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Par cette simple exposition de la texture du bois, on voit que la cohérence longitudinale doit être bien plus considérable que l'union transversale: on voit que dans les petites pieces de bois, comme dans un barreau d'un pouce d'épaisseur, s'il se trouve quatorze ou quinze couches ligneuses, il y aura treize ou quatorze cloisons; & que par conséquent ce barreau sera moins fort qu'un pareil barreau qui ne contiendra que cinq ou six couches, & quatre ou cinq cloisons. On voit aussi que dans ces petites pieces, s'il se trouve une ou deux couches ligneuses qui soient tranchées, ce qui arrive souvent, leur force sera considérablement diminuée: mais le plus grand défaut de ces petites pieces de bois, qui sont les seules sur lesquelles on ait fait des expériences, c'est qu'elles ne sont pas composées comme les grosses pieces. La position des couches ligneuses & des cloisons dans un barreau est fort differente de la position de ces mêmes couches dans une poutre; leur figure est même différente; & par conséquent on ne peut pas estimer la force d'une grosse piece par celle d'un barreau. Un moment de reflexion fera sentir ce que je viens de dire. Pour faire une poutre il ne faut qu'équarrir l'arbre, c'est - à - dire, enlever quatre segmens cylindriques d'un bois blanc & imparfait qu'on appelle aubier: le coeur de l'arbre, la premiere couche ligneuse, reste au milieu de la piece; toutes les autres couches enveloppent la premiere en forme de cercles ou de couronnes cylindriques; le plus grand de ces cercles entiers a pour diametre l'épaisseur de la piece: au - delà de ce cercle tous les autres sont tranchés, & ne forment plus que des portions de cercle qui vont toûjours en diminuant vers les arrêtes de la piece: ainsi une poutre quarrée est composée d'un cylindre continu de bon bois bien solide. & de quatre portions angulaires tranchées d'un bois moins solide & plus jeune. Un barreau tiré du corps d'un gros arbre, ou pris dans une planche, est tout autrement composé: ce sont de petits segmens longitudinaux des couches annuelles, dont la courbure es, insensible; des segmens qui tantôt se trouvent pesés parallelement à une des surfaces du barreau, & tantôt plus ou moins inclinés; des segmens qui sont plus ou moins longs & plus ou moins tranchés, & par conséquent plus ou moins forts: de plus il y a toûjours dans un barreau deux positions, dont l'une est plus avantageuse que l'autre; car ces segmens de couches ligneuses forment autant de plans paralleles: si vous posez le barreau en sorte que ces plans soient verticaux, il résistera davantage que dansune position horisontale; c'est comme si on faisoit rompre plusieurs planches à la fois, elles résistero ent bien davantage étant posées sur le côté, que sur le plat. Ces remarques font déjà sentir combien on doit peu compter sur les tables calculées ou sur les formules que différens auteurs nous ont données de la force du bois, qu'ils n'avoient éprouvée que sur des pieces, dont les plus grosses étoient d'un ou deux pouces d'épaisseur, & dont ils ne donnent ni le nombre des couches ligneuses que ces barreaux contenoient, ni la position de ces couches, ni le sens dans lequel se sont trouvées ces couches lorsqu'ils ont fait rompre le barreau; circonstances cependant essentielles, comme on le verra par les expériences de M. de Buffon, & par les soins qu'il s'est donnés pour découvrir les effets de toutes ces différences. Les Physiciens qui ont fait quelques expériences sur la force du bois, n'ont fait aucune attention à ces inconvéniens: mais il y en a d'autres, peut - être encore plus grands, qu'ils ont aussi négligé de prévoir & de prevenir. Le jeune bois
M. de Buffon a trouvé que la force du bois est proportionnelle à sa pesanteur; de sorte qu'une piece de même longueur & grosseur, mais plus pesante qu'une autre piece, sera aussi plus forte à peu près en même raison. Cette remarque donne les moyens de comparer la force du bois qui vient de différens pays & de différens terreins, & étend infiniment l'utilité des expériences de M. de Buffon: car lorsqu'il s'agira d'une construction importante, ou d'un ouvrage de conséquence, on pourra aisément au moyen de sa table, & en pesant les pieces, ou seulement des échantillons de ces pieces, s'assûrer de la force du bois qu'on employe; & on évitera le double inconvénient d'employer trop ou trop peu de cette matiere, que souvent on prodigue mal - à - propos, & que quelquefois on ménage avec encore moins de raison.
Pour essayer de comparer les effets du tems sur la résistance du bois, & pour reconnoître combien il diminue de sa force, M. de Buffon a choisi quatre pieces de dix huit piés de longueur, sur sept pouces de grosseur; il en a fait rompre deux, qui en nom<pb-> [p. 302]
Tous les auteurs qui ont écrit sur la résistance des
solides en général, & du bois en particulier, ont donné
comme fondamentale la regle suivante: la résistance
est en raison inverse de la longueur, en raison directe
de la largeur, & en raison doublée de la hauteur. Cette
regle est celle de Galilée, adoptée par tous les Mathématiciens, & elle seroit vraie pour tous les solides
qui feroient absolument inflexibles & qui romproient
tout - à - coup: mais dans les solides élastiques, tels que
le bois, il est aisé d'appercevoir que cette regle doit
être modifiée à plusieurs égards. M. Bernoulli a fort
bien observé que dans la rupture des corps él>tiques
une partie des fibres s'allonge, tandis que l'autre partie
se racourcit, pour ainsi dire, en refoulant sur elle - même.
Voyez son mémoire dans ceux de l'Académie,
année 1705. On voit par les expériences précédentes,
que dans les pieces de la même grosseur, la regle
de la résistance en raison inverse de la longueur s'observe
d'autant moins que les pieces sont plus courtes.
Il en est tout autrement de la regle de la résistance en
raison directe de la largeur & du quarré de la hauteur.
M. de Buffon a calculé la table septieme, à dessein
de s'assûrer de la variation de cette regle; on
voit dans cette table les résultats des expériences, &
au - dessous les produits que donne cette regle; il a
pris pour unités les expériences faites sur les pieces
de cinq pouces d'équarrissage, parce qu'il en a fait
un plus grand nombre sur cette dimension que sur les
autres. On peut observer sur cette table, que plus les
pieces sont courtes, & plus la regle approche de la
vérité; & que dans les plus longues pieces, comme
celles de 18 & de 20 piés, elle s'en éloigne; cependant
à tout prendre, on peut se servir de la regle géné>ale avec les modifications nécessaires pour calculer
la résistance des pieces de bois plus grosses & plus
longues que celles dont M. de Buffon a éprouvé la résistance;
car en jettant les yeux sur cette septieme
table, on voit un grand accord entre la regle & les
expériences pour les différentes grosseurs, & il regne
un ordre assez constant dans les différences par rapport
aux longueurs & aux grosseurs, pour juger de la
modification qu'on doit faire à cette regle. Voyez
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