ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"142"> moins d'agrément que la nature a donné à leur organe. Au rapport de Juan Christoval Calvete (qui a fait une relation du voyage de Philippe II. roi d'Espagne, de Madrid à Bruxelles, qu'on va traduire ici mot à mot), dans une procession solennelle qui se fit dans cette capitale des Pays - Bas en l'année 1549, pendant l'octave de l'Ascension, sur les pas de l'archange S. Michel, couvert d'armes brillantes, portant d'une main une épée, & une balance de l'autre, marchoit un chariot, sur lequel on voyoit un ours qui touchoit un orgue: il n'étoit point composé de tuyaux comme tous les autres, mais de plusieurs chats enfermés séparément dans des caisses étroites, dans lesquelles ils ne pouvoient se remuer: leurs queues sortoient en haut, elles étoient liées par des cordons attachés au registre; ainsi à mesure que l'ours pressoit les touches, il faisoit lever ces cordons, tiroit les queues des chats, & leur faisoit miauler des tailles, des dessus, & des basses, selon les airs qu'il vouloit exécuter. L'arrangement étoit fait de maniere qu'il n'y eût point un faux ton dans l'exécution: y hazien cousus aullidos altos y baxos una musica ben entonada, che era eosa nueva y mucho de ver. Des singes, des ours, des loups, des cerfs, &c. dansoient sur un théatre porté dans un char au son de cet orgue bisarre: una gratiosa dansa de monos, ossos, lobos, ciervos, y otros animales salvajes dançando delaute y detras de una granjaula che en un carro tirava un quartago. Voyez Danse.

On a entendu de nos jours un choeur très - harmonieux, qui peint le croassement des grenouilles, & une imitation des différens cris des oiseaux à l'aspect de l'oiseau de proie, qui forme dans Platée un morceau de musique du plus grand genre. Voyez Ballet & Opéra.

Le chant naturel variant dans chaque nation selon les divers caracteres des peuples & la température différente des climats, il étoit indispensable que le chant musical, dont on a fait un art long - tems après que les langues ont été trouvées, suivît ces mêmes différences; d'autant mieux que les mots qui forment ces mêmes langues n'étant que l'expression des sensations, ont dû nécessairement être plus ou moins forts, doux, lourds, légers, &c. selon que les peuples qui les ont formés ont été diversement affectés, & que leurs organes ont été plus ou moins déliés, roides, ou flexibles. En partant de ce point, qui paroît incontestable, il est aisé de concilier les différences qu'on trouve dans la Musique vocale des diverses nations. Ainsi disputer sur cet article, & prétendre par exemple que le chant Italien n'est point dans la nature, parce que plusieurs traits de ce chant paroissent étrangers à l'oreille, c'est comme si l'on disoit que la langue Italienne n'est point dans la nature, ou qu'un Italien a tort de parler sa langue. Voyez Chantre, Exécution, Opéra.

Les instrumens d'ailleurs n'ayant été inventés que pour imiter les sons de la voix, il s'ensuit aussi que la Musique instrumentale des différentes nations doit avoir nécessairement quelque air du pays où elle est composée: mais il en est de cette espece de productions de l'Art, comme de toutes les autres de la nature. Une vraiment belle femme, de quelque nation qu'elle soit, le doit paroître dans tous les pays où elle se trouve; parce que les belles proportions ne sont point arbitraires. Un concerto bien harmonieux d'un excellent maître d'Italie, un air de violon, une ouverture bien dessinée, un grand choeur de M. Rameau, le Venite exultemus de M. Mondonville, doivent de même affecter tous ceux qui les entendent. Le plus ou le moins d'impression que produisent & la belle femme de tous les pays, & la bonne musique de toutes les nations, ne vient jamais que de la conformation heureuse ou malheureuse des organes de ceux qui voyent & de ceux qui entendent. (B)

Chant Ambrosien, Chant Grégorien; (Page 3:142)

Chant Ambrosien, Chant Grégorien; voyez Plein - chant. (S)

