution. On ne leur donnera pendant les huit premiers jours que de la paille; d'autres y ajoûtent quelques breuvages contre les vers. Mais à tout âge & dans tous les tems, l'estomac de tous les chevaux est farci d'une si prodigieuse quantité de vers, qu'ils semblent faire partie de leur constitution. Ils sont dans les che - vaux sains comme dans les chevaux malades; dans ceux qui paîssent l'herbe comme dans ceux qui ne mangent que de l'avoine & du foin. Les ânes ont aussi cette prodigieuse quantité de vers, & n'en sont pas plus incommodés. Ainsi peut - être ne faut - il pas regarder ces vers comme une maladie accidentelle, comme une suite des mauvaises digestions, mais plûtôt comme un effet dépendant de la nourriture & de la digestion ordinaire de ces animaux.

C'est à deux ou trois ans, sclon l'usage général, & dans certaines provinces, à un an ou dix - huit mois qu'on hongre les poulains. Pour cette opération, on leur lie les jambes; on les renverse sur le dos; on ouvre les bourses avec un bistouri; on en tire les testicules; on coupe les vaisseaux qui y aboutissent, & les ligamens qui les soûtiennent; on referme la plaie; on fait baigner le cheval deux fois par jour pendant quinze jours; on l'étuve souvent avec de l'eau fraîche, & on le nourrit avec du son détrempé dans beaucoup d'eau: on ne hongre qu'au printems & en automne. On n'hongre point en Perse, en Arabie, & autres lieux du Levant. Cette opération ôte aux chevaux la force, le courage, la fierté, &c. mais leur donne de la douceur, de la tranquillité, de la docilité. L'hongre peut s'accoupler, mais non engendrer. Voyez l'article Chatrer.

Quand on a sevré les jeunes poulains, il faut les mettre dans une écurie qui ne soit pas trop chaude, de peur de les rendre trop sensibles aux impressions de l'air; leur donner souvent de la litiere fraìche, les bouchonner de tems en tems, mais ne les attacher & panser à la main, qu'à l'âge de deux ans & demi ou trois ans; un frottement trop rude les feroit dépérir. Il ne faut pas leur mettre le ratelier trop haut, de peur qu'ils n'en contractent l'habitude de tenir mal leur tête. On leur tondra la queue à un an ou dix - huit mois; on les séparera à l'âge de deux ans; on mettra les femelles avec les jumens, & les mâles avec les chevaux.

Dresser un cheval. C'est à l'âge de trois ans ou [p. 304] trois ans & demi qu'on commencera à les dresser. On leur mettra d'abord une selle légere & aisée; on les laissera sellés pendant deux ou trois heures chaque jour; on les accoûtumera de même à recevoir un bridon dans la bouche, & à se laisser lever les piés sur lesquels on frappera quelques coups, comme pour les ferrer. S'ils sont destinés aux carrosses ou au trait, on leur mettra un harnois & un bridon; dans les commencemens il ne faut point de bride, ni pour les uns, ni pour les autres. On les fera troter ensuite à la longe avec un caveçon sur le nez sur un terrein uni, sans être montés, & seulement avec la selle & le harnois sur le corps. Lorsque le cheval de selle tournera facilement & viendra volontiers auprès de celui qui tient la longe, on le montera & on le descendra dans la même place, & sans le faire marcher, jusqu'à ce qu'il ait quatre ans. Avant cet âge, il n'est pas encore assez fort pour le poids du cavalier. A quatre ans on le montera pour le faire marcher au pas, au trot, & toûjours à petites reprises.

Quand le cheval de carrosse sera accoûtumé au harnois, on l'attelera avec un autre cheval fait, en lui mettant une bride, & on le conduira avec une longe passée dans la bride jusqu'à ce qu'il commence à être sage au trait; alors le cocher essayera de le faire reculer, ayant pour aide un homme devant, qui le poussera en arriere avec douceur, & même lui donnera de petits coups. Tout cela se fera avant que les chevaux ayent changé de nourriture; car quand une fois ils sont engrainés, ou au grain ou à la paille, ils deviennent plus difficiles à dresser.

Monter un cheval. Nous commandons aux chevaux par le mors & par l'éperon: le mors rend les mouvemens plus précis, l'éperon les rend plus vîtes. La bouche est si sensible dans le cheval, que la moindre pression du mors l'avertit & le détermine: la grande sensibilité de cet organe veut être ménagée; quand on en abuse, on la détruit. On ne parle point au cheval au manege: tirer la bride, & donner de l'éperon en même tems, c'est produire deux effets contraires, dont la combinaison est de cabrer le cheval. Quand un cheval est bien dressé, la moindre pression des cuisses, le moindre mouvement du mors, suffisent pour le diriger, l'éperon devient presque inutile.

