ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"74"> on prend vingt - quatre livres de la plus belle fleur de blé, dix livres d'alun, & trois livres de sel; on fait fondre l'alun avec le sel en particulier, dans un petit seau d'eau chaude; on a dix douzaines de jaunes d'oeufs, & trois livres d'huile d'olive: on fait de l'alun fondu avec le sel & de la farine, une pâte; on répand l'huile d'olive sur cette pâte; on délaye bien le tout ensemble: quant aux jaunes d'oeufs, il ne faut les mêler à la pâte délayée, que quand elle n'est presque plus chaude, & avoir soin d'en rendre le mêlange très - égal. Quant à sa consistence, il ne la lui faut pas si grande que celle du miel; il lui faut un peu plus de fluidité.

Si l'on a dix douzaines de peaux, on les divisera en cinq parties égales, qu'on appelle passées, de deux douzaines chacune; & quant à la quantité de pâte ou sauce qu'on aura préparée, on la divisera aussi en cinq parties ou platées. Pour passer, on prendra une des platées, qu'on divisera encore en deux demi - platées; on aura un cuvier assez grand pour que la peau y puisse être étendue; on aura près de soi les deux douzaines de peaux; on aura fait tiédir àpeu - près trois fois autant d'eau qu'on aura de sauce, c'est - à - dire la valeur de trois demi - platées: on mêlera cette eau tiede avec la demi - platée de sauce; on remuera bien le tout; on mettra alors les deux douzaines de peaux, où l'on aura répandu son mêlange; on les y trempera bien: pour cet effet, on y agitera les peaux jusqu'à ce qu'elles ayent bû toute là sauce. Pendant cette manoeuvre, le cuvier est incliné en - devant; & la manoeuvre se fait dans la partie basse du cuvier. Quand elle est faite, on prend les peaux, & on les repousse à la partie supérieure du fond, qui forme un plan incliné: là elles s'égouttent, & ce qui en sort se rend à la partie inférieure.

Quand elles sont suffisamment égouttées, on prend l'autre demi - platée, on y ajoûte à - peu - près deux fois autant d'eau tiede; on met le tout dans le même cuvier où sont les peaux; on remue bien; puis on prend chacune des peaux déjà passées & qu'on a mises égoutter à la partie supérieure du fond du cuvier, l'une après l'autre; on tient étendue avec les deux mains celle qu'on a prise, & on la trempe trois ou quatre fois dans la sauce, en l'y frottant bien. On met ensuite cette peau trempée ou passée, dans un autre endroit de la partie supérieure du fond du cuvier: on prend une autre peau; on l'étend avec les mains; on la trempe trois ou quatre fois en la frottant bien dans la sauce, & on la met sur la premiere; & ainsi de suite, jusqu'à ce que toute la passée soit finie. Quand toute la passée est finie, on ramene toutes les peaux du haut du fond du cuvier, dans le bas, & on leur fait achever de boire toute la sauce.

Quand les cinq passées sont faites, on les met toutes ensemble dans un cuvier, & on les foule, soit avec les piés, soit avec des pilons: cette foule dure environ un quart - d'heure. Quand on a bien foulé les peaux, on les laisse reposer dans le cuvier jusqu'au lendemain. Le lendemain, s'il fait beau, on les étend au soleil; s'il fait laid, on les laisse dans le cuvier à la sauce, où elles ne souffrent point: elles y peuvent rester jusqu'à quinze jours: si elles ne péuvent pas sécher dans un même jour, on les remet dans la sauce.

Quand elles sont seches, ce qui ne demande qu'un jour quand il fait très - beau, on tire environ une dixaine de seaux d'eau, qu'on met dans un cuvier; on prend les peaux seches par deux douzaines, & on les plonge dans l'eau, d'où on les retire sur le champ, de peur qu'elles n'en prennent trop. Quand elles n'en ont pas assez pris, on les y replonge une sèconde sois; puis on les broye ou foule aux piés sur une claie qui est à terre: dix douzaines de peaux ne se broyent pas en moins de trois heures.

