ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"258"> ou d'érection trahissent elles - mêmes, & manifestent leur origine & leur dépendance. Mais la société religieuse n'ayant point un but ni des moyens conformes à ceux de l'état, donne par - là des preuves intérieures de son indépendance; & elle les confirme par des preuves extérieures, en faisant voir qu'elle n'est pas de la création de l'état, puisqu'elle existoit déja avant la fondation des sociétés civiles. Par rapport à une dépendance fondée sur une cause civile, elle ne peut avoir lieu. Comme les sociétés religieuses & civiles different entierement & dans leurs buts, & dans leurs moyens, l'administration de l'une agit dans une sphere si éloignée de l'autre, qu'elles ne peuvent jamais se trouver opposées l'une à l'autre; en sorte que la nécessité d'état qui exigeoit que les lois de la nation missent l'une dans la dépendance de l'autre, ne sauroit avoir lieu, si l'office du magistrat civil s'étendoit au soin des ames, l'église ne seroit alors entre ses mains qu'un instrument pour parvenir à cette fin. Hobbes & ses sectateurs ont fortement soutenu cette thèse. Si d'un autre côté l'office des sociétés religieuses s'étendoit aux soins du corps & de ses intérêts, l'état courroit grand risque de tomber dans la servitude de l'église. Car les sociétés religieuses ayant certainement le district le plus noble, qui est le soin des ames, ayant ou prétendant avoir une origine divine, tandis que la forme des états n'est que d'institution humaine; si elles ajoutoient à leurs droits légitimes le soin du corps & de ses intérêts, elles réclameroient alors, comme de droit, une superiorité sur l'état dans le cas de compétence; & l'on doit supposer qu'elles ne manqueroient pas de pouvoir pour maintenir leur droit: car c'est une conséquence nécessaire, que toute société dont le soin s'étend aux intérêts corporels, doit être revêtue d'un pouvoir coactif. Ces maximes n'ont eu que trop de vogue pendant un tems. Les ultramontains habiles dans le choix des circonstances, ont tâché de se prévaloir des troubles intérieurs des états, pour les établir & élever la chaire apostolique au - dessus du trône des potentats de la terre, ils en ont exigé, & quelquefois reçu hommage, & ils ont tâché de le rendre universel. Mais ils ont trouvé une barriere insurmontable dans la noble & digne résistance de l'Eglise gallicane, également fidele à son Dieu & à son roi.

Nous posons donc comme maxime fondamentale, & comme une conséquence évidente de ce principe, que la société religieuse n'a aucun pouvoir coactif semblable à celui qui est entre les mains de la société civile. Des objets qui different entierement de leur nature, ne peuvent s'acquérir par un seul & même moyen. Les mêmes relations produisant les mêmes effets, des effets différens ne peuvent provenir des mêmes relations. Ainsi la force & la contrainte n'agislant que sur l'extérieur, ne peuvent aussi produire que des biens extérieurs, objets des institutions civiles; & ne sauroient produire des biens intérieurs, objets des institutions religieuses. Tout le pouvoir coactif, qui est naturel à une société religieuse, se termine au droit d'excommunication, & ce droit est utile & nécessaire, pour qu'il y ait un culte uniforme; ce qui ne peut se faire qu'en chassant du corps tous ceux qui refusent de se conformer au culte public: il est donc convenable & utile que la société religieuse jouisse de ce droit d'expulsion. Toutes sortes de société quels qu'en soient les moyens & la fin, doivent nécessairement comme société avoir ce droit, droit inséparable de leur essence; sans cela elles se dissoudroient d'elles - mêmes, & retomberoient dans le néant, précisément de même que le corps naturel, si la nature, dont les sociétés imitent la conduite en ce point, n'avoit pas la force d'évacuer les humeurs vicieuses & malignes; mais ce pouvoir utile & néces<cb-> saire est tout celui & le seul dont la société réligieuse ait besoin; car par l'exercice de ce pouvoir, la conformité du culte est conservée, son essence & sa fin sont assurées, & le bien - être de la société n'exige rien au - delà. Un pouvoir plus grand dans une société religieuse seroit déplacé & injuste.

Société (Page 15:258)

Société, (Jurisprud.) signifie en général une union de plusieurs personnes pour quelque objet qui les rassemble. La plus ancienne de toutes les sociétés est celle du mariage, qui est d'institution divine.

Chaque famille forme une société naturelle dont le pere est le chef.

Plusieurs familles réunies dans une même ville, bourg ou village, forment une société plus ou moins considérable, selon le nombre de ceux qui la composent, lesquels sont liés entre eux par leurs besoins mutuels & par les rapports qu'ils ont les uns aux autres; cette union est ce qu'on appelle société civile ou politique; & dans ce sens tous les hommes d'un même pays, d'une même nation & même du monde entier, composent une société universelle.

