ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"6:12"> garde contre les reins, & lui présenter la pointe au ventre.

On doit observer, en allant au désarmement, de ne saisir jamais le bras de son adversaire ni sa lame avec la main gauche; car en saisissant son bras, il peut se ren - dre maître de son épée & la reprendre de sa main gau - che par la garde ou par le fort de la lame; conséquem - ment il pourroit fournir un coup de pointe à bras rac - courci. Si on saisissoit sa lame, il pourroit aussi raccour - cir le bras, retirer son épée avec force & couper la main qui l'empoigneroit. A dire vrai, tous ces désarme - mens, dont on a donné l'explication, sont plus brillans dans une salle d'armes le fleuret à la main, lorsqu'ils sont exécutés avec jugement & précision, qu'utiles l'épée à la main. Cependant dans une affaire particuliere on peut s'en servir vis - à - vis de ceux qui s'abandonnent sur les coups qu'ils tirent, & qui ne se remettent pas en gar - de avec toute la vivacité necessaire. L'épée à la main, il faut préférer le croisé d'épée ou le coup de fouet; on ne risque rien; & si on ne fait pas sauter l'épée de la main de son adversaire, on a assez de jour pour le toucher au corps si on en a l'intention.

Observations sur les gauchers.

Il peut arriver à un droitier d'être fort embarrassé de se défendre contre un gaucher, parce que la fréquen - te habitude où on est de faire des armes entre droi - tiers donne au gaucher un avantage considérable. Il est rare d'avoir occasion de se mesurer avec un gaucher, car l'espece de ce dernier n'est pas nombreuse. Par la mê - me raison deux gauchers qui se mesureroient ensemble seroient embarrassés l'un & l'autre.

Pour obvier à cet inconvenient, il seroit bon qu'un maître d'armes accoûtumât ses écoliers à tirer des deux mains; c'est - à - dire que, lorsqu'un écolier manieroit bien son fleuret avec la main droite, il faudroit l'éxercer avec la main gauche. Cet exercice seroit difficile pour tout le monde, mais avec de la bonne volonté & en prenant quelque peine on parvient à un degré d'habileté, qui est avantageux pour soi & fait honneur à celui qui en - seigne.

Le maître d'armes devroit non - seulement donner le - çon des deux mains à ses écoliers, mais encore les ins - truire de cette sorte par des mouvemens d'assaut. Cette méthode les mettroit en état de se défendre des deux mains, & ils ne seroient jamais embarrassés vis à vis d'un adversaire, qui se présenteroit dans une position diffé - rente de la leur.

Lorsqu'un droitier & un gaucher font des armes en - semble, ils doivent avoir attention de défendre le de - hors des armes: ce côté étant plus foible que celui du dedans. Ils ont tous deux la facilité de donner le coup de fouet ou de faire le glissement de lame au - dehors des armes.

Si on donne le coup de fouet à propos, il est pres - qu'impossible que l'épée ne saute de la main, à moins que l'adversaire ne saisisse le tems qu'on donne ledit coup de fouet, soit pour dégager, soit pour tourner la main en tierce.

Il faut observer que le droitier doit tirer au gaucher quarte au lieu de tierce & tierce au lieu de quarte, c'est à - dire, qu'il doit tirer tous les coups du dedans au - dehors des armes, & ceux du - dehors au - dedans. Les mêmes regles sont pour le gaucher lorsqu'il tire ses coups au droitier. Par ce moyen la main sera toujours opposée à l'épée, & le corps & le visage seront à couvert.

De la garde allemande.

Dans la position de la garde allemande on a ordinai - rement la main tournée en tierce, le bras & le poignet sur la ligne de l'épaule, la pointe de l'épée à la ceintu - re de son adversaire, la hanche droite extrêmement ca - vée, le corps en avant, le genou droit plié & le jarret gauche tendu. Les allemands cherchent toujours l'épée loit de prime, soit de seconde, tirent dans cette position souvent à bras raccourci, tiennent la main gauche de - vant l'estomac & s'en servent pour parer au besoin, & aussi - tôt qu'il tirent l'épée, ils donnent un grand coup du tranchant sur la lame de leur adversaire afin de le dé - sarmer, s'ils le peuvent.

