ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"611">

Lorsque les moules sont retirés de la fosse, on les casse à coups de marteau pour découvrir la piece qu'ils renferment. La figure se montre ensuite; & comme elle est brute en plusieurs endroits, on se sert de ciseaux bien acérés & de marteaux, pour couper toutes les superfluités & les jets du métal; & avec le tems, on donne à la piece toute la perfection que l'on veut. Lorsqu'elle commence à avoir une forme un peu réguliere, ce qui s'appelle être décrottée, on la met à l'alésoir pour lui donner le calibre qu'elle doit avoir. Voyez Alésoir. On perce ensuite sa lumiere avec une espece de foret particulier: après quoi on fait l'épreuve de la piece. Voyez Epreuve. Mémoires d'Artillerie par Saint - Remy.

On n'a pas toûjours fondu le canon avec un noyau ou un vuide dans le milieu: il y a eu des Fondeurs qui l'ont coulé massif; on voit même dans les Mémoires de M. de Saint - Remy, la figure de la machine dont ils se servoient pour former l'ame de la piece. Cette méthode fut abandonnée, suivant cet auteur, pour revenir à l'ancienne: mais le sieur Maritz a obtenu depuis quelques années la permission de fondre les pieces massives. On prétend qu'il a inventé une machine plus parfaite que celle dont il est fait mention dans les Mémoires de M. de Saint - Remy, pour les forer. Voyez Noyau.

Lorsque la piece se coule massive, le moule sé forme de la même maniere que s'il devoit avoit un noyau. On ne fait que supprimer ce noyau.

On joint ici une table de ce que le Roi paye actuellement en France pour la façon des pieces de canon dans les différens arsenaux du royaume: le prix des pieces de la fonderie de Strasbourg est plus considérable que celui des autres, parce qu'elles y sont coulées massives & forées avec la machine du Sr Maritz. [omission: table; to see, consult fac-similé version]

Les métaux sont fournis par le Roi aux commissaires des fontes; il leur est accordé dix pour cent de déchet sur tous les métaux qu'ils livrent en ouvrages neufs, faits, parfaits, & reçûs.

Le Roi fournit aussi les outils & ustensiles de fonderie: mais les commissaires des fontes sont chargés de pourvoir à leurs frais au radoub & à l'entretien des outils & ustensiles qui leur sont remis en bon état, & dont on les charge par un inventaire en bonne forme.

Le Roi paye à Douay & à Perpignan 3 sous, à Lyon & à Strasbourg 3 sous 6 deniers de façon pour chaque livre de métal pesant, pour les petits ouvrages, comme poulies, boîtes a roüage, mortiers & pilons pour compositions, boîtes à signaux, & autres petits ouvrages à l'usage de l'Artillerie.

Les pieces de canon, mortiers, & pierriers, sont portés aux lieux destinés pour leur épreuve, & rapportés dans les fonderies aux dépens du Roi, à l'exception des pieces qui sont rebutées, que les commissaires des fontes sont obligés de faire rapporter à leurs frais & dépens.

Dans les cas pressans, & lorsqu'il est ordonné aux commissaires des fontes de ne point reparer les pieces, ils sont tenus de les livrer brutes; & alors il leur est rabattu 50 livres par piece de 24, de 16 & de 12, & 25 livres par chacune piece de calibre inférieur, ainsi que pour les mortiers & pierriers. Mémoires d'Artillerie de Saint - Remy, troisieme édition. (Q)

* Lorsque la piece est finie, on perce la lumiere: pour cet effet, on renverse la piece de côté, de maniere qu'un des tourillons soit tourné vers la terre. Elle est posée sur des chantiers, l'endroit où se doit percer la lumiere correspondant à la pointe du foret quand il est monté sur la bascule, comme on voit Pl. I. fig. 2.

Suivant l'ordonnance du 7 Octobre 1732. le canal de la lumiere doit être pratiqué dans le milieu d'une masse de cuivre rouge, pure rosette, bien écroüi, & qu'on a placée dans le moule à la place où devoit être faite la lumiere. On a préféré le cuivre rouge à la matiere même du canon, parce qu'il résiste davantage à l'effort de la poudre.

La lumiere doit être percée de maniere qu'elle forme un angle obtus de 100 degrés avec l'extérieur de la piece vers la volée. C'est à quoi l'ouvrier doit faire attention en perçant, afin de diriger son foret convenablement.

