ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"268"> sympathie. Voyez Encre de sympathie. C'est par cette action sur le soufre, & par une plus grande affinité avec ce mixte que les substances métalliques, que la chaux agit dans la décomposition des mines cinnabarines de mercure, & dans sa révivification en petit; qu'elle peut servir à la préparation du régule d'antimoine, & à fixer dans le grillage ou la fonte de certaines mines, une matiere principalement sulphureuse, capable d'entraîner une partie du métal, que les Métallurgistes. Allemands appellent rauberisch, en Latin rapax. Voyez Mercure, Antimoine, Mine, Fonte, Fixer, Grillage. La chaux dissout toutes les substances huileuses, qu'elle décompose même en partie; elle détruit, par exemple, la mixtion huileuse dans les rectifications des huiles tirées des trois regnes, auxquelles on l'employe quelquefois. Voy. Huile, Rectification, Intermede. Elle ne l'épargne pas même dans l'esprit - de - vin, où le principe huileux paroît être contenu cependant dans sa plus grande simplicité. C'est par cette propriété que la chaux est très - propre à manifester les sels neutres contenus dans les sucs ou les décoctions des plantes, selon l'utile méthode que M. Boulduc a proposée dans les Mémoires de l'académie des Sciences, ann. 1734. Ce n'est apparemment qu'au même titre, qu'elle est utile dans la fabrique du salpetre, quoique les plus savans Chimistes, & entr'autres feu M. Neuman, assurent expressément qu'elle concourt à la composition même de ce sel neutre, comme ingrédient essentiel. Voyez Nitre. C'est exactement par la même vertu qu'elle est propre à blanchir le fil, les toiles neuves, & le linge sale; mais elle est trop active pour ces derniers usages, elle n'épargne pas assez le corps même du fil. On a proposé dans le journal aconomique, une préparation des marrons d'inde, qui les rend utiles à la nourriture de la volaille & des bestiaux, qui consiste à leur enlever par l'action de la chaux vive dont il est ici question, une matiere qui les rend desagréables & même dangereux.

Causticité de la chaux. La causticité proprement dite de la chaux vive, qualité très - analogue à la précédente, la rend propre à enlever les sues animaux dans la préparation des cuirs, dont elle est en état même de consumer les parties solides ou fibreuses; elle réduit en bouillie les poils, les cornes, &c. elle consume assez promptement les cadavres. Voyez Caustique, Tannerie, Mumie, Substances animales, Menstrue.

Variétés des chaux. Les chaux provenues de différentes matieres calcaires possedent la plûpart les qualités absolues que nous venons d'exposer, en degrés spécifiques qui les distinguent presque toutes entre elles: en cela bien différentes des sels alkalis purs qui sont exactement semblables entre eux de quelque corps qu'ils soient tirés; c'est - à - dire que l'art n'est pas encore parvenu à faire de la chaux pure. Voy. Cendre & Terre. Ainsi, selon l'observation de M. Pott, la corne de cerf calcinée & la pierse à chaux ordinaire calcinée, sont beaucoup plus rebelles ou plus difficiles à fondre dans les mêmes circonstances, que la chaux de marbre & la marne calcinée; les mêlanges dans lesquels entrent les deux premieres matieres, sont aussi plus difficilement portés à la transparence par le secours du feu, que ceux dans lesquels on employe les dernieres. La chaux de craie est très - inférieurè pour l'emploi dans les ouvrages de maçonnerie, à la chaux faite avec les pierres calcaires dures, connue des ouvriers dans quelques provinces sous le nom très - impropre de chaux de caillou; & plus encore à celle qu'on prépare avec le marbre, qui fournit la plus excellente pour cet usage.

Rapport & différences de la chaux & du plâtre. Tout ce qui a été rapporté jusqu'ici des principales pro<cb-> priétés de la chaux, suffit sans doute pour la faire distinguer des substances auxquelles elle est la plus analogue; savoir les alkalis - salins & les terres absorbantes, parmi lesquelles nous rangeons la terre des cendres des végétaux. Voyez Cendre. Il nous reste encore à exposer celles par lesquelles elle a quelque rapport avec le plâtre, que la plûpart des Naturalistes ont trop confondu avec elle; & les caracteres qui l'en font essentiellement différer: ces deux substances ont de commun leur origine, ou la qualité de produits de la calcination, leur consistance rare & friable, leur miscibilité réelle avec l'eau, & leur qualité dissolvante du soufre: leurs caracteres distinctifs sont, que la plûpart des pierres gypseuses sont réduites en plâtre par un feu fort leger, & très - inférieur à celui qu'exige la calcination des matieres calcaires; que la chaux est soluble dans tous les acides, & que le plâtre ne se dissout dans aucun d'eux; que le plâtre avec de l'eau pure se durcit, mais que la chaux ne le fait point à moins qu'on n'y mêle du sable: le plâtre se durcit plus promptement que la chaux; & si on ajoûte au plâtre des matieres limonneuses, il devient plus dur que la chaux. La chaux ne se détruit pas par un feu violent; & quand elle est éteinte à l'air, elle reprend sa premiere qualité, si on la fait rougir au feu: le plâtre au contraire, est tellement détruit par un feu violent, qu'il perd son gluten; ensorte qu'il ne se lie plus avec de l'eau, il ne reprend pas non plus sa premiere qualité par une seconde calcination; le plâtre détrempé avec de l'eau, a une odeur d'oeufs pourris; la chaux n'a pas cette odeur. La décoction du plâtre ne dissout pas si bien le soufre que la décoction de la chaux; le platre ne se soûtient pas tant à l'air que la chaux. Pott, examen des pierres, &c. ch. ij.

