ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"3"> quelques poésies latines qui ont été insérées dans le premier tome des délices des poëtes d'Italie, & qui y sont confondues avec celles de divers autres poëtes de médiocre réputation.

Enfin l'Arioste songea sérieusement à son grand poëme de Roland le furieux, & le commença à peu prés à l'âge de 30 ans. C'est le plus fameux de ses ouvrages, quoiqu'on en ait porté des jugemens très différens. Le premier de tous, celui du cardinal Hippolite d'Est, ne lui fut pas favorable; car, quoiqu'il lui sût dédié, il dit à l'auteur, après l'avoir lu, où diable avez - vous pris tant de fadaises, seigneur Arioste? Cependant Muret & Paul Jove ont cru que l'ouvrage passeroit à l'immortalité; & l'on peut dire qu'il en a assez bien pris le chemin, puisqu'il y a peu de pays où il n'ait été imprimé, ni de langues répandues en Europe, dans lesquelles il n'ait été traduit. Jamais piece ne fut remplie de tant de choses différentes, de combats, d'enchantemens, d'avantures bisarres, que ce poëme de l'Arioste; & il paroit qu'il n'a rien oublié de ce que son génie & son industrie ont pu lui suggérer pour les ornemens de son ouvrage.

Il n'a pourtant pas donné à son style ce caractere de sublime & de grandeur qui convient à la poésie épique; & même plusieurs critiques osent douter que ce soit un véritable poëme épique, à en juger suivant les regles de l'art. Ils disent que l'unité de l'action n'est point dans le Roland, & que ce poëme n'est régulier ni dans l'ordonnance, ni dans la proportion des parties. L'auteur mêle presque partout le faux avec le vrai, & fait jurer le vrai Dieu par l'eau du Styx. Ici le poëte a trop de feu: ailleurs il est trop rempli d'évenemens prodigieux & surnaturels, qui ressemblent aux imaginations creuses d'un malade. Ses héros ne nous offrent que des paladins; & son poëme respire un air de chevalerie romanesque, plutôt qu'un esprit héroïque.

De plus, on lui reproche des épisodes trop affectées, peu vraissemblables, & souvent hors d'oeuvre. Non seulement il ôte à ses héros la noblesse de leur condition pour les faire badiner, mais il ôte quelquefois aux femmes leur caractere qui est la pudeur & la timidité. On trouve encore que le poëte parle trop lui - même en propre personne par voie de digression, & qu'il finit ses narrations si brusquement, qu'à moins d'une grande attention, on perd le fil de l'histoire. On juge bien que la critique judicieuse n'a jamais pu approuver une pensée extravagante de l'Arioste, qui dit d'un de ses héros, que dans la chaleur du combat, ne s'étant pas apperçu qu'on l'avoit tué, il combattit toujours vaillamment, tout mort qu'il étoit:

Il pover'huomo che non s'en'era accorto, Andava combattendo, & era morto. Enfin, pour abréger, l'on répete assez communément cet ancien bon mot, que le tombeau de l'Arioste est dans le Tasse.

Malgré toutes ces critiques, l'auteur de Roland a eu, & a encore un grand nombre de partisans en Italie, tels que MM. de la Crusca, le Mazzoni, Simon Fornari, Paul Beni, & Louis Dolce qui a entrepris sa défense. M. Scipion Maffei a beaucoup contribué à soutenir les admirateurs du poëte de Reggio, lorsqu'il a dit dans son discours: « le divin Arioste est au - dessus de tous nos éloges par son admirable poëme. Sa rime est si riche qu'elle ne paroit jamais être venue après coup; on diroit qu'elle est née avec la pensée, & qu'elle n'en est que l'agrément; ses négligences sont heureuses; ses fautes même ont des graces; il n'est pas donné à tout le monde d'en commettre de pareilles.»