Defense contre la garde allemande.

Pour combattre cette garde, il faut se présenter hors de mesure, attaquer brusquement du pié & au - dedans des armes, tirer des demi - bottes au visage de son adver - saire afin de l'obliger de hausser davantage son poignet & profiter de ce tems pour dégager par - dessus le fort de son épée & lui tirer à fond un coup de seconde On peut aussi se mettre en garde en seconde, en tenant la pointe de l'épée droite à son aisselle, faire feinte du dehors au - dedans des armes par - dessus sa lame, & faire une attaque du pié dans le tems de la feinte pour le fai - realler plus promptement à l'épée: alors saisir ce tems pour faire un second dégagement par - dessus sa lame, & lui ti - rer un coup de seconde ou de quinte. S'il pare ce coup, on doit tripler le dégagement & lui tirer un coup de prime ou de quarte au - dedans des armes.

Si on veut attendre l'attaque, il faut se mettre en garde en tierce haute & la pointe dirigée à l'épaule droi - te de l'adversaire, ne pas s'ébranler des mouvemens qu'il pourroit faire, à moins qu'ils fussent assez écartés pour lui tirer sur le tems un coup droit. S'il se tenoit ferme dans sa garde, il faudroit lui donner assez de jour an dedans des armes pour l'engager d'y tirer: pour lors parer de prime ou de demi - cercle en traversant la ligne sur la droite & lui riposter vivement en tenant le poi - gnet dans la même position du coup qu'on aura paré.

S'il n'attaque pas, ou n'est pas ébranlé des attaques qu'on lui a fait, il faut se placer en tierce haute, com - me on l'a expliqué ci - devant, tourner subtilement la main de tierce en quarte en passant la pointe de l'épée par - dessus le fort de sa lame (ce qui forme un demi - cer - cle), frapper ferme du fort du dedans de l'épée sur sa lame & aussi - tôt lui tirer à fond un coup de quarte. De cette maniere il ne seroit pas difficile de lui faire sauter l'épée de la main.

S'il pare avec sa main gauche, on observera de ne point lui tirer au - dedans des armes, qu'on ne lui ait tiré auparavant une demi - botte soutenue, pour tromper la parade de sa main gauche.

De la garde italienne.

La garde ordinaire des italiens est fort basse, ils plient également les deux genoux, portent le corps au milieu des deux jambes, tiennent le poignet & la pointe de l'épée basse, raccourcissent assez le bras, mettent la main gauche devant la poitrine, s'en servent pour parer, & aussi - tôt ripostent.

Quoique cette garde leur soit ordinaire, ils la varient à tout moment pour embarrasser leur adversaire, en haus - sant le poignet à la hauteur de la ligne de l'épaule & de la pointe de l'épée, en tenant le poignet haut & la pointe fort basse, en faisant de grands mouvemens du corps & de la pointe, en tournant autour de celui avec qui il font des armes, tantôt par sa droite, tantôt par sa gauche, ou en avançant imperceptiblement le pié gau - che près du pié droit, & tirent des coups droits de vo - lée ou font des passes ou des voltes. Ils se fient beau - coup sur leur agilité & leur parade de la main gauche. C'est pour cela que deux italiens, qui se battent ensem - ble, se donnent très - souvent coup pour coup (ce qu'on appelle coups fourrés), ce qui arrive rarement entre bons tireurs, parce qu'ils savent chercher l'épée soit avec le contre - dégagement, soit avec le cercle, & qu'ils ont une prompte riposte.

Malgré cela, il n'est pas douteux que leur jeu embar - rasseroit même un habile homme, s'il ne prenoit pas les précautions qu'on expliquera ci - après.

Défense contre la garde italienne.

