ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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Quand on ne peut pas faire fouler les limiers par - ce que les cerfs ont mis bas, ou que les têtes se re - font, on leur donne une partie du droit du limier qui est le rognon, le coeur & le foye, & on leur parle comme à la chasse, lorsqu'ils sont à suivre les voyes, après, après velleci aller; & soit qu'ils foulent à la tête du cerf, soit qu'on les fasse fouler au droit du limier, on leur laisse la botte au col, on leur tient le trait déployé, & on leur parle com - me au laisser courre.

Après que le cerf est dépouillé, ce qui est l'af - faire des valets de chiens, soit ordinaires, soit par - ticuliers, le maître valet leve la venaison & com - mence par les menus droits, qui sont le mufle, la langue, les oreilles, les dintiers, le franc - boyau, la veine du coeur, & les petits filets attachés aux reins. Si c'est dans le tems de la cervaison, on leve encore les quatre noeuds qui se prennent au défaut des épaules & aux blancs attenant les cuisses: on pend le tout à un crochet que tient un valet de li - mier pour être porté à la cuisine de la bouche du roi ou de la reine. Pour procéder à l'ouverture du cerf, on incise d'abord la gorge, on en ôte le gozier & on le jette, ensuite on prend l'herbiere, on la coupe & on la fait passer à travers la poitrine; on ouvre après cela le dessus du ventre & l'on en tire la panse & les boyaux qu'un valet de chiens va bien laver, & qu'il apporte ensuite sur les baquets, dans lesquels se fait la mouée, pour les couper par pe - tits morceaux, & les mêler avec le pain: on garde seulement, comme nous avons dit, le franc boyau & les petits filets qui font partie des menus droits destinés à la cuisine de la bouche. On acheve ainsi la dissection du cerf: on leve les épaules & les grands filets qui sont attachés tout au long du dos, depuis le dessous des épaules jusqu'aux reins, attenant les hanches; on leve ensuite le gros des nombres, qui se prend dans l'entre - deux du gros des cuisses, & l'on coupe enfin successivement les cuisses, la jambe & le cimier; le coffre & le col restent pour les chiens avec la mouée; & si l'on veut, on garde les épaules pour donner aux chiens maigres après la curée. Après cela voici le partage qui se fait des meilleurs endroits du cerf.

Après que les menus droits & la hampe ont été portés à la cuisine du roi, on porte le cimier à M. le grand veneur, puis les grands filets avec une cuisse au lieutenant, & le reste se distribue ainsi: le gros des nombres appartient au sous - lieutenant, l'épaule droite au gentil - homme de la venerie qui a laissé courre, & la cuisse qui reste aux autres gen - tils - hommes. Les valets de limiers ont l'épaule gau - che, le maître valet de chiens a les côtés du cimier lorsqu'on ne les leve point, & les autres valets pren - nent ordinairement un morceau de foye pour le fri - casser, ou bien les flanchards.

On ne manque point de tirer du coeur un petit os appellé la croix du cerf, qu'on remet au lieutenant pour la reine, ou pour M. le grand veneur. On pré - tend que cet os a la propriété de faciliter l'accou - chement des femmes & de les fortifier, on le leur fait prendre au fort du travail rapé ou broyé dans un demi - verre de bon vin blanc, & aussi - tôt elles sont ou ne sont pas délivrées.

Pendant la cervaison qui dure depuis la fin de Juin jusqu'à la mi - Septembre on donne très - peu de venaison aux chiens, parce qu'elle est trop grasse & leur fait mal principalement dans les grandes chaleurs: mais au défaut de venaison, on leur fait de bonne mouée détrempée avec du lait & le sang du cerf, dont on leur abandonne aussi le coffre.

Dans l'hiver on ne leve point de venaison, on la réserve pour les chiens à qui dans ce tems elle est nécessaire, parce qu'elle leur fait une bonne nour - riture & les réchauffe; aussi les grandes curées, loin de causer aucun mal aux chiens dans l'hiver, au contraire elles leur font un bon corps.

Pour achever tout ce qui concerne la curée du cerf, tandis qu'on l'ouvre & qu'on le vuide, on en ramasse le sang dans une chaudiere pour mêler à la mouée, & après qu'il est dépecé on laisse le coffre sur la nappe. Quand la panse & les boyaux sont cou - pés par morceaux dans les baquets avec le pain, on y jette l'eau qu'on a fait bouillir avec la graisse, & l'on remue le tout pour faire tremper le pain: voi - là comment se fait la mouée pendant l'hiver ou de - puis l'automne jusqu'à la fin de Mai. Dans l'été, comme nous avons dit, au lieu de venaison on y met du lait; on sert la mouée aux chiens sur un grand drap que l'on étend à terre auprès des baquets. Lors - qu'on voit faire la curée il faut songer à ôter ses gands; car lorsque les valets de chiens apperçoi - vent quelqu'un qui a des gands aux mains, ils ont le droit de les lui ôter, & c'est un usage qui se prati - que sans exception dans la venerie du Roi depuis un tems immémorial.

