ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"604"> est parfaitement neutre, il a un goût amer, & imprime un léger sentiment de froid sur la langue; si on l'expose dans une cuillere d'argent sur des charbons allumés, il se liquefie & s'envole sous la forme d'une vapeur blanche.

Le sel de succin jetté sur du nitre en fusion détonne plus ou moins vivement, selon qu'il est plus ou moins chargé d'huile, il se dissipe avec l'acide du nitre, & il ne reste qu'un alkali fixe pur.

Si on le calcine avec parties égales d'alkli fixe bien pur & bien dépouillé de tout tartre vitriolé, il ne forme point un hepar sulphuris comme il auroit dû faire, s'il eût été de nature vitriolique, & il ne reste qu'un alkali fixe pur.

Le sel de succin distillé avec les acides du vinaigre, du sel, du nitre, du vitriol, se sublime sous sa premiere forme; ces acides ne lui enlevent que son huile étrangere. Il faut un certain degré de chaleur pour que ces acides puissent le dissoudre, il n'y a que l'acide vitriolique qui le dissout à froid. De quelque maniere qu'on l'unisse à l'acide nitreux, il ne lui donne pas la propriété de dissoudre l'or, preuve évidente qu'il n'est pas de la nature de l'acide du sel marin.

Dissous avec parties égales de ce sel & distillé, il passe pur & dépouillé de son huile.

Si l'on mêle exactement ensemble parties égales de ce sel de succin & de fleurs de sel ammoniac & qu'on les distille, on obtient d'abord un peu d'une liqueur acide de couleur jaune, qui a toutes les propriétés de l'esprit de sel. Si l'on pousse le feu, ce qui reste de sel au fond de la cornue se sublime, de façon cependant qu'ils restent séparés & distincts; le sel de succin occupant la partie supérieure du col de la retorte, & le sel ammoniac l'inférieure; au sel de succin est unie la petite portion d'alkali volatil qui a perdu son acide du sel marin; il reste au fond du vaisseau un peu de charbon noir. M. Stockar à qui nous devons cette expérience dit, qu'en ajoutant toujours de nouveau sel de succin aux mêmes fleurs de sel ammoniac, il étoit parvenu à les décomposer presqu'entierement.

La craie se dissout très - aisément dans la solution de sel de succin; & lorsqu'on a attrapé le point de saturation, ce sel perd son goût acide pour en pren dre un amer. Si l'on filtre la dissolution & qu'on l'évapore, elle crystallise beaucoup plutôt que le sel de succin pur. Les crystaux qu'on obtient, conservent leur figure tant qu'ils sont sous l'eau: mais des qu'on les a desséchés, ils tombent en poussiere & prennent une couleur grise. Ce sel ne s'humecte point à l'air, & n'est soluble que dans l'eau chaude. Les acides n'en font exhaler aucune vapeur. Les alkalis fixes & volatils & l'acide vitriolique dégagent la craie de ce composé, les autres acides n'y operent aucun changement. Le sel de succin ne précipite la craie que lorsqu'elle est unie à l'acide végétal; il n'a aucune action sur les dissolutions de cette terre dans les acides minéraux.

Le sel de succin, combiné de cette façon avec la craie, perd toute sa volatilité. L'acide du vinaigre le plus concentré distillé sur ce sel, ne peut pas en dégager le sel de succin. Le vinaigre passe pur, & la combinaison de sel de succin & de craie reste au fond de la cornue. La même chose arrive lorsqu'on distille ce sel avec l'acide du sel marin. Il n'en est pas de même, si au lieu de l'acide du sel on emploie une solution de sel armoniac: car alors le sel de succin quitte la craie pour s'unir à l'alkali volatil, & l'acide du sel marin s'unit à la craie.

Si l'on traite de la même maniere ce sel cretacée de succin avec l'acide nitreux, on obtient d'abord cet acide pur; mais lorsqu'il s'est concentré jusqu'à un certain point, il détonne avec la partie huileuse du sel de succin, & brise tout l'appareil.

