ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"402"> duit en farine, sort par l'anche, & tombe dans le sac I. L'endroit où sont les chevaux s'appelle le manege. On voit à gauche de la même figure les meules séparées, & à la distance qui convient pour la mouture, avec l'ouverture de l'anche; car le grand roüet C produit des deux côtés le même effet, & fait marcher proprement deux moulins. Mais ce n'est pas tout: le même méchanisme pourroit servir à deux moulins à l'eau; on en voit un à droite. L'eau est tirée du puits par une pompe à chapelet: on a pratiqué dans l'étage supérieur à celui du manege un trou au plancher à travers lequel passe le grand arbre debout B. Cet arbre porte à sa partie supérieure, comme on voit aussi à son inférieure, un grand roüet C C. Les dents de ce roüet engrainent dans la lanterne K K fixée sur l'arbre de couche L, au bout duquel est adaptée une étoile M garnie de ses cornichons, à l'aide desquels elle porte & tire la chaîne à chapelet, qui passant dans un tuyau de bois N qu'elle remplit exactement, monte l'eau dans le petit réservoir O, qui est au - dessus du puits. De ce réservoir on la conduit par des tuyaux de plomb partout où l'on en a besoin.

Il ne faut pas que la farine soit trop grosse, ni qu'elle soit trop fine; l'un & l'autre excès a ses inconvéniens: trop grosse, le suc ne s'en tire pas facilement; trop fine, on court risque de perdre entierement le brassin; il s'en fait alors une liaison, un mortier que l'eau ne peut pénétrer lorsque la farine est dans la cuve.

De la cuve matiere. Lorsque la farine est faite, on la met dans la cuve appellée communément cuve matiere, Planche V. A. Cette cuve A est de bois; ses douves ont environ deux pouces ou deux pouces & demi d'épaisseur sur quatre à cinq pouces de largeur; sa profondeur est d'environ quatre piés & demi, elle est à deux fonds: celui d'en bas est plein, comme le sont ordinairement tous les fonds de cuve: mais il est surmonté d'un second que l'on appelle faux - fond. Ce faux - fond est composé de planches percées d'une multitude de petits trous faits en cone, ou plus ouverts à la partie inférieure de la planche, qu'à sa partie supérieure. La différence de diametre de ces ouvertures est grande; car à la partie inférieure le trou peut avoir trois quarts de pouce ou environ, & il se trouve réduit à la partie supérieure à une ligne ou environ. Ces planches sont soûtenues au - dessus du premier fond par des patins qui sont attachés sur elles - mêmes; ces patins ont environ deux pouces de hauteur, de façon qu'il se trouve deux pouces d'intervalle entre les deux fonds.

Le faux - fond est arrêté en - dessus par un cordon de bois, qui regne tout autour de la cuve. Ce cordon a environ trois petits pouces de large, & sert à retenir tous les bouts des planches du faux - fond, & à cinpêcher qu'elles ne se levent avec l'eau que l'on envoye dans la cuve. Dans un endroit de la cuve le plus commode, on place debout une espece de pompe ou tuyau de bois, qu'on appelle pompe à jetter trempe. Ce tuyau passe à - travers le faux - fond, & pose sur l'autre fond, mais ne s'y applique pas. On lui a pratiqué aux quatre angles quatre especes de piés, sur lesquels il est appuyé: l'espace évuidé qui est entre ces quatre piés, suffit pour donner passage à l'eau.

Sous la cuve - matiere, il y en a une autre plus petite que l'on nomme reverdoir, & dans laquelle est équipée une pompe à chapelet, qu'on appelle pompe à cabarer. Cette pompe sert à enlever ce qui sort de la cuve - matiere, & à le renvoyer, par le moyen d'une gouttiere qu'on lui applique, dans les chaudieres, sur le bord desquelles cette gouttiere est appuyée de l'autre bout. Voyez la Planche V. A cuvematiere: B autre cuve - matiere; car on peut en avoir plusieurs: C, C, pompes à cabarer, qui se rendent dans les cuves placées au - dessous des cuves matieres: E, E, gouttieres: D, D, chaudieres: F, F, bacs. On verra plus bas l'usage de tous les agrès, après que nous aurons expliqué ce qui concerne les chaudieres.