Quand elles sont broyées, on les laisse reposer jusqu'au lendemain. Le lendemain, on leur donne encore un coup de pié; puis on les ouvre sur le alisson, du côté de la chair: on les fait sécber ensuite, en les étendant dans le grenier. Voyez, Plan. du Mégissier, ces peaux étendues dans le grenier. On en ouvre douze douzaines en un jour.

On les laisse étendues dans le grenier jusqu'au lendemain; puis on les broye encore fortement sur la claie. On les redresse ensuite sur le palisson du côté de la chair; un ouvrier en peut redresser jusqu'à quinze douzaines en un jour. Quand elles sont redressées, on les pare à la lunette, toûjours du côté de la chair. Ce qui s'en détache à la lunette, s'appelle du parun, & se vend aux Cordonniers, aux Tisserands, aux Cartiers qui en font de la colle. Le parun est blanc comme de la farine, si le pareur est un ouvrier propre; mais il n'est pas aussi fin.

Nous n'avons pas insisté ici sur ce que c'est que redresser au palisson, ouvrir sur le même instrument, & parer à la lunette, ces opérations se trouvant expliquées plus au long dans la premiere partie de cet article, où nous avons traité de l'art du Chamoiseur.

La police a pris quelques précautions contre la corruption de l'air, qui peut être occasionnée par le travail des peaux passées, soit en huile, soit en blanc, ou en mégie. La premiere, c'est d'ordonner à ces ouvriers d'avoir leurs tanneries hors du milieu des villes: la seconde, de suspendre leurs ouvrages dans les tems de contagion; & la troisieme, qui est particuliere peut - être à la ville de Paris, c'est de ne point infecter la riviere de Seine, en y portant leurs peaux.

Quant à leurs réglemens, il faut y avoir recours, si l'on veut s'instruire des précautions qu'on a prises, soit pour la bonté des chamois vrais ou faux, soit pour le commerce des laines: voyez aussi l'article Mégissier. Nous avons exposé l'art de Mégisserie & de Chamoiserie avec la derniere exactitude: on peut s'en rapporter en sûreté à ce que nous en venons de dire; le peu qu'on en trouvera ailleurs, sera très - incomplet & très - inexact. Si la manoeuvre varie d'un endroit à un autre, ce ne peut être que dans des circonstances peu essentielles, auxquelles nous n'avons pas crû devoir quelque attention. Il suffit d'avoir décrit exactement un art tel qu'il se pratique dans un lieu, & tel qu'il se peut pratiquer par - tout. Or c'est ce que nous venons d'exécuter dans cet article, qu'on peut regarder comme neuf; mérite que nous tâcherons de donner à tous ceux qui suivront sur les Arts, dans les troisieme, quatrieme, &c. volumes, comme nous avons fait dans les deux premiers; ce qui n'étant la partie de ce Dictionnaire ni la moins difficile, ni la moins pénible, ni la moins étendue, devroit être principalement examinée par ceux qui se proposeront de juger de notre travail sans partialité.

CHAMOND (Page 3:74)

CHAMOND, (saint) Géog. mod. petite ville de France dans le Lyonnois, au bord du Giez. Long. 22. 8. lat. 45. 28.

CHAMOS (Page 3:74)

* CHAMOS, s. m. (Myth.) nom d'une idole des Moabites; d'autres l'appellent Chemosh: Vossius dit que c'est le Comus des Grecs & des Romains: Bochard le confond avec leur Mercure, sur des conjectures érudites que nous ne manquerions pas de rapporter, si nous voulions donner un exemple de ce que la multitude des connoissances fournit de combinaisons singulieres à l'imagination, & de ce qu'on ne parviendroit pas à démontrer par cette voie. Ce souverain des Hébreux qui eut une sagesse à l'épreuve de tout, hors des femmes, Salomon, eut la complaisance pour une de ses maîtresses Moabite, d'éle<pb-> [p. 75] ver des autels à Chamos. Il y en a qui croyent que ce Chamos est le même que Moloch: sentiment qui differe beaucoup de l'opinion de Nicétas, qui prétend que l'idole Chamos étoit une figure de Venus.

