ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"570"> Ne te pouvant aimer, fais que je te regrette. Montre d'un vrai romain la derniere vigueur, Et mérite mes pleurs au défaut de mon coeur.

Le premier vers est sublime, & les autres, quoique pleins de grandeur, ne sont pourtant pas du genre sublime.

Dans la tragédie de Sertorius, la reine Viriate parle à Sertorius qui refusoit de l'épouser, parce qu'il s'en croyoit indigne par sa naissance, & qui cependant la vouloit donner à Perpenna; & sur ce qu'il disoit qu'il ne vouloit que le nom de créature de la reine, elle lui répond:

Si vous prenez ce titre, agissez moins en maître, Ou m'apprenez du - moins, seigneur, par quelle loi Vous n'osez m'accepter, & disposez de moi? Accordez le respect que mon trône vous donne, Avec cet attentat sur ma propre personne; Voir toute mon estime, & n'en pas mieux user, C'en est un qu'aucun art ne sauroit déguiser.

Tout cela est beau, tout cela est noble; mais quand elle vient à dire immédiatement après:

Puisque vous le voulez, soyez ma créature; Et me laissant en reine ordonner de vos voeux, Portez - les jusqu'à moi, parce que je le veux.

Ces trois derniers vers sont si sublimes, & élevent l'ame si haut, que les autres vers tout grands qu'ils sont, paroissent perdre de leur beauté; de sorte qu'on peut dire que le grand disparoît à la vûe du sublime, comme les astres disparoissent à la vue du soleil.

Cette différence du grand & du sublime, me semble certaine; elle est dans la nature, & nous la sentons. De donner des marques & des regles pour faire cette distinction, c'est ce que je n'entreprendrai pas, parce que c'est une chose de sentiment; ceux qui l'ont juste & délicat, feront cette différence. Di sons seulement que tout discours qui éleve l'ame éclairée avec admiration au - dessus de ses idées ordinaires de grandeur, & qui lui donne une plus haute opinion d'elle - même, est sublime. Tout discours qui n'a ni ces qualités ni ces effets, n'est pas sublime, quoiqu'il ait d'ailleurs une grande noblesse.

Enfin, nous déclarons que quand on trouveroit sublimes quelques - uns des passages qui nous paroissent seulement grands, cela ne feroit rien contre le principe; & un exemple par nous mal appliqué, ne peut détruire une différence réelle & reconnue.

Comme les personnes qui ont en partage quelque goût, sont extrèmement touchées des beautés du sublime, on demande s'il y a un art du sublime c'est - à - dire si l'art peut servir à acquérir le sublime.

Je réponds avec M. Silvain, que si on entend par le mot d'art un amas d'observations sur les opérations de l'esprit & de la nature, ou sur les moyens d'exciter à la production de ces beaux traits les personnes qui sont nées au grand, il y a un art du sublime. Mais si on entend par art, un amas de préceptes propres à faire acquérir le sublime, je ne crois pas qu'il y en ait aucun. Le sublime doit tout à la nature; il n'est pas moins l'image de la grandeur du coeur ou de l'esprit de l'orateur, que de l'objet dont il parle; & par conséquent il faut, pour y parvenir, être né avec un esprit élevé, avec une ame grande & noble, & joindre une extrème justesse à une extrème vivacité. Ce sont - là, comme on voit, des dons du Ciel, que toute l'adresse humaine ne sçauroit procurer.

D'ailleurs le sublime consiste non - seulement dans les grandeurs extraordinaires d'un objet, mais encore dans l'impression que cet objet a faite sur l'orateur, c'est - à - dire dans les mouveméns qu'il a excités en lui, & qui sont imprimés dans le tour de son expression. Comment peut - on apprendre à avoir ou à produire des mouvemens, puisqu'ils naissent d'eux - mêmes en nous à la vue des objets, souvent malgré nous, & quelquefois sans que nous nous en appercevions? ne faut - il pas avoir pour cela un coeur & un naturel sensibles? & dépend - t - il d'un homme d'être touché quand il lui plaît, & de l'être précisément autant & en la maniere que la grandeur des choses le demande?

Dans le sublime des images, peut - on se donner ou donner aux autres cette intelligence vive & lumineuse, qui vous fait découvrir dans les plus grands objets de la nature une hauteur extraordinaire & inconnue au commun des hommes? D'un autre côté, est - il au pouvoir d'un homme de faire naître en soi des sentimens héroïques? Et ne faut - il pas qu'ils partent naturellement du coeur & d'un mouvement que la magnanimité seule peut inspirer? Concluons que le seul art du sublime est d'être né pour le sublime.

Nous nous sommes étendus sur cette matiere, parce qu'elle annoblit le coeur, & qu'elle éleve l'ame au plus haut point de grandeur dont elle soit capable, & parce qu'enfin c'est le plus beau sujet de l'éloquence & de la poésie. (Le chevalier de Jaucourt.)

SUBLIMÉ CORROSIF (Page 15:570)

SUBLIMÉ CORROSIF, ou MERCURE SUBLIMÉ CORROSIF. Voyez Mercure, Chimie, & Mercure, Mat. médic.

