ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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THOMAS, arbre de Saint - (Page 16:281)

THOMAS, arbre de Saint - , (Hist. nat. Bot.) arbre des Indes orientales. Ses feuilles ressemblent à celles du liere, ses fleurs sont comme des lys violets, dont l'odeur est très - agréable. Cet arbre ne produit aucun fruit.

Thomas (Page 16:281)

Thomas, Saint - , (Géog. mod.) île d'Afrique, dans la mer d'Ethiopie, sous la ligne. Elle a été découverte par les Portugais en 1495. On lui donne environ douze lieues de diametre; l'air y est malsain, à cause des chaleurs excessives qu'on y ressent. Le terroir en est cependant fertile en raisins & en cannes de sucre. Pavoasan est la capitale de cette île. (D. J.)

Thomas (Page 16:281)

Thomas, Saint - , (Géog. mod.) île de l'Amérique septentrionale, une des Antilles, au levant de Porto - Rico. Elle a six lieues de tour, & appartient aux Danois. Long. 18. 27. (D. J.)

Thomas, chrétiens de saint (Page 16:281)

Thomas, chrétiens de saint, (Hist. ecclés.) c'est le nom qu'on donne aux chretiens indiens, établis dans la presqu'île des Indes, au royaume de Cochin, & sur la côte de Malabar & de Coromandel.

On ne doit pas douter que le christianisme n'ait percé de bonne heure dans les Indes, & l'on peut le prouver par Cosmas, témoin oculaire d'une partie de ce qu'il avance dans sa topographie chrétienne. « Il y a, dit - il, dans l'île Taprobane, dans l'Inde intérieure, dans la mer des Indes, une église de chrétiens, avec des clercs & des fideles; je ne sai s'il n'y en a point au - delà. De même dans les pays de Malé, où croît le poivre, & dans la Calliane, il y a un évêque qui vient de Perse, où il est ordonné ».

Nous avons dans ces paroles, un témoignage de christianisme, établi aux Indes dans le sixieme siecle. Cosmas écrivoit environ l'an 547 de Notre - Seigneur, & ces chrétiens se sont conservés jusqu'à notre siecle dans un état qui paroît n'avoir été exposé par rapport à la religion, à aucune contradiction violente, hormis celle qu'ils eurent à essuyer de la part des Portugais, vers la fin du seizieme siecle.

Le P. Montfaucon a rendu service à l'Eglise & à la république des lettres, par la publication & la traduction de l'ouvrage de Cosmas. Sans parler de plusieurs choses curieuses qui y sont rapportées, on y trouve les plus anciennes connoissances qu'on ait de l'établissement de l'Eglise chrétienne sur la côte de Malabar, & de la dépendance où étoit leur évêque, à l'égard du catholique ou métropolitain de Perse: dépendance qui a continué jusqu'à ce que les Portu<pb-> [p. 282] gais, qui s'étoient rendus puissans dans les Indes, mirent tout en oeuvre pour amener cette église à la tutelle du pape, auquel elle n'avoit jamais été soumise.

Les chrétiens de S. Thomas se donnent une antiquité bien plus reculée que celle dont nous venons de parler. Ils prétendent que l'apôtre S. Thomas est le fondateur de leur église, & les Portugais leurs ennemis, n'ont pas peu contribué à appuyer cette tradition. Antoine Gouvea, religieux Augustin, la soutient dans son livre intitulé: Jornada do Arcebispo de Goa, imprimé à Conimbre en 1606.

Il prétend que dans la répartition de toutes les parties du monde qui se fit entre les apôtres, les Indes échurent à S. Thomas, qui après avoir établi le christianisme dans l'Arabie heureuse, & dans l'île Dioscoride, appellée aujourd'hui Socotora, se rendit à Cranganor, où résidoit alors le principal roi de la côte de Malabar. Le saint apôtre ayant fondé plusieurs églises à Cranganor, vint sur la côte opposée, connue aujourd'hui sous le nom de Coromandel, & s'étant arrêté à Méliapour, que les Européens appellent Saint - Thomas, il y convertit le roi & tout le peuple.

Je ne suivrai point sa narration romanesque, qui doit peut - être son origine à ceux - là même, qui ont autrefois supposé divers actes sous le nom des apôtres; entr'autres les actes de S. Thomas, & l'histoire de ses courses dans les Indes. Ces actes fabuleux subsistent encore dans un manuscrit de la bibliotheque du roi de France. M. Simon dans ses observations sur les versions du nouveau Testament, en a donné un extrait, que le savant Fabricius a inséré dans son premier volume des apocryphes du nouveau Testament. Il paroît que c'est de - là, que le prétendu Abdias, baby lonien, a puisé tout ce qu'il débite dans la vie de S. Thomas; & il n'est pas surprenant que les chrétiens de Malabar, gens simples & crédules, aient adopté la fable de cette mission, ainsi que beaucoup d'autres.