CHAMOUZAY (Page 3:75)

CHAMOUZAY, (Géog. mod.) petite ville de France en Lorraine.

CHAMP (Page 3:75)

* CHAMP, s. m. se dit au simple d'un espace de terre cultivée, plus ou moins grand: plusieurs champs forment la piece de terre; plusieurs pieces forment un territoire. Comme les terres cultivées sont ordinairement hors de l'enceinte des villes, bourgs, & villages, on entend par aller dans les champs, se promener dans les champs, parcourir par exercice les terres cultivées qui sont aux environs des habitations. On dit aller aux champs, pour mener paître les bestiaux;

Si le Tasse, Virgile, & Ronsard, sont des ânes, Sans perdre en vains discours le tems que nous perdons,

Allons aux champs çomme eux, & mangeons des chardons.

De cette acception du mot champ ou espace de terre, ouvert de tout côté, on en a dérivé un grand nombre d'autres. Exemples.

Champ, (Page 3:75)

* Champ, (Hist. anc.) c'étoit un lieu ouvert dans la campagne où les jeunes gens s'assembloient pour y faire leurs exercices, & y célébrer certains spectacles, &c. & où les citoyens tenoient aussi leurs comices, ou les assemblées dans lesquelles il s'agissoit de délibérer de quelque affaire publique. On comptoit à Rome un grand nombre de champs: il y avoit le champ d'Agrippa, le champ Brutien, le Caudetan, le Lanatarius, le Martius, le Pecuarius, le Setarius, le Viminalis, &c. mais par le nom de champ sans addition, on entendoit toûjours le champ de Mars.

Le campus Agonius étoit situé entre la vallée Martia & le cirque de Flaminius: ce n'étoit qu'un marché.

Le champ d'Agrippa étoit dans la septieme région de la ville, entre le capitole & ce qu'on appelle aujourd'hui le collége Romain.

Le champ Brutien ou Brytien étoit dans la quatorzieme région de la ville, au Janicule, près du faubourg Brutianus, à peu de distance des murs de la ville. Il avoit été ainsi nommé des Prutiens, ou comme d'autres le prétendent, d'un Brutus qui l'avoit fait orner.

Le Caudetanus se trouvoit aussi dans la quatorzieme région, & avoit été ainsi nommé d'un petit bouquet de bois, entre lequel on imagina quelque ressemblance avec la forme de la queue d'un cheval.

Le Calimontanus étoit dans la seconde région; on en ignore la place, à moins que ce champ n'ait été le même que le campus Martialis.

L'Esquilinus étoit dans la cinquieme région, au haut du mont Esquilin, où l'on étoit dans l'usage d'enterrer la populace & les pauvres: Pantolabum scurram, Nomentanumque nepotem. Le champ Esquilin fut hors de la ville jusqu'au tems de Servius Tullins, sous lequel il y fut réuni: on y éleva dans la suite des édifices, & Mécene finit par en faire ses jardins; ainsi qu'Horace nous l'apprend dans la satyre Olim truncus eram, &c. où l'on voit encore que c'étoit - là que les magiciens alloient faire leurs incantations nocturnes.

Le Figulinus étoit dans la treizieme région, entre le Tibre & le mont Aventin: il a pris son nom des Potiers qui habitoient ce quartier.

Le campus Flora, ou champ de Flore étoit dans la neuvieme région: ce fut là qu'on bâtit le théatre de Pompée: on y publioit les lois, les édits, & les reglemens du sénat; on y célébroit les jeux appellés floralia en l'honneur d'une des affranchies de Pompée, d'où il fut appellé campus Flora; ou d'une courtisane de l'ancienne Rome qui avoit amassé assez d'argent pour fonder des jeux en sa mémoire. Ces jeux furent institués; mais dans la suite des tems, la gravité romaine offensée de ces fêtes, tâcha d'en abolir la honte, en les perpétuant non à l'honneur de la courtisane, mais de la déesse des fleurs; cependant les jeux continuerent toûjours à se ressentir de leur premiere institution, par la liberté des actions & des paroles qui y regnoient.