Si l'on distille l'acide vitriolique sur ce même sel, il le décompose, l'acide vitriolique s'unit à la craie, & le sel de succin passe pur.

Le sel de succin dissous dans l'eau, dissout le cuivre, le fer, l'étain & le zinc; il attaque plus difficilement le plomb & le bismuth; il ne touche pas à l'argent, au mercure, à la platine ni au régule d'antimoine. Ces dissolutions présentent quelques phénomenes particuliers: par exemple, l'acide vitriolique dégage le cuivre uni à ce sel, & n'en dégage pas le fer; l'étain se précipite de lui - même au fond de la dissolution, & il n'en reste rien dans la liqueur. Le plomb ne paroît que rongé à la surface, sans que la liqueur qui le surnage en paroisse rien contenir. L'alkali volatil versé sur la dissolution du zinc lui donne une petite couleur rouge. Alors l'alkali fixe ne peut plus la précipiter; au lieu qu'il la précipite sous la forme d'une poudre blanche, lorsqu'on le verse le premier.

Nous avons déja dit que le sel de succin ne dégageoit point l'argent ni le mercure dissous dans l'eauforte; il ne dégage pas non plus le plomb de l'eauforte ni de l'esprit de sel; mais il le dégage de l'acide du vinaigre, la poudre qu'on obtient par ce moyen, ne peut pas se changer en plomb corné.

Ces expériences sont plus que suffisantes pour démontrer que le sel de succin n'est pas un sel vitriolique, comme l'ont prétendu Neumann, Sendelius, &c. puisqu'il ne forme pas de soufre avec la poudre de charbon; ni un acide de la nature de l'acide du sel marin, puisqu'il ne convertit pas l'eau forte en eau régale, qu'il ne dégage pas l'argent ni le mercure dissous dans cette même eau forte, & qu'il ne fait pas de plomb corné. Est - on plus fondé à le regarder comme une espece de sel végétal? M. Pott seroit assez de ce sentiment, ce seroit aussi le nôtre; car quant à ce que M. Stockard objecte qu'il ne fait pas de tartre tartarisé avec l'alkali fixe, & qu'il chasse l'acide du vinaigre, de la craie & du plomb auxquels il étoit uni, on pourroit lui répondre, que ce sel n'étant pas un acide pur, puisqu'il a une forme concrete, peut avoir quelques qualités particulieres qu'il doit aux matieres hétérogènes qui lui sont unies; cela est si vrai que la crème de tartre & le vinaigre, quoiqu'ils soient un même acide végétal, forment des sels neutres différens avec l'alkali fixe & les terres absorbantes, & que l'acide du vinaigre & même le suc de citron, décomposent les différentes combinaisons de la crème de tartre avec les alkalis, les terres, & même les substances métalliques. D'ailleurs on trouve dans le regne végétal un sel concret acide qui paroît avoir la plus grande analogie avec le sel de succin, je veux parler des fleurs de benjoin.

Les Chimistes paroisient s'être bien moins occupés de développer la nature de l'huile de succin que celle de son sel: à - peine trouve - t - on quelques expériences sur cette substance; on a cependant travaillé à l'avoir aussi pure qu'il est possible, ce qu'on a obtenu par des rectifications répétées. Ces rectifiations se font, ou sans addition, ou en y ajoutant differens intermedes: de ces intermedes il n'y a que l'eau, l'esprit de vin ou l'acide du sel marin qu'on puisse employer avec sureté: les autres, ou décomposent l'huile de succin, ou en retiennent une grande partie.

Cette huile ainsi rectifiée est très - limpide, d'une odeur forte; elle est insoluble dans l'esprit auquel on l'unit cependant par le moyen de différens intermedes, tels que le savon, le blanc de baleine, &c. & c'est le procédé que l'on suit ordinairement pour faire l'eau de luce. Elle se dissout aisément dans l'huile de vitriol, l'esprit de térébenthine, les huiles & les baumes des végétaux. Il n'a pas été possible à M. Stockard de l'unir à l'alkali fixe, quoiqu'il les [p. 605] ait tenus en digestion pendant très - long - tems.

