ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"558"> sortent participent de tous ses différens modes, & elles se trouvent imprégnées de parties de sel à proportion des différences de leurs positions.

La mer est trop éloignée pour s'imaginer qu'elle foit la cause de la salure de ces eaux; l'eau filtrée dans les terres pendant un si long trajet, se dépouilleroit nécessairement de son sel, à - moins qu'on ne supposât qu'elles sont apportées de la mer ici par un canal fort droit & fort large, ce qui s'oppose à la raison & à l'expérience, par laquelle nous remarquons que l'eau de ces sources vient par différentes embouchures, & qu'elles croissent ou diminuent suivant que la saison est seche ou pluvieuse.

On remarque même que plus elles sont abondantes, plus elles sont salées; ce qui provient de ce qu'ayant alors plus de volume, de poids & de vitesse, elles frappent avec plus de violence & émoussent avec plus de facilité les angles des sinuosités qu'elles parcourent, & en entraînent aussi les particules jusqu'où le niveau leur permet d'arriver.

Voilà ce qui nous restoit à ajouter à cet article, d'après lequel on aura, je crois, une connoissance suffisante de ce que c'est que les fontaines salantes; & les usines qu'on appelle salines. Voyez encore les articles Sel, Sel gemine, Sel marin , & l'art. suiv.

Salines de Franche - Comté (Page 14:558)

Salines de Franche - Comté, il y en a deux dont l'abondance des sources, la qualité des eaux, & le produit en sel sont fort différens. La saline de Montmorrot inférieure en tout à celle de Salins, n'a sur elle que l'avantage de l'avoir précédée. Mais détruite par le feu, ou abandonnée pour quelque autre raison, elle a été oubliée pendant plusieurs siecles, & c'est seulement vers le milieu de celui - ci que l'on a pensé à la relever. Au contraire depuis plus de douze cens ans que la saline de Salins subsiste, elle a toujours été entretenue avec un soin particulier, & a paru mériter l'attention de tous les souverains à qui elle a appartenu. Elle est beaucoup plus considérable que l'autre, & c'est par elle que nous commencerons cet article.

Saline de Salins (Page 14:558)

Saline de Salins, (a) elle est divisée en deux parties que l'on distingue par grande & petite saline. Il y a une voûte soûterreine de 206 piés de longueur, 7 piés 5 pouces de haut, & 5 piés de largeur, qui donne communication de l'une à l'autre, ensorte qu'elles ne font ensemble qu'une seule & même maison. Elle est située au centre de Salins, dans une gorge fort étroite. Le rempart la sépare de la riviere de Furieuse, & elle est fermée par un mur du côté de la ville, à qui elle a donné la naissance & le nom. Car Salins a commencé par quelques habitations construites pour les ouvriers qui travailloient à la formation du sel.

Les eaux précieuses de cette saline en avoient fait un domaine d'un grand revenu, & ce fut un de ceux que S. Sigismond, roi de Bourgogne, donna au commencement du vj. siecle, pour doter le monastere d'Agaune. Ce monastere posséda dès - lors Salins en toute propriété jusqu'en 943, que Meinier, abbé d'A<->

(a) La ferme générale soustraitant depuis long - tems la saline de Salins, il y a deux régies dans cette saline: celle de l'entrepreneur, dont nous indiquerons les employés dans la suite de ces notes, & celle de la ferme générale, dont nous allons d'abord donner une idée, parce qu'elle n'a point de rapport à toutes les manoeuvres que nous détaillerons, & qui regardent l'entrepreneur.

La régie de la ferme générale consiste à veiller à l'exécution du traité fait avec l'entrepreneur, à recevoir de lui les sels formés; en faire faire les livraisons, percevoir le prix des sels d'ordinaire & Rozieres; des Salaigres, Bez & Poussets, & de payer les dépenses assignées sur le produit.