Le campus Horatiorum; on n'en connoît pas la place: c'étoit peut - être l'endroit du combat des Horaces & des Curiaces.

Le campus Jovis; c'est, selon quelques - uns, le même que le campus Martius major, où Jupiter vengeur avoit en effet son temple: d'autres, au contraire, veulent que ce fut le campus Martius minor, où il y avoit une statue colossale de Jupiter.

Le Lanatarius étoit dans la douzieme région; il fut ainsi nommé, à ce qu'on dit, des marchands de laine qui y étoient établis ou qui s'y assembloient.

Le campus Martialis étoit dans la seconde région, sur le mont Calius. Il fut nommé martialis, de Mars dont on y célébra les equiria, lorsque le champ de Mars fut inondé par le Tibre. C'est actuellement la place de devant l'Eglise de S. Jean de Latran.

Le campus Martius, champ de Mars, qui se nommoit par excellence campus ou campus Martius major, pour le distinguer du campus Martius minor, étoit dans la neuvieme région; il fut consacré à Mars par Romulus même suivant quelques - uns; & suivant d'autres, par le peuple après l'expulsion de Tarquin le superbe, qui se l'étoit approprié & qui le faisoit cultiver. Quoi qu'il en soit, ce n'étoit dans les commencemens qu'une prairie où la jeunesse Romaine alloit s'exercer, & où l'on faisoit paître les chevaux; les Romains en firent dans la suite un des principaux lieux de leurs assemblées, & un des endroits de Rome les plus remarquables par les décorations. Il s'étendoit depuis la porte Flaminia jusqu'au Tibre, & comprenoit ce qu'on appelle aujourd'hui la place Borghese, le Panthéon, les places di Carlo Farnese, di Ponti, di Navone, Nicosea, &c. avec la longue rue di Scrofa, & l'entrée du pont S. Ange. Il étoit hors de la ville; Jules César eut le dein de l'y renfermer; mais Aurélien passe pour l'avoir exécuté, en conduisant les murs de la ville depuis la porte Colline jusqu'au Tibre. Ce champ étoit très - beau par sa situation; c'étoit le lieu des exercices militaires. On y luttoit; lorsque les jeunes gens étoient couverts de sueur & de poussiere, ils se jettoient dans le Tibre qui l'arrosoit. C'étoit - là que se tenoient les comices ou assemblées générales du peuple. Plusieurs grands hommes y avoient leurs sépultures. Les statues y étoient si nombreuses, que pour en peindre l'effet, les auteurs ont dit qu'on les eût prises de loin pour une armée. L'empereur Auguste y avoit son tombeau; il étoit encore remarquable par un obélisque surmonté d'une boule dorée qui servoit de gnomon à un cadran solaire. Cet obélisque, après avoir resté pendant plusieurs siecles enseveli sous les ruines de l'ancienne Rome, & sous les maisons de la Rome nouvelle, fut relevé par les soins de Benoît XIV. aujourd'hui régnant. Ce pontife acheta toutes les maisons qui le couvroient, & le rétablit dans son ancienne splendeur. Le campus Martius comprenoit différens portiques, la villa publica, le Panthéon, les thermes Néroniens, les thermes d'Agrippine, le théatre de Pompée, le cirque Flammien, la colonne d'Antonin, la basilique d'Antonin, le Diribitorium, différens temples, & une infinité de choses remarquables. C'est aujourd'hui un des quartiers de Rome les plus habités.

Le campus Martius minor étoit une partie du campus Martius major, & la même chose que le campus Tiberinus qui avoit été donné au peuple par Caia

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