ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

RECHERCHE Accueil Mises en garde Documentation ATILF ARTFL Courriel

Previous page

"2:19"> après lui les lévriers d'estric, & ensuite les autres dans le même ordre dont on a parlé ci - dessus: deux cavaliers piquent en même tems après lui, pour l'obliger à s'avancer dans l'accourre; car il est très - important que le loup y donne, sans cela il seroit manqué, parce que l'on n'entreprend guere de for - cer le loup à la course. Il faudroit, pour y réussir, être bien sûr de ses relais, que les chiens fussent dres - ses uniquement pour le loup, ou qu'il n'y eût dans la forêt ni bêtes fauves, ni sangliers; encore cette espece de chasse seroit - elle longue & pénible, parce que les loups sont bien en haleine en quelque tems que l'on veuille les courre, & tiennent quelquefois les chiens pendant six ou sept heures de suite: c'est pourquoi l'on ne s'avise guere de vouloir les forcer à la course. Les lévriers placés aux accourres abre - gent beaucoup cette chasse, & la rendent aussi bien plus amusante pour ceux qui en sont spectateurs.

Aussi tôt qu'on a pris un loup, il faut l'abandonner aux chiens courans qui arrivent presque à l'instant, parce qu'autrement les lévriers se jetteroient sur les chiens: il est donc à propos de les retirer prompte - ment, & de les remettre en laisse pour retourner en requêter un autre; car il est facile de prendre plusieurs loups dans un même jour. Lorsqu'on a ce dessein, il faut que chacun reprenne son poste exactement; pour ceux qui sont placés aux défen - ses, ils ne doivent point quitter leur place qu'ils n'en ayent ordre.

Losque le loup est à sa fin, on sonne sa mort par trois mots du gros ton de la trompe; on met pié à terre, on caresse les chiens pour les exciter à le fouler. C'est au premier piqueur à lever le pié droit de la bête qu'il va présenter au commandant de l'é - quipage.

Maniere de courre la louve & les jeunes loups.

On observe à - peu - près les mêmes choses à la chasse de la louve qu'à celle du loup; même façon de poursuivre, mêmes cris: mais pour ce qui est des jeunes loups, on les chasse plus hardiment; on va les attaquer jusques dans leurs forts avec les chiens. Aussi - tôt que les chiens les ont trouvés, la peur les saisit, ils s'écartent de côté & d'autre, sans cepen - dant quitter le buisson. Alors les chiens les chassent selon qu'ils les rencontrent dans les forts. Le pi - queur doit suivre & appuyer ses chiens par trois mots du premier grêle de sa trompe, & leur parler vivement dans ces termes: Harlou, harlou, hou vel - leci. Cela rechauffe les chiens & les enhardit, on verra même qu'ils reprennent de nouvelles forces, & qu'ils se jettent avec ardeur sur les jeunes loups Lorsqu'ils les ont mis à bout, le veneur les acheve avec le couteau de chasse, toujours avec la précau - tion dont on a parlé ci - dessus, de peur de blesser les chiens.

S'il y avoit dans la meute de jeunes chiens qui n'eussent point encore chassé, on pourroit les faire commencer par la chasse des jeunes loups en les joignant avec de vieux chiens bien dressés. Ils ap - prendroient promptement, & seroient bientôt en état de chasser. Il faut dans ces commencemens les animer & les encourager en les caressant souvent de la main; & lorsque les jeunes loups sont pris, il faut les en faire approcher & les faire fouler avec les autres.

La chasse finie, on sonne la retraite, on rassem - ble tous les chiens, & l'on emporte les loups qu'on a pris.

Curée du loup.

La curée du loup se fait bien différemment de celle des cerfs, chevreuils & autres bêtes qu'on abandonne aux chiens sur le champ. Le sentiment du loup est extrèmement fort, & les chiens n'en goûteroient point si l'on n'avoit soin de le leur dégui - ser. On a même remarqué que des chiens qui avoient assez d'ardeur pour suivre le loup à la chasse, n'o - soient en approcher pour le fouler lorsqu'il étoit pris; ce n'est qu'avec beaucoup de précaution & des caresses souvent réitérées qu'on peut avec le tems vaincre l'aversion qu'ils ont pour la chair de cet animal. Voici de quelle façon on s'y prend pour la curée.

Il faut d'abord dépouiller le loup, le vuider & lui lever la tête que l'on doit couper par le noeud du coup: on y laisse la peau & les oreilles: on par - tage ensuite les quatre quartiers que l'on fait rôtir avec le corps dans un four bien chaud. Pendant que le tout se rôtit, on met dans un ou plusieurs ba - quets quantité de petits morceaux de pain, on jette par - dessus les quartiers du loup que l'on coupe par petits morceaux au sortir du sour; ensuite on verse par - dessus le tout une grande chaudiere d'eau bouil - lante, dans laquelle on aura mêlé pendant qu'elle chauffoit trois ou quatre livres de graisse, & l'on remue bien le tout ensemble. Lorsqu'on voit que tout est bien trempé, on renverse ce qui est dans les baquets sur un drap de grosse toile faite exprès, & on remue encore une fois, afin que ce mélange qui est encore un peu chaud, soit en état d'être man - gé par les chiens.