Pour se défendre contre le jeu d'un italien, il faut avoir beaucoup de sens froid & se mettre dans une po - [p. 6:13] sition couverte, ne pas s'ébranler de tous ses différens mouvemens, lui faire des attaques, tirer des demi - bot - tes hors de mesure pour l'obliger d'entrer en mesure, & dans le tems qu'il leve le pié droit pour avancer, opé - rer sans écarter le poignet ni la pointe de l'epée de la ligne de son corps, afin que, dans le cas où il tireroit, on fût en état de parer & de lui faire immédiatement riposte. On ne doit jamais redoubler crainte du coup pour coup ou qu'il pare de la main gauche, ce qui ex - poseroit à une riposte; mais aussi - tôt après avoir tiré une botte, soit qu'on touche ou non, il faut se remettre promptement en garde en parant du cercle.

Si l'italien se présentoit en gar de tenant son bras & sa pointe sur une même ligne, il faudroit se servir du croisé d'épée ou du coup de fouet, & lui tirer ferme & à fond au corps.

On ne doit jamais tirer dans le grand jour qu'il peut donner crainte du coup de tems; mais alors lui tirer une demi botte bien soutenue; & s'il part sur ce tems, parer en serrant la mesure d'une demi - semelle & riposter aussi - tôt.

Pour tromper la parade de sa main gauche, il faut tirer une demi - botte & achever le coup aussi - tôt qu'il a fait le mouvement de ladite main pour parer. Nota, ce - ci est bon à éxécuter vis - à - vis de ceux qui ne ripostent pas.

On doit encore ne pas tirer à son adversaire au - de - dans des armes s'il donnoit un trop grand jour; mais on peut marquer une feinte au - dedans & tirer au - dehors ou au - dessous.

S'il serroit la mesure en portant le pié gauche près du pié droit, il faudroit lui faire un battement d'épée, ou lui tirer une demi - botte; & s'il ne s'ébranloit pas, rompre promptement la mesure, porter le pié droit près du pié gauche, en parant du cercle, ou attendre qu'il tire, & aussi tôt gagner sa lame par un contre dégage - ment, & se saisir de son épée ou lui riposter dans le tems qu'il fait sa retraite.

Des gardes italiennes avec l'épée & le poignard.

Fig. 41. L'exercice de l'épée avec le poignard n'est d'usage qu'en Italie. Lorsqu'un écolier sait bien manier son épée, on l'instruit dans l'éxercice de l'épée avec le poignard. Les Italiens sortent rarement de nuit sans avoir leur épée & poignard à leur côté. Les droitiers portent le poignard à côté de la hanche droite, & les gauchers à côté de la hanche gauche; ils le tirent si - tôt qu'ils ont l'épée à la main. Naples est la ville de l'Italie où on s'en sert le plus communément & le plus adroitement.

On ne fait usage du poignard à Paris que lorsqu'on reçoit publiquement un maître d'armes, Lorsqu'un pre - vôt a fait son apprentissage sous un habile homme & qu'on le présente pour être reçu maître d'armes, il est obligé de tirer avec plusieurs maîtres. Après avoir tiré avec le fleuret seul, ils tirent avec le fleuret & le poi - gnard. La réception d'un maître a quelque chose d'a - gréable, & donne d'autant plus d'emulation aux jeunes gens pour s'instruire dans les faits d'armes, qu'un hom - me ne peut être reçu au nombre des autres maîtres, s'il n'a travaillé pendant six années consécutives sous le même maître, usage qui ne se pratique qu'à Paris. Cet exercice public, qui est comme la pierre de touche de l'art de l'escrime, produit un bien d'autant plus grand qu'il tend à la perfection des armes. Il seroit injuste de se taire sur le talent des maîtres d'armes françois. Les hommes qui s'y connoissent le mieux, avouent qu'ils sont les premiers maîtres du monde pour la bonne grace & l'habileté.

Quoiqu'on ne se serve pas de l'épée & poignard dans ce pays, on a crû nécessaire d'en donner l'explication, afin qu'on soit en état de se défendre, si l'on voyage dans les pays où en fait usage, & afin qu'on ne se trouve pas embarrassé en voyant deux pointes devant soi. Je don - ne ici deux gardes différentes & les plus usitées de cet éxercice. On expliquera, à la suite, la maniere de se dé - fendre avec une épée seule contre une épée & un poi - gnard.

