ENCYCLOPÉDIE OU DICTIONNAIRE RAISONNÉ
DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS

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"83"> sans perdre de tems, de crainte que l'enfant ne soit suffoqué par l'action de l'orifice sur le cou, si cette partie restoit arrêtée trop long - tems au passage. Aussitôt que les épaules seront dehors, on coule les doigts sous les aisselles pour tirer le reste du corps.

Dès que l'enfant sera tiré, le Chirurgien le rangera de côté, lui tournant la face de façon qu'il ne puisse être incommodé, ou même étouffé par le sang & les eaux qui sortent immédiatement après, & qui tomberoient dans la bouche & dans le nez du nouveau né s'il étoit couché sur le dos.

Après avoir mis l'enfant dans une position où l'on ne puisse pas craindre ces inconvéniens, on fait deux ligatures au cordon ombilical avec un fil ciré en plusieurs doubles: ces ligatures se font à quatre travers de doigt de distance, & le plus proche de l'enfant, à peu près à cet intervalle de son nombril. On coupe le cordon avec des ciseaux ou avec un bistouri entre les deux ligatures, dont l'effet est d'empêcher que la mere ne perde du sang par la veine ombilicale qui le porte à l'enfant, & que l'enfant ne souffre point de l'hémorrhagie des arteres ombilicales qui reportent le sang de l'enfant au placenta.

On entortille alors l'extrémité du cordon qui sort de la matrice autour de deux doigts, & on le tire doucement après avoir donné de légeres secousses en tous sens pour décoller le placenta, dont la sortie est l'effet de la contraction de la matrice déterminée encore par quelques douleurs. Ce viscere tend à se débarrasser de l'arriere - faix qui deviendroit corps étranger. On doit considérer la sortie du placenta comme un second accouchement. Lorsque le cordon ombilical est rompu, ou lorsque le placenta résiste un peu trop à sa séparation de l'intérieur de la matrice, il faut que le Chirurgien y porte la main promptement tandis que l'orifice est encore béant: le délai deviendroit par le resserrement de l'orifice un grand obstacle à l'introduction de la main. Si dans le second cas que nous venons d'exposer on ne portoit pas la main dans la matrice pour en détacher le placenta, & qu'on s'obstinât à vouloir tirer par le cordon, on pourroit occasionner le renversement de la matrice dont nous parlerons en son lieu. Il faut de même porter la main dans la matrice, lorsqu'après avoir tiré le placenta on s'apperçon qu'il n'est pas dans son entier. On débarrasse en même tems dans toutes ces occasions la cavité de cet organe des caillots de sang qui pourroient s'y trouver.

Si après avoir tiré l'enfant on reconnoissoit que le ventre ne se fùt point affaissé, comme il le fait ordinairement, & que les douleurs continuassent assez vivement, il faudroit avant que de faire des tentatives pour avoir le placenta, reporter la main dans la matrice. Il y a presque toûjours dans cette circonstance un second enfant dont il faudroit accoucher de nouveau la femme, après avoir rompu les membranes qui enveloppent le second enfant; & il ne faudroit délivrer la mere du placenta du premier enfant qu'après le second accouchement, parce que les arrierefaix pouvant être collés l'un à l'autre, on ne pourroit en arracher un sans décoller l'autre, ce qui donneroit lieu à une perte de sang qui pourroit causer la mort à l'enfant qui resteroit, & même être préjudiciable à la mere.

Si un enfant avoit beaucoup souffert au passage, s'il étoit froissé & contus, comme cela arrive dans les accouchemens laborieux, on pourroit couper le cordon ombilical après avoir fait une seule ligature, & tiré quelques cuillerées de sang par le bout du cordon qui tient à l'enfant avant que de le lier: cette saignée rempliroit l'indication que demande un pareil état.

L'accouchement où l'enfant présente les piés pourroit à la rigueur passer pour naturel, puisqu'il sort faci<cb-> lement de cette façon par l'aide d'un Accoucheur, & que c'est ainsi qu'il faut terminer les accouchemens laborieux dans lesquels les enfans présentent quelques autres parties, à moins que ce ne soient s fesses, l'enfant pouvant alors être tiré en double.

Lorsqu'on a été obligé d'aller chercher les piés de l'enfant, on les amene à l'orifice de la matrice: si l'on n'en a pû saisir qu'un, l'autre ne fait point d'obstacle; il faut tirer celui qu'on tient jusqu'à ce qu'on puisse dégager l'autre cuisse. Lorsque l'enfant a la poitrine dans l'orifice de la matrice, il faut; sans cesser de tirer, donner un demi tour si les doigts des piés regardoient l'os pubis, afin de retourner l'enfant dont le menton pourroit s'accrocher à ces os si l'on continuoit de le tirer dans cette premiere situation.

Un accouchement naturel par rapport à la bonne situation de l'enfant, peut être difficile lorsque la femme n'aura point été aidée à propos, qu'il y aura long - tems que les eaux se seront écoulées, & que les douleurs deviendront languissantes, ou même cesseront tout - à - fait. On peut bien remédier en quelque sorte à la secheresse de l'accouchement, en exposant la femme à la vapeur de l'eau tiede qui relâche les parties: mais rien ne supplée au défaut des douleurs: les lavemens acres que quelques Auteurs conseillent peuvent irriter le rectum & la matrice par communication; mais cela peut être infructueux & nuisible: le plus court dans ces conjonctures est de se servir du tire - tête, dont nous parlerons au mot Forceps.