Outre ces sociétés générales, il se forme encore dans un même état, dans une même ville, ou autre lieu, diverses sociétés particulieres; les unes relatives à la religion, qu'on appelle communautés & congrégations, ordres religieux; les autres relatives aux affaires temporelles, telles que les communautés d'habitans, les corps de ville; d'autres relatives à l'administration de la justice, telles que les compagnies établies pour rendre la justice; d'autres relatives aux arts & aux sciences, telles que les universités, les colleges, les académies, & autres sociétés littéraires; d'autres encore relativement à des titres d'honneur, telles que les ordres royaux & militaires; enfin d'autres qui ont rapport aux finances, ou au commerce, ou à d'autres entreprises.

Les sociétés qui se contractent entre marchands, ou entre particuliers, sont une convention entre deux ou plusieurs personnes, par laquelle ils mettent en commun entre eux tous leurs biens ou une partie, ou quelque commerce, ouvrage, ou autre affaire, pour en partager les profits, & en supporter la perte en commun, chacun selon leur fonds, ou ce qui est réglé par le traité de société.

Quand la part de chacun dans les profits & pertes n'est pas réglée par la convention, elle doit être égale.

Les portions peuvent être réglées d'une maniere inégale, soit eu égard à l'inégalité des fonds, ou à ce que l'un met plus de travail & d'industrie que l'autre.

On peut aussi convenir qu'un associé aura plus grande part dans les profits qu'il n'en supportera dans la perte, & même qu'un associé ne supportera rien de la perte, pourvu néanmoins que la perte soit prélevée avant qu'on regle sa part des profits, autrement la société seroit léonine.

Aucune société ne peut être contractée que pour un objet honnête & licite, & elle ne doit rien contenir de contraire à l'équité & à la bonne foi, qui doit être l'ame de toutes les sociétés; du reste, elles sont susceptibles de toutes les clauses & conditions licites.

Pour former une société, il faut le consentement de tous les associés.

On peut avoir quelque chose en commun, comme des cohéritiers, des colégataires, sans être pour cela associés.

L'héritier d'un associé n'est même pas associé, parce qu'il n'a pas été choisi pour tel; on peut cependant stipuler, que le droit de l'associé décédé passera à son héritier.

Si l'un des associés s'associe une autre personne, [p. 259] ce tiers ne devient point associé des autres, il n'est considéré que comme l'associé particulier de celui qui l'a adjoint avec lui, & c'est ce que l'on appelle vulgairement croupier.

Une société se peut contracter par écrit ou même sans écrit, par un consentement tacite.

Entre marchands les sociétés doivent être rédigées par écrit, & il doit en être déposé un extrait au greffe de la jurisdiction consulaire.

Les sociétés peuvent être générales de tous biens, ou relatives seulement à un certain objet, auquel cas elles se bornent à cet objet, & aux profits qui en proviennent, & n'embrassent point ce qui vient d'ailleurs.

On ne doit prendre sur les biens de la société que les dépenses licites, & dettes contractées pour le compte de la société; chaque associé doit payer seul ses dettes particulieres, soit sur sa part, ou autrement.

Si la société étoit de tous biens, chaque associé ne peut disposer que de sa portion, & ne doit prendre sur le fonds commun que son entretien & celui de sa famille.

On peut cependant convenir dans une société générale que les dots des filles se prendront sur le fonds commun à mesure que les filles seront en âge d'être pourvues.

Les associés doivent demeurer unis & se garder fidélité. Chacun d'eux est obligé d'apporter tous ses soins pour l'intérêt commun, & est responsable aux autres de ce qui arrive par son dol, ou par sa faute grossiere.

Mais ils ne sont jamais tenus des cas fortuits, àmoins que leur faute n'y ait donné lieu.

Un associé ne peut rien faire contre le gré des autres, ni les engager sans leur fait, à - moins qu'il n'ait été chargé d'eux.

Il n'est pas permis à un associé de retirer son fonds avant la fin de la société.

Mais la société peut se dissoudre avant la fin, du consentement de tous les associés.

Chaque associé peut même renoncer à la société, pourvu que ce soit sans fraude, & que sa renonciation ne soit pas faite à contre - tems.

La société finit aussi lorsque l'objet pour lequel elle avoit été contractée est rempli, ou qu'il ne peut plus avoir lieu.

La mort naturelle ou civile d'un associé fait pareillement finir la société à son égard.

La société étant finie, l'on préleve les dettes, chacun se rembourse de ses avances, & l'on partage ensuite les profits s'il y en a.

