ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"296"> quelle on fait entrer des liqueurs dans la bouche, puis dans le gosier pour les conduire à l'estomac. Voyez Gosier & Estomac. Il y a deux moyens pour cet effet, sans compter ceux que nous pourrions mettre en usage, si nous voulions imiter les façons de boire des animaux: celles qui sont les plus ordinaires à l'homme, sont de pomper les liquides, ou de les verser dans la bouche.

On boit en pompant, en suçant, quand on boit avec un chalumeau: les enfans tetent leurs nourrices en suçant. On suce de même en buvant dans un verre, dans un blberon, ou lorsque l'on boit dans une riviere ou au bassin d'une fontaine. On peut pomper ou sucer de différentes manieres, avec la bouche seulement, ou avec la bouche & la poitrine ensemble. Quand on suce avec la bouche seulement, on fait d'elle - même une pompe aspirante, les levres se ferment en rond, & laissent une ouverture que je compare à celle du bout de la pompe qui est dans l'eau; le corps de la pompe est fait par les joües, les mâchoires & le palais; la langue fait le piston. Quoique cette comparaison soit exactement juste quant au fond, il y a pourtant quelque différence de la pompe ordinaire à celle que nous faisons avec notre bouche: ces différences consistent en ce que l'ouverture de la pompe, son corps & son piston, ne changent point leur grosseur ni leur diametre, & que les levres peuvent former une ouverture plus ou moins grande, suivant le desir que nous avons de pomper plus ou moins de liqueur à la fois, ou que nous voulons les faire entrer avec plus ou moins de vîtesse: la bouche devenue corps de pompe, s'augmente ou diminue, soit pour contenir la liqueur pompée, soit pour s'ajuster à la langue: celle - ci qui fait le piston, se grossit ou devient petite pour se proportionner aux différens diametres de la bouche: elle prend aussi différentes figures pour s'accommoder aux inégalités des dents, auxquelles elle doit être appliquée avec autant de justesse qu'un piston le doit être au corps de sa pompe. Ainsi on peut dire que la bouche fait tout ce que peut faire une pompe, & que de plus ses parties étant capables d'un nombre infini de modifications, elles multiplient les fonctions de la bouche, & en font une pompe d'une structure particuliere. Pour mettre en usage cette pompe, il faut que quelque liquide soit présent à l'ouverture des levres, & qu'il la bouche entierement; on approche les joues des mâchoires pour diminuer la capacité de la bouche: on retire la langue en arriere, & le liquide vient occuper la place que tenoit la langue: mais pour faire entrer la boisson plus promptement & en plus grande quantité, on écarte la mâchoire inférieure de la supérieure, & la bouche occupant plus d'espace au dehors, presse l'air extérieur qui comprime la liqueur, & la fait entrer dans la cavité de la bouche, augmentée par l'éloignement des mâchoires. Si l'on met le bout d'un biberon plein d'eau dans l'ouverture des levres, & que l'on fasse les mêmes mouvemens des joues, des levres, de la langue & des mâchoires, le liquide entrera de même. Un siphon, un biberon & autres vaisseaux de pareille espece, ne sont que l'ouverture des levres prolongées. Lorsque l'on a rempli la bouche, il faut la vuider, si l'on veut pomper ou sucer de nouveau. Elle se vuide en - dedans quand on avale, ou en - dehors quand on seringue, pour ainsi - dire, ce que l'on avoit pompé; c'est ce que font les Cabaretiers quand ils goûtent leurs vins. Dans l'un & dans l'autre cas la langue fait le piston; elle s'avance endevant, elle presse le liquide qu'elle jette en - dehors, si les levres sont ouvertes, ou qu'elle chasse du côté du gosier, si la valvule est levée, & que les levres soient exactement fermées. La seconde maniere de faire entrer des liqueurs dans la bouche en pompant, dépend de la dilatation de la poitrine; par cette dila<cb-> tation l'air extérieur pousse l'eau & la fait entrer dans l'ouverture des levres; cela se fait, en inspirant. On inspire de l'eau ou de l'air ensemble ou séparément: quand on inspire du liquide seul, cela se nomme sucer; & lorsque l'on inspiré l'un & l'autre, cela s'appelle humer: dans cette façon de boire, l'air prend la route de la trachée - artere, pendant que l'eau reste dans la bouche. Pour humer on forme ordinairement une ouverture aux levres plus grande que pour pomper. On éloigne les levres des mâchoires; on leve le bout de la langue du côté du palais; on releve la valvule du gosier, & on inspire. L'ouverture des levres doit être plus grande, pour que l'air extérieur qui presse l'eau que l'on veut humer, ait moins de peine à la faire entrer dans la bouche. On éloigne des levres les mâchoires pour former une espace capable de contenir l'eau; on releve le bout de la langue, qui, comme un rempart, retient l'eau, l'empêche de suivre l'air qui entre dans la trachée - artere; on releve la valvule du gosier pour que l'air puisse passer; & enfin en dilatant la poitrine, on inspire pour que l'air extérieur presse le liquide, & l'oblige d'entrer dans la bouche avec lui. C'est ainsi que l'on prend un bouillon, du thé, du caffé & autres liqueurs chaudes.