Aussi - tôt que la curée est prête, le lieutenant va trouver M. le grand veneur pour en avertir le Roi, & en son absence l'avertit lui - même. Alors le maître valet de chiens se fait apporter par un autre valet, des houssines de coudre ou de bouleau, il en donne deux au lieutenant, le lieutenant les remet au grand veneur qui les présente toutes deux au roi: sa ma - jesté en choisit une, & le grand veneur garde l'autre. Pendant tout ce cérémonial le lieutenant, le sous - lieutenant, les gentilhommes de la venerie, les va - lets de limiers & les valets de chiens sont présens, ayant tous la trompe en écharpe. S'il se trouve à la curée ou des princes ou des seigneurs, le lieutenant leur présente des baguettes, & le maître valet de chiens en distribue pareillement à toutes les personnes de qualité qui sont alors auprès du roi & aux sous - lieutenant & gentils - hommes de la venerie. Ces ba - guettes ne sont pas seulement un ornement de la cé - rémonie, elles servent encore à empêcher les chiens de se battre pendant la curée, & à les écarter quand ils s'approchent du roi, ou des personnes de sa suite. Tout étant prêt, M. le grand veneur sonne avec sa trompe d'argent pour faire venir les chiens à la mouée, & aussi - tôt le lieutenant, le sous - lieutenant & les gentils - hommes donnent tous ensemble; en même - tems le valet de chiens, qui est dans le chenil, les lache tous, & ils accourrent à toutes jambes au son du cor.

Tandis qu'ils mangent, on ne cesse point de son - ner du gros ton de la trompe, comme on sonne pour chiens à la chasse, ensuite les gentils hommes de la venerie, ou dans les équipages des princes les pi - queurs vont au coffre du cerf qu'on a mis à cin - quante pas de - là sur l'herbe & sonnent du grêle de la trompe pour faire venir les chiens. Là on les égaye par le son du cor, on les flatte, on leur parle en termes de chasse, on les nomme la plûpart par leurs noms, & on caresse particulierement ceux qui ont bien chassé. Rien ne les anime davantage, ils enten - dent mieux à la chasse la voix de celui qui leur parle & se rallient mieux à sa voix.

Quand tout est mangé on ôte la carcasse du cerf, & pour couronner le festin, un valet de chien prend les menus boyaux que l'on a mis exprès à part, & les élevant au bout d'une fourche de bois, ainsi que l'on voit dans la vignette, appelle les chiens en leur criant comme à la chasse, ho tahaut tahaut, & cette espece de dessert s'appelle le forhu. Lorsque tous les chiens sont rassemblés autour de lui, il jette le forhu au milieu d'eux, & l'on sonne comme à la vûe du cerf. Ce dernier régal ne se fait ainsi que pour ap - prendre aux chiens à se rallier auprès des piqueurs, [p. 2:10] lorsqu'ils sont écartés sur un défaut ou sur un retour, ou pour les faire requêter & reprendre les voyes. Le forhu n'est gueres d'usage que dans les meutes des seigneurs, où les chiens ne chassent pas aussi souvent que dans la venerie du roi: au reste rien n'est plus plaisant que de voir les chiens autour du forhu tous la tête levée & attentifs au mouvement de la four - che, sauter jusque sur les épaules du valet de chiens qui la promene & se jetter ensuite sur le forhu, qui disparoît en un instant. La curée finie, on sonne la re - traite, & on fait rentrer les chiens dans le chenil en les comptant à mesure qu'ils rentrent, pour s'assu - rer qu'il n'en manque point, & faire chercher ceux qui peuvent manquer; le jour suivant on laisse re - poser les chiens jusqu'à huit ou neuf heures du ma - tin, & on ne leur laisse point manquer d'eau; si mê - me ils ont laissé de la mouée on la porte dans le che - nil, & ils la mangent toute la nuit.

Le lendemain sur les neuf ou dix heures du ma - tin, après les avoir bien nettoyés, on les mene à l'ébat, c'est - à - dire, promener, une heure après on leur présente du pain: mais la plûpart n'en veulent point, parce qu'ils sont encore pleins de curée.

Comme le service des chiens dépend entie - rement de leur santé, tout roule sur les valets qui en ont soin: on ne peut donc trop leur recomman - der de tenir leurs chiens proprement, & de les chan - ger souvent de paille; car plus les chiens sont net - toyés & tenus propres, moins ils sont sujets à la galle, aux dartres & autres maladies. Il faut, au retour de la chasse, leur regarder toujours aux jambes, afin de voir s'ils n'ont point d'épines, & s'ils n'ont point les piés dessolés ou échauffés par la secheresse; car cela leur arrive souvent, particulierement dans l'hi - ver quand ils ont courru dans les neiges.

Bas de la Planche.

Fig. 1. Piés d'un cerf dix cors. A B, ergots du pié de devant qui est le plus grand. a b, ergots du pié de derriere qui est emboîté dans celui de devant.