SUBLINGUAL, LE (Page 15:570)

SUBLINGUAL, LE, adj. en Anatomie, se dit des parties qui sont situées sous la langue. Voy. Langue.

Les glandes sublinguales sont au nombre de deux, placées de chaque côté sous la langue; elles versent dans la bouche la salive qu'elles séparent. M. Morgagni a décrit le premier les conduits particuliers de ces glandes: ils sont situés entre la langue & les gencives, & s'ouvrent à peu de distance du frein. Rivinus les découvrit le premier dans les veaux en 1679, Bartholin les découvrit ensuite dans le lion en 1682; c'est pour cela que ce conduit se nomme le conduit de Rivin ou de Bartholin.

L'artere sublinguale est une branche de la carotide externe: elle se distribue aux muscles hyoïdiens & glossiens, aux glandes sublinguales, & se plonge dans la langue, & s'anastomose aux environs de la pointe de la langue avec celle du côté opposé. Voyez Carotide, Langue, &c. on l'appelle aussi artere ranine. Voyez Ranine.

SUBLUNAIRE (Page 15:570)

SUBLUNAIRE, adj. (Phys.) se dit de toutes les choses qui sont sur la terre ou dans son atmosphere, au - dessous de la lune: ainsi on dit les corps sublunaires, pour marquer tous les corps qui sont ici bas, tous les météores, &c. (O)

SUBMERGER (Page 15:570)

SUBMERGER, v. act. (Gram.) inonder, couvrir d'eau, noyer. Ce bâtiment a été submergé; les rivieres se sont débordées, & toutes les terres voisines de leurs bords ont été submergées.

SUBMERSION par le sable (Page 15:570)

SUBMERSION par le sable, s. f. (Physique générale.) les côtes de Suffolk sont exposées à être submergées par le sable. Leur voisinage est rempli de monticules entierement sablonneux, & seulement couverts d'une fine herbe par - dessus. Les vents violens qui surviennent, renversent cette herbe, & portent en forme de pluie le sable caché dessous, dans toutes les plaines voisines, où il s'accumule & forme de nouveaux lits. Rien n'arrête le progrès de l'inondation, ensorte qu'elle gagne sans cesse du terrein. Dans quelques endroits même, la situation du sol favorise le déluge de sable, & lui permet de couvrir des centaines d'arpens. Il descend des collines avec la plus grande rapidité, passe à - travers les haies, s'éleve au - dessus des côteaux, & quand il gagne un village dans son cours, il ensévelit en passant les chaumieres & les cabannes qui ne sont pas bâties à plus grands frais qu'elles ne valent. Il remplit les [p. 571] caves des maisons, & abat quelquefois par sa pesanteur, les murs qu'il trouve sur sa route. Mais il faut lire les détails curieux que M. Wright a donnés de ce déluge sec, dans les Transact. philos. n°. 37.

La portion du pays de Suffolk exposée à cette étrange submersion, est non - seulement sablonneuse par elle - même, mais située est - nord - est d'une partie d'un vaste terrein plat, exposé à des vents impétueux, qui emportent tout le sable qu'ils trouvent sur leur passage, & qui continuent d'agir avec leurs forces entieres, en parcourant sans être brisés ni interrompus, une grande étendue de terres.

On n'a point encore trouvé de meilleur secret pour garantir les habitations précieuses de cette submersion, que de les environner de haies de genêts épineux, qu'on plante serrés par gradation les uns au - dessus des autres. Ceux qui ont eu le courage de faire ces sortes de plantations, ont eu le bonheur d'arrêter & de détourner le progrès du ravage, après avoir vû auparavant dans ces mêmes terres le sable élevé jusqu'à la hauteur de vingt piés.

Près de Thetford, ville de la province de Norfolk, plusieurs villages ont été éntierement détruits depuis plus de cent ans par les déluges de sable de Suffolk, & une branche de la riviere de l'Ouse, appellée depuis la riviere de Thetford, en a été tellement bouchée, qu'il n'y a plus que de petits bâtimens qui puissent y passer, au - lieu qu'auparavant les grands vaisseaux y navigeoient. Il est vrai que ce déluge. de fable en se jettant dans la riviere, a préservé une partie de la province de Norfolk de la submersion sablonneuse, qui n'eût pas manqué d'y ruiner une grande quantité de son terrein plat, si fertile en blé.

Aux environs de Saint - Paul de Léon en basse Bretagne, il y a sur le bord de la mer un canton, qui avant l'an 1666 étoit habité, & ne l'est plus, à cause d'un sable qui le couvre jusqu'à une hauteur de plus de vingt piés, & qui d'année en année gagne du terrein A compter de l'époque marquée, il a gagné plus de six lieues, & il n'est plus qu'à une demi - lieue de Saint - Paul; de sorte que, selon toutes les apparences, il faudra abandonner la ville. Dans le pays submergé on voit encore quelques pointes de clochers & de cheminées qui sortent de cette mer de sable: les habitans des villages enterrés ont eu du moins le loisir de quitter leurs maisons pour aller mandier.