On peut verser les liquides dans la bouche de trois manieres: dans la premiere on verse doucement à mesure que la langue conduit la boisson dans le gosier; c'est une façon assez ordinaire de boire. Dans la seconde on verse brusquement tout - à - la - fois, & la langue conduit le tout dans le gosier avec la même vîtesse; c'est ce que l'on appelle sabler: & la troisieme est de verser dans la bouche ayant la tête renversée; c'est ce que l'on appelle boire au galet. Quand on boit de la premiere façon, la langue peut prendre deux situations différentes; elle peut avoir son bout appliqué à la partie du palais qui est la plus proche des dents de devant, sans quitter cette place, quoiqu'elle se meuve pour avaler, parce qu'il suffit qu'elle se baisse pour son milieu, en décrivant une ligne courbe qui laisse deux espaces sur les côtés par où l'eau monte dans le vuide que la courbure de la langue laisse entr'elle & le palais; après quoi la langue pousse l'eau dans le gosier, en approchant son milieu au palais, sans que son bout quitte sa premiere place, & pour lors le milieu de la langue ne fait que se baisser pour recevoir, & se hausser pour pousser les liquides dans le gosier jusqu'à ce qu'on ait tout avalé. La seconde situation que peut prendre la langue est d'avancer au - delà des dents, & placer son bout au - dessous du bord du verre qui répand sur elle sa liqueur, laquelle est poussée de même dans le gosier lorsque la langue se releve, & qu'elle s'applique au palais. Les actions de sabler & de boire au galet demandent d'autres mouvemens, dans le détail desquels nous n'entrerons pas ici. V. Mém. de l'academie royale des Sciences, année 1715. page 188. & suivantes. (L)

Boire (Page 2:296)

Boire, faire boire les peaux, terme de Chamoiseur & de Mégissier, qui signifie jetter à la riviere les peaux de chevre, de mouton, ou autres animaux semblables, pour les y faire tremper, après qu'elles ont passé sur le chevalet, & qu'elles y ont été préparées avec le couteau de riviere du côté de la chair. On les y laisse plus ou moins de tems, selon la chaleur de la saison. Cette façon se donne quand on est prêt à les travailler de fleur pour la seconde fois. Voyez Chamois.

