ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"511"> l'origine de la plupart de ces manieres de parler proverbiales, ou d'expliquer ce qui y a donné occasion.

Proverbes (Page 13:511)

Proverbes, (Théol.) nom d'un des livres canoniques de l'ancien testament. C'est un recueil des sentences morales & de maximes de conduite pour tous les états de la vie, que l'on attribue à Salomon.

Cependant quelques critiques, & entr'autres Grotius, ont douté que Salomon fût l'auteur de ce livre. Ils avouent que ce prince fit faire pour son usage une compilation de ce qu'il y avoit alors de plus beau en fait de morale dans les anciens écrivains de sa nation, mais que sous Ezéchias on grossit ce recueil de ce qui avoit été écrit d'utile depuis Salomon, & que ce furent Eliacim, Sobna & Joaké qui firent alors cette compilation. Grotius apporte en preuve de cette opinion, qu'on remarque dans les diverses parties de ce livre une différence palpable de style. Les neufs premiers chapitres qui ont pour titre paraboles de Salomon, sont écrits en forme de discours suivi; mais au chap. X. quoique ce soit le même titre, le style est tout nouveau, coupé & plein d'antitheses: ce qui continue jusqu'au verset 17 du chap. xxij. où l'on trouve un style plus semblable à celui des neuf premiers chapitres; mais il redevient court & sententieux au vingt - troisieme verset du chap. xxjv. Enfin au commencement du chap. xxv. on lit ces mots: voici les paroles qui furent recueillies & compilées par les gens d'Ezéchias, roi de Juda. Ce recueil va jusqu'au chap. xxx. On y lit: discours d'Agur, fils de Joaké. Enfin le chap. xxxj. & dernier a pour titre, discours du roi Lamuel.

De tout cela il paroit certain que le livre des proverbes, en l'état où nous l'avons aujourd'hui, est une compilation d'une partie des proverbes de Salomon faite par plusieurs personnes; mais on n'en peut pas conclure que l'ouvrage ne soit pas de ce prince. Inspiré par le St. Esprit il avoit écrit jusqu'à trois mille paraboles, comme il est rapporté dans le III. liv. des Rois, c. iv. v. 32. Diverses personnes en purent faire des recueils, entr'autres, Ezéchias, Agur, Esaïe, Eidras, & de ces différens recueils on a composé l'ouvrage que nous avons.

On ne doute pas de la canonicité du livre des proverbes. Théodore de Mopsueste, parmi les anciens, & entre les modernes, l'auteur d'une lettre insérée dans les sentimens de quelques théologiens de Hollande, sont les seuls qui l'ayent révoquée en doute, & qui ayent prétendu que Salomon avoit composé cet ouvrage par une pure industrie humaine.

Les Hébreux appellent ce livre , misle ou mischle, ce que les Grecs ont rendu par PARABOLAI, paraboles. La version grecque de ce livre s'éloigne assez souvent de l'hébreu, & ajoute un assez grand nombre de versets qui ne sont pas dans l'original. Le grec de l'édition romaine renferme diverses transpositions de chapitres entiers. On ne sait d'où viennent ces dérangemens. Dans les anciennes éditions latines on trouve aussi plusieurs versets ajoutés, mais que l'on a retranchés depuis saint Jérome. Calmet, dictionn. de la bibl. Tom. III. p. 298.

Proverbe (Page 13:511)

Proverbe, (Critiq. sacrée.) en grec PAROIMI/A, proverbium dans la vulgate. Ce mot dans l'Ecriture signifie 1°. une sentence commune & triviale: 2°. une chanson, idcirco dicetur in proverbio, nom. xxj. 27; c'est pourquoi on dit en chanson, venite in Herebon: 3°. jouet, raillerie: erit Israel in proverbium, & in fabulam cunctis populis, Deuter. xxviij. 37, Israël deviendra la risée de tous les peuples: 4°. une énigme, une sentence obscure, occulta proverbiorum exquiret. Eccl. xxxjx. 3, le sage tâchera de pénétrer le secret des énigmes: 5°. une parabole, discours figuré par lequel on représente une vérité; hoc proverbium dixit eis Jesus, Jesus leur dit cette parabole, Joan. x. 6. (D. J.)