Rapport & différences de la chaux vive & de la chaux métallique. La chaux vive a encore quelques rapports généraux & extérieurs avec la chaux métallique. Ces matieres sont l'ouvrage d'un feu ouvert comme la chaux & le plâtre; elles sont dans un état de desunion de parties comme ces dernieres substances: mais elles en different par la plûpart de leurs propriétés essentielles & intérieures. Voyez Chaux métallique.

Nous avons indiqué déjà les principaux usages de la chaux, & nous les avons rapportés autant qu'il nous a été possible chacun à celle de ses propriétés dont il dépendoit, afin que l'exposition d'un certain nombre de faits ainsi rapprochés de leur principe physique, servît à constater & à lier les connoissances que nous avons sur notre sujet. Mais outre ces usages déjà exposés, la chaux en a encore plusieurs autres qu'il auroit été inutile, impossible, ou du moins trop peu exact, de ramener à quelqu'une des propriétes que nous avons observées. On les trouvera répandus dans les differens articles d'Arts méchaniques de ce Dictionnaire. (b)

Vertus médicinales de la chaux. La chaux vive fournit plusieurs bons remedes à la Medecine. Les plus anciens medecins l'ont employée extérieurement. Hippocrate lui - même la recommande contre différentes especes de lepre; Dioscoride, Pline, Galien, Paul d'Ægine, &c. la rangent au nombre des remedes acres & caustiques, qu'on doit employer contre les ulceres putrides & malins. Celse la regarde comme un secours efficace pour faire separer les parties sphacelées, soit en les laupoudrant de chaux vive très - fine, ou en employant une lestive préparée par le deliquium avec une partie de chaux vive, & trois parties de cendres gravelees.

Fuller donne pour un remede eprouvé contre les douleurs scorbutiques & rhûmatismales, un liniment fait avec la chaux vive & le miel.

On trouve dans différens auteurs un grand nom<pb-> [p. 269] bre d'onguens contre les brûlures, dans lesquelles on fait entrer la chaux vive avec les émolliens & & les adoucissans.

La chaux est très - communément employée dans les dépilatoires, voyez Dépilatoire: les Indiens en composent des mafticatoires avec l'areque, & les Américains avec le tabac. Voyez Masticatoire.

L'eau de chaux ordinaire doit être regardée comme un très - bon détersif, qu'on employe avec succès extérieurement dans le traitement des vieilles plaies dont les bords sont mollasses & trop abreuvés, & dans celui des ulceres putrides & sanieux: on peut s'en servir encore comme d'un bon discussif fortifiant & antiseptique, contre certaines maladies cutanées, comme la gratelle, les dartres, les tumeurs oedémateuses, & principalement celle des piés avec menace de gangrene. Riviere la recommande en fomentation contre les tumeurs oedémateuses.

Cette eau de chaux battue avec une huile par expression, prend la consistance d'un onguent qui est fort recommandé contre les brûlures; mais on se sert sur - tout parmi nous de l'eau de chaux à la préparation d'une lotion contre la galle, qui consiste à faire bouillir cette eau avec une certaine quantité de fleurs de soufre qui sont dissoutes en partie, & combinées sous la forme d'un foie de soufre. Voyez Soufre & Galle.

L'eau de chaux est le principal ingrédient de l'eau phagedenique. Voyez eau phagedenique au mot Phagedenique.

On prépare aussi avec l'eau de chaux un assez bon collyre, connu dans les boutiques sous le nom d'eau saphirine ou eau céleste. Voyez eau saphirine sous le mot Saphirine.

La chaux ayant toûjours été regardée comme un mixte rempli de parties de feu qui détruit & consume les corps sur lesquels elle peut agir, on auroit cru jadis donner un poison, en donnant par la bouche un remede tiré de la chaux, jusqu'à ce qu'enfin dans ces derniers tems - ci l'eau de chaux prise intérieurement, a passé pour un excellent remede, & que plusieurs auteurs célebres l'ont mise en usage pour un grand nombre de maladies. Burlet, Méin. de l'ac. oy. des Sc. an. 1700.