Boire (Page 2:296)

Boire dans son blanc, (Manége.) expression figurée qui signifie qu'un cheval bay alzan, &c. a le nez tout blanc. Boire la bride, se dit lorsque les montans de la bride, n'étant pas assez allongés, le mors force les coins de la bouche du cheval, & les fait rider. Faire boire un cheyal au seau, c'est lui apporter un seau page n="297"> d'eau pour le faire boire dans l'écurie sans le déranger de sa place. (V)

Boire (Page 2:296)

Boire, terme de papier; on dit que du papier boit, lorsque l'encre pénetre à travers, & paroit de l'autre côté de la feuille; le papier qui boit ne vaut rien pour écrire, parce que dans ce cas l'encre s'étend & brouille l'écriture. Ce défaut arrive au papier faute d'avoir été bien collé, & quand il est trop humide.

Boire (Page 2:296)

Boire, terme de Tailleur; les tailleurs disent qu'une étoffe boit, lorsque de deux lisieres qui sont jointes ensemble par une couture, l'une plisse un peu, & est cousue plus lâche que l'autre.

BOIS (Page 2:296)

* BOIS, s. m. (OEconomie rustiq.) ce terme a deux grandes acceptions; ou il se prend pour cette substance ou matiere dure & solide que nous tirons de l'intérieur des arbres & arbrisseaux; ou pour un grand canton de terre planté d'arbres propres à la construction des édifices, au charronage, au sciage, au chauffage, &c.

Si l'on jette un coup d'oeil sur la consommation prodigieuse de bois qui se fait par la charpente, la menuiserie, d'autres Arts, & par les feux des forges, des fonderies, des verreries, & des cheminées, on concevra facilement de quelle importance doivent avoir été en tout tems, & chez toutes les nations, pour le public & pour les particuliers, la plantation, la culture, & la conservation des forêts ou des bois, en prenant ce terme selon la seconde acception. Comment se peut - il donc que les hommes soient restés si long - tems dans les préjugés sur ces objets, & qu'au lieu de tendre sans cesse à la perfection, ils se soient au contraire de plus en plus entêtés de méthodes qui les éloignoient de leur but? Car c'est - là qu'ils en étoient; c'est - là qu'ils en sont encore pour la plûpart, comme nos pourrjons le démontrer par la comparaison des regles d'agriculture qu'ils ont prescrites, & qu'on suit sur les bois, & par celles que l'expérience & la philosophie viennent d'indiquer à M. de Buffon. Mais notre objet est d'exposer la vérité, & non pas de l'associer à l'erreur: l'erreur ne peut être trop ignorée, & la vérité trop connue, sur - tout quand elle embrasse un objet aussi considérable que l'aliment du seu, & le second d'entre les matéraux qui entrent dans la construction des édifices. ous observerons seulement que l'extrait que nous allons donner des différens memoires que M. de Pusson a publiés, non seulement pourra éclairer, su la culture, l'amélioration & la conservation des bois, mais pourra même devenir une grande leçon pour les philosophes de se méfier de l'analogie; car il paroît que l'ignorance dans laquelle il semble qu'on aime encoe à rester, malgré le grand intérêt qu'on a d'en sortir, ne vient dans son origine que d'avoir transporté les regles de l'agriculture des jardins à l'agriculture des forêts. La nature a ses loix, qur ne nous paroissent peut - être si généraies, & s'étendre uniformément à un si grand nombre d'êtres, que parce que nous n'avons pas la patience ou la sagacité de connoître la conduite qu'elle tient dans la production & la conservation de chaque individu. Nous nous attachons au gros de ses opérations: mais les finesses de sa main d'oeuvre, s'il est permis de parler ainsi, nous échappent sans cesse; & nous persistons dans nos erreurs jusqu'à ce qu'il vienne quelqu'Homme de génie, assez ami des hommes, pour chercher la vérité; & j'ajoûterois volontiers, assez courageux pour la communiquer quand il l'a trouvée.

Le nom de bois, pris généralement, comprend les forêts, les bois, les haies, & les buissons ou bocages.

L'on entend vulgairement sous le nom de forêt, un bois qui embrasse une fort grande etendue de pays.

Sous le nom de bois, l'on comprend un bois de moyenne étendue.

Le parc est un bois enfermé de murs.