Il est néanmoins toujours certain, que la connoissance du christianisme est ancienne sur la côte de Malabar, non - seulement par le témoignage de Cosmas, mais encore, parce qu'on trouve dans les souscriptions du concile de Nicée, celle d'un prélat qui se donne le titre d'évêque de Perse. De plus, un ancien auteur cité par Suidas, dit que les habitans de l'Inde intérieure (c'est le nom que Cosmas donne à la côte de Malabar), les Ibériens & les Arméniens, furent baptisés sous le regne de Constantin.

Les princes du pays, entr'autres Serant Peroumal, empereur de Malabar, fondateur de la ville de Calecut, l'an de J. C. 825, selon M. Vischer, donna de grands privileges aux chrétiens de la côte. Ils ne dépendent à proprement parler que de leur évêque, tant pour le temporel, que pour le spirituel.

Le roi de Cranganor honora depuis de ses bonnes graces un arménien nommé Thomas Cana ou mar - Thomas; ce mot de mar est syriaque, & signifie la même chose que le dom des Espagnols. Il y a de l'apparence que la conformité de nom l'a quelquefois fait confondre avec l'apôtre S. Thomas. Cet homme qui faisoit un gros trafic avoit deux maisons, l'une du côté du sud, dans le royaume de Cranganor, & l'autre vers le nord, au voisinage d'Augamale.

Dans la premiere de ces maisons, il tenoit son épouse légitime, & dans la seconde, une concubine convertie à la foi. Il eut des enfans de l'une & de l'autre de ces femmes. En mourant, il laissa à ceux qui lui étoient nés de son épouse légitime, les terres qu'il possédoit au midi; & les bâtards hériterent de tous ses biens qui étoient du côté du nord. Ces descendans de mar Thomas s'étant multipliés, partagerent tout le christianisme de ces lieux - là. Ceux qui descendent de la femme légitime, passent pour les plus nobles; ils sont si fiers de leur origine, qu'ils ne contractent point de mariages avec les autres, ne les admettant pas même à la communion dans leurs églises, & ne se servant point de leurs prêtres.

Quelques tems après la fondation de la ville de Coulan, à laquelle commence l'époque du Malabar, c'est - à - dire après l'an 822 de Notre - Seigneur, deux ecclésiastiques syriens vinrent de Babylone dans les Indes: l'un se nommoit mar Sapor, & l'autre mar Peroses. Ils aborderent à Coulan, où le roi voyant qu'ils étoient respectés des chrétiens, leur accorda entr'autres privileges, celui de bâtir des églises partout où ils voudroient; ces privileges subsistent peut - être encore: les chrétiens indiens les firent voir à Alexis de Menezès, écrits sur des lames de cuivre, en langue & caracteres malabares, canarins, bisnagares & tamules, qui sont les langues les plus en usage sur ces côtes.

Une si longue suite de prospérités rendit les chrétiens indiens si puissans, qu'ils secouerent le joug des princes infideles, & élurent un roi de leur nation. Le premier qui porta ce nom s'appelloit Baliarté, & il se donnoit le titre de roi des Chrétiens de S. Thomas. Ils se conserverent quelque tems dans l'indépendance sous leurs propres rois, jusqu'à ce qu'un d'eux, qui selon une coutume établie dans les Indes, avoit adopté pour fils, le roi de Diamper, mourut sans enfans, & ce roi payen lui succéda dans tous ses droits sur les chrétiens des Indes. Ils passerent ensuite par une adoption semblable sous la jurisdiction du roi de Cochin, auquel ils étoient soumis, lorsque les Portugais arriverent dans les Indes. Il y en avoit cependant un nombre assez considérable qui obéissoit aux princes voisins.

L'an 1502, Vasco de Gama, amiral du roi de Portugal, étant arrivé à Cochin avec une flotte, ces chrétiens lui envoyerent des députés, par lesquels ils lui représenterent que puisqu'il étoit vassal d'un roi chrétien, au nom duquel il venoit pour conquérir les Indes, ils le prioient de les honorer de sa protection & de celle de son roi; l'amiral leur donna de bonnes paroles, n'étant pas en état de les assister d'une autre maniere.