Le préjugé si contraire à l'usage intérieur de la chaux, n'étoit pas seulement fondé sur une terreur rationnelle; sa qualite de poison étoit établie sur plusieurs observations. M. Burlet rapporte, que peu de tems avant qu'il ecrivit le mémoire que nous venons de citer, il s'étoit répandu dans ie public que des boeufs altérés ayant bû dans une fosse à chaux de l'eau qui la surnageoit, en moururent en peu de tems. Les auteurs de Medecine nous ont transmis plusieurs observations qui concourent à prouver que la chaux prise intérieurement est dangereuse. La vapeur même élevée de la chaux pendant son effervescence avec l'eau, a quelquefois éte sunestc. Les accidens auxquels s'exposent ceux qui habitent des maisons neuves bàties avec le mortier ou trop récemment blanchies, doivent être rapportés à ce genre d'effets. Hippocratc (de morb. pop. lib. III. agr. 2.) a observe une paralysie due à cette cause. Les observations semblables ne sont pas rares. On trouve dans les éphem. des cur. de la nature, que la poussiere de la chaux respirée fréquemment par un manoeuvre employé dans un four à chaux, engendra des concrétions pierreuses dans ses poumons. On peut ajoûter à ces considerations, que la chaux en poudre est un poison sur pour les rats, & qu'elle fournit un tres - bon préservant contre les insectes, qu'elle tue ou qu'elle chasse. M. Anderson rapporte dans son hist. nat. d'Islande, un fait qui a du rapport avec cette derniere propriéte: on m'a assure, dit cet auteur, qu'un vaisseau charge de chaux, ou qui en est enduit en - dehors, chassoit absolument toute sorte de poisson; ce que cet auteur attribue plûtôt à l'odeur qu'au goût de la chaux.

Si l'explication des effets veneneux de la chaux peut être pour quelque medecin un nouveau motif de ne l'employer intérieurement qu'avec circonspection, il en trouvera une dans Boerhaave, qui iui apprendra (Institut. med. 1143.) que la chaux, soit vive, soit éteinte, doit être rapportée, peut - être, à la classe des poisons, qui procurent une mort prompte ou lente en resserrant, constringendo, en incrassant, en obstruant, en desséchant.

Quelques medecins ont cependant osé donner intérieurement la chaux, même en substance. M. Duhamel rapporte, dans son histoire de l'acadénue, une observation de M. Homberg, qui avoit guéri un hypocondriaque, avec un mêlange d'une partie de sel ammoniac, & de deux parties de chaux éteinte à l'air, donné à la dose de 20 grains.

La chaux éteinte a été recommandée, employée en clistere contre certaines dyssenteries.

Hippocrate, épidem. v. 2. a donné des lavemens d'eau de chaux dans des anciens flux de ventre.

Mais c'est l'eau de chaux, qui est le remede tiré de cette substance, qui a été le plus généralement employé. Sylvius Deleboe & Willis passent pour les premiers qui ayent mis en vogue l'usage intérieur de l'eau de chaux; le premier en Hollande, & le second en Angleterre. Morton, Bennet, Spon medecin François, Bateus, & plusieurs autres, ont aussi célebré ce remede, qui aujourd'hui a perdu beaucoup de son crédit parmi nous, quoique nous ne le regardions plus comme poison; & que quelques habiles medecins l'employent encore avec succès dans quelques - uns des cas que nous allons indiquer, & sur - tout dans les maladies des reins.

M. Burlet rapporte, dans son mém. déjà cité, qu'il avoit vû en Hollande un medecin qui en employoit trente pintes par jour, mais presque toûjours mêlée avec d'autres drogues; ensorte que les guérisons que ce medecin opéroit ne peuvent pas être mises assez exactement sur le compte de l'eau de chaux.

Les maladies contre lesquelles on a célebré principalement l'efficacité de l'eau de chaux, sont la phthisie, & tous les ulceres internes, l'asthme, l'empieme, l'hæmopthisie, les écroüelles, la dyssenterie & la diarrhée, les tumeurs démateuses du serntum, les fleurs - blanches, & les pâles couleurs; la goutte, les dartres, la gangrene, l'oedeme, l'enflure des genoux & des jambes, les ulceres humides; le diabete, le calcul, & le sable des reins & de la vessie, &c.

Outre l'action occulte ou altérante de l'eau de chaux, on a observé qu'elle poussoit quelquefois par les urines, & assez souvent par les sueurs. Willis la regarde comme un bon diurétique, donnée à la dose de quatre à six onces, avec un gros, ou un gros & demi de teinture de sel de tartre. La vertu lithontriptique de l'eau de chaux a été bien plus célebrée encore, soit prise intérieurement, soit employée en injection. Nous examinerons les pretentions qui lui sont favorables à ce titre, au mot lithontriptique. Voyez Lithontriptique.

M. Burlet observe fort judicieusement, ce semble, que l'eau de chaux est plus utile & moins dangereuse dans les pays froids & humides, que dans les contrées plus tempérées.

Ce medecin préparoit l'eau de chaux qu'il nous apporta de Hollande, en versant six livres d'eau bouillante sur une livre de chaux vive, laissant reposer, filtrant, &c. & c'etoit - là ce qu'on a appellé depuis eau de chaux premiere. Celle qui est connue dans les boutiques sous le nom d'eau de chaux seconde, se propare en versant une nouvelle quantité d'eau bouil<pb->

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