Chant, (Page 3:142)

* Chant, (Littérat.) c'est une des parties dans lesquelles les Italiens & les François divisent le poëme épique. Le mot chant pris en ce sens, est synonyme à livre. On dit le premier livre de l'Iliade, de l'Enéide, du Paradis perdu, &c. & le premier chant de la Jérusalem délivrée, & de la Henriade. Le Poëte épique tend à la fin de son ouvrage, en faisant passer son lecteur ou son héros par un enchaînement d'avantures extraordinaires, pathétiques, terribles, touchantes, merveilleuses. Il établit dans le cours du récit général de ces avantures, comme des points de repos pour son lecteur & pour lui. La partie de son poëme comprise entre un de ces points & un autre qui le suit, s'appelle un chant. Il y a dans un poëme épique des chants plus ou moins longs, plus ou moins intéressans, selon la nature des avantures qui y sont récitées. Il y a plus: il en est d'un chant comme du poëme entier; il peut intéresser davantage une nation qu'une autre, dans un tems que dans un autre, une personne qu'une autre. Il y auroit une grande faute dans la machine, ou construction, ou conduite du poëme, si l'on pouvoit prendre la fin d'un chant, quel qu'il fût, excepté le dernier, pour la fin du poëme; & il y auroit eu un grand art de la part du Poëte, & il en fût résulté une grande perfection dans son poëme, s'il avoit sû le couper de maniere que la fin d'un chant laissât une sorte d'impatience de connoître la suite des choses, & d'en commencer un autre. Le Tasse me paroît avoir singulierement excellé dans cette partie. On peut interrompre la lecture d'Homere, de Virgile, & des autres Poëtes épiques, à la fin d'un livre; le Tasse vous entraìne malgré que vous en ayiez, & l'on ne peut plus quitter son ouvrage quand on en a commencé la lecture. Il n'en faut pas inférer de - là que j'accorde au Tasse la prééminence sur les autres Poëtes épiques; je dis seulement que par rapport à nous, il l'emporte du côté de la machine sur Homere & Virgile qui, au jugement des Grecs & des Romains, l'auroient peut - être emporté sur lui, si la colere d'Achille, l'établissement des restes de Troie en Italie, & la prise de Jérusalem par Godefroi de Bouillon, avoient pû être des évenemens chantés en même tems, & occasionner des poëmes jugés par les mêmes juges. Il me semble que les Italiens ont plus de droit que nous d'appeller les parties de leurs poëmes épiques, des chants, ces poëmes étant divisés chez eux par stances qui se chantent. Les Gondoliers de Venise chantent ou plûtôt psalmodient par coeur toute la Jérusalem délivrée, & l'on ne chante point parmi nous la Henriade ou le Lutrin, ni chez les Anglois le Paradis perdu. Il suit de ce qui précede, que les différens chants d'un poëme épique devroient être entr'eux, comme les actes d'un poëme dramatique; & que, de même que l'intérêt doit croìtre dans le dramatique de scene en scene, d'acte en acte jusqu'à la catastrophe, il devroit aussi croître dans l'épique d'évenemens en évenemens, de chants en chants, jusqu'à la conclusion. Voyez Drame, Scene, Acte, Machine, Coupe, Poeme épique, &c.

Chant, (Page 3:142)

* Chant, (Belles - Lettres.) se dit encore dans notre ancienne poésie, de plusieurs sortes de pieces de vers, les unes assujetties à certaines regles, les autres n'en ayant proprement aucune particuliere. Il y a le chant royal, le chant de Mai, le chant nuptial, le chant de joie, le chant pastoral, le chant de folie. Voyez, dans Clément Marot, des exemples de tous ces chants.