Mais il ne faut pas se prévaloir de ce jugement de M. Maffei, pour prétendre que Roland le furieux n'a de concurrent que le Godefroi du Tasse, & que ce dernier même ne doit pas aspirer à la supériorité; le marquis Maffei ne le pensoit pas sans doute; car il ajoute après ses éloges de l'Arioste, qu'il n'est pas exempt de taches. En effet, le burlesque y naît quelquefois du sérieux, contre le goût & l'attente du lecteur. Il franchit en divers endroits les bornes que prescrit la bienséance. L'hyperbole fréquente détruit souvent le vraissemblable, si nécessaire même dans la fiction; & des digressions inutiles interrompent encore plus souvent le fil du discours. Enfin le génie de l'Arioste paroit semblable à ces terres fertiles qui produisent des fleurs & des chardons tout ensemble; & quoique presque tous les morceaux de son poëme soient très beaux, que sa versification soit aisée, sa diction pure & élégante, & ses descriptions pleines d'agrémens, cependant l'ouvrage entier n'est point le premier poëme de l'Italie.

Il s'en est fait nombre d'éditions, soit sans commentaires, soit avec des commentaires. On estime surtout celles de Venise en 1562, en 1568 & 1584 in - 4°.

Le chevalier Jean Harington traduisit Roland en vers héroïques anglois, & le dédia à la reine Elisabeth. La troisieme édition de cet ouvrage curieux, & heureusement versifié, parut à Londres en 1634, in - fol. avec une défense ingénieuse de l'Arioste, & un abrégé de la vie de ce poëte, recueilli de divers auteurs italiens, & en particulier de Sansovino.

Gabriel Chappuys Tourangeau mit au jour à Lyon, en 1582 & 1583 in - 8°. une traduction françoise en prose de l'Orlando; mais cette version est tombée dans un profond oubli, surtout depuis que M. Mirabaud de l'académie françoise a donné lui - même une nouvelle traduction du poëme de l'Arioste.

Je n'ai pu me dispenser de m'étendre sur ce grand poëte, parce que son mérite comparé au Tasse, partage encore aujourd'hui une partie des beaux esprits d'Italie.

Pancirole (Gui) célebre jurisconsulte & littérateur, naquit en 1523, à Reggio en Lombardie, prosessa avec beaucoup d'honneur, d'abord à Padoue, & ensuite à Turin; mais ayant éprouvé que l'air du Piémont étoit fort contraire à ses yeux, il revint à Padoue en 1582, & y passa le reste de sa vie dans sa premiere chaire avec mille ducats d'appointement. Il mourut en 1599, après avoir mis au jour plusieurs ouvrages, dont j'indiquerai les principaux.

Le premier est ses concilia, qui parurent à Venise en 1578, in - fol.

2. Notitia dignitatum cùm Orientis, tùm Occidentis ultrà Arcadii Honoriique tempora. Venise 1593 & 1602 in - fol. Lyon 1608, & Geneve 1623 in - fol. Le même ouvrage est inséré dans le tome VII. des antiquités rom. de Groevius. Les savans ont donné de grands éloges au commentaire de Pancirole sur la notice des dignités de l'empire. On y lit avec plaisir ce qui concerne les légions de Rome & la magistrature romaine; mais il s'y trouve plusieurs erreurs en Géographie.

3. De claris legum interpretibus, libri IV. Venise, 1635 & 1655, in - 4°. Francfort, 1721, in - 4°. Cette derniere édition supérieure aux précédentes, a été donnée par M. Hofman qui a joint d'autres ouvrages sur le même sujet.

4. Rerum memorabilium, libri duo: quorum prior deperditarum, posterior noviter inventarum, est. Nurimbergoe, 1599, en 2 vol. in - 8°. Lipsioe, 1707, in - 4°. L'ouvrage avoit d'abord été fait en italien. Il a été traduit en françois par Pierre de la Noue, sous ce titre: les antiquités perdues, & des choses nouvellement inventées. Lyon, 1608, in - 8°. (Le chevalier de Jaucourt.) [p. 4]

Reggio (Page 14:4)

Reggio, le duché de, (Géogr. mod.) duché en Italie, au couchant du Modénois. Il se partage en cinq petits états, qui appartiennent au duc de Modène. Reggio est la capitale. (D. J.)