Les noms de haie & de buisson ou bocage, sont usités en quelques endroits pour signifier un bois de peu d'arpens.

Néanmoins l'usage fait souvent employer indifféremment les noms de forêt & de bois; il y a même des bois de très - grande étendue, des forêts qui occupent peu d'espace, & des bois qui ne sont appellés que haies ou buissons, & chaumes; comme les chaumes d'Avenay pres Beligny - sur - Ouche, dans le bailliage de Dijon en France, qui contiennent autant d'arpens que des bois de moyenne grandeur.

Toutes ces sortes de bois sont plantés d'arbres, qui sont ou en futaie ou en taillis.

Futaie se dit des arbres qu'on laisse croître sans les couper que fort tard. Voyez Futaie

Taillis, des arbres dont la coupe se fait de tems en tems, & plûtôt que celle de la sutaie. V. Taillis.

Il y a des forêts qui sont toutes en futaie; d'autres toutes en taillis: mais la plûpart sont mêlées de l'une & de l'autre sorte.

Quand on parle de bois de futaie & de taillis, on considere le bois debout & sur le canton même qui en est couvert, & formant des forêts, &c.

Dans les autres occasions, le terme bois s'entend du bois abattu & destiné aux usages de la vie civile: c'est sous ces deux points de vûe que nous allons considérer le bois.

Bois (Page 2:296)

Bois sur pié; voyez Forêt. Le bois qui étoit autrefois très - commun en France, maintenant suffit à peine aux usages indispensables, & l'on est menacé pour l'avenir d'en manquer absolument. Ceux qui sont préposés à la conservation des bois, se plaignent eux - mêmes de leur dépérissement: mais ce n'est pas assez de se plaindre d'un mal qu'on sent déjà, & qui ne peut qu'augmenter avec le tems, il en faut chercher le remede; & tout bon citoyen doit donner au public les expériences & les réflexions qu'il peut avoir faites à cet égard.

Tous nos projets sur les bois doivent se réduire à tâcher dé conserver ceux qui nous restent, & à renouveller une partie de ceux que nous avons détruits.

Tout le bois de service du royaume consiste dans les forêts qui appartiennent à sa Majesté, dans les réserves des ecclésiastiques & des gens de main morte, & enfin dans les baliveaux, que l'ordonnance oblige de laisser dans tous les bois.

On sait par une expérience déjà trop longue, que le bois des baliveaux n'est pas d'une bonne qualité, & que d'ailleurs ces baliveaux font tort au taillis. Voy. Baliveaux. M. de Buffon a observé les effets de la gelée du printems dans deux cantons voisins de bois taillis: on avoit conservé dans l'un tous les baliveaux de quatre coupes successives; dans l'autre, on n'avoit réservé que les baliveaux de la coupe actuelle: M. de Buffon a reconnu que la gelée avoit fait un si grand tort au taillis surchargé de baliveaux, que l'autre taillis l'a devancé de près de cinq ans sur douze. L'exposition étoit la même: M. de Buffon a sondé le terrein en différens endroits; il étoit semblable: ainsi il ne peut attribuer cette différence qu'à l'ombre & à l'humidité que les baliveaux jettoient sur le taillis, & à l'obstacle qu'ils formoient au dessechement de cette humidité, en interrompant l'action du vent & du soleil.