Le résidu qu'on trouve dans la cornue est plus ou moins abondant, selon que le succin qu'on a employé est plus ou moins pur. C'est une terre unie au phlogistique: celui - ci y tient si fort, que la calcination la plus long - tems continuée ne sauroit l'en dégager, & qu'il détonne encore avec le nitre. On trouve dans cette terre quelques vestiges de fer que l'aiman en sépare, & quelquefois un peu de sel marin, surtout lorsqu'on a employé du succin puisé dans la mer.

Il nous reste à parler de l'emploi que l'on fait en médecine de cette substance & de ses différens produits, comme sa teinture, son huile & son sel essentiel. On fait entrer le succin préparé, c'est - à - dire réduit en poudre très - subtile dans les différentes compositions antispasmodiques & nervines; on l'emploie même seul pour arrêter les gonorrhées & les hémorrhagies. Sa teinture, par sa vertu antispasmodique & nervine, convient dans les maladies hipocondriaques & hystériques, & quelquefois dans les maladies convulsives, surtout dans les personnes d'un tempérament lâche & humide.

Le sel de succin bien purifié est rangé parmi les remedes céphaliques, détersifs, balsamiques, antiseptiques & antispasmodiques. Il agit par la voie des urines; & joint à petite dose aux diaphorétiques & aux purgatifs, il en augmente la vertu; combiné avec l'esprit volatil de corne de cerf, il forme un sel qu'on conserve en liqueur sous le nom de liqueur de corne de cerf succinée, qu'on emploie avec le plus grand succès à la suite des remedes apéritifs pour redonner aux parties le ton qu'elles ont perdu.

L'huile de succin est âcre, balsamique, vulnéraire, diaphorétique, emménagogue & antispasmodique; on l'emploie avec succes dans les vieux ulceres & dans les maladies de convulsions.

Usage médicinaux du succin. L'huile de succin blanche, & celle qu'on retire de l'huile noire par la rectification, sont regardées comme spécifiques contre les assections spasmodiques, & principalement contre la passion hystérique. Elles sont très - recommandées encore contre les maladies du système nerveux & du cerveau, telles que la paralysie, l'apoplexie, &c. On l'ordonne communément par gouttes, & la dose la plus haute n'excede guere sept à huit gouttes. Il n'y a point d'inconvéniens à augnienter considérablement cette dose, à donner cette huile à un demi - gros, & même à un gros & davantage, si on l'unit à un jaune - d'oeuf ou à du sucre en poudre. Voyez oleo - saccharum. Outre l'usage intérieur dont nous venons de parler, on l'emploie encore extérieurement contre les mêmes maladies, on en frotte les tempes, le dessous du nez, la nuque, l'épine du dos, dans les maladies nerveuses & convulsives, dans l'apoplexie, la paralysie, &c.

Dans les paroxismes des vapeurs hystériques, on en applique sous les natines, on en fait flairer un flacon, & on en fait encore un usage fort singulier & vraissemblablement fort inutile, qui est d'en frotter le pubis & la vulve, & même d'introduire dans le vagin des pessaires qui en soient imbibés.

L'esprit & le sel de succin, sont comptés parmi les apéritifs diurériques les plus efficaces: on croit que la matiere huileuse dont ce sel est empreint, le rend très - propre à déterger & à consolider les ulceres de la vessie & de l'uretre. Cet esprit & ce sel sont encore recommandés contre les maladies des obstructions & en particulier contre la jaunisse: on le vante aussi pour le traitement du scorbut; la dose commune de l'esprit est d'environ demi - gros jusqu'à un gros, dans une liqueur appropriée. Or en supposant l'esprit de succin comme une liqueur saline à peu - près saturée, la dose de sel concret correspondante à un gros de liqueur, sera d'environ cinq grains: car une partie de sel de succin demande environ quatorze parties d'eau pour être dissoute; d'où l'on peut conclure que cette dose vulgaire d'esprit de succin, pourroit être très - considérablement augmentée: car certainement le sel de succin ne sauroit être regardé comme un remede actif. Au reste le sel & l'esprit de succin sont des drogues fort peu employées.