Lorsque tout est prêt pour la curée, le premier piqueur prend les houssines de la main du premier valet de chiens, il en présente deux au commandant de l'équipage, qui en donne une au seigneur auquel il appartient; on en donne aussi par ordre à tous ceux qui sont présens à la curée, selon la qualité de chacun. Les houssines distribuées, on ouvre le chenil, & les piqueurs sonnent la curée, comme on l'a observé dans les autres chasses. On tient pen - dant ce tems - là la peau & la tête du loup devant les chiens, afin qu'ils s'accoutument à cet animal. Après qu'ils ont mangé la mouée, on leur présente à trente pas de - là le corps du loup rôti, auquel on a rejoint la tête. Le meilleur moyen de leur en faire manger est de le leur montrer au bout d'une fourche, & de les animer de la voix & de la trompe: ils ne man - queront pas de se jetter dessus à l'envi l'un de l'autre.

Cette curée est pour l'hiver; pour l'été, il y a quelque différence: on en fait rôtir de même les quatre quartiers que l'on coupe par morceaux; mais au lieu d'eau bouillie avec de la graisse, on prend deux ou trois seaux de lait, dans lequel on met quantité de morceaux de pain bien menus ou de la farine d'orge; on mêle le tout ensemble, & on leur présente cette mouée de la même façon que la pre - miere. Les chiens en mangent volontiers, & elle est très - rafraîchissante pour eux: on leur donne ensuite le corps à manger, comme on vient de le dire.

CHASSES, | |PLANCHE VI. (Page 20:2:19)

PLANCHE VI. Chasse du renard, &c.

La vignette représente l'usage de plusieurs piéges pour prendre les renards, loups, &c. Elle est aussi tirée de Rhidinger.

Fig. 1re. représente une fosse couverte d'une trape circulaire ou quarré mobile, sur un axe horizon - tal. Cette trape doit être couverte de mousse, d'herbes, &c. ensorte qu'elle soit à - peu - près sem - blable au sol des environs: on doit aussi fermer les côtés de la fosse, vis - à - vis les extrémités de l'axe; ensorte que la trape étant placée dans une coulée, les renards ou loups ne la puissent [p. 2:20] traverser que dans le sens où elle est mobile. En cet état, il faut placer une poule vivante au mi - lieu de la trape, & l'y attacher. Si alors il vient un renard ou un loup pour la dévorer, à peine aura - t - il passé le bord de la trape que sa pesanteur la fera enfoncer, & l'animal tombera dans la fosse où il demeurera enfermé, la trape reprenant tout de suite la situation horizontale. On voit dans la figure un renard qui tombe dans la fosse, & plu - sieurs autres qui le regardent.

2. Autre fosse découverte pour le même usage. Sur le bord de la fosse & dans l'alignement de la cou - lée où on la suppose placée, on établira une plan - che en équilibre, ensorte qu'une des extrémités réponde au centre de la fosse. C'est à cette extré - mité que l'on placera la poule; & un renard ou un loup venant pour s'en saisir, & ne trouvant d'autre chemin que la planche, l'animal passera dessus, & tombera dans la fosse d'où il ne pourra sortir: là on pourra le fusiller à son aise.

3. Autre piege, nommé traquenard, pour prendre les loups ou les renards. On ajuste ce piége avec un morceau de charogne, suivant la sorte d'ani - mal que l'on espere y prendre. Voyez les Pl. suiv.

4. Autre sorte de piége ou d'hameçon que l'on sus - pend à quelques branches d'arbre. On ajuste ce piége avec quelque morceau de charogne; & l'a - nimal vorace venant pour s'en saisir, engueule la barre inférieure du piége, laquelle étant tirée en en - bas, laisse détendre la piece supérieure qui est poussée par un ressort. Cette piece terminée par deux crochets aigus, tombe sur le nez de l'animal qui ne peut s'en débarrasser, & y demeure ainsi suspendu. On voit dans la figure un renard pris, & le second qui saute après l'appât.

On chasse aussi le renard avec des chiens. Cette chasse, outre qu'elle se fait à peu de frais, & qu'elle est assez divertissante, est extrémement nécessaire; car cet animal fait un degât étonnant de gibier dans les endroits où il se retire. Il prend les lapins au gîte, il déterre les petits lapreaux dans les garennes & les dévore; il découvre les nids de perdrix, les surprend sur les oeufs, mange les perdreaux, quand il en trouve, & se jette même sur les levreaux dans les plaines. Cet animal est fort vîte & court bien; il est très - adroit d'ailleurs, & quand il guette sa proie, il est bien rare qu'il la manque. Il est encore plus re - doutable lorsqu'il a famille; car il va dans les fermes & dans les villages, & s'il trouve de la volaille, il ne manque pas de se jetter dessus, & l'apporte à ses petits dans son terrier. Lorsque ses renardeaux sont un peu forts, il les mene au long des haies pour leur apprendre à y attraper oiseaux ou gibier, & pour les former de bonne - heure à l'art d'attraper leur proie.