L'héritier de l'associé a part aux profits qui étoient déja acquis, & porte aussi sa part des dettes qui étoient contractées; il prend les choses en l'état qu'elles étoient au moment du décès. Voyez au digeste & au code le titre pro socio, l'ordonnance du commerce, tit. 4. Savary, & les mots Associés, Commandite, Commerce, Marchands . (A)

Société anonyme (Page 15:259)

Société anonyme est celle qui se contracte sans paroître sous aucun nom. Ceux qui font ces sociétés travaillent chacun de leur côté sous leurs noms particuliers, pour se rendre ensuite raison l'un à l'autre des profits & pertes qu'ils ont fait dans leurs négociations. Voyez Savary.

Société civile (Page 15:259)

Société civile s'entend du corps politique que les hommes d'une même nation, d'un même état, d'une même ville ou autre lieu, forment ensemble, & des liens politiques qui les attachent les uns aux autres; c'est le commerce civil du monde, les liaisons que les hommes ont ensemble, comme sujets d'un même prince, comme concitoyens d'une même ville, & comme sujets aux mêmes lois, & parti<cb-> cipant aux droits & privileges qui sont communs à tous ceux qui composent cette même société. Voyez Cité, Citoyen, Etat, Nation, Peuple

Société en nom collectif (Page 15:259)

Société en nom collectif est celle où le commerce & toutes les affaires communes se font, sous le nom de chacun des associés, qui sont tous dénommés dans les actes comme négocians en compagnie, ou seulement sous le nom d'un ou deux d'entre eux, avec cette addition & compagnie, qui annonce que ceux qui sont dénommés négocians en compagnie, & qu'ils ont encore quelques autres associés qui ne sont pas dénommés.

Société en commande (Page 15:259)

Société en commande est confondue par quelques uns avec la société en commandite. Il semble néanmoins qu'il y ait quelque différence, & que le terme de société en commande convienne plus particulierement à cette espece de société qui se contracte entre celui qui donne des bestiaux à cheptel, & le preneur de ces bestiaux, sous la condition d'avoir certaine part aux profits provenans des bestiaux. Voyez Bestiaux, Cheptel, Commande & Société en commandite.

Société en commandite (Page 15:259)

Société en commandite, est celle qui se fait entre deux personnes, dont l'une ne fait que mettre son argent dans la société, sans faire aucune fonction d'associé; & l'autre donne quelquefois son argent, mais toujours son industrie pour faire sous son nom le commerce des marchandises dont ils sont convenus ensemble. Voyez Savary.

Société léonine (Page 15:259)

Société léonine est celle où l'un des associés tire pour lui seul tout le profit, ou du moins la plus grande partie, tandis que les autres ne sont participans que des pertes. Le surnom de léonines donné à ces sortes de sociétés, paroît avoir été tiré de la fable du lion, où cet animal sous divers prétextes, retient partout la part de ses associés, & garde tout pour lui.

Société par participation (Page 15:259)

Société par participation est la même chose que la société anonyme. Elle est ainsi appellée, parce que celui qui promet de payer une partie du prix de la chose que l'on achete en commun, ne le fait qu'à la charge de participer au profit. Voyez Société anonyme.

Société tacite (Page 15:259)

Société tacite est celle qui se contracte sans écrit, & même sans convention expresse, entre deux ou plusieurs personnes, par la demeure commune, mélange de biens, vie, bourse & dépense commune, & autrement que par le mariage. Voyez le traité de le Brun, inséré à la fin de son tr. de la communauté. (A)

Société d'Edimbourg (Page 15:259)

Société d'Edimbourg, est le nom d'une académie de médecine, établie dans cette capitale de l'Ecosse. Elle a publié des mémoires estimés, dont plusieurs volumes sont traduits en françois.

Société royale de Londres (Page 15:259)

Société royale de Londres, (Hist. des acad. mod.) académie de savans, établie à Londres pour la culture des arts & des sciences. Voici ce qu'en dit M. de Voltaire.

Quelques philosophes anglois, sous la sombre administration de Cromwel, s'assemblerent pour chercher en paix des vérités, tandis que le fanatisme opprimoit toute vérité. Charles II. rappellé sur le trône de ses ancêtres par l'inconstance de sa nation, donna des lettres patentes en 1660, à cette académie naissante; mais c'est tout ce que le gouvernement donna. La societé royale, ou plutôt la société libre de Londres, travailla pour l'honneur de travailler.

Ses travaux commencerent à adoucir les moeurs, en éclairant les esprits. Les Belles - lettres renaquirent, & se perfectionnerent de jour en jour. On n'avoit guere connu du tems de Cromwel, d'autre littérature que celle d'adapter des passages de l'ancien & du nouveau Testament aux dissensions publiques. On

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