Le chant royal suit les mêmes regles que la ballade, la même mesure de vers, le même mêlange [p. 143] de rime, & le même nombre de stances, si toutefois il est déterminé dans la ballade; il a aussi son vers de refrein & son envoi. Il ne differe, dit - on, de la ballade que par le sujet. Le sujet de la ballade est toûjours badin; celui du chant royal est toùjours sérieux. Cependant il y a dans Marot même un chant royal dont le refrein est, de bander l'arc ne guérit point la plaie, qui fut donné par Francois I. & dont le sujet est de pure galanterie. Voyez Ballade. Le chant de Mai est aussi une ballade, mais dont le sujet est donné; c'est le retour des charmes de la nature, des beaux jours & des plaisirs, avec le retour du mois de Mai. Selon que le poëte traite ce sujet d'une maniere grave ou badine, le chant de Mai est grave ou badin. Il y en a deux dans Marot, & tous les deux dans le genre grave. Le refrein n'est pas exactement le même à toutes les stances du premier; il est dans une stance en précepte, & dans l'autre en défense: loüez le none du Créateur; n'en loüez nulle créature. Cette licence a lieu dans la ballade, sous quelque titre qu'elle soit. Le chant nuptial n'est qu'une épithalame en stances, où quelquefois les stances sont en ballade, dont le refrein est ou varié par quelque opposition agréable, ou le même à chaque stance. Le chant de joie est une ballade ordinaire sur quelque grand sujet d'allégresse, soit publique, soit particuliere. Le chant pastoral, une ballade dont les images & l'allégorie sont champêtres. Le chant de folie n'est qu'une petite piece satyrique en vers de dix syllabes, où l'on chante ironiquement le travers de quelqu'un.

Chant, (Page 3:143)

Chant, (Medecine, Physiologie.) voyez Voix & Respiration; (Pathologie & Hygiene) voyez Exercice.

CHANTABOUN (Page 3:143)

CHANTABOUN, (Géog.) ville maritime d'Afie au rovaume de Siam, sur une riviere qui porte son même nom.

CHANTEAU (Page 3:143)

CHANTEAU, s. m. (Jurispr.) dans quelques coûtumes & anciens auteurs, signifie part ou plûtôt partage: c'est en ce dernier sens qu'il y est dit que le chanteau part le villain. La coûtume de la Marche rédigée en 1521, porte, article 153. qu'entre hommes tenant héritages serfs, ou mortaillables, le chanteau part le villain; c'est - à - dire, continue le même article, que quand deux ou plusieurs desdits hommes, parens, ou autres qui par avant étoient communs, font pain séparé par maniere de déclaration de vouloir partir leurs meubles, ils sont tenus & réputés divis & séparés quant aux meubles, acquêts, conquêts, noms, dettes, & actions.

La coutume d'Auvergne, chap. xxvij. article 7. porte que par ladite coûtume ne se peut dire ni juger aucun partage, avoir été fait entre le conditionné (c'est l'emphitéote main - mortable) & ses freres au retrait lignager par la seule demeure, séparé dudit conditionné & de ses autres freres ou parens, par quelque laps de tems que ce soit, s'il n'y a partage formel faît entre ledit conditionné & ses freres ou lignagers, ou commencement de partage par le partement du chanteau.

La disposition de cette coûtume fait connoître que le terme de chanteau ne signifie pas toûjours un partage de tous les biens communs, mais que le chanteau, c'est - à - dire une portion de quelque espece de ces biens qui est possédée séparément par un des mortaillables ou autres communiers, fait cesser la communauté qui étoit entre eux, tant pour ces biens que pour tous les autres qu'ils possedent par indivis.

Le terme de chanteau peut aussi être pris pour pain séparé, car chanteau en général est une portion d'une chose ronde; & comme les pains sont ordinairement ronds, le vulgaire appelle une piece de pain, chanteau; & de - là dans le sens figuré, on a dit chanteau pour pain à part ou séparé. En effet, dans plusieurs coûtumes, le feu, le sel, & le pain, partent l'homme de morte - main; c'est - à - dire, que quand les communiers ont leur feu leur sel, ou leur pain à part, ils cessent d'être communs, quoiqu'ils n'ayent pas encore partagé les biens communs entre eux. Voyez la coûtume du duché de Bourgogne, art. 90. Celle du Comté, art. 99. Celle de Nivernois, tit. viij. art. 13.