Ils dépendent du catholique de Perse & du patriarche de Babylone, & de Mosul. Ils appellent leurs prêtres, caçanares, dont les fonctions étoient d'expliquer leurs livres écrits en langue syriaque. Les premiers missionnaires qui travaillerent à leur instruction, pour les soumettre à l'Eglise romaine, furent des Cordeliers; mais les jésuites envisageant cette charge comme une affaire fort lucrative, obtinrent un college du roi de Portugal, outre des pensions, & la protection du bras séculier. Malgré tout cela, les chrétiens malabares suivirent leur culte, & ne permirent jamais qu'on fît mention du pape dans leurs prieres. Mais il faut ici donner une idée complette des opinions & des rits ecclésiastiques de ces anciens chrétiens.

La premiere erreur qu'on leur reproche, est l'attachement qu'ils ont pour la doctrine de Nestorius, joint à leur entêtement à nier, que la bienheureuse Vierge soit véritablement la mere de Dieu.

Ils n'admettoient aucunes images dans leurs églises, sinon dans quelques - unes qui étoient voisines des Portugais, dont ils avoient pris cet usage. Cela n'empêchoit pas que de tout tems ils n'eussent des croix, pour lesquelles ils avoient beaucoup de respect.

Ils croyoient que les ames des bienheureux ne verroient Dieu qu'après le jour du jugement universel, opinion qui leur étoit commune avec les autres églises orientales; & qui, quoique traitée d'erreur par Gouvea, est en quelque maniere appuyée sur la tradition.

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Ils ne connoissoient que trois sacremens, le baptême, l'ordre & l'eucharistie. Dans la forme du baptême, il y avoit fort peu d'uniformité entre les diverses églises du diocèse.

Quelques - uns de leurs ecclésiastiques administroient ce sacrement d'une maniere invalide, au sentiment de l'archevêque, qui à l'exemple des autres ecclésiastiques de sa nation, rapportoit tout à la théologie scholastique. Dans cette persuasion, il rebaptisa tout le peuple d'une des nombreuses églises de l'évêché.

Ils différoient le baptême des enfans, souvent un mois, quelquefois plus long - tems; il arrivoit même qu'ils ne les baptisoient qu'à l'âge de sept, de huit, ou de dix ans, contre la coutume des Portugais qui baptisent ordinairement les leurs le huitieme jour après la naissance, en quoi il semblent suivre le rit de la circoncision des Juifs, comme l'a remarqué l'auteur du Traité de l'inquisition de Goa.

Ils ne connoissoient aucun usage des saintes huiles, ni dans le baptême, ni dans l'administration des autres sacremens: seulement après le baptême des enfans, ils les frottoient par - tout le corps d'huile de cocos, ou de gergelin, qui est une espece de safran des Indes. Cet usage, quoique sans prieres, ni bénédiction, passoit chez eux pour quelque chose de sacré.

Ils n'avoient aucune connoissance des sacremens de confirmation & d'extrême - onction; ils n'admettoient point aussi la confession auriculaire.

Ils étoient sort devots au sacrement de l'eucharistie, & communioient tous sans exception le Jeudi - Saint. Ils n'y apportoient point d'autre préparation que le jeûne.

Leur messe ou liturgie étoit alterée par diverses additions que Nestorius y avoit faites. Avant l'arrivée des Portugais dans les Indes, ils consacroient avec des gâteaux, où ils mettoient de l'huile & du sel. Ils faisoient cuire ces gâteaux dans l'église même. Cette coutume de paîtrir le pain de l'eucharistie avec de l'huile & du sel, est commune aux nestoriens & aux jacobites de Syrie. Il faut observer ici, qu'ils ne mêloient dans la pâte l'huile qu'en très - petite quantité, ce qui ne change point la nature du pain. Dans l'église romaine, on se sert d'un peu de farine délayée dans de l'eau, & séchée ensuite entre deux fers que l'on a soin de frotter de tems - en - tems de cire blanche, de peur que la farine ne s'y attache. C'est donc une colle séchée, mélée de cire; ce qui semble plus contraire à l'institution du sacrement, que l'huile des églises syriennes.

Au lieu de vin ordinaire, ils se servoient comme les Abyssins, d'une liqueur exprimée de raisins secs, qu'ils faisoient infuser dans de l'eau. Au défaut de ces raisins, ils avoient recours au vin de palmier.

Celui qui servoit le prêtre à l'autel portoit l'étole, soit qu'il fût diacre, ou qu'il ne le fût pas. Il assistoit à l'office l'encensoir à la main, chantant en langue syriaque, & récitant lui seul presque autant de paroles que le prêtre qui officioit.