PROVIDENCE (Page 13:511)

PROVIDENCE, s. f. (Métaph.) la providence est le soin que la divinité prend de ses ouvrages, tant en les conservant, qu'en dirigeant leurs opérations. Les payens, tant poëtes que philosophes, si l'on en excepte les Epicuriens, l'ont reconnue, & elle a été admise par toutes les nations du moins policées, & qui vivoient sous le gouvernement des lois. Virgile nous tiendra ici lieu de tous les poëtes. Il fait adresser à Jupiter cette invocation par Vénus:

O qui res hominumque, deûmque AEternis regis imperiis & fulmine terres. AEneid. lib. I.

Diodore de Sicile dit que les Chaldeens soutenoient que l'ordre & la beauté de cet univers étoient dûs à une Providence, & que ce qui arrive dans le ciel & sur la terre, n'arrive point de soi - même, & ne dépend point du hazard, mais se fait par la volonté fixe & déterminée des dieux. Les philosophes barbares admettoient une Providence générale. Ils tomboient d'accord qu'un premier moteur, que Dieu avoit présidé à la formation de la terre, mais ils nioient une providence particuliere; ils disoient que les choses ayant une fois reçu le mouvement qui leur convenoit, s'étoient dépliées, pour ainsi dire, & se succédoient les unes aux autres à point nommé: c'est une folie de croire, disoient - ils, que chaque chose arrive en détail, parce que Jupiter l'a ainsi ordonné: tout au contraire, ce qui arrive est une dépendance certaine de ce qui est arrivé auparavant. Il y a un ordre inviolable duquel tous les évenemens ne peuvent manquer de s'ensuivre, & qui ne sert pas moins à la beauté qu'à l'affermissement de l'univers.

Les philosophes grecs, en admettant une providen - ce, étoient partagés entr'eux sur la maniere dont elle étoit administrée. Il y en eut qui n'étendirent la Providence de Dieu que jusqu'au dernier des orbes célestes, le genre humain n'y avoit point de part. Il y en eut aussi qui ne la faisoient gouverner que les affaires générales, la déchargeant du soin des intérêts particuliers, magna dii curant, parva negligunt, disoit le stoïcien Balbus, ils ne croyoient pas qu'elle s'abaissât jusqu'à veiller sur les moissons & sur les fruits de la terre. Minora dii negligunt, neque agellos singulorum, nec viticulas persequuntur, nec si uredo aut grando quidpiam nocuit, id Jovi animadvertendum fuit. Nec in regnis quidem reges omnia minima curant.