Il faut se placer avec le poignard le bras tendu & un peu éloigné de la garde de l'épée. Pour bien former les parades & les éxécuter les plus serrées qu'il est possi - ble, ce qui est très difficile ayant le bras tendu, on doit faire attention, en couvrant une partie, de ne pas décou - vrir l'autre. Dans cette garde on ne peut pas effacer le corps, car l'épaule gauche est plus avancée que la droite. Quoique le bras droit couvre le dehors des armes, il doit être raccourci.

Lorsque dans cette position on formera bien ses pa - rades, on se mettra en garde, le bras tendu, mais sans roideur, & le bras gauche raccourci & la pointe du poi - gnard près du coude droit. Le point principal est de ne pas s'ébranler aux mouvemens que l'adversaire peut faire.

S'il cherche à gagner l'épée avec la sienne, il faut la quitter, à moins qu'on ne se sente assez de fermeté pour opposer le fer au sien, en serrant la mesure d'une de - mi - semelle, & sans quitter sa lame de gagner son foible avec le fort du poignard. Alors quittant son épée il se - roit aisé de tromper sa parade du poignard & de le tou - cher. Pendant cette opération il ne faut jamais quitter du poignard sa lame, & plus elle sera longue, plus on au - ra d'avantage. De même après telle parade qu'on puis - se faire avec le poignard, on ne doit pas quitter sa lame, si on veut riposter.

Les Italiens parent plus souvent avec le poignard qu'a - vec l'épée: ainsi il est certain que celui qui se sert de deux lames pour parer, a un grand avantage, pourvû qu'il le fasse avec jugement & sans précipitation; car autrement il ne feroit que se découvrir.

Il faut tromper son adversaire dans le tems qu'il fait des attaques ou tire des demi - bottes en ne s'ébranlant pas de l'épée, & faire quelques mouvemens écartés avec le poignard pour l'engager à partir. Si - tôt qu'il déta - che son coup, on doit le parer avec le poignard en ser - rant la mesure dans le même tems, faire feinte avec l'épée de lui tirer au visage, & achever le coup au corps, com - me on peut le voir dans la 42 figure.

Les Italiens parent avec le poignard les coups tirés au - dedans & au - dessous des armes, & comme ils se fient entierement sur cette parade, ils couvrent beaucoup le côté du dehors de la pointe de leur épée.

De l'épée seule contre l'épée & le poignard.

Comme tous les coups qu'une épée seule tire au - de - dans des armes contre l'épée & le poignard peuvent être parés aisément, la riposte de la pointe de l'épée de l'ad - versaire toucheroit infailliblement; c'est pourquoi on ne doit agir qu'avec jugement & attention.

Il faut se mettre en garde en tournant le poignet en - tre tierce & quarte, & un peu plus bas que dans la gar - de ordinaire, & en fixant la pointe de l'épée à l'épaule droite de l'adversaire. On ne doit pas engager l'épée, mais faire des battemens d'épée au - dehors des armes & des attaques du pié, & diriger la pointe à son visage, pour l'obliger à hausser son poignet: alors saisir ce tems pour lui tirer avec beaucoup de vivacité un coup de se - conde, & revenir promptement à l'épée en prime ou au cercle.

S'il étoit en garde la pointe de l'épée sur la ligne de l'épaule, il faudroit faire feinte au - dedans des armes, donner un coup de fouet ferme au dehors des armes du foible au fort de son épée, & lui tirer quarte sur les armes.

S'il tient sa pointe plus basse que son poignet, il faut se placer dans la même position au - dedans des armes, lui tirer une demi - botte au - dedans, gagner vivement sa lame, & lui fournir une ftanconnade. On peut aussi après une demi - botte faire un croisé d'épée & lui tirer à fond tierce.

On ne conseillera pas de lui tirer au - dedans des ar - mes, parce que la parade du poignard pourroit réus - sir, & qu'on seroit exposé à la riposte. Mais dans le cas où l'adversaire seroit ébranlé & chercheroit à parer avec son épée sur les attaques qu'on pourroit lui faire, alors après lui avoir tiré une demi - botte au - dedans des armes & à la partie du dehors du poignard, on pourroit lui tirer quarte basse: le coup achevé, se remettre en gar - de soit en tierce, soit en demi - cercle.

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