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Le même auteur accumule différens faits, tels que la conduite de S. Ambroise à l'égard de Théodose; le privilegé accordé par S. Grégoire le grand au monastere de S. Médard de Soissons; l'exemple de Grégoire II. qui défendit aux peuples d'Italie de payer les tributs accoutumés à l'empereur Léon, surnommé Brise - images, que ce pontife avoit excommunié; la déposition de Childeric, de Wamba roi des Goths, des empereurs Louis le Débonnaire & Henri IV. Frédéric II. & Louis de Baviere, &c. mais tous ces faits ne concluent rien, parce que ce sont autant d'usurpations manifestes de la puissance pontificale sur l'autorité temporelle; d'ailleurs Bellarmin les rapporte souvent d'une maniere infidele, contraire à la narration des auteurs contemporains; il les tourne à l'avantage de sa cause d'une maniere qui toute subtile qu'elle est, fait peu d'honneur ou à son jugement, ou à sa bonne foi. Consultez sur ces faits la défense de la declaration du clergé par M. Bossuet, & imprimée en 1728.
L'église gallicane qui dans tous les siecles ne s'est pas moins distinguée par sa vénération envers le saint - siege, que par sa fidélité pour les souverains, s'est constamment opposée à cette doctrine des ultramontains; ses théologiens établissent le sentiment contraire sur les autorités les plus respectables, & sur les raisonnemens les plus solides. Les premier principe dont ils partent, est que la puissance que Jesus - Christ a donnée à ses apôtres & à leurs successeurs, est une puissance purement spirituelle, & qui ne se rapporte qu'au salut éternel. En effet, les ministres de la religion n'ont, en vertu de l'institution divine, d'autre autorité que celle dont Jesus - Christ - même étoit dépositaire en qualité de médiateur: Comme mon Pere m'a envoyé, leur dit - il, je vous envoie aussi de même. Joan. xx. 21. Or le Sauveur du monde, considéré comme médiateur, n'avoit aucun pouvoir sur le temporel des princes. Ses discours & ses actions concourent à le démontrer. Interrogé par Pilate s'il est vrai qu'il se croit roi des Juifs, il proteste qu'il n'a aucun pouvoir sur le temporel des rois, qu'il ne vient pas pour détruire les états des princes de la terre: mon royaume, répond - il, n'est point de ce monde; si mon royaume étoit de ce monde, mes sujets combattroient pour empêcher qu'on ne me livrât aux Juifs: mais mon royaume n'est point d'ici, ibid. 36. Le magistrat romain insiste, vous êtes donc roi, ibid. 87. oui, lui dit Jesus - Christ, vous le dites, je suis roi, c'est pour cela que je suis nè, & que je suis venu dans le monde, afin de rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. Pouvoit - il marquer plus précisément que sa royauté ne s'étendoit que sur des choses spirituelles, qu'il étoit roi d'un royaume tout divin & tout céleste que son Pere alloit former par sa prédication & par celle de ses apôtres dans tout l'univers. Lui - même pendant sa vie mortelle se soumet à l'empire des Césars, & leur paye le tribut. Si le peuple, épris de ses miracles, veut le faire roi, il prend la fuite pour se soustraire à leurs sollicitations. Un homme lui propose d'être arbitre entre son frere & lui au sujet d'une succession qui lui étoit
Mais, dira - t - on, si Jesus - Christ n'a pas lui - même exercé cette puissance, peut - être l'a - t - il accordée à ses apôtres, c'est ce dont on ne trouve nulle trace dans l'Ecriture; toute la puissance que Jesus - Christ accorde à ses apôtres, se réduit au pouvoir d'annoncer l'Evangile, de baptiser, de lier ou de délier les péchés, de consacrer l'Eucharistie, d'ordonner les ministres; en un mot, de conférer tous les sacremens, de lancer l'excommunication, ou d'infliger d'autres peines canoniques contre ceux qui se révolteroient contre les lois de l'Eglise; enfin il leur déclare expressément que leur ministere est un ministere de paix, de charité, de douceur, de persuasion, qu'il n'a rien de commun avec la domination que les princes temporels exercent sur leurs sujets. Reges gentium dominantur eorum, vos autem non sic. Luc. xvij. 25.