Des chaudieres. Les chaudieres dont on se sert, sont faites de grandes tables de cuivre, cloüées ensemble avec des clous de même métal. Leur figure est celle d'un demi - globe. Elles sont montées sur leurs fourneaux, qui doivent être construits de brique ou de tuileau. On y employe quelquefois la pierre: mais la difficulté de trouver des pierres qui résistent au feu, fait préférer les deux autres especes de matériaux.

Pour bien construire un fourneau, il faut d'abord faire un bon massif de moilon que l'on revêtira de bons murs. Voyez fig. 2. Pl. II. A, A, A, A, &c. Ces murs étant élevés à la hauteur de deux piés & demi ou environ, suivant la grandeur des chaudieres, on pavera le fond du fourneau B, B, B, B, &c. avec du gros pavé de grais, ou avec de la brique de champ, & debout: puis on posera l'embouchure C, C, C, C, &c. L'embouchure doit être construite de trois ou quatre barres de fer, fortes & larges de cinq à six pouces; chacunes assemblées avec des entretoises de pareil fer. L'embouchure étant posée, on construira le mur intérieur du fourneau, qu'on voit même Planche, fig. 9. en D, D, D. Cette figure est une coupe verticale de la chaudiere & du fourneau, prise sur le milieu de l'embouchure qu'elle partage en deux selon sa longueur. Ce mur intérieur doit être de brique ou de tuileau. On l'élevera environ de quinze pouces à plomb. Sa forme, comme on voit, est concave. Après quoi on le continuera à grand fruit. Quant à la forme qu'on lui donnera, ce sera celle d'une calote sphérique concave, capable d'embrasser la chaudiere dans toute sa surface, excepté à l'endroit qui correspond au fourneau, où la chaudiere n'a aucune partie de construction qui s'y applique, & que par - tout ailleurs il y a entre la chaudiere & le mur en calote sphérique concave, cinq à six pouces de distance. Il n'y a rien qui corresponde au fond de la chaudiere E, comme on voit figure 9. L'espace du mur & de la chaudiere F, F, plus grand par en bas que par - tout ailleurs, va toûjours en diminuant à mesure qu'il s'éleve vers les bords de la chaudiere. Cette construction est très - raisonnable; par ce moyen les parties de la chaudiere sont d'autant plus découvertes, qu'elles sont plus exposées à l'action du feu; & la flamme resserrée à mesure qu'elle monte, se replie sur elle - même, & enveloppe toute la chaudiere, s'élevant jusqu'aux ventouses qui sont perpendiculairement au - dessus de l'embouchure, environ à cinq à six piés plus haut. Il n'est pas nécessaire d'avertir qu'il faut garnir & élever les murs de revêtissement, à mesure que l'on éleve ceux du fourneau qui doivent commander aux autres. Lorsqu'on a poussé la construction jusqu'en G, G, à quatre à cinq pouces des agraffes de la chaudiere, qui doivent être faites de cuivre pour plus grande solidité, on fermera tout - à - coup le fourneau; ensorte que toutes les briques toucheront pour lors la chaudiere; & l'on continuera de construire ainsi lors même qu'on sera au - dessus des agraffes, avec cette différence seulement, que les briques depuis le pié du mur jusqu'aux agraffes, seront unies avec de la terre à four; & que depuis les agraffes jusqu'aux bords & au - dessus des bords, on les liera avec un mortier de chaux & un ciment d'eau - forte. On observera, lorsqu'on posera les briques avec le mortier de chaux & le ciment, de faire mouiller les briques, afin qu'elles soient plus disposées à faire corps avec le ciment.