C'est le vent d'est ou de nord - est qui avance cette calamité; il éleve ce sable qui est très - fin, & le porte en si grande quantite & avec tant de vîtesse, que M. Deslandes, à qui on doit cette observation, dit qu'en se promenant en ce pays - là pendant que le vent charrioit, il étoit obligé de secouer de tems - entems son chapeau & son habit, parce qu'il les sentoit appesantis. De plus, quand le vent est violent, il jette ce sable par - dessus un petit bras de mer, jusque dans Roscose, petit port assez fréquenté par les vaisseaux étrangers: le sable s'éleve dans les rues de cette bourgade jusqu'à deux piés, & on l'enleve par charretées.

Ce désastre est nouveau, parce que la plage qui fournit ce sable, n'en avoit pas encore une assez grande quantité pour s'élever au - dessus de la surface de la mer, ou peut - être parce que la mer n'a abandonné cet endroit, & ne l'a laissé découvert que depuis un certain tems. Elle a eu quelque mouvement sur cette côte; elle vient présentement dans le reflux une demi - lieue au - delà de certains rochers qu'elle ne passoit pas autrefois. Ce malheureux canton inondé d'une façon si singuliere, ainsi que les déluges de sable de la province de Suffolk, dont nous avons parlé au commencement de cet article, ne justifient que trop ce que les anciens & les modernes rapportent des tempêtes excitées en Afrique, qui ont fait périr par des déluges de sable, des villes, & même des armées. Histoire de l'académie des Sciences, 1722. (D. J.)

SUBORDINATION (Page 15:571)

SUBORDINATION, s. f. (Gramm.) est un terme relatif qui exprime les degrés d'infériorité entre une chose & une autre.

Il y a dans l'Eglise différens degrés de subordination, comme des diacres aux prêtres, des prêtres aux évêques, & des évêques au pape, à cause de sa primauté d'honneur & de jurisdiction. Voyez Primauté. L'assemblage de tous ces ordres se nomme hiérarchie. Voyez Hiérarchie.

Subordination (Page 15:571)

Subordination, la, c'est, dans l'état militaire, l'obéissance & la soumission que doit l'ossicier inférieur au supérieur pour toutes les choses qui concernent ses fonctions ou son emploi. C'est dans la subordination, renfermée dans ses justes bornes, que consiste principalement la discipline militaire, si importante dans les armées. Voyez Discipline militaire & Officiers. (Q)

SUBORNATION (Page 15:571)

SUBORNATION, (Grammaire & Jurisprud.) est l'action de corrompre quelqu'un, soit par flatterie & caresses, soit par promesses ou par menaces; ce crime est mis dans la classe des différentes especes de faux.

Il y a deux sortes de subornation.

L'une est celle par laquelle on entraîne une personne dans la débauche.

L'autre est celle par laquelle on engage une personne à faire ou dire quelque chose contre la justce ou la vérité, comme lorsque l'on corrompt un juge ou autre officier public, pour lui faire faire quelque acte faux ou injuste.

La loi Cornelia de falsis, prononçoit la peine de faux contre ceux qui subornent les juges, & contre les juges qui se laissent suborner: parmi nous ces peines dépendent de l'arbitrage du juge & des circonstances.

Le terme de subornation est principalement usité pour exprimer la corruption des témoins que l'on engage à certifier ou déposer quelque chose contre la vérité.

La preuve de ce crime est difficile à acquérir, parce que l'on ne fait pas ordinairement de convention par écrit pour corrompre quelqu'un: c'est pourquoi deux témoins qui accusent un tiers de les avoir voulu suborner, suffisent pour faire décreter l'accusé, même pour le faire condamner à la question, on peut même le condamner quand il n'avoueroit rien, si les deux dépositions sont uniformes & sur un même fait.

La peine de la subornation chez les Romains, tant pour le suborneur que pour les témoins subornés, étoit la peine ordinaire du faux, ff. ad leg. Corn. de fals.

Les ordonnances de France, notamment celle de 1531, prononcent la peine de mort contre ceux qui subornent les témoins, & contre les temoins qui se laissent suborner.

Le subornement des témoins, sur - tout si c'est pour faire périr un innocent, mérite une mort plus rigoureuse que les autres, telle que le supplice de la roue.

Suivant le droit canon le suborneur est excommunié, & celui qui se laisse suborner est déclaré incapable de porter témoignage, & est noté d'infamie. Voyez le Traité des crimes par M. de Vouglans. (A)

SUBREDAURADE (Page 15:571)

SUBREDAURADE, s. f. (Hist. nat.) on donne ce nom à la daurade lorsqu'elle a pris tout son accroissement. Voyez Daurade.

SUBREPTICE (Page 15:571)

SUBREPTICE, adj. (Gram. & Jurisprud.) est ce qui tend à ôter la connoissance de quelque fait ou de quelque piece que l'on a intérêt de dissimuler.

Des lettres de chancellerie sont subreptices, lorsque l'on a déguisé quelque fait essentiel qui eût empêché d'accorder les lettres.

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