Les arbres qui poussent vigoureusement en bois, produisent rarement beaucoup de fruit; les baliveaux se chargent d'une grande quantité de glands, & annoncent par là leur foiblesse. On imagineroit que ce gland devroit repeupler & garnir les bois, mais cela se réduit à bien peu de chose; car de plusieurs millions de ces graines qui tombent au pié de ces arbres, à peine en voit - on lever quelques centaines, & ce petit nombre est bientôt étouffé par l'ombre continuelle [p. 298] & le manque d'air, ou supprimé par le dégouttement de l'arbre, & par la gelée, qui est toûjours plus vive près de la surface de la terre, ou enfin détruit par les obstacles que ces jeunes plantes trouvent dans un terrein traversé d'une infinité de racines & d'herbes de toute espece. On trouve, à la vérité, quelques arbres de brin dans les taillis. Ces arbres viennent de graine; car le chêne ne se multiplie pas par rejettons, & ne pousse pas de la racine: mais les arbres de brin sont ordinairement dans les endroits clairs des bois, loin des gros baliveaux, & sont dûs aux mulots ou aux oiseaux, qui en transportant les glands en sement une grande quantité. M. de Buffon a sû mettre à profit ces graines que les oiseaux laissent tomber. Il avoit observé dans un champ, qui depuis trois ou quatre ans étoit demeuré sans culture, qu'autour de quelques petits buissons, qui s'y trouvoient fort loin les uns des autres, plusieurs petits chênes avoient paru tout d'un coup. M. de Busson reconnut bientôt par ses yeux que cette plantation appartenoit à des geais, qui en sortant des bois venoient d'habitude se placer sur ces buissons pour manger leur gland, & en laissoient tomber la plus grande partie, qu'ils ne se donnoient jamais la peine de ramasser. Dans un terrein que M. de Buffon a planté dans la suite, il a eu soin de mettre de petits buissons; les oiseaux s'en sont emparés, & ont garni les environs d'une grande quantité de jeunes chênes.

Les réserves établies dans les bois des ecclésiastiques & des gens de main - morte, ne sont pas sujettes au défaut des baliveaux. Il faudroit établir un tems fixe pour la coupe de ces futaies en réserve; ce tems seroit plus ou moins grand, selon la qualité du terrein. On pourroit en régler les coupes à 50 ans dans un terrein de 2 piés 1/2 de profondeur, à 70 dans un terrein de 3 piés 1/2, & à 100 ans dans un terrein de 4 piés 1/2 & au - delà de profondeur. M. de Bsson donne ces termes d'après les observations qu'il a faites au moyen d'une tarriere haute de cinq plés, avec laquelle il a sondé quantité de terreins, où il a examiné en même tems la hauteur, la grosseur & l'âge des arbres: cela se trouve assez juste pour les terres fortes & pétrissables. Dans les terres légeres & sablonneuses, on pourroit fixer les termes des coupes à 40, 60 & 80 ans: on perdroit à attendre plus long - tems; & il vaudroit infiniment mieux garder du bois de service dans des magasins, que de le laisser sur pié dans les forêts, où il ne peut manquer de s'altérer après un certain âge.

Tous ceux qui connoissent un peu les bois, savent que la gelée du printems est le fleau des taillis; c'est elle qui dans les endroits bas & dans les petits vallons, supprime continuellement les jeunes rejettons, & empéche le bois de s'élever; en un mot, elle fait aux bois un aussi grand tort qu'à toutes les autres productions de la terre; & si ce tort a jusqu'ici été moins connu, moins sensible, c'est que la joüissance d'un taillis étant éloignée, le propriétaire y fait moins d'attention, & se console plus aisément de la perte qu'il fait: cependant cette perte n'est pas moins réelle, puisqu'elle recule son revenu de plusieurs années. M. de Busson a tâché de prévenir, autant qu'il est possible, les mauvais effets de la gelée, en étudiant la façon dont elle agit; & il a fait sur cela des expériences qui lui ont appris, que la gelée agit bien plus violemment à l'exposition du midi, qu'à l'exposition du nord; qu'elle fait tout périr à l'abri du vent, tandis qu'elle épargne tout dans les endroits où il peut passer librement. Cette observation, qui est constante, fournit un moyen de préserver de la gelée quelques endroits des taillis, au moins pendant les deux ou trois premieres années, qui sont le tems critique, & où elle les attaque avec plus d'avantage. Ce moyen consiste à observer, quand on les abat, de commen<cb-> cer la coupe du côté du nord: il est aisé d'y obliger les marchands de bois, en mettant cette clause dans son marché; & M. de Buffon s'est déjà bien trouvé d'avoir pris cette précaution pour ses taillis.