Lorsqu'on a conduit la maçonnerie à la hauteur de la chaudiere, & qu'on aura construit les ventou [p. 403] ses; les cheminées R, R, fig. 1. les hottes S, S, on posera sur le devant de la chaudiere, c'est - à - dire à la partie opposée à l'embouchure du fourneau, une jante de bois d'orme de 4 à 5 pouces d'équarrissage, & dont la largeur couvre l'épaisseur du mur. On garnira & l'on arrasera cette jante tout autour de la chaudiere & des bords, avec des briques & du ciment. La maçonnerie ainsi arrasée, on posera les sommiers: ce sont deux pieces de bois de chêne d'environ neuf pouces de largeur, sur un pié de hauteur, qui doivent traverser la chaudiere dans toute sa largeur, laissant entr'elles un espace de vingt à vingt - deux pouces qui restera toûjours vuide, afin de pouvoir emplir & vuider les chaudieres. Ces deux pieces de bois étant aussi arrasées par la maçonnerie de brique & de ciment, on posera dessus des planches, comme on les voit en T, T, T, fig. 1. Planche II. ou fig. 1. Planche V. Ces planches seront attachées sur les sommiers, serviront de couvertures à la chaudiere, & porteront les bacs à jets, qui doivent toûjours être sur les chaudieres, & qu'on y voit fig. 1. Planche V. en F, F.

Des bacs. Les bacs sont des especes de réservoirs destinés à recevoir la bierre lorsqu'elle est faite. Il y en a de deux sortes, les bacs à jetter, & les bacs de décharge. Les bacs à jetter dont il s'agit ici, & qu'on voit en F, F, fig. 1. Pl. V. sont placés sur les chaudieres, & sont faits pour recevoir tout ce qui en sort, soit eau, soit bierre: mais les liqueurs ne font que passer dessus, & n'y restent jamais; aussi sont - ils plus petits que les autres. Les bacs de décharge sont destinés à recevoir la bierre lorsqu'elle est faite, & qu'elle a cessé de cuire dans les chaudieres. On fait couler dessus ces bacs la bierre avec le houblon, par le moyen de gouttieres faites & disposées exprès. La bierre reste dessus jusqu'à ce qu'elle soit prête à mettre en levain dans la cuve guilloire, dont nous parlerons ci - après.

Nous avons suffisamment exposé ce qui concerne les agrès de la brasserie: nous allons maintenant retourner au grain moulu, que nous avons laissé dans la cuve - matiere, & continuer la fabrication de la bierre, ou l'art de brasser, qui ne commence proprement qu'en cet endroit.

Maniere de brasser. Après qu'on a tiré de l'eau du puits, & qu'on en a rempli les chaudiees, on fait du feu dans les fourneaux sur lesquels elles sont placées, jusqu'à ce que l'eau ait acquis le degré de chaleur convenable pour jetter trempe. Il faut bien prendre garde que l'eau ne soit ni trop chaude, ni trop froide. Cela est de la derniere conséquence pour la fabrication. Le trop de chaleur est cause que l'on ne peut ensuite faire fermenter la bierre, ni par conséquent la dépurer de tout ce qu'elle a de grossier. Le trop peu peut nuire encore davantage, une trempe trop douce ne manquant jamais de lier en quelque sorte la farine, de l'empêcher de filtrer, & d'occasionner la perte des brassins.

Il n'est pas facile de juger si l'eau est bonne; c'est une affaire d'un tact expert à goûter les caux: c'est le terme des Brasseurs. On goûte les eaux, en présentant le bout du doigt à leur surface. Si l'eau pique au premier abord, c'est un signe qu'elle est bonne. Cette détermination me paroît bien vague. Il me semble qu'il vaudroit beaucoup mieux s'en rapporter au thermometre: il ne s'agiroit que d'un nombre suffisant d'expériences faites avec cet instrument en différentes saisons.

On appelle jetter trempe, vuider l'eau de la chaudiere dans les bacs à jetter qu'on voit en F, F, sur les chaudieres. Cette manoeuvre se fait à l'aide d'un instrument qu'on appelle un jet. Il est représenté Pl. II. fig. 4. C'est un grand chaudron de cuivre fait exprès, & emmanché d'un long morceau de bois, au bout duquel est un contrepoids de plomb qui allege le fardeau du jet & de l'eau qu'il contient, & facilite son mouvement. Le milieu du manche porte sur la jante de bois qui occupe l'intervalle des deux sommiers qui sont sur la chaudiere; on laisse omber la cuilliere du jet dans la chaudiere. Quand elle est pleine on applique la main vers le contrepoids; la cuilliere s'éleve jusqu'à la hauteur du bac, dans lequel on renverse l'eau qu'elle contient, en lui donnant un tour de poignet.