Il faut ici remarquer que la religion des payens, ce qu'ils disoient de la Providence, leur crainte de la justice divine, leurs espérances des faveurs d'en - haut étoient des choses qui ne couloient point de leur doctrine touchant la nature des dieux. Je parle même de la doctrine des philosophes sur ce grand point. Cette doctrine approfondie, bien pénétrée, étoit l'éponge de toute religion. Voici pourquoi: c'est qu'un dieu corporel ne seroit pas une substance, mais un amas de plusieurs substances; car tout corps est composé de parties. Si l'on invoquoit ce dieu, il n'entendroit point les prieres entant que tout, puisque rien de composé n'existe hors de notre entendement sous la nature de tout. Si Dieu, entant que tout, n'entendoit point les prieres, du moins les entendoit - il quant à ses parties, pas davantage; car ou chacune de ces parties les entendroit & les pourroit exaucer, ou cela n'appartiendroit qu'à un certain nombre de parties. Au premier cas, il n'y auroit qu'une partie qui fût nécessaire au monde, toutes les autres passeroient sous le rasoir des nominaux, la nature ne souffrant rien d'inutile. Bien plus, cette partie - là contiendroit une infinité d'inutilités, car elle seroit divisible à l'infini. On ne parvient jamais à l'unité dans les choses corporelles. Au second cas, on ne pourroit jamais déterminer quel est le nombre des parties exauçantes, ni pourquoi elles ont cette [p. 512] vertu préférablement à leurs compagnes. Dans ces embarras on concluroit par n'invoquer aucun dieu. Je vais plus loin, & je raisonne contre les philosophes anciens. Le dieu que vous admettez n'étant qu'une matiere très - subtile & très - déliée (les anciens n'ont jamais eu d'autre idée de la spiritualité), n'est tout entier nulle part, ni quant à sa substance, ni quant à sa force: donc il n'existe tout entier en aucun lieu quant à sa science: donc il n'y a rien qui par une idée pure & simple connoisse tout - à - la fois le présent, le passé & l'avenir, les pensées & les actions des hommes, la situation & les qualités de chaque corps, &c. donc la science de votre dieu est partout bornée, & comme le mouvement, quelque infini qu'on le suppose dans l'infinité des especes, est néanmoins fini en chaque partie, & modifié diversement selon les rencontres; ainsi la science, quelque infinie qu'elle puisse être extensivè par dispersion, est limitée intensivè quant à ses degrés dans chaque partie de l'univers: il n'y a donc point une Providence réunie qui sache tout, & qui regle tout: il seroit donc inutile d'invoquer l'auteur de la nature. Si les anciens philosophes eussent donc raisonné conséquemment, ils auroient nié toute Providence, mais cette idée d'une Providence est si naturelle à l'esprit, & si fortement imprimée dans tous les coeurs, que malgré toutes leurs erreurs sur la nature de Dieu, erreurs qui la détruisoient absolument, ils ont néanmoins toujours reconnu cette Providence. Ils ont réuni en un seul point toute la force & toute la science de Dieu, quoique dans leurs principes elle dût être à part & désunie dans toute la nature. Ils ne sont redevables de leur orthodoxie sur cet article qu'au défaut d'exactitude qui les a empêchés de raisonner conséquemment. Ce sont deux questions qui dans le vrai se supposent l'une & l'autre. Si Dieu gouverne le monde, il a présidé à sa formation, & s'il y a présidé, il le gouverne. Mais tous les anciens philosophes n'y regardoient pas de si près: ils avouoient que la matiere ne devoit qu'à elle - même son existence. Il étoit tout simple d'en conclure que les dieux n'agissoient point sur la matiere, & qu'ils n'en pouvoient disposer à leur fantaisie. Mais ce qui nous paroit si simple & si naturel, n'entroit point dans leur esprit; ils trouvoient le secret d'unir les choses les plus incompatibles & les plus discordantes. M. Bayle a très - bien prouvé que les Epicuriens qui nioient la Providence, dogmatisoient plus conséquemment que ceux qui la reconnoissoient. En effet, ce principe une fois posé que la matiere n'a point été créée, il est moins absurde de soutenir, comme faisoient les Epicuriens, que Dieu n'étoit pas l'auteur du monde, & qu'il ne se mêloit pas de le conduire, que de dire qu'il l'avoit formé, qu'il le conservoit, & qu'il en étoit le directeur. Ce qu'ils disoient étoit vrai; mais ils ne laissoient pas de parler inconséquemment. C'étoit une vérité, pour ainsi dire intruse, qui n'entroit point naturellement dans leur système; ils se trouvoient dans le bon chemin, parce qu'ils s'étoient égarés de la route qu'ils avoient prise au commencement. Voici ce qu'on pouvoit