Lorsque le foetus est mort, & qu'on ne peut pas l'avoir par l'instrument dont nous venons de parler, on est contraint de se servir des moyens extrèmes, & de dépecer l'enfant avec les crochets, pour délivrer la mere de ce fruit infortuné. Voyez Crochet.

Si toutes choses bien disposées d'ailleurs, il y a une impossibilité physique de tirer l'enfant en vie par les voies ordinaires, en consequence de la mauvaisc conformation des os du bassin de la mere, &c. il faut faire l'opération césarienne. V. Césarienne.

Mais la nature tend trop efficacement à la conservation des especes pour avoir rendu les accouchemens laborieux les plus fréquens. Au contraire, il arrive quelquefois que le foetus sort de la matrice sans déchirer les membranes qui l'enveloppent, & par conséquent sans que la liqueur qu'elles contiennent se soit écoulée: cet accouchement paroìt être le plus naturel, & ressemble à celui de presque tous les animaux: cependant le foetus humain perce ordinairement ses membranes à l'endroit qui se trouve sur l'orifice de la matrice, par l'effort qu'il fait contre cette ouverture; & il arrive assez souvent que l'amnios, qui est fort mince, ou même le chorion, se déchirent sur les bords de l'orifice de la matrice, & qu'il en reste une partie sur la tête de l'enfant en forme de calote; c'est ce qu'on appelle naitre coeffé. Dès que cette membrane est percée ou déchirée, la liqueur qu'elle contient s'écoule: on appelle cet écoulement le bain ou le, eaux de la mere: les bords de l'orifice de la matrice & les parois du vagin en étant humectés, se prétent plus facilement au passage de l'enfant. Après l'écoulement de cette liqueur, il reste dans la capacité de la matrice un vuide dont les Accoucheurs intelligens savent profiter pour retourner le foetus, s'il est dans une position desavantageuse pour l'accouchement, ou pour le débarrasser des entraves du cordon ombilical qui l'empêchent quelquefois d'avancer. M. de Buffon, Hist. nat.

Pour que l'Accouchement soit naturel, il faut, selon les Medecins, trois conditions: la premiere, que la mere & l'enfant fassent réciproquement leurs efforts, la mere pour mettre au monde l'enfant, & l'enfant pour sortir du ventre de sa mere. La seconde, que l'enfant vienne au monde la tête la promiere, [p. 84] cela étant sa situation naturelle. Et la troisieme, que l'accouchement soit prompt & facile, sans aucun mauvais accident.

Lorsque l'enfant présente les piés, ou qu'il vient de travers ou double, l'accouchement n'est point naturel. Les Latins appelloient les enfans ainsi nés agrippoe, comme qui diroit oegrè parti. Voyez Agrippa.

L'Accouchement naturel est celui qui se fait au terme juste, c'est - à - dire, dans le dixieme mois lunaire: l'accouchement n'est point naturel, lorsque l'enfant vient au monde ou plûtôt ou plûtard, comme dans le huitieme mois.

Les femmes accouchent au bout de sept, huit, neuf, dix & onze mois: mais elles ne portent pas plus longtems, nonobstant que quelques Medecins prétendent qu'un accouchement peut être naturel dans le quatorzieme mois.

On a remarqué que les Accouchemens sont plus heureux dans le septieme mois que dans le huitieme, c'est - à - dire, qu'il est plus aisé de sauver l'en fant quand il vient dans le septieme mois que quand il vient dans le huitieme, & que ces premiers vivent plus souvent que les derniers.

Peysonnel, Medecin à Lyon, a écrit un Traité Latin du terme de l'Accouchement des femmes, où il entreprend de concilier toutes les contradictions apparentes d'Hippocrate sur ce sujet. Il prétend que le terme le plus court de l'Accouchement naturel, suivant Hippocrate, est de cent quatre - vingts - deux jours, ou de six mois entiers & complets; & le plus long, de deux cens quatre - vingts jours, ou de neuf mois complets & dix jours; & que les enfans qui viennent devant ou après ce terme ne vivent point, ou ne sont pas légitimes.

Bartholin a écrit un Livre de insolitis partûs viis, des conduits extraordinaires par où sort le foetus: il rapporte différens exemples d'accouchemens fort extraordinaires. Dans les uns le foetus est sorti par la bouche; dans d'autres par l'anus. Voyez Salmuthus, Obs. 94. Cent. III. Transact. Philosoph. n°. 416. p. 435.

* Il est fait mention dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, année 1702, page 235, d'un foetus humain tiré du ventre de sa mere par le fonde ment. Cette espece d'accouchement est assez extraordinaire pour trouver place ici. Au mois de Mars 1702, M. Cassini ayant donné avis à l'Académie des Sciences qu'une femme, sans avoir eu aucun signe de grossesse, avoit rendu par le siége plusieurs os qui sembloient être les os d'un foetus, la chose parut singuliere, d'autant plus que quelques-uns se souvinrent qu'on avoit autrefois proposé des faits semblables, qui s'étoient trouvé faux par l'examen qu'on en avoit fait; & M. Littre s'offrit à vérifier celui - ci.