Les ordres sacrés étoient en grande estime chez eux. Il y avoit peu de maisons où il n'y eût quelqu'un de promu à quelque degré ecclésiastique. Outre que ces dignités les rendoient respectables, elles ne les excluoient d'aucune fonction séculiere. Ils recevoient les ordres sacrés dans un âge peu avancé: ordinairement ils étoient promus à la prêtrise dès l'âge de dix - sept, de dix - huit & de vingt ans. Les prêtres se marioient même à des veuves, & rien ne les empêchoit de contracter de secondes noces après la mort de leurs femmes. Il arrivoit assez souvent que le pere, le fils & le petit - fils, étoient prêtres dans la même église.

Les femmes des prêtres, qu'ils appelloient caça - neires, avoient le pas par - tout. Elles portoient, pendue au col, une croix d'or, ou de quelqu'autre métal. Les ecclésiastiques des ordres inférieurs, qui ne paroissent pas avoir été distingués parmi ces chrétions, s'appelloient chamazès, mot syriaque qui signifie diacre ou ministre.

L'habit ordinaire des ecclésiastiques consistoit dans de grands caleçons blancs, par - dessus lesquels ils revétoient une longue chemise. Quand ils y ajoutoient une soutane blanche ou noire, c'étoit leur habit décent. Leurs couronnes ou tonsures, étoient semblables à celles des moines ou des chanoines réguliers.

Ils ne récitoient l'office divin qu'à l'église, où ils le chantoient à haute voix deux fois le jour; la premiere à trois heures du matin, la seconde à cinq heures du soir. Personne ne s'en exemptoit. Hors de - là ils n'avoient point de bréviaire à réciter, ni aucuns livres de dévotion particuliere qui fussent d'obligation.

Ils étoient simoniaques, dit Gouvea, dans l'administration du baptême & de l'eucharistie: le prix de ces sacremens étoit réglé. Je ne sai s'il n'y a point d'erreur à taxer de simonie un pareil usage. Ces ecclésiastiques n'avoient point d'autre revenu, & ils pouvoient bien exiger de leurs paroissiens ce qui étoit nécessaire pour leur subsistance.

Lorsqu'ils se marioient, ils se contentoient d'appeller le premier caçanare qui se présentoit. Souvent ils s'en passoient. Quelquefois ils contractoient leurs mariages avec des cérémonies assez semblables à celles des Gentils.

Ils avoient une affection extraordinaire pour le patriarche nestorien de Babylone, & ne pouvoient souffrir qu'on fît mention dans leurs églises, ni du pape, ni de l'église romaine. Le plus ancien des prêtres d'une église y présidoit toujours. Il n'y avoit ni curé, ni vicaire.

Tout le peuple assistoit le dimanche à la liturgie, quoiqu'il n'y eût aucune obligation de le faire. Mais il y avoit des lieux où elle ne se célébroit qu'une fois l'an.

Les prêtres se chargeoient quelquefois d'emplois laiques, jusqu'à être receveurs des droits qu'exigeoient les rois payens.

Ils mangeoient de la chair le samedi; & leurs jours d'abstinence étoient le mercredi & le vendredi. Leur jeûne étoit fort sévere en carême. Ils ne prenoient de repas qu'une fois le jour après le coucher du soleil, & ils commençoient à jeûner dès le dimanche de la Quinquagésime. Pendant ce tems - là ils ne mangeoient ni poissons, ni oeufs, ni laitages, ne buvoient point de vin, & n'approchoient point de leurs femmes. Toutes ces observances leurs étoient ordonnées sous peine d'excommunication; cependant les personnes avancées en âge étoient dispensées de jeûner.

Pendant le carême ils alloient trois fois le jour à l'église, le matin, le soir & à minuit. Plusieurs s'exemptoient de la derniere heure; mais nul ne manquoit aux deux précédentes. Ils jeûnoient de même tout l'avent. Outre ces deux jeûnes d'obligation, ils en avoient d'autres qui n'étoient que de dévotion, comme celui de l'assomption de la Vierge, depuis le premier d'Août jusqu'au quinzieme; celui des apôtres qui duroit cinquante jours, & commençoit immédiatement après la Pentecôte; & celui de la nativité de Notre - Seigneur, depuis le premier de Septembre jusqu'à Noël.

Toutes les fois qu'ils entroient dans l'église les jours de jeûne, ils y trouvoient les prêtres assemblés qui chantoient l'office divin, & leur donnoient la bénédiction. Cette cérémonie s'appelloit donner, ou recevoir le casturi. Elle consistoit à prendre entre leurs mains celles des caçanares, & à les baiser après [p. 284] les avoir élevées en - haut. C'étoit un signe de paix, qui n'étoit accordé qu'à ceux qui étoient dans la commmunion de l'église: les pénitens & les excommuniés en étoient exclus.

