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On rencontre dans les auteurs plusieurs exemples de cette espece; Bullengerus en a recueilli une partie dans le traité qu'il a composé sur ce sujet; mais ceux que l'on vient de rapporter suffisent pour montrer jusqu'où peut aller la superstition humaine. (D. J.)
Sorts des saints (Page 15:379)
Elle consistoit à ouvrir au hasard les livres sacrés, dans l'espérance d'y trouver quelques lumieres sur le parti qu'ils avoient à suivre dans telles & telles circonstances; d'y apprendre, si le succès des événemens qui les intéressoient, seroit heureux ou malheureux, & ce qu'ils devoient craindre ou espérer du caractere, de la conduite, & du gouvernement des personnes auxquelles ils étoient soumis.
L'usage avoit établi deux manieres de consulter la volonté de Dieu par cette voie: la premiere étoit, comme on vient de le dire, d'ouvrir au hasard quelques livres de l'Ecriture - sainte, après avoir imploré auparavant le secours du ciel par des jeûnes, des prieres, & d'autres pratiques religieuses. Dans la seconde qui étoit beaucoup plus simple, on se contentoit de regarder comme un conseil sur ce qu'on avoit à faire, ou comme un présage du bon ou du mauvais succès de l'entreprise qu'on méditoit, les premieres paroles du livre de l'Ecriture, qu'on chantoit dans le moment où celui qui se proposoit d'interroger le ciel par cette maniere, entroit dans une église.
Saint Augustin dans son épître à Januarius, ne paroît condamner cette pratique qu'au sujet des affaires mondaines; cependant il aime encore mieux qu'on en fasse usage pour les choses de ce siecle, que de consulter les démons.
S. Grégoire évêque de Tours, nous a fait connoître d'une maniere assez particuliere les cérémonies religieuses, avec lesquelles on consultoit les sorts des saints. Les exemples qu'il en donne, & le sien propre, justifient que cette pradique étoit fort commune de son tems, & qu'il ne la desapprouvoit pas.
On en jugera par ce qu'il raconte de lui - même en
ces termes:
Ce qu'il rapporte de Meroüée fils de Chilpéric, mérite de trouver place ici, parce qu'on y voit quelles étoient les pratiques de religion auxquelles on avoit recours pour se rendre le ciel favorable, avant que de consulter les sorts des saints, & pour mieux s'assurer de la vérité de la réponse qu'on y cherchoit.
Dans cet exemple, on voit que c'est Méroüée qui sans recourir au ministere des clercs de saint Martin de Tours, pose lui - même les livres saints, & les ouvre. Dans celui que l'on va citer toujours d'après le même auteur, on fait intervenir les clercs de l'église, qui joignent leurs prieres à celles du suppliant; voici comme le même auteur expose ce fait.
Non - seulement on employoit les sorts des saints
pour se déterminer dans les occasions ordinaires de
la vie, mais même dans les élections des évêques,
lorsqu'il y avoit partage. La`vie de saint Aignan fait
soi, que c'est de cette maniere qu'il fut nommé évêque d'Orléans. Saint Euverte qui occupoit le siége
de cette ville sur la fin du iv. siecle, se trouvant accablé
de vieillesse, & voulant le désigner pour son
successeur, le clergé & le peuple s'opposerent vivement
à ce choix. Saint Euverte prit la parole, & leur
dit:
Saint Euverte fit ensuite amener un enfant qui n'avoit point encore l'usage de la parole, & lui commanda de prendre au hasard un de ces billets; l'enfant ayant obéi, il tira celui qui portoit le nom de saint Aignan, & se mit à lire à haute voix: Aignan est le pontife que Dieu vous a choisi. Mais saint Euverte, continue l'historien, pour satisfaire tout le monde, voulut encore interroger les livres saints; le [p. 380]
Les Grecs aussi - bien que les Latins, consultoient les sorts des saints dans les conjonctures critiques; Cedrenus rapporte, comme nous l'avons dit en parlant des sorts en général, que l'empereur Héraclius après avoir eu de grands avantages sur Cosroez roi des Perses, se trouvant incertain sur le lieu où il prendroit ses quartiers d'hiver, purifia son armée pendant trois jours; ce sont les termes de l'historien; qu'ensuite il ouvrit les évangiles, & qu'il trouva qu'ils lui ordonnoient d'aller hiverner en Albanie.
Depuis le huitieme siecle, les exemples de cette pratique deviennent un peu plus rares; cependant il est certain que cet usage subsista jusque dans le quatorzieme siecle, avec cette seule différence, qu'on ne se préparoit plus à cette consultation par des jeûnes & despprieres, & qu'on n'y joignoit plus cet appareil religieux, que jusqu'alors on avoit cru nécessaire pour engager le ciel à manifester ainsi ses volontés.