Dans les pieces de 12, le canal de la lumiere doit aboutir à 8 lignes du fond de la lumiere. Dans celles de 8 à 7 lignes, & dans celles de 4 à 6 lignes.

Dans celles de 24 & de 16 où il y a de petites chambres, à 9 lignes du fond de la petite chambre dans celle de 24, & à 8 lignes dans celle de 16.

Le foret dont on se sert est le même que oelui des Serruriers; sa partie tranchante est seulement en langue de serpent.

Comme la force d'un homme ne seroit pas suffisante pour pousser le foret & le faire mordre, on se sert de la machine qu'on voit fig. 1. elle s'appelle bascule; & s'en servir, c'est forer à bascule.

La palette G est tenue fortement appliquée au foret par le levier A B C & le poids D.

* Quand la lumiere est faite, on procede à l'épreuve: pour cet effet, on choisit un lieu terminé par une butte de terre assez forte pour arrêter le boulet. [p. 612]

On place la piece à terre sur un chantier, & on la tire trois fois. La premiere charge de poudre est de la pesanteur du boulet. Après la premiere épreuve, on y brûle encore un peu de poudre en - dedans pour la flamber; on y jette de l'eau sur le champ; on bouche la lumiere; on presse cette eau avec un écouvillon, & l'on examine si elle ne s'échappe par aucun endroit.

On prend ensuite le chat: c'est un morceau de fer soit à trois, soit à deux griffes, comme on le voit fig. 3. 4. 5. du calibre de la piece, que l'on conduit partout pour trouver les chambres. On ne peut user de la bougie que pour les petites pieces, la fumée l'éteignant dins les grandes.

On n'éprouve les pieces de la nouvelle invention qu'avec une charge de poudre des trois quarts du poids du boulet.

On substitue quelquefois au boulet des cylindres de terre grasse du calibre de la piece, & d'environ deux piés de long.

Le chat de la fig. 5. est à l'usage de toute sorte de pieces, par la commodité qu'on a d'étendre ou de resserrer ses griffes par le moyen de l'anneau dans lequel elles sont passées, & du ressort qui est placé entre elles.

Quand on s'est assûré par le chat qui se trouve arrêté dans l'intérieur de la piece, qu'il y a chambre, on connoît la profondeur de la chambre de la maniere suivante: on prend le chat simple de la fig. 3. on éleve sur sa plaque de la terre - glaise jusqu'à la hauteur du bout de la griffe; vous conduisez votre griffe dans cet état dans la chambre; vous l'y faites entrer le plus que vous pouvez: quand elle y est bien enfoncée, vous retirez votre chat; les bords de la chambre appuient contre la glaise, & la détachent de la griffe; & la partie découverte de la griffe marque la profondeur de la chambre.

* L'on met des grains aux lumieres des pieces, en les alesant d'un trou d'environ deux pouces; cela fait, on fait couler par la bouche du canon de la cire au fond de l'ame, lorsque l'épaisseur de derriere de la culasse n'est pas assez considérable. On met sur cette cire du sable un peu moite: on le frappe avec un refouloir jusqu'à la hauteur des anses; on fait chauffer la piece; on place au - dessus un écheno de terre; la piece est à deux piés au dessous de l'écheno qui y conduit le métal. Il y a dans le fourneau à peu près 800 livres de métal. On pratique un gros jet pour la lumiere; elle s'abbreuve de métal par ce jet; on la laisse refroidir: on enleve ce qu'il y a de trop, & on fore une nouvelle lumiere.

Banii, fondeur Polonois, s'y prend autrement: il creuse la lumiere en écrou avant que d'y couler le métal; le métal s'engage si bien dans ces tours ou pas d'écrou, qu'il n'en peut être chassé.

On a proposé d'autres moyens que les précédens pour mettre des grains, mais qui ont tous leurs invéniens. M. Gor, commissaire des fontes de Perpignan, en proposa un en 1736, par le moyen duquel le grain se met à une piece en moins de quatre heures sans la démonter: l'essai s'en fit le deux Mai, & il fut heureux.