Il est donc important, pour se conserver le plaisir de la chasse du lievre & de la perdrix, de détruire ces animaux qui ne s'attachent qu'à nous les enlever. Il est inutile de vouloir les forcer avec des chiens courans: les braques suffisent. Dès que le renard est chassé par les chiens, il court au plus vîte à sa ta - niere pour s'y terrer; mais pour l'attraper, voici ce qu'il faut faire.

Il faut d'abord chercher les terriers, dans les bois & dans les buissons où ces animaux vont se retirer, & lorsqu'on en a découvert, il faut s'y transporter de grand matin, même avant le jour, c'est à - dire, avant que les renards soient rentrés dans les bois, & faire bien boucher les terriers. Cependant les chasseurs se dispersent; les uns montent sur des ar - bres pour les guetter au passage; d'autres s'embus - quent auprès des terriers; & il faut que ceux qui choisissent ce poste, soient bons tireurs, parce que c'est l'endroit le plus sûr pour les rencontrer. Lors - que tout le monde est posté, un valet va découpler les chiens pour les faire quêter, afin de lancer en - suite les renards. Les chiens d'ordinaire aiment à les chasser, parce qu'ils ont assez de sentiment & qu'ils ne rusent pas comme les lievres. En effet, ils percent toujours, ils battent un buisson d'un bout à l'autre, & à plusieurs sois, retournant souvent à leurs ta - nieres pour s'y terrer; c'est là que les chasseurs, pour peu qu'ils tirent bien, ne les manquent guere. Lorsque le renard est tué, on le fait fouler aux chiens, pour les animer à le mieux chasser dans la suite.

On peut encore, si l'on veut, détruire les renards sans les chasser. C'est ordinairement vers la fin d'A - vril & au commencement de Mai que ces animaux forment leur ménage: ils cherchent dans ce tems - là des terriers commodes; ils les préparent eux - mêmes, & les nettoyent afin d'y être plus à leur aise. Lors donc qu'on aura remarqué ces terriers, on prépa - rera de petites boules composées de noix vomi - ques nouvelles. Ensuite on prendra un poulet mort ou un pigeonneau, que l'on plumera, en le fletris - sant le moins qu'il sera possible: on le fendra par - dessus le dos, sans y toucher de la main; & avec un petit bâton on introduira ces petites boules, en les enduisant un peu de graisse, dans le corps du poulet ou du pigeonneau, qu'on ira porter à l'entrée du ter - rier. Les renards ne maqueront pas de le prendre & de le manger: ils mourront sûrement, & par ce moyen on sera délivré de toute la portée.

Jusqu'ici nous avons extrait ces explications, du Traité de la venerie du sieur de Chappeville, gentil - homme de la venerie du roi.

Bas de la Planche.

Plan d'un chenil propre à contenir tout ce qui concerne un grand équipage de chasse.

Le chenil que nous proposons, consiste en une grande cour entourée de bâtimens sur deux faces, & fermée sur les deux autres par deux murs de clô - ture, au milieu desquels il y a une grille. Dans le mi - lieu de cette cour est un bassin avec jet - d'eau qui est entouré de quatre pieces de gazon. Les deux corps de bâtimens sont terminés par quatre pavillons, dans lesquels sont les logemens des piqueurs, des valets de limiers, valets de chiens, &c. aussi - bien que le fournil où on fait le pain qui sert de nourriture aux chiens. L'étendue du rez - de - chaussée est divisée en plusieurs chambres dans lesquelles sont les différen - tes meutes destinées soit pour le cerf, chevreuil, sanglier, loup & le vautrait, composées les unes de grands levriers, levriers, dogues, &c.

A, porte d'entrée.

B, une des chambres du chenil.

C C C, tolas ou lits des chiens, sur lesquels on étend de la paille fraîche.

D, cage de fer au - dessus de laquelle est le loge - ment du valet de chiens: c'est dans cette cage de fer ou retranchement que l'on fait entrer les chiens qui sont trop gras, pendant que les au - tres mangent une partie de la mouée.

F, cuvette ou fontaine où les chiens vont boire.

G G, escaliers pour monter à l'étage au - dessus qui sert de logement.

H H, passages fermés par une grille pour entrer dans le chenil.

Les autres salles sont distribuées de la même ma - niere.

CHASSES, | |PLANCHE VII. (Page 20:2:20)

PLANCHE VII.

La vignette représente l'intérieur d'une des salles du chenil, laquelle est décorée de sculptures repré - sentant, soit des têtes de cerf ou sanglier, &c. A, porte d'entrée. CC, tolas. D, cage de fer où on enferme les chiens gras. B, supente où couche le valet de chiens.

Next page


The Project for American and French Research on the Treasury of the French Language (ARTFL) is a cooperative enterprise of Analyse et Traitement Informatique de la Langue Française (ATILF) of the Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), the Division of the Humanities, the Division of the Social Sciences, and Electronic Text Services (ETS) of the University of Chicago.

PhiloLogic Software, Copyright © 2001 The University of Chicago.