L'église tant grecque que latine, conserva sans cesse quelques traces de cet usage. La coutume étoit encore dans le xv. & xvj. siecle quand un évêque étoit élu, que dans la cérémonie de son sacre, immédiatement après qu'on lui avoit mis sur la tête le livre des évangiles, on l'ouvroit au hasard, & le premier verset qui se présentoit, étoit regardé comme un pronostic de ce qu'on avoit à espérer ou à craindre de son caractere, de ses moeurs, de sa conduite, & du bonheur ou du malheur qui lui étoit réfervé durant le cours de son épiscopat; les exemples en sont fréquens dans l'histoire ecclésiastique.
Si l'on en croit un de ses écrivains qui a fait la vie des évêques de Liége, la mortpfuneste d'Albert évêque de cette ville, lui fut annoncée par ces paroles, que l'archevêque qui le sacroit trouva à l'ouverture du livre des évangiles: Il envoya un de ses gardes avec ordre de lui apporter la tête de Jean; & ce garde étant entré dans la prison, lui coupa la tête. L'historien ajoute, que ce prélat en fut si frappé, qu'il adressa la parole au nouvel évêque, & lui dit en le regardant avec des yeux baignés de larmes: Mon fils, en vous donnant au service de Dieu, conduisez - vous avec crainte & avec justice, & préparez votre ame à la tentation; car vous serez un jour martyr. Il fut en effet assassiné par des émissaires de l'empereur Henri VI. & l'Eglise l'honore comme martyr.
On ajoutoit tant de foi à ces sortes de pronostics; ils formoient un préjugé si favorable ou si desavantageux aux évêques, qu'on les alléguoit dans les occasions les plus importantes, & même dans celles où il étoit question de prononcer sur la canonicité de leur élection.
La même chose se pratiquoit à l'installation des abbés, & même à la réception des chanoines; cette coutume subsiste encore aujourd'hui dans la cathédrale de Boulogne, dont le diocèse aussi - bien que ceux d'Ypres & de Saint - Omer, a été formé des débris de cette ancienne église, après que la ville de Térouanne eut été détruite par Charles - Quint. Toute la différence qui s'y trouve présentement, c'est qu'à Boulogne, le nouveau chanoine tire les sorts dans le livre des pseaumes, & non dans celui des évangiles. Feu M. de Langle évêque de Boulogne,
Quant à la seconde maniere de consulter les sorts des saints, elle étoit comme on l'a dit, beaucoup plus simple, & également connue dans les deux églises grecque & latine. Cette maniere consistoit à regarder comme un bon ou un mauvais augure, ou comme une déclaration de la volonté du ciel, les premieres paroles de la sainte Ecriture, qu'on chantoit à l'église dans le moment qu'on y entroit à cette intention: les exemples en sont très - nombreux.
Saint Cyprien étoit si persuadé que Dieu manifestoit quelquefois ses volontés par cette voie, qu'il y avoit souvent recours; c'étoit pour ce pere de l'Eglise un heureux présage lorsqu'il trouvoit que les premieres paroles qu'il entendoit en mettant le pié dans l'église, avoient quelque relation avec les choses qui l'occupoient.
Il faut cependant convenir que dans le tems où cet usage de consulter les sorts à venir par l'Ecriture, étoit le plus en vogue, & souvent même accompagné d'un grave appareil d'actes de religion; on trouve différens conciles qui condamnent en particulier les sorts des saints, & en général toute divination faite par l'inspection des livres sacrés. Le concile de Vannes, par exemple, tenu sous Léon I. dans le v. siecle; le concile d'Agde assemblé l'an 506; les conciles d'Orléans & d'Auxerre, l'un de l'an 511, & l'autre de l'an 595, proscrivent les sorts des saints; & l'on trouve un capitulaire de Charlemagne publié en l'an 789, qui contient aussi la même défense. Mais les termes dans lesquels ces défenses sont conçues, donnent lieu de croire, que la superstition avoit mêlé une infinité de pratiques magiques dans les sorts des saints, & qu'il ne faut peut - être pas confondre la maniere de les consulter condamnée par ces canons, avec celle qui étoit souvent employée dans les premiers siecles de l'Eglise par des personnes éminentes en piété.
Ce qu'il y a de sûr, c'est que quelques théologiens conviennent en général qu'on ne peut pas excuser les sorts des saints de superstition; que c'étoit tenter Dieu que de l'interroger ainsi; que les Ecritures ne contiennent rien dont on puisse conclure, que Dieu ait pris là - dessus aucun engagement avec les hommes, & que cette coutume bien loin d'être autorisée par aucune loi ecclésiastique, a été abrogée dans les tems éclairés; cependant ces mêmes théologiens oubliant ensuite la solidité des principes qu'ils venoient d'établir, se sont persuadés que dans certaines occasrons, plusieurs de ceux qui ont consulté les sorts des saints, y ont été portés par une secrete inspiration du ciel. (D. J.)
SORTA cap (Page 15:380)
SORTA
SORTE (Page 15:380)
SORTE, s. f. (Gram.) nom collectif, qui rassemble
sous son acception un certain nombre de choses
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