RECHERCHE | Accueil | Mises en garde | Documentation | ATILF | ARTFL | Courriel |
CAMÉLÉON (Page 2:569)
CAMÉLÉON, cameleo, s. m. (Hist. nat. Zoolog.)
petit animal du genre des animaux à quatre piés qui
sont des oeufs, comme le crocodile & le lézard, avec
lesquels il a beaucoup de ressemblance. Voyez
Le caméléon habite dans les rochers: ce qu'il a
de plus merveilleux, c'est le changement de couleur
qu'il éprouve à l'approche de certains objets.
Il est ordinairement verd, tirant sur le brun vers
les deux épaules, & d'un verd - jaune sous le ventre,
avec des taches quelquefois rouges quelquefois
blanches. Sa couleur verte se change souvent en
un brun foncé, sans qu'il reste rien de la premiere
couleur: les taches blanches disparoissent aussi quelquefois,
ou changent seulement en une couleur
plus obscure, qui tire sur le violet, ce qui arrive ordinairement
lorsqu'il est épouvanté. Lorsqu'il dort
sous une couverture blanche, il devient blanc,
mais jamais ni rouge ni bleu; il devient aussi verd,
brun ou noir, si on le couvre de ces couleurs. Telles sont au moins les relations ordinaires qu'on a
données de ce phenomène: mais il me paroît exagéré;
& avant que d'en entreprendre l'explication,
il faudroit bien constater le fait. Le P. Feuillée.
Minime, par exemple, prétend dans son Journal
d'observations physiques, mathématiques & botaniques,
que le changement de couleurs de cet animal vient
des divers points de vûe où l'on le regarde, ce qui
n'est point aussi merveilleux que ce qu'en avoient
publié les anciens (Mém. de Trevoux, Août 1727.
pag. 1419.). M. Souchu de Rennefort assûre dans
son Histoire des Indes Orientales, que les caméléons
prennent par les yeux les couleurs des objets sur
lesquels ils s'arrêtent (Hist. des ouvr. des Sav. Mars
1688. tom. II. p. 308.). Un autre auteur avance
qu'il n'est pas vrai que le caméléon change de couleur,
suivant les choses sur lesquelles il se trouve:
mais ce changement arrive, selon lui, suivant les
différentes qualités de l'air froid ou chaud qui l'environne
(Rec. d'Hist. & de Litter. tom. III. p. 73.)
M
Il y a en Égypte des caméléons qui ont onze à
douze pouces, y compris la queue; ceux d'Arabie
& du Mexique ont six pouces seulement ».
On ne sait pourquoi les Grecs ont donné à une bête aussi vile & aussi laide, d'aussi beaux noms que ceux de petit - lion ou de chameau - lion. Cependant on a soupçonné que c'étoit parce qu'elle a une crête sur la tête comme le lion: mais cette crête ne paroît à la tête du lion, qu'après que les muscles des tempes ont >é enlevés. On a aussi prétendu que c'est parce que le caméléon prend les mouches, comme le lion chasse & devore les autres animaux, qu'il a été comparé au lion; de même que le formica - leo.
Les caméléons ont les jambes plus longues que le crocodile & le lézard: cependant ils ne marchent aisément que sur les arbres. On en a observé de vivans, qui avoient été apportés d'Égypte. Le plus grand avoit la tête de la longueur d'un pouce & dix lignes. Il y avoit quatre pouces & demi depuis la tête jusqu'au commencement de la queue. Les piés avoient chacun deux pouces & demi de long, & la queue étoit de cinq pouces. La grosseur du corps se trouvoit différente en différens tems; il avoit quelquefois deux pouces depuis le dos jusqu'au - dessous du ventre; d'autres fois il n'avoit guere plus d'un pouce, parce que le corps de l'animal se contractoit & se dilatoit. Ces mouvemens étoient non - seulement dans le thorax & le ventre, mais encore dans les bras, les jambes & la queue; ils ne suivoient pas ceux de la respiration, car ils étoient irréguliers comme dans les tortues, les grenouilles, & les lézards. On a vû ici des caméléons rester enflés pendant plus de deux heures, & demeurer desenflés pendant un plus long tems; dans cet état ils paroissent si maigres, qu'on croiroit qu'ils n'auroient que la peau appliquée sur leurs squeletes. On ne peut attribuer ces sortes de contractions & de dilatations qu'à l'air que respire l'animal: mais on ne sait pas comment il peut se répandre dans tout le corps entre la peau & les muscles; car il y a toute apparence que l'air forme l'enflure comme dans la grenouille. Quoique le caméléon qui a été observé, parût fort maigre lorsqu'il étoit desenflé, on ne pouvoit cependant pas sentir le battement du coeur. La peau étoit froide au toucher, inégale, relevée par de petites bosses comme le chagrin, & cependant assez douce,
Lorsque le caméléon avoit été à l'ombre & en repos depuis long tems, la couleur de tous les grains de sa peau étoit d'un gris - bleuâtre, excepté le dessous des pattes qui étoit d'un blanc un peu jaunâtre, & les intervalles entre les amas de grains du dos & de la tête étoient d'un rouge pâle & jaunâtre, de même que le fond de la peau.