REGIANA (Page 14:4)

REGIANA, (Géogr. anc.) ville d'Espagne. L'itinéraire d'Antonin la met sur la route de Séville à Mérida, entre Celti & Mérida, à 44 milles de la premiere, & à 27 milles de la seconde. (D. J.)

RÉGIATES (Page 14:4)

RÉGIATES, (Géog. anc.) peuple d'Italie, que Pline, l. III. chap. xv. place dans la huitieme région. (D. J.)

RÉGICIDE (Page 14:4)

RÉGICIDE, s. m. (Hist. & Politique.) c'est ainsi qu'on nomme l'attentat qui prive un roi de la vie. L'histoire ancienne & moderne ne nous fournit que trop d'exemples de souverains tués par des sujets furieux. La France frémira toujours du crime qui la priva d'Henri IV. l'un des plus grands & des meilleurs de ses rois. Les larmes que les françois ont versé sur un attentat plus récent, seront encore longtems à se sécher; ils trembleront toujours au souvenir de leurs allarmes, pour les jours précieux d'un monarque, que la bonté de son coeur & l'amour de ses sujets sembloient assurer contre toute entreprise funeste.

La religion chrétienne, cet appui inébranlable du trône, défend aux sujets d'attenter à la vie de leurs maîtres. La raison & l'expérience font voir, que les désordres qui accompagnent & suivent la mort violente d'un roi, sont souvent plus terribles, que les effets de ses déréglemens & de ses crimes. Les révolutions fréquentes & cruelles auxquelles les despotes de l'Asie sont exposés, prouvent que la mort violente des tyrans ébranle toujours l'état, & n'éteint presque jamais la tyrannie. Comment se trouve - t - il donc des hommes audacieux & pervers, qui enseignent que l'on peut ôter la vie à des monarque, lorsqu'un faux zele ou l'intérêt les fait traiter de tyrans? Ces maximes odieuses, cent fois proscrites par les tribunaux du royaume, & détestés par les bons citoyens, n'ont été adoptées que par des fanatiques ambitieux, qui s'efforcent de sapper les fondemens du trône, lorsqu'il ne leur est point permis de s'y asseoir à côté du souverain.

L'Angleterre donna dans le siecle passé à l'univers étonné, le spectacle affreux d'un roi jugé & mis à mort par des sujets rebelles. N'imputons point à une nation généreuse, un crime odieux qu'elle désavoue, & qu'elle expie encore par ses larmes. Tremblons à la vue des excès auxquels se portent l'ambition, lorsqu'elle est secondée par le fanatisme & la superstition.

RÉGIE (Page 14:4)

RÉGIE, s. f. (Jurisprud.) signifie en général, administration. On dit que les fermes sont en régie, lorsque le roi ou quelqu'autre seigneur fait lui - même exploiter ses biens par des préposés & receveurs, & non par des fermiers. (A)

Régie (Page 14:4)

Régie, s. f. (Gram. Comm. & Fin.) administration ou direction d'une affaire de finance, ou de commerce. Dans quelques édits & déclarations du roi, concernant la police de la compagnie des Indes, ou les divers commerces que sa majesté lui a permis, on se sert du terme de régie; & alors ceux qui en ont la direction, au lieu d'être appellés directeurs, sontnommés régisseurs. Il y a aussi des commerces particuliers de cette compagnie qui sont en régie, entr'autres les fermes du tabac & du caffé. Dictionn. de Comm. & de Trév.

RÉGIFUGE (Page 14:4)

RÉGIFUGE, s. f. (Antiq. rom.) fête que l'onfaisoit à Rome le six avant les calendes de Mars. Les anciens ne conviennent pas de l'origine de la fête: les uns rapportent que c'est en mémoire de l'évasion de Tarquin le superbe, lorsque la ville recouvra sa liberté. Les autres prétendent qu'elle fut instituée, parce que le roi des choses sacrées s'enfuyoit après qu'il avoit sacrifié. Le premier sentiment fondé sur l'autorité d'Ovide, de F estus, & d'Ausone, paroît bien plus vraissemblable que le second qui est de Plutarque; à moins qu'on ne dise pour les concilier, que le roi des choses sacrées fuyoit ce jour - là, pour rappeller la mémoire de cette fuite du dernier des rois de Rome. (D. J.)