Leur second principe est que l'Eglise ne peut changer ni détruire ce qui est de droit divin. Or telle est d'une part la puissance des souverains sur leurs peuples, & d'une autre l'obeissance que les peuples doivent à leurs souverains. Ces deux vérités se trouvent également établies par ces paroles de S. Paul: toute personne vivante doit être soumise aux puissances souveraines; car il n'y a point de puissance qui ne vienne de Dieu, & celles qui sont, sont ordonnées de Dieu; ainsi qui résiste à la puissance, résiste à l'ordre de Dieu. Rom. xiij. 1. La seconde ne l'est pas moins évidemment par ce que dit S. Pierre: soyez soumis à toute créature humaine à cause de Dieu, soit au roi comme au plus excellent, soit aux chefs comme envoyés par ses ordres, & dépositaires de son autorité. Epît. I. c. ij. 13. C'étoit de Néron & des empereurs payens que les apôtres parloient de la sorte. Si la révolte eût jamais pû être colorée de quelque prétexte, c'eût été sans doute de celui de défendre la religion contre ses persécuteurs; mais les premiers fideles ne surent jamais qu'obéir & mourir.
La tradition n'est pas moins formelle sur ce point que l'Ecriture. Tous les docteurs de l'Eglise enseignent 1°. que la puissance séculiere vient immédiament de Dieu, & ne dépend que de lui seul. Christianus, disoit Tertullien, nullius est hostis nedum imperatoris quem sciens à Deo suo constitui, necesse est ut & ipsum diligat & revereatur & honoret & salvum velit. Colimus ergo imperatorem sic quomodo & nobis licet, & ipsi expedit ut hominem à Deo secundum, & quidquid est à Deo consecutum & solo Deo minorem, lib. ad scapul. c. ij. Optat. l. III. contr. Parmenian. super imperatorem non est uni solus Deus qui fecit imperatorem; & S. Augustin, lib. V. de civit. Dei, cap. xxj. non tribuamus dandi regni atque imperii potestatem, nisi Deo vero.
2°. Qu'on doit obéir aux princes, même quand ils abusent visiblement de leur puissance, & qu'il n'est jamais permis à leurs sujets de prendre les armes contre eux: Neque tunc, dit S. Augustin en parlant des persécutions des empereurs païens, civitas Christi adversus impios persecutores pro salute temporali pugnavit. Ligabantur, cedebantur, includebantur, urebantur, torquebantur ..... non erat eis pro salute pugnare nisi salutem pro salvatore contemnere. de civit Dei, lib. II. cap. v. & sur le Ps. cxxiv. le même pere s'exprime ainsi: Julianus extitit infidelis imperator ..... milites christiani servierunt imperatori infideli. Ubi veniebatur ad causam Christi non agnoscebant nisi illum qui in coelo erat. Si quando volebat ut idola colerent, ut thurificarent, proeponebant illi Deum: quando autem dicebat, producito aciem, ite contra illam gentem, statim [p. 93]
3°. Que comme les princes ont reçu de Dieu le glaive matériel pour exercer la justice vindicative, & contenir les méchans; l'Eglise n'a reçu qu'un glaive spirituel, pour exercer sa puissance sur les ames. Pacificos vult Christus esse suos discipulos, dit Origenes sur le chap. xvj. de S. Matthieu, ut bellicum gladium deponentes, alterum pacificum accipiant gladium quem dicit scriptura gladium spiritus: & S. Chrysostôme, rex habet arma sensibilia, sacerdos arma spiritualia.