Ses employés sont un receveur général - inspecteur, un contrôleur des salines, un contrôleur à l'emplissage des bosses, un contrôleur au pesage, un contrôleur - géometre, deux contrôleurs aux passavants, huit guettes, faisant les fonctions de portier, & chargés de fouiller les ouvriers & ouvrieres qui sortent des salines; deux gardes attachés à la saline.

gaune, le donna en fief à Albéric, comte de Bourgogne & de Mâcon. Nous ne trouvons rien qui nous apprenne si l'établissement de cette saline est de beaucoup antérieur au vj. siecle. Strabon assure qu'on saisoit grand cas à Rome des chairs salées dans le pays des Séquanois; mais ce passage ne peut pas s'appliquer à la saline de Salins plutôt qu'à celle de Lons - le - Saunier, qui est sûrement plus ancienne, & à laquelle par cette raison il semble mieux convenir.

La grande saline occupe un terrein irrégulier qui a 143 toises dans sa plus grande longueur du septentrion au midi, & 50 toises dans sa plus grande largeur du levant au couchant. La petite saline placée au septentrion de la grande, & dans la même position, a 40 toises de longueur & 25 de largeur.

Cette derniere renferme un puits appellé puits à muire. Il est à 66 piés de profondeur, depuis la voûte supérieure jusqu'au fond du récipient qui reçoit les eaux salées, & il a 30 piés de largeur, de toutes faces, présentant la forme d'un quarré. L'on y descend par un escalier, & l'on trouve au fond deux belles sources salées (b) qui dans 24 heures produisent 160 muids, mesure de Paris. L'eau claire, transparente, & à 17 degrés, est conduite par un tuyau de bois, dans le récipient des eaux salées. Il est à 5 pies de distance construit en pierre, & contient 47 muids. A côté de ce récipient, il en est un autre de la contenance de 61 muids, dans lequel se rassemblent les eaux de 4 sources (c) une fois plus abondantes que les deux premieres; mais qui étant seulement à 3 degrés, sont pour cela nommées petites eaux. On en éleve une partie pour des usages qui seront explquées dans la suite.

En termes de saline, l'on entend par degrés la quantité de livres de sel renfermées dans cent livres d'eau; c'est - à - dire que 100 liv. pesant d'eau des deux premieres sources qui sont à 17 degrés, rendront apres l'évaporation, 17 liv. de sel; & par la même raison, 100 liv. des quatre dernieres sources, ou petites eaux à 5 degrés, n'en rendront que 5 liv. La pinte de Paris des eaux à 17 degrés, contenant 48 pouces cubes, pese 35 onces ¼; & celle des eaux à 5 degrés, pese 32 onces .

On connoît le degré des eaux, en réduisant à siccité, par le moyen du feu, une quantité d'eau d'un poids connu, & celui du sel formé donne le degré. Sur cette opération, on a établi une éprouvette qui démontre d'abord la quantité de sel contenu dans 100 liv. pesant d'eau. Cette éprouvette est un cylindre d'étain, d'argent, &c. que l'on introduit perpendiculairement dans un tube de même matiere rempli de l'eau qu'on veut éprouver. Au haut du cylindre sont gravées des lignes circulaires distantes l'une de l'autre, dans des proportions déterminées par l'épreuve du feu. Ce cylindre se soutenant plus ou moins dans l'eau, suivant qu'elle est plus ou moins salée, & par conséquent plus ou moins forte, en désigne les degrés, par le nombre des lignes qui s'apperçoivent au - dessus du niveau de l'eau. Il ne faut pas que l'éprouvette soit en bois, parce que le sel s'y imbibant, donneroit ensuite à l'eau un degré de salure qu'elle n'auroit pas. D'ailleurs, le bois se gonflant ou se resserrant, suivant la sécheresse ou l'humidité de l'air, mettroit toujours un obstacle à la justesse de l'opé<->