leur dire: si la matiere est éternelle, pourquoi son mouvement ne le seroit - il pas? Et s'il l'est, elle n'a donc pas besoin d'être conduite. L'éternité de la matiere entraîne avec elle l'éternité du mouvement. Dès que la matiere existe, je la conçois nécessairement susceptible d'un nombre infini de configurations. Peut - on s'imaginer qu'elle puisse être figurable sans mouvement? D'ailleurs qu'est - ce que le mouvement introduit dans la matiere? Du moins quel est - il selon vos idées? Ce n'est qu'un changement de situation qui ne peut convenir qu'à la matiere, c'est un de ses principaux attributs éternels. Et puis, pourroit dire un épicurien, de quel droit Dieu a - t - il ôté à la matiere l'état où elle avoit subsisté éternellement? Quel est son titre? D'où lui vient sa commission pour faire cette réforme? Qu'auroit - on pu lui répondre? Eût - on fondé ce titré sur la force supérieure dont Dieu se trouvoit doué; Mais en ce cas - là ne l'eût - on pas fait agir selon la loi du plus fort, & à la maniere de ces conquérans usurpateurs, dont la conduite est manifestement opposée au droit? Eût - on dit, que Dieu étant plus parfait que la matiere, il étoit juste qu'il la soumît à son empire? Mais cela même n'est pas conforme aux idées de la religion. Un philosophe qu'on auroit pressé de la sorte, se seroit contenté de dire que Dieu n'exerce son pouvoir sur la matiere que par un principe de bonté. Dieu, diroit - il, connoissoit parfaitement ces deux choses: l'une, qu'il ne faisoit rien contre le gré de la matiere, en la soumettant à son empire; car, comme elle ne sentoit rien, elle n'etoit point capable de se fâcher de la perte de son indépendance: l'autre, qu'elle étoit dans un état de confusion & d'imperfection, un amas informe de matériaux, dont on pouvoit faire un excellent édifice, & dont quelques - uns pouvoient être convertis en des corps vivans & en des substances pensantes. Il voulut donc communiquer à la nature un état plus parfait & plus beau que celui où elle étoit. 1°. Un épicurien auroit demandé s'il y avoit un état plus convenable à une chose que celui où elle a toujours été, & où sa propre nature & la nécessité de son existence l'ont mise éternellement. Une telle condition n'est - elle pas la plus naturelle qui puisse s'imaginer? Ce que la nature des choses, ce que la néceffité à laquelle tout ce qui existe de soi - même doit son existence réglée & déterminée, peut - il avoir besoin de reforme? 2°. Un agent sage n'entreprend point de mettre en oeuvre un grand amas de matériaux, sans avoir examiné ses qualités, & sans avoir reconnu qu'ils sont susceptibles de la forme qu'il voudroit leur donner; or Dieu pouvoit - il les connoître, s'il ne leur avoit pas donné l'être? Dieu ne peut tirer ses connoissances que de lui - même: rien ne peut agir sur lui, ni l'éclaircir: si Dieu ne voyant donc point en lui - même, & par la connoissance de ses volontés, l'existence de la matiere, elle devoit lui être éternellement inconnue: il ne pouvoit donc pas l'arranger avec ordre, ni en former son ouvrage. On peut donc conclure de tous ces raisonnemens que l'impiété d'Epicure rouloit naturellement & philosophiquement de l'erreur commune aux payens sur l'existence éternelle de la matiere. Ses avantages auroient été bien plus grands, s'il avoit eu à faire au vulgaire, qui croyoit bonnement que les dieux mâles & semelles, issus les uns des autres, gouvernoient le monde. On peut lire sur cela l'article d'Epicure dans le dictionnaire de Bayle.

Il y avoit encore une autre raison qui auroit dû empêcher les anciens philosophes, supposé qu'ils eussent raisonné conséquemment, d'admettre une Providence du moins particuliere: c'est le sentiment où ils étoient presque tous, qu'il n'y avoit point de peines ni de récompenses dans une autre vie, quoiqu'ils enseignassent au peuple ce dogme à cause de son utilité. L'ancienne philosophie grecque étoit rafinée, subtilisée, spéculative à l'excès; elle se décidoit moins par des principes de Morale, que par des principes de Métaphysique; & quelque absurdes qu'en fussent les conséquences, elles n'étoient pas capables de vaincre l'impression que ces principes faisoient sur leurs esprits, ni de les tirer de l'erreur dont ils étoient prévenus; or ces principes métaphysiques qui donnent, dans leur façon de raisonner, nécessairement l'exclusion au dogme des peines & des récompenses d'une autre vie, étoient 1°. que Dieu ne pouvoit se fâcher, ni faire du mal à qui que ce soit: 2°. que nos ames étoient autant de parcelles de l'ame du monde

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