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CHEMINEE (Page 3:280)
CHEMINEE, s. f. terme d'Architecture, du Latin
caminus, fait du Grec
La situation d'une cheminée consiste dans la nécessté de la placer toûjours dans le milieu d'une piece, soit sur sa longueur, soit sur sa largeur; de maniere que dans la face qui lui est opposée, l'on puisse placer quelqu'autre partie essentielle de la décoration, telle qu'un trumeau de glace, une porte ou une croisée. Sa situation dépend encore de la placer de préférence plûtôt sur le mur de refend qui est oppose à la principale entrée, que sur celui où cette porte est percée; & si par quelque cas indispensable on ne peut éviter de la placer de cette derniere maniere, du moins faut - il observer un dosseret de deux piés entre le chambranle de cette même porte & l'un des jambages de la cheminée. Quelquefois l'on place les cheminees dans des pans coupés; mais cette situation n'est convenable que pour de petites pieces, & ne peut raisonnablement être admise dans la décoration d'un appartement principal. Il arrive assez souvent que la nécessité oblige de situer les cheminées en face des croisées; mais cette maniere a son desavantage, parce que les personnes qui sont rangées autour du foyer ne reçoivent la lumiere que par reflet: néanmoins cette situation peut être de quelqu'utilité dans un cabinet consacré à l'étude, & doit être préférée à tous égards à la nécessité de les placer dans les murs de face, lorsqu'absolument il n'est pas possible de les pratiquer dans les autres murs de refend.
La construction des cheminées consiste aujourd'hui
dans l'art de dévoyer leurs tuyaux dans l'épaisseur
des murs, de maniere que sans nuire à la solidité de
ces mêmes murs, les languettes (voy.
La décoration des cheminées est devenue une partie importante pour l'ornement des pieces, principalement depuis cinquante ans, que les glaces ont pris la place des bas - reliefs de sculpture & des membres d'architecture de plâtre, de marbre, ou de stuc qui les décoroient auparavant. M. Decotte, premier architecte du roi, est celui à qui l'on doit l'usage des glaces sur les cheminées. D'abord on se révolta contre cette nouveauté; on eut peine à s'accoûtumer à voir un vuide que les glaces représentent sur une partie qui ne pourroit se soutenir sans être un corps opaque & d'une solidité réelle: mais enfin la mode a prévalu au point que la plus grande beauté de la décoration d'une cheminée consiste aujourd'hui, selon quelques-uns, dans la grandeur des glaces. Il n'en est pas moins vrai cependant que les bordures qui les environnent, que les parties qui les couronnent, & les pilastres qui les accompagnent & qui occupent ce qu'on appelle le manteau de la cheminée, doivent être d'une proportion & d'une richesse relative à l'ordonnance qui préside dans la decoration de la piece en général: l'on doit même observer que les glaces qui représentent un vuide, comme nous venons de le remarquer, soient d'une hauteur & d'une largeur proportionnée à l'élégance qu'on aura dû affecter dans la baie ou vuide des portes & des croisées. Il faut encore faire attention que la largeur du manteau & sa hauteur, soient d'une proportion reiative à celle des panneaux qui revêtissent la surface des murs de la piece, lorsqu'elle est lambrissée.