(b) Il y en a même trois: 1°. la bonne source a dix - sept degrés: 2°. le surcroit a dix - huit degrés deux tiers: 3°. le vieux puisoir; mais cette derniere source n'a que deux tiers de degrés. Aussi ne la réunit - on avec les deux premieres que lorsque l'on fait l'épreuve juridique des eaux. C'est un ancien usage qui n'en est pas plus raisonnable pour cela. Dès que l'épreuve est finie, on renvoie le vieux puisoir dans le puits des petites eaux. (c) La premiere est le vieux puisoir dont on a parlé dans la note précédente: la seconde s'appelle le durillon; les autres sont sans nom, & aussi foibles en salure.
[p. 559] ration. L'étain paroit préferable à l'argent, parce qu'il ne se charge pas de verd - de - gris; & l'on doit toujours avoir soin de laver l'éprouvette avec de l'eau douce après qu'on s'en est servi, autrement elle cesse d'être juste.

Nous observerons ici, qu'il n'y a que les matieres salines qui marquent à l'éprouvette; parce que le sel seul, pouvant se placer dans les petits interstices qui sont entre les globules de l'eau, la rend plus forte, plus difficile à céder, & s'y insinue même jusqu'à une quantité assez considérable, sans la faire augmenter de volume; mais l'on auroit beau charger une eau douce de boue, & d'autres parties étrangeres, si on la met à l'éprouvette, le cylindre restera à la marque de l'eau douce, sans indiquer le moindre degré de salure.

Il y avoit autrefois une ancienne éprouvette en usage à Salins, dont le degré etoit d'un tiers plus foible que celui de la nouvelle dont nous venons de parler, c'est - à - dire qu'au lieu d'indiquer une livre de sel renfermée dans 100 liv. d'eau, il n'en indiquoit que les deux tiers d'une livre; c'est à quoi il faut faire attention, quand on lit quelques mémoires ou procès - verbaux sur cette saline, & les officiers qui font tous les mois la visite des sources pour en constater les degrés, les comptent encore aujourd'hui suivant l'ancien usage.

La grande saline renferme deux puits dans lesquels il se trouve beaucoup de sources, salées & douces. Le premier est appellé puits d'amont; & le second, puits agray; & quoique l'un & l'autre soient désignés par le nom de puits, ils n'en ont point la forme. Ce sont de grandes & spacieuses voûtes souterreines bien travaillées, & construites solidement. Elles commencent au puits d'amont; on y descend par un escalier en forme de rampe, composé de 61 marches. On arrive sur un plancher de 21 piés de long, sur 15 piés de large, sous lequel se trouve un grand nombre de sources de différens produits. Elles sont toutes séparées, non par des peaux de boeufs, comme on le lit dans le Dict. de Commerce, mais avec de la terre glaise préparée & battue, que l'on nomme conroi (d), & couverte par des trapes qu'on l'on leve au besoin.

Il y a sept de ces sources (e) qui par de petites rigoles faites avec le conroi dont on vient de parler, sont amenées dans deux récipiens ménagés dans un même bassin de bois attenant au plancher, & de la contenance de 37 muids, 2 quarts, 58 pintes, mesure de Salins. (f) Elles fournissent par demi - heure

(d) Les cinq premieres sources formées de différens filets, se réunissent dans le plus grand des deux récipiens, & y coulent sous les dénominations que nous allons rapporter.

La premiere, dite les trois anciennes, est à onze degrés de salure.

La seconde s'appelle le corps de plomb; elle est au même degré que les trois anciennes.

La troisieme ou la petite roue, est à douze degrés.

La quatrieme est nommée la nouvelle source; ses eaux sont à quatre degrés trois quarts.