Les anciens surent très - bien se faire entendre à leurs chevaux, sans la bride & sans l'éperon, quand ils les monterent; ce qui n'arriva que tard. Il n'y a presque pas un seul vestige d'équitation dans Homere: on ne voit dans les bas - reliefs, du moins pour la plûpart, ni bride ni éperon, il n'est point parlé d'étriers dans les auteurs Grecs & Latins. Un Grec, du tems de Xénophon, pour monter à cheval, prenoit de la main droite la criniere avec les renes; & quand li étoit trop pesant, un écuyer l'aidoit à monter, à la mode des Perses. Les Perses avoient appris aux chevaux à s'accroupir. Les Romains s'apprenoient à monter sur des chevaux de bois; ils montoient à droite, à gauche, sans armes d'abord, puis armés. L'usage de ferrer les chevaux est ancien, mais il fut peu fréquent jadis; les mules & les mulets l'ont été de tout tems. Le luxe fut porté sous Néron jusqu'à ferrer les chevaux d'argent & d'or. Il paroît qu'on ne les ferroit pas chez les Grecs, puisque Xénophon prescrit la maniere dont on durcira la corne aux chevaux: cependant il est parlé d'un fer à cheval dans Homere, liv. II. iliad. vers 151.

Les chevaux bridés à la Romaine ont un mors sans renes. Les Romains montoient aussi à nud, sans bride & sans selle. Les Massagetes couvroient de fer la poitrine de leurs chevaux. Les Numides couroient à nud, & étoient obéis de leurs chevaux comme nous le sommes de nos chiens. Les Perses les couvroient aussi de fer au front & à la poitrine. Les chevaux de course étoient estimés au tems d'Homere & des jeux olympiques, comme une grande richesse: ils ne l'étoient pas moins des Romains; on gravoit sur des pierres, on exécutoit en marbre ceux qui s'étoient signalés par leur vîtesse, ou qui se faisoient remarquer par l'élégance de leurs formes: on leur érigeoit des sépulcres, où leurs noms & leurs pays étoient inscrits; on les marquoit à la cuisse: les Grecs avoient deux lettres destinées à cet usage, le coppa, & le san; le coppa étoit fait comme notre Q, & les chevaux ainsi marqués s'appelloient copparioe: le san étoit le sigma „, mais ils le marquoient comme notre grand C, & les chevaux marqués du san s'appelloient samphoroe. On a vû plus haut que c'étoit aussi l'usage de nos jours en quelques contrées de marquer les chevaux.

On donne à la tête du cheval, par le moyen de la bride, un air avantageux; on la place comme elle doit être; & le signe le plus leger fait prendre sur le champ au cheval ses différentes allures, qu'on s'applique à perfectionner.

Monter à cheval. Pour monter à cheval, il faut s'approcher assez près de l'épaule du cheval, raccourcir les renes avec la main droite jusqu'au point d'appuyer le mors sur la barre, saisir alors une poignée de la criniere avec les renes de la main gauche, porter la main droite à l'endroit où l'étriviere joint l'étrier, pour tourner l'étrier du bon côté afin d'y passer le pié gauche; porter ensuite la main droite au trousquin de la selle, élever le corps, & passer la jambe droite, de façon qu'en passant elle chasse la main droite, sans tomber à coup sur la selle.

Descendre de cheval. Pour descendre de cheval, il faut se soulever sur la selle, en appuyant la main droite sur la bâte droite du devant de la selle, dégager auparavant le pié de l'étrier, passer ensuite la jambe par - dessus la croupe, en la faisant suivre par la main droite qui s'appuiera sur le trousquin de la selle, comme on avoit fait en montant, & donnera la facilité de poser doucement le pié droit par terre. Au reste il paroît utile d'avoir un cheval de bois sur lequel on mette une selle parcille à celles dont on se sert ordinairement, & d'apprendre sur ce cheval à monter & descendre dans les regles: on y placera aussi facilement le corps, les cuisses & les jambes du cavalier, dans la meilleure situation où elles puissent être: ce cheval ne remuant ni ne dérangeant le cavalier, il restera dans la meilleure attitude aussi longtems qu'il lui sera possible, & en prendra ainsi plus aisément l'habitude. S'il s'agissoit d'instruire un régiment de cavalerie, il faudroit absolument choisir un certain nombre de cavaliers qui auroient le plus de disposition & d'intelligence, & après leur avoir appris, leur ordonner de montrer aux autres; observant dans les commencemens que cet exercice s'exécutât devant soi, afin de s'assûrer que ceux qu'on a instruits rendent bien aux autres ce qu'ils ont appris.

Se tenir à cheval, ou posture du corps à cheval: Dans la posture du corps à cheval, il faut le considérer comme divisé en trois parties; le tronc, les cuisses, & les jambes.

Il faut que le tronc soit assis perpendiculairement sur le cheval, de maniere que la ligne qui tomberoit du derriere de la tête tout le long des reins soit perpendiculaire au cheval. Comme il faut prendre cette position sans avoir égard aux cuisses, le moyen de savoir si on l'a bien prise, c'est de soulever les deux cuisses en même tems; si l'on exécute aisément ce mouvement, on peut en inférer que le tronc est bien assis.

On laisse descendre les cuisses aussi bas qu'elles peuvent aller, sans déranger l'assiette du tronc. Il ne faut pas s'opiniâtrer à les faire descendre à tous

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