La couleur grise du caméléon changeoit lorsqu'il étoit exposé au soleil. Tous les endroits qui en étoient éclairés prenoient, au lieu de leur gris bleuâtre, un gris plus brun & tirant sur le minime; le reste de la peau changeoit son gris en plusieurs couleurs éclatantes, qui formoient des taches de la grandeur de la moitié du doigt; quelques - unes descendoient depuis la crête de l'épine jusqu'à la moitié du dos; il y en avoit d'autres sur les côtés, sur les bras, & sur la queue; leur couleur étoit isabelle, par le mêlange d'un jaune pâle dont les grains se coloroient, & d'un rouge clair qui étoit la couleur du fond de la peau entre les grains. Le reste de cette peau, qui n'étoit pas exposée au soleil & qui étoit demeurée d'un gris plus pâle qu'à l'ordinaire, ressembloit aux draps mêlés de laines de plusieurs couleurs; car on voyoit quelques - uns des grains d'un gris un peu verdâtre, d'autres d'un gris minime, d'autres d'un gris bleuâtre qu'ils ont d'ordinaire; le fond demeuroit rouge comme auparavant. Lorsque le caméléon ne fut plus exposé au soleil, la premiere couleur grise revint peu - à - peu sur tout le corps, excepté le dessous des piés qui conserva sa premiere couleur, avec quelque teinte de brun de plus. Lorsqu'on le toucha, il parut incontinent sur les épaules & sur les jambes de devant plusieurs taches fort noires de la grandeur de l'ongle; quelquefois il devenoit tout marqueté de tàches brunes qui tiroient sur le verd. Après avoir été enveloppé dans un linge pendant deux ou trois minutes, il devint blanchâtre, ou plûtôt d'une couleur grise fort pâle, qu'il perdit insensiblement quelque tems après. Cette expérience ne réussit qu'une seule fois, quoiqu'elle fût répétée plusieurs fois en differens jours: on la tenta aussi sur d'autres couleurs, mais l'animal ne les prit pas. On pourroit croire qu'il ne pâlit dans le linge blanc, que parce qu'il s'y trouva dans l'obscurité, & parce que le linge étoit froid de même que l'air, qui se trouva plus froid le jour de cette expérience, qu'il ne le fut les autres jours où on la répéta.
La tête de ce caméléon étoit assez semblable à celle d'un poisson, parce qu'il avoit le col fort court, & recouvert par les côtés, de deux avances cartilagineuses assez ressemblantes aux ouies des poissons. Il y avoit sur le sommet de la tête une crête élevée & droite; deux autres au - dessus des yeux, contournées comme une S couchée; & entre ces trois crêtes deux cavités le long du dessus de la tête. Le museau formoit une pointe obtuse, & la mâchoire de dessous étoit plus avancée que celle de dessus. On voyoit sur le bout du museau, un trou de chaque côté pour les narines, & il y a apparence que ces trous servent aussi pour l'ouie. Les mâchoires étoient garnies de dents, ou plûtôt, c'étoit un os dentelé, qui n'a pas paru servir à aucune mastication, parce que l'animal [p. 571]
Le thorax étoit fort étendu en comparaison du ventre. Les quatre piés étoient pareils, ou s'il y avoit quelque différence, c'est que ceux de devant étoient pliés en arriere, & ceux de derriere en devant, de forte que l'on pourroit dire que ce sont quatre bras qui ont leur coude en dedans, y ayant dans chacun l'os du bras & les deux os de l'avant - bras. Les quatre pattes étoient composées chacune de cinq doigts, & ressembloient plûtôt à des mains qu'à des piés. Elles étoient néanmoins aussi larges l'une que l'autre, les doigts qui étoient deux à deux étant plus gros que ceux qui étoient trois à trois. Ces doigts étoient enfermés ensemble sous une même peau, comme dans une mitaine, & n'étoient point séparés l'un de l'autre, mais paroissoient seulement à travers la peau. La disposition de ces pattes étoit différente, en ce que celles de devant avoient deux doigts en dehors & trois en dedans, au contraire de celles de derriere, qui en avoient trois en dehors & deux en dedans.
Avec ces pattes il empoignoit les petites branches des arbres, de même que le perroquet, qui pour se percher partage ses doigts autrement que la plûpart des autres oiseaux, qui en mettent toûjours trois devant & un derriere; au lieu que le perroquet en met deux derriere de même que devant.
Les ongles étoient un peu crochus, fort pointus, & d'un jaune pâle; & ils ne sortoient que de la moitié hors la peau; l'autre moitié étoit cachée & enfermée dessous. Ils avoient en tout deux lignes & demie de long.
Le caméléon marchoit plus lentement qu'une tortue, quoique ses jambes fussent plus longues & moins embarrassées. On a cru que les animaux de cette espece pourroient aller plus vîte, & on a soupçonné que c'est la timidité qui les arrête. La queue de celui qui a été observé ressembloit assez à une vipere, ou à la queue d'un grand rat, lorsqu'elle étoit gonflée; autrement elle prenoit la forme des vertebres sur lesquelles la peau est appliquée. Lorsque l'animal étoit sur des arbres, il entortilloit sa queue autour des branches; & lorsqu'il marchoit, il la tenoit parallele au plan sur lequel il étoit posé, & il ne la laissoit traîner par terre que rarement.
On l'a vu prendre des mouches & autres insectes
avec sa longue langue; on a trouvé ces mêmes mouches
& des vers dans l'estomac & les intestins; il est
vrai qu'il les rendoit presque aussi entiers qu'il les
avoit pris: mais on sait que cela arrive à d'autres
animaux qui n'ont jamais été soupçonnés de vivre
d'air comme le caméléon. Ce préjugé n'est pas mieux
fondé que celui qui a rapport au changement de
couleurs qu'on a dit lui arriver par l'attouchement
des différentes choses dont il approche. Mém. de l'Acad. roy. des Sciences, tom. III. part. j. pag. 35. &
suiv. Voyez
The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.