La cinquieme dite la troisieme changeante, est à quatre degrés & demi. (e) Il y a deux préposés pourvûs d'office par le roi pour veiller à l'entretien du conroi qui sépare les sources salées & douces, & conduit leurs eaux dans les bassins qui leur sont destinés. Ils sont aussi chargés d'accompagner les officiers des salines, lorsqu'ils vont faire l'épreuve juridique des sources, d'y suivre le montier de garde dans sa visite hebqomadaire, & d'y conduire les étrangers. On les nomme conducteurs conroyeurs des sources. L'un est pour la grande saline & l'autre pour la petite. (f) La pinte de Salins contient 64 pouces cubes, & il faut 240 pintes pour le muid.

La pinte de Paris ne contient que 48 pouces cubes, & il en faut 288 pour le muid.

La différence du muid de Salins est donc de 1544 pouces cubes, dont il est plus grand que le muid de Paris, ou de 32 pintes mesure de Paris, qui ne valent que 24 pintes mesure de Salins.

17 quarts, 12 pintes d'une eau à 10 degrés. Les autres, à l'exception de deux nommées les changeantes, n'étant qu'à 1, 2 degrés, ou même la plûpart totalelement douces, elles sont rassemblées dans un récipient voisin, de même nature que le premier, & de la contenance de 15 muids, toujours mesure de Salins.

Les deux sources dites premiere & seconde changeantes, parce qu'elles ont souvent varié, ainsi que la troisieme changeante, sont à 2 degrés . & fournissent par demi - heure 1 quart 50 pintes. Un cheneau de bois les amene dans le récipient des eaux salées, d'où elles sont élevées séparément (g) pour des usages dont nous parlerons dans la suite.

La voûte en cet endroit a 39 piés de haut, à compter depuis le fond des récipiens, jusques sous la clé des arcades, & 44 piés de largeur: le tout à une seule arcade & sans piliers. Elle est construite ainsi dans la longueur de 178 piés; de - là elle n'a plus que 17 piés de haut sous clé, sur 20 de large, & 148 de longueur; cette partie sert à communiquer aux sources dites le puits à gray. En cet endroit la voûte a 46 piés de large, sur 34 de hauteur, & 176 de longueur. L'on trouve à l'extremité un plancher de 13 piés de large sur la longueur de 25; sous lequel sont sept petites sources salées à 13 degrés, couvertes par des trapes, comme au puits d'amont, & conduites par des rigoles de terre glaise dans un petit bassin de réunion où tombe encore un filet d'eau au même degré, dont l'on ignore la source. De ce bassin, où elles prennent le nom de grand coffre, elles sont envoyées par des tuyaux de bois de 18 toises de longueur au récipient des eaux salées, contenant 28 muids. A 18 pouces du fond de ce récipient, il sort encore une source nommée la chevre; elle est à 10 degrés, & se mêle avec les autres. Leur produit total donne dans 24 heures, 145 muids à 12 degrés .

L'on doit observer que dans le nombre des sept premieres sources, il y en a une, d'un produit peu considérable, qui tarit dans les tems de grande pluie, & ne reparoît que dans les tems de sécheresse. Autour du plancher qui les couvre, il se trouve encore huit ou dix petites sources presque douces, qui réunies par un cheneau, vont tomber ensemble dans leur récipient, contenant 78 muids.

Toutes les sources salées des trois puits fournissent dans 24 heures 527 muids, dont le mêlange dans la cuve du tripot est ordinairement à 14 degrés. Elles sont mesurées le premier de chaque mois en présence des officiers de la jurisdiction des salines, & des préposés des fermiers. Les quantités de muids rapportées ci - dessus ont été calculées, de même que le degré des eaux, sur le produit total de plusieurs années dont on a tiré le commun. Ces sources augmentent ou diminuent proportionnellement au plus ou moins de pluie qui tombe; & l'on a remarqué que les années qui étoient abondantes en neige étoient celles où les sources produisoient davantage. En général, plus le produit des sources augmente, & plus elles sont salées; elles paroissent toutes venir du couchant, & passer sous la montagne sur laquelle est bâti le fort Saint - André.

Les eaux salées & douces des deux salines sont élevées (h) avec des pompes aspirantes, au moyen

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