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CENSEUR (Page 2:817)
CENSEUR, s. m. (Hist. anc.) l'un des premiers magistrats de l'ancienne Rome, qui étoit charge de faire le dénombrement du peuple, & la répartition des taxes pour chaque citoyen. Ses fonctions avoient encore pour objet la police, & la réform tion des moeurs dans tous les ordres de la république.
Le nom de censeur vient de censere, estimer, évaluer, parce que cet officier évaluoit les biens de chacun, enregistroit leurs noms, & distribuoit le peuple par centuries. Selon quelques auteurs, ce terme est dérivé de l'inspection que les censeurs avoient sur les moeurs & sur la police.
Il y avoit à Rome deux censeurs. Les premiers furent créés en 311, c'étoient Papirius & Sempronius: Le sènat qui voyoit que les consuls étoient assez oc<pb-> [p. 818]
L'autorité des censeurs étoit fort étendue, puisqu'ils avoient droit de reprendre les citoyens les plus élevés en dignité; aussi cette charge ne s'obtenoit - elle qu'après qu'on avoit passé par toutes les autres. On trouva étrange que Crassus en eût été pourvû avant que d'avoir été ni consul ni préteur. L'exercice de la censure duroit d'abord cinq ans: mais cet usage ne dura que neuf ans; le dictateur Mamercus ayant porté, l'an de Rome 420, une loi qui réduisit le tems de la censure à dix - huit mois; ce qui fut dans la suite observé à la rigueur.
Outre les fonctions des censeurs, dont on a déjà parlé, ils étoient spécialement chargés de la sur - intendance des tributs, de la défense des temples, du soin des édifices publics, de réprimer le libertinage, & de veiller à la bonne éducation de la jeunesse. Si quelque sénateur deshonoroit par ses débauches l'éclat de cet illustre corps, ils avoient droit de l'en chasser; & l'histoire fournit des exemples de cette sévérité. Ils ôtoient aux chevaliers leur cheval, & la pension que leur faisoit l'état, s'ils se comportoient d'une maniere indigne de leur rang; & quant au menu peuple, ils en faisoient descendre les membres d'une tribu distinguée dans une plus basse, les privoient du droit de suffrage, ou les condamnoient à des taxes & des amendes.
Cette autorité n'étoit pourtant pas sans bornes, puisque les censeurs eux - mêmes étoient obligés de rendre compte de leur conduite aux tribuns du peuple, & aux grands édiles. Un tribun fit mettre en prison les deux censeurs M. Furius Philus, & M. Attilius Regulus. Enfin, ils ne pouvoient pas dégrader un citoyen sans avoir préalablement exposé leurs motifs, & c'étoit au sénat & au peuple à décider de leur validité. (G)
A Lacédémone, dit l'illustre auteur de l'Esprit des Lois, tous les vieillards étoient censeurs. Le même auteur observe que ces magistrats sont plus nécessaires dans les républiques, que dans les monarchies & dans les états despotiques. La raison en est facile à appercevoir.
La corruption des moeurs détruisit la censure chez les Romains; cependant César & Auguste voyant que les citoyens ne se marioient pas, rétablirent les censeurs qui avoient l'oeil sur les mariages. (O)
Censeurs (Page 2:818)
Ces censeurs ont été établis dans les différens états pour examiner les ouvrages littéraires, & porter leur jugement sur les livres qu'on se propose d'imprimer, afin que rien ne soit rendu public, qui puisse séduire les esprits par une fausse doctrine, ou corrompre les moeurs par des maximes dangereuses. Le droit de juger des livres concernant la religion, & la police ecclésiastique, a toûjours été attaché en France à l'autorité épiscopale: mais depuis l'établissement de la faculté de Théologie, il semble que les évêques ayent bien voulu se décharger de ce soin sur les docteurs, sans néanmoins rien diminuer de leur autorité
Les livres s'étant considérablement multipliés au commencement de l'année 1600, le nombre des docteurs chargé de les examiner fut augmenté; il en résulta différens abus, ces docteurs se dispenserent du rapport qu'ils étoient obligés de faire à la faculté assemblée, & approuverent des livres qu'elle trouva repréhensibles. Pour remédier à cette espece de desordre, la faculté publia un decret par lequel elle défendit à tous docteurs de donner inconsidérément leur approbation, sous peine de perdre pendant six mois l'honoraire & les priviléges attachés au doctorat, & pendant quatre ans le droit d'approuver les livres: elle fit encore plusieurs autres reglemens, mais qui ne firent qu'aigrir les esprits. Enfin en 1623 l'harmonie cessa tout - à - fait dans la faculté à l'occasion d'une question de Théologie, qui partagea tous les docteurs; il s'agissoit de décider si l'autorité du pape est supérieure ou inférieure à celle des conciles. Chacun prit parti dans cette affaire, chacun écrivit pour soûtenir son opinion; le docteur Duval, chef de l'un des deux partis, craignant de se voir accabler par les écrits multipliés de ses adversaires, obtint du roi des lettres patentes, en 1624, qui lui attribuerent, & à trois de ses confreres, à l'exclusion de tous autres, le droit d'approuver les livres, avec une pension de 2000 livres à partager entr'eux. Ces lettres de création chagrinerent la faculté, qui se voyoit dépouiller d'un droit qu'elle croyoit devoir lui appartenir toûjours. La pension d'ailleurs accordée aux quatre nouveaux censeurs, lui parut deshonorante pour des gens consacrés par état au maintien de la saine doctrine. Elle fit remontrances sur remontrances, & ne cessa de demander avec instance la révocation de ces lettres: mais elle ne put l'obtenir; le roi au contraire les confirma par de nouvelles, dans lesquelles il étoit dit que par la suite ces quatre censeurs créés par lettres patentes, seroient pris dans la maison de Sorbone, & élûs à la pluralité des voix dans une assemblée à laquelle seroient appellés deux docteurs de la maison de Navarre. Cette espece d'adoucissement ne satisfit pas encore la faculté; elle continua, mais inutilement, les sollicitations. La discorde régna plus que jamais parmi les docteurs, & pendant plus de trois ans, les nouveaux censeurs essuyerent tant de desagrémens de la part de leurs confreres, que Duval, en 1626, prit enfin le parti de se démettre en pleine assemblée de ses fonc<pb-> [p. 819]
Stabant orantes primi transmittere cursum, Tendebantque manus ripoe ulterioris amore. Navita sed tristis nunc hos nunc accipit illos: Ast alios longe summotos arcet arena.
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