Il faut observer que, tandis qu'on jette l'eau hors de la chaudiere, il faut tirer le feu de dessous; sans quoi la chaudiere se vuidant & restant à sec, & le feu continuant dans le fourneau, la chaudiere risqueroit d'être brulée. L'eau est conduite des chaudieres par les bacs dans la cuve matiere, par le moyen d'une gouttiere qui porte d'un bout à l'endroit où le bac à jetter est percé, & de l'autre sur les bords de la cuve matiere. Mais la maniere dont elle est portée dans la cuve matiere est très - ingénieuse: la gouttiere, ou plûtôt son ouverture correspond à celle de la pompe à jetter dont nous avons parlé: l'eau, au sortir de la gouttiere, tombe dans la pompe à jetter; la pompe à jetter la transmet jusqu'au fond - plein de la cuve matiere. L'intervalle compris entre le fond - plein & le faux - fond ou fond percé de trous coniques, se remplit d'eau; quand il en est plein, alors l'eau des chaudieres qui continue de descendre par la pompe à jetter, force celle qui est contenue entre les deux fonds, à sortir par les trous du faux - fond: cet essort est considérable, comme le penseront bien ceux qui savent que les liqueurs agissent en tout sens, en raison de leur hauteur & de leur base. La farine qui couvre le fauxfond est enlevée du faux - fond par l'essort de l'eau jaillissante par les trous, jusqu'au niveau des bords de la cuve. Cinq ou six garçons brasseurs, armés chacun d'un fourquet, ou d'un instrument tel qu'on le voit fig. 7. Pl. II. (c'est une espece de pelle de fer ou de cuivre, percée dans son milieu de deux grands yeux longitudinaux); ces ouvriers, dis je, font vis - à - vis d'eux, chacun un trou dans la farine, l'écartant avec leur fourquet jusqu'à ce qu'ils ayent atteint l'eau qui l'enleve en masse. Aussi - tôt qu'ils l'ont atteinte, ils agitent la farine; ils travaillent à la méler à l'eau; ils n'épargnent aucun moyen de la bien délayer, du moins en gros. A cette manoeuvre, ils en font succéder une autre. Ils quittent le fourquet. Ils prennent la vague: c'est un long instrument de bois, terminé par trois fourchons, traversés tous trois horisontalement par trois ou quatre chevilles, ce qui divise l'espace total contenu entre les fourchons en plusieurs espaces plus petits. Voy. Pl. des outils de Brass. Ils plongent la vague dans la cuve, & agitent fortement l'eau & la farine avec cet instrument. Dès ce moment, le mêlange d'eau & de farine contenu dans la cuve - matiere, s'appelle le fardeau, & la derniere manoeuvre s'appelle vaguer. On ne cesse de vaguer, que quand la farine est délayée le plus parfaitement qu'on peut.

Du fardeau. Le fardeau reste dans cet état une heure ou environ, pendant laquelle toute la farine se précipite & se repose sur le faux - fond. La liqueur que pour lors on nomme les métiers, demeure au - dessus; au bout d'une heure, les métiers étant éclaircis, on donne avoi, en levant une tape de bois, qui traverse le faux fond, & ferme un trou pratiqué dans le fond de la cuve. La tape de bois étant levée, la liqueur passe dans le reverdoir, petite cuve dont nous avons fait mention ci - dessus. Quand je dis la liqueur, j'entens celle qui est comprise entre les deux fonds. Pour celle qui est sur le fardeau; lorsque l'espace compris entre le fond & le faux - fond est vuide, elle se filtre à travers le fardeau, & acheve de se charger du suc contenu dans cette farine.

Pendant que les métiers s'éclaircissent, comme on

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