Mais n'est - il pas permis au - moins à l'Eglise de se servir du glaive matériel, quand la religion est en péril & pour sa defense? Voici ce qu'en pensoit Lactance: Non est opus vi & injuriâ, quia religio cogi non potest ..... defendenda est non occidendo sed moriendo, non soevitiâ sed patientiâ, non scelere sed fide, lib. V. divin. institut.
Il est presqu'inconcevable qu'après une doctrine si fondée & si publique, il ait pû se trouver des théologiens qui ayent soutenu les prétentions des papes ou même de l'Eglise sur le temporel des rois: l'indépendance des deux puissances & leurs limites n'étoient - elles pas assez marquées?
Les souverains pontifes eux - mêmes avoient reconnu
cette vérité.
La doctrine des ultramontains est donc diamétralement opposée à celle de l'Ecriture, des peres & des papes mêmes; il y a plus, elle choque manifestement la raison en réduisant même leurs prétentions au pouvoir indirect. Car pour que ce pouvoir fût quelque chose de réel, il faudroit ou que le pouvoir des clés eût par lui - même la force de dépouiller immédiatement dans le cas de besoin non - seulement des biens célestes, mais encore des biens temporels; ou que la privation des biens spirituels, effet immédiat & naturel du pouvoir des clés, emportât par sa nature, dans le cas de nécessité, la privation même des biens temporels. Or ni l'une ni l'autre de ces suppositions ne peut être admise. 1°. L'effet propre & unique du pouvoir des clés, même dans les circonstances les plus pressantes, se borne au dépouillement des biens spirituels. Si votre frere n'écoute pas l'Eglise, dit Jesus - Christ, Matth. xviij. vers. 17. qu'il soit à votre égard comme un païen & un publicain; c'est - à - dire, ne le regardez plus comme une personne qui puisse vivre en société de religion avec vous, ne l'admettez ni aux prieres communes, ni à la participation des sacremens, ni à l'entrée de l'église, ni à la sépulture chrétienne. Voilà précisément à quoi se
Enfin on regarde avec raison cette doctrine comme
dangereuse, capable de troubler la tranquillité
des états, & de renverser les fondemens de la société.
En effet les conséquences de ces principes sont
affreuses; en les suivant,
C'est donc à juste titre que les plus célebres universités, & entre autres la faculté de Paris, & les églises les plus florissantes, telles que celle d'Allemagne, d'Angleterre & d'Espagne, ont proscrit cette doctrine comme dangereuse. De tout tems l'église gallicane l'a rejettée ou combattue, mais sur - tout par la fameuse déclaration du clergé en 1682, sur laquelle on peut consulter l'ouvrage de M. Dupin, & celui de M. Bossuet dont nous avons déja parlé.
TEMS (Page 16:93)
TEMS, s. m. (Métaphysique.) succession de phénomenes
dans l'univers, ou mode de durée marqué
par certaines périodes & mesures, & principalement
par le mouvement & par la révolution apparente
du soleil. Voyez
Voici les différentes opinions des philosophes sur le tems.
M. Locke observe que l'idée du tems en général s'acquiert en considérant quelque partie d'une durée infinie, divisée par des mesures périodiques; & l'idée de quelque tems particulier ou de longueur de durée, comme est un jour, un heure, &c. s'acquiert d'abord en remarquant certains corps qui se meuvent suivant des périodes régulieres, &, à ce qu'il semble, également distantes les unes des autres.
Comme nous pouvons nous représenter ou répéter tant que nous voulons ces longueurs ou mesures de tems, nous pouvons aussi nous imaginer une durée, dans laquelle rien ne se passe ou n'existe réellement, &c. c'est ainsi que nous nous formons l'idée de ce qu'on appelle lendemain, année prochaine, &c.
Quelques - uns des philosophes modernes définissent
le tems; la durée d'une chose dont l'existence
n'est point sans commencement, ni sans fin; ce qui
distingue le tems de l'éternité. Voyez
Aristote & les Péripatéticiens définissent le tems,
numerus motûs secundum priùs & posteriùs; ou une multitude
de parties de mouvement qui passent & se suc<pb->
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