2. Pié d'un vieux cerf.

3. Autre pié de vieux cerf.

4. Pié d'un jeune chevreuil.

5. Pié d'un chevreuil dix cors.

6. Autre pié de chevreuil.

      Piés d'une chevrette.

9. Pié d'un faon.

Comment on connoît par le pié le cerf dix cors, fig. 1. Planche III.

Le cerf dix cors a le pié de devant plus gros en - core que le cerf de dix cors jeunement, & a moins de pié de derriere; il a les pinces plus grosses; la solle du pié plus grande & plus large, les côtés des piés plus gros & plus usés; le talon large & usé à l'uni du pié, le pié plein; il doit avoir les éponges retirées ou retrecies, la jambe large, les os gros & usés; il est bas jointé, a les allures grandes, les voies bien tournées, & en marchant il tire du bout de ses pinces la terre en arriere, ce que ne font pas les jeu - nes cerfs, il va les piés clos ou serrés devant & der - riere; mais lorsque les cerfs sont bien en venaison, comme dans les mois de Juin, de Juillet & d'Août, ils ont les allures courtes, leur pié de derriere de - meure sur le bord du talon du pié de devant, & quelquefois même n'en fait qu'approcher à cause de la venaison, ou de la graisse qu'ils ont alors, tant au devant des épaules, qu'aux flancs, & qui les empê - che d'allonger les piés. Les cerfs en cet état ne cour - rent guéres long - tems.

Comment on connoît les vieux cerfs par le pié & des signes de vieillesse qui les font juger tels. fig. 2 & 3.

Les vieux cerfs ont les mêmes allures & les mê - mes connoissances par le pié que les cerfs de dix cors, si ce n'est qu'ils ont les côtés des piés tout usés & fort gros, la jambe & le talon retrecis; qu'ils sont fort bas jointés, qu'ils ont les os gros, courts & tout proche du talon, qu'ils se jugent bien par - tout, que leurs piés de derriere ne sont marqués qu'à un doigt de distance de ceux de devant, & qu'ils tirent du bout des pinces de leurs piés de devant la terre en arriere. Si le cerf a été nourri dans une forêt dont le terrein soit graveleux & rempli de sable, ou dans un bois pierreux, & entre - coupé de côteaux, vous remarquerez qu'il a les piés & les os beaucoup plus usés que s'il étoit dans un pays plat & uni; mais s'il a été nourri dans un terrain marécageux & doux, ou dans un pays de bruyeres, il aura au contraire les piés fort creux. La plûpart des cerfs nourris dans ces forêts ont le pié long; mais en général un vieux cerf doit avoir les côtés du pié tranchans & la jambe re - trecie, & quant aux piés de derriere, ils ne parois - sent pas plus grands que les piés de devant d'une chevre.

En voilà assez pour les connoissances du pié; le reste est l'affaire des yeux. Une description plus étendue instruiroit moins que la vûe même des fi - gures que nous avons fait graver; mais il faut en les étudiant ne point négliger la nature & la consulter sur les objets mêmes.

CHASSES, | |PLANCHE IV. (Page 20:2:10)

PLANCHE IV. Chasse du sanglier.

La vignette, d'après Rhidinger, représente l'ins - tant où le sanglier, étant coëffé par les chiens, est percé par un veneur, ainsi qu'il sera expliqué plus bas.

Voici les termes les plus usités à cette chasse.

Les piés du sanglier, par lesquels les veneurs en connoissent, se nomment traces.

Les os ou ergots qu'ils ont au - dessus de leurs ta - lons, s'appellent gardes, fig. 1, 2, 3, 4, 5, du bas de la planche.

S'ils ont à leurs traces un bout des pinces plus long que l'autre, cela s'appelle pigache. fig. 3 & 5.

Les endroits où ils mettent leurs piés, ou leurs traces, se nomment marche ou voie.

La distance qu'il y a de l'une à l'autre, allure.

La tête, c'est la hure.

De quatre grandes dents qu'ils ont dans la gueu - le, les deux qui sont dans la machoire d'en - bas, se nomment défenses, & les deux de la machoire d'en - haut, s'appellent grais; elles ne servent, pour ainsi dire, qu'à éguiser celles d'en - bas.

Le nés, c'est le boutoir; les fouillures qu'il fait s'appellent bouttis.

Lorsqu'un sanglier a un peu levé le dessus de la terre en marchant, cela s'appelle vermillis; on dit un sanglier a vermillé dans cet endroit.

Les endroits où l'on voit qu'il a mangé blés, avoine, &c. se nomment mangeures, voilà où un sanglier a fait ses mangeures, ou ses mangis.

Un sanglier gras, s'appelle sanglier à porchaison, la peau épaisse que les sangliers mâles ont sur les épaules, s'appelle armure.

Les testicules se nomment suites.

Leur fiente s'appelle laisse, on dit voilà des laisses de sanglier.

L'endroit où il couche, est une bauge.

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