REGILLA (Page 14:4)

REGILLA, s. f. (Hist. anc.) espece de tunique blanche, bordée de pourpre, à l'usage des fiancées, qui s'en revêtoient la veille de leurs nôces, avant que d'être mises au lit.

REGILLUM (Page 14:4)

REGILLUM ou REGILLUS, (Géog. anc.) ville d'Italie dans la Sabine, à cent soixante stades de Rome, selon Denys d'Halicarnasse, liv. V. p. 308. Tite - Live, Suétone, & Etienne le géographe, font aussi beaucoup mention de cette ville, dont on ne connoît pas trop bien aujourd'hui la juste position.

Appius Claudius, surnommé Sabinus, naquit à Regillum, & étoit un des principaux de cette capitale, également illustre par son courage & ses richesses, mais plus encore par sa vertu & par son éloquence. Son grand mérite l'ayant exposé à l'envie de ses concitoyens, qui l'accusoient de vouloir se faire tyran de sa patrie, il prit le parti de se retirer à Rome avec toute sa famille, l'an 250, sous les consuls P. Valerius Publicola IV, & Lucretius Tricipitinus II. 502 ans avant J. C. Plutarque raconte, qu'en se retirant, il amena avec lui cinq mille familles à Rome, ce qui dépeupla prodigieusement la ville de Régille.

Quoi qu'il en soit, les Romains reçurent très - bien tous les transfuges de Régille; on leur accorda le droit de bourgeoisie, avec des terres situées sur la riviere de Téveron, & l'on en donna deux arpens à chacun. On en donna vingt - cinq à Appius, qui sut fait patricien, & aggrégé parmi les sénateurs. Il se distingua bientôt dans le sénat pas la sagesse de ses conseils, & sur - tout par sa fermeté. Il fut nommé consul avec Publius Servilius Priscus, l'an 259 de la fondation de Rome, & 493 ans avant J. C. Cette année il y eut de grands troubles à Rome, à l'occasion des dettes que le peuple avoit contractées, & dont il demandoit l'abolition. Le désordre alla si loin, que les consuls mêmes, qui tâchoient de calmer le tumulte, furent en danger de la vie.

Appius qui étoit d'un caractere severe, fut d'avis qu'on ne pouvoit appaiser la sédition que par la mort de deux ou trois des principaux mutins; mais Servilius, plus doux & plus populaire, croyoit qu'on devoit avoir quelqu'égard au misérable état du peuple, & que les Romains étant menacés d'une guerre dangereuse, il étoit à propos d'accorder quelque satisfaction à ceux qui avoient été opprimés, qui, sans cela, ne donneroient pas leurs noms pour s'enrôler au service de la république.

L'avis de Servilius prévalut: il procura un decret du sénat en faveur des pauvres débiteurs, & les levées se firent. Mais on n'exécuta pas fidélement le décret; ensorte qu'après la campagne, le peuple recommença à se soulever avec plus de fureur que jamais, sur - tout vers le tems de l'élection de nouveaux consuls. Il refusa de marcher contre l'ennemi; & les consuls ayant voulu lui inspirer de la crainte par un coup d'autorité, en faisant saisir quelques - uns des plus rebelles, le peuple les arracha des mains des licteurs. Le sénat voyant l'autorité souveraine méprisée, délibéra sur le parti qu'il y avoit à prendre dans cette urgente nécessité. Les sentimens furent partagés, mais Appius les réunit, en proposant de créer un dictateur.

Ce dictateur ne put pourtant mettre fin aux brouilleries, dont le résultat fut, qu'on créeroit deux tribuns du peuple. Le fils d'Appius Claudius hérita de son pere, cette hauteur & cette fermeté qui l'avoient rendu odieux à la multitude. Les tribuns le citerent

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