Lorsqu'on refond des pieces, il s'agit de les mettre en tronçons pour les jetter dans le fourneau; pour cela, on fait une rainure à la piece dans l'endroit où l'on veut la couper avec une tranche & le marteau; puis on fait une maçonnerie seche de quatre briques d'épaisseur: on y place la piece en équilibre; on remplit de charbon allumé la maçonnerie; on fait chauffer la piece jusqu'à lui donner la couleur de cerise; puis on éleve un gros poids avec la chevre, qu'on laisse retomber à plomb sur la piece qui en est brisée.

* Des lavures. Dans les lieux où l'on fond & où on alese les canons, il reste des grains, des sciures, & autres pieces de métal mêlées avec les ordures. Il en reste aussi dans les fourneaux, attaché au fond de l'atre, qu'on appelle gâteau. La maniere de séparer ces portions métalliques s'appelle laver; & ces portions métalliques séparées s'appellent lavures. Pour laver, on fait passer le ramas de matieres hétérogenes tirées de l'attelier de l'alesoir des terres de la Fonderie, &c. par plusieurs eaux; & on met au moulin ce qui sort des eaux. Il y a deux sortes de moulins; la premiere n'a rien de particulier, elle ressemble aux moulins à cidre. C'est une meule de ser coulé, d'environ trois pîés de diametre, sur quinze pouces d'épaisseur, posée verticalement sur une cuvette coulée aussi de fer, & assise sur une maçonnerie. Les rebords de la cuvette ont six pouces de haut: un levier passe au centre de la meule, la traverse, & se rend dans un arbre vertical mobile sur lui même, & soûtenu par en haut dans une solive où entre son tourillon, & par en bas sur une crapaudine placée au centre de la cuvette. Deux hommes s'appliquent au levier, & font tourner avec l'arbre la meule qui écrase les lavures: quand elles sont bien écrasées on les relave; puis on les fond pour les mettre en saumon. Il y a une autre sorte de moulin qu'on voit Plan. II. de la Fonderie de canons.

B B, baquet à laver les lavures.

C C, pilons qui écrasent dans l'auger D D les lavures.

A, arbre qui meut les pilons.

E, grande roue mûe par des hommes.

F, lanterne qui fait mouvoir la roue E.

G, autre lanterne fixée sur le même arbre que la lanterne F, & qui fait mouvoir l'arbre A, qui fait hausser les pilons C, C, C, d'où l'on voit que cette machine à laver, n'est autre chose que celle à bocarder des grandes fonderies & usines placées aux environs des mines.

Les lavures sont portées, comme nous avons dit, au fourneau d'affinage, qu'on voit fig. 3. même Plan.

F, fourneau.

G H, espece de rigoles où l'on jette la matiere & le charbon pêle - mêle.

I, un soufflet.

K, levier à mouvoir le soufflet.

Voilà tout ce qui peut concerner la fonte des canons. Pour l'entendre bien parfaitement, il ne seroit pas hors de propos d'en faire précéder la lecture par celle de la fonte des grandes statues en bronze. Voy. Bronze. Quant à la maniere de charger le canon, voyez Charge; & pour celle de le mettre en situation nécessaire pour que le boulet atteigne dans un lieu désigné, voyez Pointer.

On croit que l'on n'a commencé à se servir de canons qu'en 1350 sur la mer Baltique; quoi qu'il en soit, il est certain qu'ils furent employés en 1380 pendant la guerre des Vénitiens avec les Génois. Six ans après, il en passa quelques - uns en Angleterre sur deux vaisseaux François pris par ces insulaires. Les Anglois en firent de fer au commencement du seizieme siecle. (Q)

Canon (Page 2:612)

Canon de la nouvelle invention ou à l'Espagnole: on appelloit ainsi des pieces imaginées vers la fin du siecle dernier, qui avoient une chambre au fond de l'ame, en forme de sphere un peu applatie. Ces canons étoient donc plus courts que les autres.

L'objet qu'on s'étoit proposé dans cette invention, étoit de chasser le boulet dans un canon plus court, moins pesant, & par conséquent plus aisé à transporter que les anciens, avec la même force que dans les canons ordinaires.

Pour cela on faisoit aboutir la lumiere à peu - près vers le milieu de la chambre sphérique, afin qu'il s'enflammât une plus grande quantité de poudre à la fois, que lorsque l'ame du canon étoit par - tout uniforme.

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.