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En effet, comment se détacheroit - on du seul bien qu'on veuille nécessairement? En y renonçant formellement? cela est impossible. En en faisant abstraction? cette abstraction fermera les yeux un >oment sur la fin; mais cette fin n'en sera pas moins réelle. L'artiste qui travaille, n'a pas toûjours son but présent, quoique toute sa manoeuvre y soit dirigée. Mais je dis plus; & je prétends que celui qui produit un acte d'amour de Dieu, n'en sauroit séparer le desir de la joüissance: en effet, ce sont les deux objets les plus étroitement unis. La religion ne les sépare jamais; elle les rassemble dans toutes ses prieres. L'abstraction momentanée sera, si l'on veut, dans l'esprit; mais elle ne sera jamais dans le coeur. Le coeur ne fait point d'abstraction, & il s'agit ici d'un mouvement du coeur & non d'une opération de l'esprit. S. Thomas qui s'est distingué par son grand sens dans un siecle où ses rivaux, qui ne le sont plus depuis long - tems, avoient mis à la mode des subtilités puériles, disoit: si Dieu n'>toit pas tout le bien de l'homme, il ne lui seroit pas l'unique raison d'aimer. Et ailleurs: il est toute la raison d'aimer, parce qu'il est tout le bien de l'homme. L'amour présent & le bonheur futur sont, comme on voit, toûjours unis chez ce docteur de l'école.
Mais, dira - t - on peut - être, quand nous ignorerions que Dieu peut & veut nous rendre heureux, ne pourrions - nous pas nous elever à son amour par la contemplation seule de ses perfections infinies? je réponds qu'il est impossible d'aimer un Dieu sans le voir comme un Être infiniment parfait; & qu'il est impossible de le voir comme un Être infiniment parfait, sans être convaincu qu'il peut & veut notre bonheur. N'est - ce pas, dit M. Bossuet, une partie de sa perfection d'être libéral, bienfaisant, miséricordieux, auteur de tout bien? y a - t - il quelqu'un qui puisse exclure par abstraction ces attributs de l'idée de l'Être parfait? Non sans doute: cependant accordons - le; convenons qu'on puisse choisir entre les perfections de Dieu pour l'objet de sa contemplation, son immensité, son éternité, sa prescience, &c. celles en un mot qui n'ont rien de commun avec la
D'où il s'ensuit que Dieu devient l'objet de notre amour ou de notre admiration, selon la nature des attributs infinis dont nous faisons l'objet de notre méditation; qu'entre ces attributs, il n'y a proprement que ceux qui constituent la liaison du Créateur à la créature, qui excitent en nous des sentimens d'amour. Que ces sentimens sont tellement inséparables de la vûe du bonheur, & la charité tellement unie avec le penchant à la joüissance, qu'on ne peut éloigner ces choses que par des hypotheses chimériques hors de la nature, fausses dans la spéculation, dangereuses dans la pratique. Que le sentiment d'amour peut occasionner en nous de bons desirs, & nous porter à des actions excellentes; influer en partie & même en tout sur notre conduite; animer notre vie, sans que nous en ayons sans cesse une perception distincte & présente; & cela par une infinité de raisons, dont je me contenterai de rapporter celle - ci, qui est d'expérience: c'est que ne pouvant par la foiblesse de notre nature partager notre entendement, & être à différentes choses à la fois, nous perdons nécessairement les motifs de vûe, quand nous sommes un peu fortement occupés des circonstances de l'action. Qu'entre les motifs loüables de nos actions, il y en a de naturels & de surnaturels; & entre les surnaturels, d'autres que la charité proprement dite. Que les motifs naturels loiiables, tels que la commisération, l'amour de la patrie, le courage, l'honneur, &c. consistant dans un légitime exercice des facultés que Dieu a mises en nous, & dont nous faisons alors un bon usage; ces motifs rendent les actions du Payen dignes de récompense dans ce monde, parce qu'il est de la justice de Dieu de ne