L'usage pharmaceutique le plus ordinaire de l'esprit de succin, c'est d'être employé à la préparation de la liqueur de corne de cerf succinée, qui se fait en mêlant jusqu'au point de saturation de l'esprit de succin & de l'esprit volatil de corne de cerf, ce qui constitue une liqueur saline ou lessive d'un sel ammoniacal fort gras, & que plusieurs auteurs recommandent singulierement comme un excellent remede, dans les maladies convulsives, principalement dans l'asthme, & dans les maladies d'obstructions, dans lesquelles il paroît en effet que ce remede doit très bien faire, & qu'il devroit par conséquent être plus usité parmi nous dans ces cas.

Le succin en substance ou en poudre est aussi employé à titre de remede; mais il paroît peu propre à passer dans les secondes voies & à opérer un effet réel. La teinture qu'on en tire par l'esprit - de - vin, a un peu plus d'essicacité: d'abord parce que l'esprit - devin lui - même, qu'on y emploie, a une vertu médicamenteuse reconnue contre les maladies auxquelles on emploie cette teinture, & qui sont les mêmes pour lesquelles on recommande l'huile de succin; secondement, par l'état de dissolution, ou au moins de très - grande division, dans lequel le succin contenu dans cette teinture peut parvenir à l'orifice des vaisseaux lactés, quand même cette teinture seroit précipitée par les liqueurs digestives: au reste cette teinture de succin est très - peu chargée; l'esprit - devin ne dissout le succin qu'avec peine, qu'en petite quantité, & peut - être que fort incompletement. M. Baron dit dans ses notes sur Lemeri, que l'huile aromatique du succin, est la seule partie de ce bitume dont l'esprit - de - vin puisse se charger. Si cette proposition au - lieu d'être purement gratuite, étoit tant - soitpeu prouvée, il faudroit dire positivement que l'esprit - de - vin ne dissout le succin qu'incompletement, au - lieu de dire que cela est peut - être ainsi.

Quoi qu'il en soit, pour faire une bonne teinture de succin, une teinture bien chargée, vraiment empreinte de la vertu médicamenteuse du succin, il faut avoir recours à l'intermede de l'alkali fixe, qui est capable non seulement de disposer le succin à être plus facilement attaqué par l'esprit - de - vin, mais même qui peut contracter avec ce bitume, une espece d'union sous forme de savon, qui le rend très - propre à se distribuer parfaitement dans le système vasculeux, à se mêler à la masse des humeurs: l'alkali fixe opere l'un & l'autre effet dans la teinture de succin d'Hoffman, dont voici la description.

Teinture de succin d'Hossman; essentia succini proestantissima, décrite dans les observations physico - chimiques de cet auteur, liv. I. obs. 17. Prenez du sel de tartre & du succin choisi & réduit en poudre très - fine, parties egales; faites - les digerer dans un vaisseau convenable, avec suffisante quantité d'espritde - vin, pour s'élever de quatre doigts au - dessus de la matiere; distillez ensuite en un alambic de verre, vous obtiendrez un esprit bien empreint de l'huile subtile & aromatique de succin, qui sera par - là bien plus propre que l'esprit - de - vin ordinaire, à préparer la teinture suivante.

Prenez du succin transparent en poudre, broyez - le sur le porphyre, en versant dessus peu - à - peu une suffisante quantité d'huile de tartre par défaillance, pour le réduire en consistance de bouillie, que vous

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