Les femmes accouchées d'un enfant mâle, n'entroient dans l'église que quarante jours après leur délivrance; pour une fille on doubloit le nombre des jours, après lesquels la mere venoit dans l'assemblée offrir son enfant à Dieu & à l'Eglise.

Ces chrétiens étoient en général fort peu instruits. Quelques - uns seulement savoient l'oraison dominicale, & la salutation angélique.

Ils craignoient extrèmement l'excommunication, & ils avoient raison de la craindre; la discipline ecclésiastique étoit si sévere, que les homicides volontaires, & quelques autres crimes, attiroient une excommunication dont le coupable n'étoit jamais absous, pas même à l'article de la mort.

Leurs églises étoient sales, peu ornées, & bâties à la maniere des pagodes, ou temples des Gentils. Nous avons déjà remarqué qu'ils n'avoient point d'images. Nous ajouterons ici qu'ils n'admettoient point de purgatoire, & qu'ils le traitoient de fable.

On voit par ce détail, que ces anciens chrétiens malabares, sans avoir eu de commerce avec les communions de Rome, de Constatinople, d'Antioche & d'Alexandrie, conservoient plusieurs des dogmes admis par les Protestans, & rejettés, en tout ou en partie, par les églises qu'on vient de nommer. Ils nioient la suprématie du pape, ainsi que la transubstantiation, soutenant que le sacrement de l'Eucharistie n'est que la figure du corps de J. C. Ils excluoient aussi du nombre des sacremens, la confirmation, l'extrèmeonction & le mariage. Ce sont là les erreurs que le synode de Diamper proscrivit.

Le savant Geddes a mis au jour une traduction angloise des actes de ce synode, composés par les jésuites; & M. de la Croze en a donné des extraits dans son Histoire du christianisme des Indes. C'est assez pour nous de remarquer qu'Alexis Menezès, nommé archevêque de Goa, tint ce synode après avoir entrepris, en 1599, de soumettre les chrétiens de S. Thomas à l'obéissance du pape. Il réussit dans ce projet par la protection du roi de Portugal, & par le consentement du roi de Cochin, qui aima mieux abandonner les chrétiens de ses états, que de se brouiller avec les Portugais. Menezès jetta dans le feu la plupart de leurs livres, perte considérable pour les savans curieux des antiquités ecclésiastiques de l'Orient; mais le prélat de Goa ne s'en mettoit guere en peine, uniquement occupé de vûes ambitieuses. De retour en Europe, il fut nommé archevêque de Brague, vice - roi de Portugal, & président du conseil d'état à Madrid, où il mourut en 1617.

Cependant la conquête spirituelle de Menezès, ainsi que l'autorité temporelle des Portugais, reçut quelque tems après un terrible échec, & les chrétiens de S. Thomas recouvrerent leur ancienne liberté. La cause de cette catastrophe fut le gouvernement arbitraire des jésuites, qui par le moyen des prélats tirés de leur compagnie, exerçoient une domination violente sur ces peuples, gens à la vérité simples & peu remuans, mais extrèmement jaloux de leur religion. Il paroît par le livre de Vincent - Marie de Ste Catherine de Sienne, que les jésuites traitoient ces chrétiens avec tant de tyrannie, qu'ils résolurent de secouer un joug qu'ils ne pouvoient plus porter; en sorte qu'ils se firent un évêque de leur archidiacre, au grand déplaisir de la cour de Rome.

Alexandre VII. résolut de remédier promptement au schisme naissant; & comme il savoit que la hauteur des jésuites avoit tout gâté, il jetta les yeux sur les Carmes déchaussés, & nomma quatre religieux de cet ordre, pour ramener les chrétiens de S. Thomas à son obéissance: mais leurs soins & leurs travaux n'eurent aucun succès par les ruses du prélat jésuite, qui aliéna les esprits, & fit rompre les conférences.

Enfin la prise de Cochin par les Hollandois, en 1663, rendit aux chrétiens de S. Thomas la liberté dont ils avoient anciennement joui. Mais ces mêmes Hollandois, trop attachés à leur négoce, négligerent entierement la protection de ces pauvres gens. Il est honteux qu'ils ne se soient pas plus intéressés en leur faveur, que s'ils avoient été des infideles dignes d'être abandonnés. (Le Chevalier de Jaucourt.)

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