Il trouva dans le lit une femme de 31 ans, autrefois fort grasse, alors horriblement décharnée & très foible. Il y avoit douze ans qu'elle étoit mariée: elle avoit eu trois enfans pendant les six premieres années de son mariage; elle avoit fait quatre fausses couches dans les trois années suivantes; & le 15 du mois d'Août de l'année précédente elle avoit senti une douleur aiguë à la hanche droite; & cette douleur qui étoit diminuée quelque tems après, avoit entierement cessé au bout de cinq semaines. Au commencement du mois de Novembre de la même année, elle avoit senti sous le foie une autre douleur, accompagnée d'un grandétouffement; & en appuyant sur la région douloureuse, on y avoit remarqué une tumeur ronde & grosse qui ne paroissoit pas au dehors, & qu'on sentoit au toucher. Environ deux mois après, ce qui faisoit cette tumeur étoit tombé dans le côté droit du bassin de l'hypogastre, & la douleur & l'étouffement avoient cessé sur le champ. Voyez la suite effrayante des symptomes de cet accident dans le Mémoire de M. Littre; la fievre continue pendant quatre mois sans relâche, avec redoublemens par jour, & frissons; l'aversion pour les alimens, les défaillances, les hoquets, le vomissement de sang, un cours de ventre purulent & sanglant, qui entraînoit des os, des chairs, des cheveux, &c. les épreintes, les coliques, la toux, le crachement de sang, les insomnies, les délires, &c.

l'inspection des os rendus, M. Littre s'apperçut qu'ils appartenoient à un foetus d'environ six mois. Cependant cette femme n'avoit jamais eu aucun soupçon de grossesse; son ventre n'avoit jamais sensiblement grossi, & elle n'y avoit point senti remuer d'enfant: mais d'un autre côté elle avoit eu quelques autres signes de grossesse que M. Littre rapporte. M. Littre examina ensuite la matrice & le gros boyau de la malade: la matrice étoit dans son état naturel, & il n'en étoit rien sorti que dans le tems réglé pour les femmes saines qui ne sont pas grosses. Mais le fondement étant bordé d'hémorrhoïdes, son orifice étoit serré & rétréci par une dureté considérable qui en occupoit toute la circonférence; & en introduisant avec beaucoup de peine de sa part, & de douleur de la part de la malade, le doigt & les instrumens, le rectum lui parut ulceré & percé en dedans d'un trou large d'environ un pouce & demi. Ce trou situé à la partie postérieure de l'intestin du côté droit, deux pouces & demi au - dessus du fondement, ne laissoit plus de doute sur le chemin que les os & les autres matieres étrangeres avoient tenu.

En examinant avec le doigt cette plaie, M. Littre fentit la tête d'un foetus qui etoit si fortement appliquée, qu'il ne put la déranger, & que depuis trois jours la malade ne rendoit plus de matieres extraordinaires.

L'état de la malade étant constaté, il s'agissoit de la guérir: pour cet effet, M. Littre commença par lui donner des forces, en lui prescrivant les meilleurs alimens & les remedes les plus capables d'affoiblir les symptomes du mal: ensuite il travailla à tirer le reste du foetus; ce qu'il ne put exécuter qu'avec des précautions infinies, & dans un tems très - considérable. Il tira avec ses doigts tous les petits os & les chairs, il inventa des instrumens à l'aide desquels il coupa les gros os, sans aucun danger pour la femme; & ce traitement commencé au mois de Mars dura cinq mois, au bout desquels la malade se trouva en état de vaquer à ses affaires. Ceux qui le suivront dans tout son détail, douteront si l'art a moins de ressources que la nature, & s'il n'y a pas des cas où le Chirurgien & le Medecin ne font pas plus qu'elle pour notre conservation: cependant on sait qu'elle conserve tout ce qu'elle peut empêcher de périr, & que de tous les moyens qui lui sont possibles, il n'y en a presqu'aucun qu'elle n'emploie.

M. Littre cherche, après avoir fait l'histoire de la guérison, dans quel endroit ou dans quelle partie du ventre de la malade le foetus étoit contenu pendant qu'il vivoit. On peut d'abord soupçonner quatre endroits différens; la simple capacité du ventre, la matrice, les trompes & les ovaires.

Il n'étoit pas dans la simple capacité du ventre, parce qu'en pressant la partie inférieure du ventre de haut en bas, on touchoit une espece de poche d'une grandeur à contenir un petit foetus d'environ six mois, ronde, peu stable dans son assiette, & percée d'un trou. Cette poche n'étoit pas les membranes du foetus, mais une partie de la mere, car les membranes du foetus avoient été extraites par l'ouverture du gros boyau.

Il n'étoit pas non plus dans la cavité de la matrice; 1°. parce que la malade a eu réglément ses ordinaires pendant cette grossesse: 2°. que le trou de

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