Un pere de famille, un homme arrangé qui se trouve propriétaire d'une quantité un peu considérable de bois taillis, commence par les faire arpenter, borner, diviser, & mettre en coupe réglée; il s'imagine que c'est - là le plus haut point d'oeconomie; tous les ans il vend le même nombre d'arpens; de cette façon ses bois deviennent un revenu annuel, il se sait bon gré de cette regle; & c'est cette apparence d'ordre qui a fait prendre faveur aux coupes réglées: cependant il s'en faut bien que ce soit là le moyen de tirer de ses taillis tout le profit qu'on en peut tirer. Ces coupes réglées ne sont bonnes que pour ceux qui ont des terres éloignées qu'ils ne peuvent visiter; la coupe réglée de leurs bois est une espece de ferme; ils comptent sur le produit, & le reçoivent sans s'être donné aucun soin; cela doit convenir à grand nombre de gens: mais pour ceux dont l'habitation se trouve sixée à la campagne, & même pour ceux qui vont y passer un certain tems toutes les années, il leur est facile de mieux ordonner les coupes de leurs bois taillis. En général, on peut assûrer que dans les bons terreins on gagnera à attendre, & que dans les terreins où il n'y a pas de fond, il faudra les couper fort jeunes: mais il seroit bien à souhaiter qu'on pût donner de la précision à cette regle, & déterminer au juste l'âge où l'on doit couper les taillis. Cet âge est celui où l'accroissement du bois commence à diminuer. Dans les premieres années, le bois croît de plus en plus, c'est - à - dire, la production de la seconde année est plus considérable que celle de la premiere, l'accroissement de la troisieme année est plus grand que celui de la seconde; ainsi l'accroissement du bois augmente jusqu'à un cértain âge, après quoi il diminue: c'est ce point, ce maximum qu'il faut saisir, pour tirer de son taillis tout l'avantage & tout le profit possible.

M. de Buffon a donné, dans les Mémoires de l'Académie, année 1738, le moyen qu'il a trouvé d'augmenter la force & la solidité du bois: rien n'est plus simple; car il ne s'agit que d'écorcer les arbres, & les laisser ainsi sécher & mourir sur pié avant que de les abattre; l'aubier devient par cette opération aussi dur que le coeur de chêne; il augmente considérablement de force & de densité, comme M. de Buffon s'en est assûré par un grand nombre d'expériences; & les souches de ces arbres écorcés & séchés sur pié, ne laissent pas de repousser & de reproduire des rejettons: ainsi il n'y a pas le moindre inconvénient à établir cette pratique, qui, en augmentant la force & la durée du bois mis en oeuvre, doit en diminuer la consommation, & par conséquent doit être comptée au nombre des moyens de conserver les bois. Les Allemands, chez qui les Hollandois vont chercher leurs bois de menuiserie, n'ont point d'autre secret pour leur donner cette qualité qui les rend si propres à être travaillés. Au printems, lorsque l'écorce commence à se lâcher, on écorce l'arbre; on lui laisse passer l'année: le printems suivant, l'arbre écorcé ne pousse plus que de petites feuilles; on lui laisse achever encore cette année sur pié; on ne le coupe que dans la saison où l'on coupe les arbres.

Regles pour semer le bois. Pour semer une terre forte & glaiseuse, il faut conserver le gland pendant l'hyver dans de la terre, en faisant un lit de deux pouces de gland sur un lit de terre d'un demi - pié, puis un lit de terre & un lit de gland, toûjours alternativement, & enfin en couvrant le magasin d'un pié de terre, pour que la gelée ne puisse y pénétrer. On en tirera le gland au commencement de Mars, & on le plantera à un pié de distance. Ces glands qui

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