laisser aucun bien sans récompense, & que le Payen ne peut être récompensé dans l'autre monde. Que penser que les actions du Chrétien qui n'auront qu'un motif naturel loüable, lui seront méritoires dans l'autre monde, par un privilege particulier à sa condition de Chrétien, & que c'est - là un des avantages qui lui reviennent de sa participation aux mérites de J. C. ce seroit s'approcher beaucoup du Sémi - Pélagianisme; qu'il y aura sûrement des Chrétiens qui n'ayant pour eux que de bonnes actions naturelles, telles qu'elles auroient été faites par un honnête Payen, ne seront récompensés que dans ce monde, comme s'ils avoient vêcu sous le joug du Paganisme. Que les motifs naturels & surnaturels ne s'excluent point; que nous ne pouvons cependant avoir en même tems la perception nette & claire de plusieurs motifs à la fois; qu'il ne dépend nullement de nous d'établir une priorité d'ordre entre les perceptions de ces motifs: que, malgré que nous en ayons, tantôt un motif naturel précédera ou sera précédé d'un motif surnaturel, tantôt l'humanité agira la premiere, tantôt ce sera la charité. Que, quoiqu'on ne puisse établir entre les motifs d'une action l'ordre de perception qu'on désireroit, le Chrétien peut toûjours passer d'un de ses motifs à un autre, se les rappeller successivement, & les sanctifier. Que c'est cette espece d'exercice intérieur qui constitue l'homme tendre & l'homme religieux; qu'il ajoûte, quand il est libre & possible, un haut degré de perfection aux actions: mais qu'il y a des occasions où l'action suit si promptement la présence du motif, que cet exercice ne devient presque pas possible. Qu'alors l'action est très - bonne, quel que soit celui d'entre les motifs loüables, naturels, ou surna<pb-> [p. 207]
Charité se prend encore, 1° pour l'amour que Dieu a porté de tout tems à l'homme; 2° pour l'effet d'une commisération, soit chrétienne, soit morale, par laquelle nous secourons notre prochain de notre bien, de nos conseils, &c. La charité des conseils est la plus commune, il faut un peu s'en méfier; elle ne coûte rien, & ce peut être aisément un des masques de l'amour pròpre. Hors de la Théologie, notre terme charité n'a presque point d'idées communes avec le charitas des Latins, qui signifie la tendresse qui do> unit les peres & les enfans.
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Dans la plûpart de ces écoles de charité, les aumônes ou fondations servent encore à habiller un certain nombre d'enfans, à leur faire apprendre des métiers, &c.
Ces écoles ne sont pas fort anciennes; elles ont commencé à Londres, & se sont ensuite répandues dans la plûpart des grandes villes d'Angleterre & de la principauté de Galles. Voici l'état des écoles de charité dans Londres & aux environs de cette capitale, tel qu'il étoit en 1710.
Nombre des écoles de charité, 88. des>rçons, 2181. des filles, 1221. garçons habillés, 1863.> en tout 2977. filles habillées, 1114. garçons non - habillés, 373.> en tout 501. filles non - habillées, 128.
Remarquez que sur le total il y a eu 967 garçons & 407 filles, qu'on a mis en apprentissage.
Il y a eu semblablement à Londres une association charitable pour le soulagement des pauvres industrieux, qui fut instituée lous la reine Anne pour donner moyen à de pauvres manufacturiers ou à de pauvres commerçans, de trouver de l'angent à un intérêt modique & autorile par les lois. On fit pour cet effet un fonds de 30000 livres sterling.
Nous avons en France dans plusieurs villes, & sur - tout à Paris, grand nombre d'établissemens de la premiere espece; car, outre les écoles pour les enfans des pauvres, conduites par les freres des écoles chrétiennes, combien de mailons, telles que l'Hôpital - général, la Pitié, les Enfans - rouges, &c. ou l'on éleve des enfans pauvres ou orphelins, auxquels, quand ils sont en age, on fait apprendre des métiers> (G)
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