Il résulte de ces différentes explications que cette façon de parler, le chanteau part le villain, fignisie que le moindre commencement de partage entre communiers fait cesser la communauté, quoiqu'ils possedent encore d'autres biens par indivis. Voyez la pratique de Masuer, tit. xxxij. art. 20. Le gloss. de M. de Lauriere, au mot Chanteau. (A)

Chanteau, (Page 3:143)

* Chanteau, (Tailleur.) c'est ainsi que ces ouvriers appellent les especes de pointes qu'ils sont obligés d'ajoûter sur les côtés d'un manteau ou autre vêtement semblable, entre les deux lés du rap, tant pour lui donner l'ampleur nécessaire, que pour l'arrondir.

Chanteau, (Page 3:143)

* Chanteau, (Tonnell.) c'est entre les pieces du fond d'un tonneau ou autres vaisseaux ronds, celle du milieu, qui n'a point de semblable, & qui est terminée par deux segmens de cercles égaux.

CHANTEL - LE - CHASTEL (Page 3:143)

CHANTEL - LE - CHASTEL, (Géog.) petite ville France dans le Bourbonnois, sur la riviere de Boule. Long. 20. 35. lat. 46. 10.

CHANTELAGE (Page 3:143)

CHANTELAGE, s. m. (Jurispr.) est un droit dû au seigneur pour le vin vendu en gros ou à broche sur les chantiers de la cave ou du cellier, situés das l'étendue de sa seigneurie. Il en est parlé dans les statuts de la prevôté & échevinage de la ville de Paris, & au livre ancien qui enseigne la maniere de procéder en courlaye, où il est dit que le chantelage est un droit que l'on prend pour les chantiers qui sont assis sur les fonds du seigneur. Voyez Chopin, sur le chap. vüj. de la coûtunee d'Anjou, à la fin. Le droit de chantelage se payoit aussi anciennement, pour avoir la permission d'ôter le chantel du tonneau & en vuider la lie dans les villes; c'est ce que l'on voit dans le registre des péages de Paris. Chantelage, dit ce registre, est une coûtume aise anciennement, par laquelle il fut établi qu'il loisoit à tous ceux qui le chantelage payent, d'ôter le chantel de leur tonneau, & vuider la lie; & parce qu'il sembloit que ceux qui demeurent à Paris n'achetoient du vi que pour le revendre, & quand il étoit vendu ôter le chantel de leur lonneau, & ôter leur lie, pour ce fut mis le chantelage sur les demeurans & bourgeois de Paris. Voyez l'indice de Ragueau; & Lauriere, ibid. au mot chantelage. Dans des lettres d 9 Août 1359, accordées par Charles régent du royaume, les Arbalêtriers de la ville de Paris sont exemptés, pour leurs denrées, vivres, ou marchandises qu'ils font venir à Paris ou ailleurs, de tous droits de gabelles, travers, chantiées, &c. Ce mot chantiées signifie en cet endroit la même chose que chantelage: car dans des lettres du mois de Février 1615, accordées à ces mêmes Arbalêtriers, le terme de chantelage se trouve substitué à celui de chantiées. Voyez le recueil des ordonnances de la troisieme race, tome III. pag. 361. & la note de M. Secousse, ibid. (A)

CHANTELLE (Page 3:143)

CHANTELLE, s. f. (Jurisprud.) en quelques provinces est une taille personnelle dûe au seigneur par ses mortaillables à cause de leur servitude. Elle paroît avoir été ainsi nommée de chantel, qui signifie la même chose que lieu ou habitation, parce qu'elle se paye au seigneur par les serfs, pour la permission de demeurer dans sa seigneurie, & d'y posséder certains héritages; par exemple, suivant une charte de l'an 1279, les habitans de Saint - Palais en Berri payent douze ders à leur seigneur,

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