ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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TOISON (Page 16:385)

TOISON, s. m. (Gram. OEcon. rustiq.) la peau de la brebis chargée de sa laine, & plus souvent la laine séparée de la peau.

Toison d'or (Page 16:385)

Toison d'or, (Mytholog.) les enfans savent la fable de la conquête de la toison d'or, qui donna lieu au voyage des Argonautes; mais les gens de lettres en cherchent encore l'explication.

Diodore de Sicile croyoit que c'étoit la peau d'un mouton que Phryxus avoit immolé, & qu'on gardoit très - soigneusement à cause qu'un oracle avoit prédit que le roi seroit tué par celui qui l'enleveroit.

Strabon & Justin pensoient que la fable de cette toison étoit fondée sur ce qu'il y avoit dans la Colchide des torrens qui rouloient sur un sable d'or qu'on ramassoit avec des peaux de mouton, ce qui se pratique encore aujourd'hui vers le fort Louis, où la poudre d'or se recueille avec de semblables toisons, lesquelles quand elles en sont bien remplies, peuvent être regardées comme des toisons d'or.

Varron & Pline prétendent que cette fable tire son origine des belles laines de ce pays, & que le voyage qu'avoient fait quelques marchands grecs pour en aller acheter, avoit donné lieu à la fiction.

Ajoutez que comme les Colcques faisoient un grand commerce de peaux de marte & d'autres pelleteries précieuses; ce fut peut - être là le motif du voyage des Argonautes.

Paléphate a imaginé, on ne sait sur quel fondement, que sous l'emblème de la toison d'or, on avoit voulu parler d'une belle statue d'or que la mere de Pélops avoit fait faire, & que Phryxus avoit emportée avec lui dans la Colchide.

Enfin Suidas le lexicographe a songé que cette toison étoit un livre en parchemin qui contenoit le secret de faire de l'or, objet de la cupidité non seulement des Grecs, mais de toute la terre; & cette opi<pb-> [p. 386] nion que Tollius a voulu faire revivre, est embrassée par les alchimistes.

Mais Bochart qui connoissoit le génie des langues de l'Orient, a cru trouver dans celle des Phéniciens le dénouement de la plûpart de ces fictions; & comme il nous semble que personne n'a mieux réussi que lui dans l'explication de cette fable, ce sont des idées conjecturales que l'on va proposer.

Médée que Jason avoit promis d'épouser & d'emmener dans la Grece, sollicitée encore par Calciope sa soeur, veuve de Phryxus, qui voyoit ses enfans en proie à l'avarice d'un roi cruel, aida son amant à voler les trésors de son pere, soit en lui donnant une fausse clé ou de quelqu'autre maniere, & s'embarqua avec lui. Cette histoire étoit écrite en phénicien, que les poëtes qui sont venus long - tems après, n'entendoient que très - imparfaitement; & les mots équivoques de cette langue donnerent lieu aux fablès qu'on en a racontées. En effet, dans cette langue le mot syrien gaza signifie également un trésor ou une toison; sam qui veut dire une muraille, désigne aussi un taureau; & on exprime dans cette langue de l'airain, du fer & un dragon par le mot nachas; ainsi au lieu de dire que Jason avoit enlevé un trésor que le roi de la Colchide tenoit dans un lieu bien fermé, & qu'il faisoit garder soigneusement, on a dit que pour enlever une toison d'or, il avoit fallu dompter des taureaux, tuer un dragon, &c.

L'amour de Médée pour Jason, ce grand ressort qu'OElien croit avoir été inventé par Eurypide dans sa tragédie de Médée faite à la priere des Corinthiens n'a rien d'extraordinaire; & cette princesse qui abandonna son pere & sa patrie pour suivre Jason, montre assez par sa conduite qu'elle en étoit amoureuse, sans qu'il soit besoin de faire intervenir Junon & Minerve dans cette intrigue qui fut l'ouvrage de Calciope. Cette femme pour venger la mort de son mari, & sauver ses enfans qu'Aëtès avoit résolu de faire mourir à leur retour de la guerre où il les avoit envoyés, favorisa de tout son pouvoir la passion que sa soeur avoit conçue pour Jason. On peut ajouter que les quatre jeunes princes que Jason avoit ramenés, & qui se voyoient exposés à la fureur de leur grand - pere, si les Grecs étoient vaincus, les secoururent de tout leur pouvoir.

Le même Bochart explique assez heureusement la circonstance de ces hommes armés qui sortirent de terre & s'entretuerent. Il devoit y avoir, selon lui, dans cette histoire une phrase composée à - peu - près des mots qui signifient: Jason assembla une armée de soldats armés de picques d'airain prêts à combattre, qu'on expliqua ainsi à l'aide des mots équivoques: il vit naître des dents de serpent une armée de soldats armés cinq à cinq, qui étoit la maniere ancienne, surtout chez les Egyptiens, de ranger & de faire marcher les troupes.

Il est permis de conjecturer que Jason, outre ses compagnons, avoit pris dans le pays quelques troupes auxiliaires, qu'on publia être sorties de terre, parce qu'elle étoient sujettes du roi de Colchide, & elles périrent toutes dans le combat qui fut donné, apparemment entre les Grecs & les Colcques; car tout ce mystere poétique peut s'entendre d'un combat qui rendit les Grecs victorieux & maîtres de la personne & des trésors d'Aëtès. Cette explication semble préférable à celle de Diodore de Sicile, qui dit que le gardien de la toison d'or se nommoit Draco, & que les troupes qui le servoient, étoient venues de la Chersonnese taurique, ce qui avoit donné lieu aux fables qu'on avoit débitées. (D. J.)

Toison (Page 16:386)

Toison, ordre de la, (Hist. des ordres.) ordre que confere le roi d'Espagne comme duc de Bourgogne. Ce fut en 1430 que Philippe le bon, duc de Bourgogne, après avoir épousé à Bruges en troisiemes no<cb-> ces Elisabeth de Portugal, institua l'ordre de la toison en l'honneur d'une de ses maîtresses. Il eut quinze bâtards qui eurent tous du mérite. L'amour des femmes, dit M. de Voltaire, ne doit passer pour un vice que quand il détourne les hommes de remplir leurs devoirs, & qu'il conduit à des actions blâmables. Anvers, Bruges & autres villes appartenantes à Philippe le bon, faisoient un grand commerce, & répandoient l'abondance dans ses états. La France dut à ce prince sa paix & sa grandeur.

Louis XI. qui ne lui ressembla point, eut d'abord intention de se rendre chef de l'ordre de la toison, & de le conférer à la mort de Charles le téméraire, comme étant aux droits de la maison de Bourgogne; mais ensuite il le dédaigna, dit Brantôme, & ne crut pas qu'il lui convînt de se rendre chef de l'ordre de son vassal. Cet ordre a cependant continué de se soutenir jusqu'à ce jour, & se seroit soutenu bien davantage, si le nombre des chevaliers étoit borné comme au commencement à trente & un. Quoi qu'il en soit, il a fourni la matiere de trois volumes in - fol. publiés en 1756 par Julien de Pinedo y Salazar. (D. J.)

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