A l'égard du chambranle de ces cheminées, dont la
matiere doit être de marbre ou de pierre de liais, leur
largeur entre deux jambages dépend, comme nous
l'avons dejà dit, du diametre des pieces; mais il faut
faire ensorte que cette largeur égale celle du manteau
de la cheminée, de maniere que l'épaisseur de ces jambages
fasse retraite de chaque côté; afin que la tablette
qui couronne ce chambranle, forme des retours
dans ses deux extrémités égaux à sa saillie sur le devant,
afin qu'il paroisse servir de soûbassement à la
partie superieure. La hauteur de ces chambranles dépend
de l'usage des pieces. Dans les galeries, dans les
salons, & grandes salles d'assemblée, où la largeur
des foyers est au moins de six ou sept piés, & où l'on
fait un feu extraordinaire, il faut leur donner de hauteur
depuis cinq jusqu'à six piés; mais dans les appartemens
de sociéte (voyez
Cheminée. (Page 3:281)
Mais l'on ne peut douter par une foule d'autorités
incontestables, que les anciens n'eussent des cheminées, & en grand nombre. Appian Alexandrin, racontant
(liv. IV. des guerr. civ.) de quelle maniere se
cachoient ceux qui étoient proscrits par les triumvirs,
dit que les uns descendoient dans des puits ou
des cloaques, que les autres se cachoient sur les
toits & dans les cheminées: il croit que le mot Grec
Et jam summa procul villarum culmina fumant:
Il paroit donc certain que les anciens avoient des cheminées, comme l'a prouvé par plusieurs autres passages Octavio Ferrari, ce savant Italien, qui fut tout - à - la - fois honoré des bienfaits de la république de Venise, de Louis XIV. & de la reine Christine; mais faute de plans & de description des cheminées des anciens, nous n'en avons qu'une légere connoissance. Nous savons cependant qu'elles n'étoient pas faites comme les nôtres, qu'elles étoient construites au milieu de la chambre, qu'elles n'avoient ni tuyau ni manteau, & qu'il y avoit seulement au haut de la chambre & au milieu du toit, une ouverture pour la fumée, laquelie sortoit d'ordinaire par cette ouverture: c'est pourquo. Horace dit: (ode xj. l. IV.)
Et dans un autre endroit: (ode ij. lib. V.)
Ailleurs il conseille à son ami de mettre force bois dans le foyer pour chasser le froid: Dissolve frigus, ligna super foco Large reponens.
Tous ces passages confirment encore l'existence des cheminées parmi les anciens, mais ils montrent aussi que leur luxe ne s'étoit pas tourné de ce côtélà. Peut - être que l'usage des étuves a fait naturellement négliger chez les anciens cette partie du bâtiment, que nous avons assujettie à des proportions symmétriques & décorées, en même tems que le froid de notre climat nous a contraint de multiplier le nombre des cheminées, & de rechercher les moyens d'augmenter les effets du feu. quoique par habitude ou par nécessité nous ne mettions pas toùjours ces moyens en pratique.
En effet, il est certain que la disposition des jambages paralleles, & la hotte inclinée des cheminées ordinaires, ne tendent pas à refléchir la chaleur. La méchaníque apprend que des jambages en lignes paraboliques, & la situation horisontale du dessous de la tablette d'une cheminée, sont les plus propres à répandre la chaleur dans les chambres. C'est ce qu'a prouvé M. Gauger dans un ouvrage intitulé la Mé - [p. 282]
Mais nos cheminées par leur multiplication & la forme de leur construction, o>n inconvénient très - commun & très - incommode, c'est celui de fumer.
Pour obvier à cette incommodité, on a employé plusieurs inventions, comme les éolipiles de Vitruve, les soûpiraux de Cardan, les moulinets à vent de Jean Bernard, les chapiteaux de Sebastien Serlio, les tabourins & les giroüettes de Paduanus, & plusieurs artifices de Philibert de Lorme: mais toas ces moyens sont fautifs. Il est de plus souvent nécessaire pour remédier à la fumée, de rendre les chemlnées plus profondes, d'en abaisser le manteau, de changer le tuyau de communication, de faire des soûpapes, & principalement de diversifier les remedes suivant la position des lieux, & les causes de la fumée; cependant on employe d'ordinaire à cette besogne des ouvriers qui n'ont en partage qu'une routine aveugle. Cet art seroit uniquement du ressort d'Architectes éclairés par les lumieres de la Physique, & ils ne s'en mêlent guere.
L'auteur ancien qui en a le mieux raisonné, est M.
Savot, dans son livre d'Architecture Françoise des batimens
particuliers, imprimé d'abord en 1624, ensuite
en 1673, & en 1683, avec les notes de M. Blondel.
Consultez aussi les mémoires critiques d'Architecture de
M. Fremin, mis au jour à Paris en 1702, in - 12. &
autres modernes, comme M. Brizeux. Article de M.
le chevalier
Cheminée, (Page 3:282)
Tous les tuyaux à cheminée doiventavoir des oreilles aux deux côtés de leur bouche, pour les pouvoir accorder.
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